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Les anévrysmes de l'aorte abdominale (AAA) représentent la treizième cause de  mortalité aux États-Unis, et sont les plus fréquents de tous les anévrysmes  artériels 
 (fig 1).  Cette pathologie a connu en 40 ans des bouleversements sur tous les plans. Le  mode de dépistage a complètement changé avec l'avènement de l'échographie et du  scanner abdominal 
. Les anévrysmes sont maintenant découverts le plus  souvent de façon fortuite lors de la réalisation d'une échographie  abdominopelvienne au cours du bilan d'un adénome prostatique, ou d'un scanner  abdominal dans le bilan d'une pathologie digestive. Les patients sont vus à un  stade plus précoce. Ceci a deux conséquences : moins d'anévrysmes rompus sont  opérés, mais des patients plus jeunes porteurs de lésions anévrysmales entre 3  et 5 cm se retrouvent soumis à une surveillance annuelle ou semestrielle, voire  trimestrielle selon des critères qui ne sont pas toujours bien définis. Le  dialogue chirurgien-radiologue-médecin traitant avec le patient doit être  univoque et précis quant aux éventuelles douleurs abdominales qui nécessitent  une hospitalisation d'urgence. Mais comment appréhender l'angoisse des patients  conscients de la gravité potentielle de cette lésion, qui sont reconvoqués de  façon régulière pour le suivi de l'anévrysme ? Certains inciteront le chirurgien  à une intervention rapide. Pourquoi ne pas opérer les patients à un stade plus  précoce plutôt que d'attendre la dégradation de leur fonction myocardique, ou  l'apparition de tares contre-indiquant alors momentanément, voire définitivement  la chirurgie 
 ?
L'épidémiologie des AAA s'est modifiée elle aussi. La prédominance masculine  est évidente pour tous, mais des facteurs familiaux sont reconnus 
.
L'étiopathogénie a, elle aussi, évolué et l'anévrysme de l'aorte ne peut  plusêtre considéré comme une manifestation banale de la maladie athéromateuse.  Des facteurs génétiques, métaboliques, enzymatiques et cellulaires sont évoqués  
.
Le bilan préopératoire des AAA varie selon les équipes, surtout dans la  recherche d'une pathologie coronarienne associée 
.  Aucun examen non invasif ne peut, pour l'instant, exclure de façon formelle une  pathologie coronarienne grave. La morbidité et la mortalité négligeables de la  coronarographie préopératoire, face au risque de l'infarctus du myocarde  périopératoire, incitent à la réalisation de cet examen. Il est vrai que les  indications de revascularisations myocardiques doiventêtre clairement définies.  L'interrogatoire, l'examen clinique, l'électrocardiogramme de repos et d'effort  prennent alors toutes leurs valeurs avant de déclencher des examens  complémentaires plus invasifs. En effet, les études ne sont pas toujours  concordantes quant aux résultats des revascularisations myocardiques préventives  [
, 
].
Mais le bouleversement à venir sera peut-être thérapeutique. Même si  certaines publications font état de ralentissement de la croissance d'anévrysmes  chez certaines espèces animales traitées par bêtabloqueurs, le traitement doit  rester chirurgical 
. Le  traitement par endoprothèses nécessite des études expérimentales fiables, et le  règlement de certains problèmes techniques : le recouvrement des ostia rénaux,  mésentérique inférieur et iliaques internes dans les prothèses bifurquées, les  fuites périprothétiques et la réinjection de la coque anévrysmale par les  artères lombaires 
. De plus,  la mise en place d'un tel matériel nécessite de " naviguer " dans la lumière  artérielle au contact du thrombus mural, avec des possibilités de migrations et  d'embolies distales. Ces techniques seront de plus à comparer aux techniques  chirurgicales usuelles, dont les résultats, au sein des équipes entraînées,  donnent des taux de mortalité inférieur à 3 % 
.
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Quelques dates importantes ont récemment été rappelées par Thévenet  
 :
- - 1951 : première intervention par résection-greffe effectuée par Dubost   ;  
- - 1964 : première série d'anévrysmes aortiques opérés : De Bakey et al   ;  
- - 1966 : Szylagyi et al démontrent le bénéfice sur la survie à long terme de  la chirurgie des AAA .  
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Un anévrysme artériel correspond à une dilatation localisée d'un segment plus  ou moins long d'artère avec perte du parallélisme des bords, qui permet la  distinction avec le seul diagnostic différentiel existant : l'artériomégalie,  qui correspond à une dilatation diffuse de tout le système artériel 
. Du diamètre aortique dépendent les indications  chirurgicales, celui-ci varie selon l'âge et le sexe. Steinberg et al ont mesuré  sur des artériographies les limites du diamètre aortique chez des patients de  plus de 40 ans 
(tableau I)  .
Selon le Ad Hoc Comitee, le diamètre moyen est compris entre 1,4 et 2,05 cm  chez l'homme adulte et 1,19 et 1,87 cm chez la femme 
.
La définition de l'anévrysme doit donc tenir compte de ces limites, et du  diamètre transverse interne de l'anévrysme comparé au calibre de l'aorte  sus-jacente considérée comme normale. L'anévrysme est une dilatation qui atteint  une fois et demie le calibre de l'artère, les chiffres inférieurs étant  considérés comme des ectasies. Un diamètre transversal de l'aorte abdominale  sous-rénale supérieur à 35 mm chez l'homme et 30 mm chez la femme est considéré  comme un anévrysme 
.
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L'aorte abdominale est la partie terminale de l'aorte. Elle est située dans  l'espace rétropéritonéal, en avant et légèrement à gauche du rachis  dorsolombaire. Elle a une direction oblique en bas et à droite. Son origine se  situe au niveau de l'orifice diaphragmatique par lequel elle pénètre dans  l'espace rétropéritonéal, en D12. L'aorte abdominale sous-rénale en est le  segment distal et débute en dessous de l'origine des artères rénales (tiers  inférieur du corps vertébral de L1, ou bord supérieur du corps vertébral de L2).  Elle correspond au segment V de la classification chirurgicale 
. Elle a une longueur de 10 cm environ qui peut varier selon  la situation haute ou basse de sa bifurcation en artères iliaques primitives :  tiers supérieur de L5 ou de L4, dont la projection cutanée est l'ombilic.  L'épaisseur de la paroi aortique normale est d'environ 0,7 mm. Elle se termine  en deux artères iliaques primitives qui forment un angle de 60 à 70°. Cette  bifurcation siège au-dessus du confluent des deux veines iliaques  primitives.
Les collatérales de l'aorte abdominale sous-rénale sont de cinq  types.

 Artères rénales
La disposition modale en une artère rénale droite, et une artère rénale  gauche n'est présente que dans 50 à 80 % des cas 
. Une artère polaire est présente chez 2 à 5 % des sujets  normaux. Elle peut naître de l'aorte ou des artères iliaques primitives. Les  artères polaires passent en avant de la veine cave inférieure et posent le  problème de leur réimplantation lors de la cure des anévrysmes sous-rénaux 
(fig  2).

 Artères lombaires
En nombre variable-classiquement, quatre paires d'artères lombaires naissent  de l'aorte abdominale sous-rénale -, elles sont parfois responsables de pertes  sanguines importantes au cours de la mise à plat des anévrysmes.

 Artères gonadiques
Elles partent, de façon le plus souvent symétrique, des bords latéraux de  l'aorte, mais dans 17 % des cas elles naissent des artères rénales.

 Artère mésentérique inférieure
Elle naît du bord antérolatéral gauche de l'aorte 6 à 8 cm en dessous des  artères rénales. Elle vascularise le côlon gauche et le sigmoïde, et développe  des anastomoses importantes avec les branches des artères  hypogastriques.

 Artère sacrée moyenne
Elle naît de façon quasi constante de la bifurcation aortique.
En arrière, l'aorte abdominale est séparée du rachis lombaire par le grand  ligament vertébral antérieur.
En avant, elle entre en contact en haut avec le bloc duodénopancréatique  accolé par le fascia de Treitz (au niveau L2-L3), dont la section constitue le  premier temps de l'abord chirurgical de l'aorte abdominale sous-rénale ; cette  dernière est recouverte par le péritoine pariétal postérieur. Les éléments du  système nerveux végétatif sont constitués par le plexus intermésentérique et le  plexus mésentérique inférieur.
La veine rénale gauche passe transversalement en avant et en haut (niveau  L2). Elle représente la limite supérieure de la dissection chirurgicale de  l'aorte abdominale sous-rénale. L'artère mésentérique supérieure et les artères  rénales partent légèrement au-dessus de la veine rénale gauche (au niveau  L2).
Sur le bord gauche de l'aorte, se trouvent les plexus sympathiques  intermésentériques, suivis en bas par le plexus hypogastrique qui croise la face  antérieure de l'artère iliaque primitive gauche. La section chirurgicale de  ceux-ci est responsable d'éjaculation rétrograde 
. Les rapports plus lointains sont représentés par le muscle  psoas iliaque et le rein gauche.
À droite de l'aorte, se trouve la veine cave inférieure. Le confluent  iliocave se situe en regard du corps vertébral de L5, mais la veine iliaque  primitive gauche est surcroisée par l'artère iliaque primitive droite. La veine  cave inférieure reçoit, dans sa portion abdominale, les veines lombaires gauches  qui longent la face postérieure de l'aorte.
Le sigmoïde à gauche et les anses grêles en avant constituent des rapports  plus lointains. Les uretères, plus externes, sont concernés par la chirurgie des  artères iliaques, mais peuvent se médialiser en cas d'anévrysmes inflammatoires  
.

 Anomalies veineuses
Elles sont importantes à connaître car les plaies veineuses, au cours de la  chirurgie aortique, peuvent entraîner des hémorragies massives. La  tomodensitométrie (TDM) est un examen essentiel dans leur diagnostic  préopératoire. Elles sont dues à la persistance de la veine sus-cardinale ou de  la veine périaortique. L'incidence de 2 % rapportée par De Laurentis et al est  semblable à celle des autres auteurs 
. Quatre  types principaux d'anomalies sont décrits.

 Veine rénale gauche rétroaortique
 La plus fréquente, elle est rapportée 13 fois par De Laurentis et al  
. Ces  auteurs insistent sur la dissection chirurgicale qui doitêtre menée vers le haut  jusqu'à ce que la veine rénale soit identifiée ; son trajet est habituellement  oblique vers le bas pour rejoindre la veine cave.

 Veine rénale gauche double
 Elle peutêtre présente même en cas de veine rénale gauche antérieure. Le  segment postérieur peutêtre haut situé ou oblique vers le bas.

 Veine cave inférieure double
 La veine cave inférieure comporte alors deux segments qui se rejoignent, en  règle, au niveau des veines rénales. Ce segment gauche de veine cave inférieure  peutêtre postérieur ou antérieur.

 Veine cave inférieure gauche
 Elle est le plus souvent préaortique. C'est l'anomalie veineuse la moins  fréquente (0,5 %).

 Anomalies rénales
Deux types d'anomalies congénitales du haut appareil urinaire peuvent  modifier la technique chirurgicale : les anomalies de la fusion et celles de  l'ascension rénale.

 Rein en " fer à cheval "
 C'est l'anomalie la plus fréquente. Les études autopsiques et les revues de  littérature rapportent une incidence de 2,5/1 000 
. Les deux reins sont correctement latéralisés mais présentent  un défaut de rotation avec fusion des deux pôles inférieurs. Cette fusion est le  plus souvent constituée de parenchyme rénal normal, et siège de façon quasi  exclusive en avant de l'aorte 
(fig 4).  Près d'une centaine de cas d'associations rein en " fer à cheval " et AAA  sous-rénale ont été colligés par Lesage et al dans une revue de littérature  extensive en 1990 
. Les  principaux intérêts de cette association sont l'identification de la  vascularisation rénale préopératoire et l'abord de l'aorte sous-rénale.

 Anomalies de l'ascension rénale
 Elles se caractérisent par une situation pelvienne, iliaque ou  intrathoracique d'un ou des deux reins. Leur étiologie est inconnue. Elles sont  associées, dans près d'un tiers des cas, à des malformations génitales. Leur  fréquence est extrêmement faible : environ 1/1 000 des séries autopsiques  
.
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Les AAA sous-rénale ont été particulièrement bien étudiés car ils  représentent la localisation la plus fréquente de la maladie anévrysmale : 62,5  % de tous les anévrysmes artériels, devant les anévrysmes de l'artère poplitée,  qui ne représentent que 16 % 
. Ils sont  situés en règle 2 à 3 cm en dessous des artères rénales, ce qui correspond à  l'émergence de la deuxième paire d'artères lombaires. Cette fréquence  particulière serait en partie due aux conditions hémodynamiques locales  
.
C'est une pathologie de fréquence croissante : 16 % de cas supplémentaires  par an, parmi les populations nord-américaines et européennes 
. Cet accroissement ne semble pas seulement dû à la  multiplication des examens complémentaires (échographie, TDM) faits pour  d'autres pathologies. Le vieillissement de la population est sûrement en cause,  mais il semble exister une augmentation vraie de cette incidence. Celle-ci varie  de 1,8 à 6,6 % dans les études autopsiques 
.
La fréquence est estimée à 45/100 000 chez l'homme et à 20/100 000 chez la  femme. Le sex ratio varie selon les séries de trois à huit hommes pour une  femme, mais la prédominance masculine a tendance à diminuer avec l'âge  
.
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L'AAA sous-rénale est classiquement considéré comme une manifestation de  l'athérosclérose. Hammond a démontré la forte corrélation entre la survenue d'un  AAA, l'intoxication tabagique et l'hypertension artérielle 
. Cronenwett a trouvé une incidence élevée d'hypertension  artérielle chez les malades porteurs d'un AAA avec une forte corrélation entre  la survenue d'une rupture, une bronchopathie obstructive préexistante et une  pression artérielle diastolique élevée 
.
Il n'existe pas de vasa vasorum au niveau de l'aorte abdominale. La nutrition  se fait par diffusion à partir de la lumière artérielle, celle-ci pouvantêtre  annihilée par la plaque d'athérome. Cependant, certains malades porteurs d'AAA  ne présentent aucun des facteurs de risque classiques. Pour Gandhi et al, ces  facteurs de risque ne pourraient ainsiêtre que des catalyseurs de la formation  des anévrysmes artériels 
. Il est  possible que les lésions athéroscléreuses soient la conséquence plutôt que la  cause des anévrysmes. Les régimes fortement athérogènes n'entraînent pas  forcément de lésions anévrysmales chez l'animal. Les modèles expérimentaux  d'athérome mettant en jeu le traumatisme endothélial et/ou la surcharge  lipidique ne donnent qu'exceptionnellement des anévrysmes.
Des cas familiaux ont été recensés et des études de protéolyse du collagène  ont mis en évidence des enzymes dans la paroi anévrysmale 
. À partir de ces constatations, d'autres  hypothèses ont été formulées.
Une mutation sur le chromosome X de souris, d'espèce déterminée, affecte le  couplage élastine-collagène. Cette anomalie vient interférer avec le métabolisme  du cuivre 
. Selon Johansen, le risque serait six fois plus élevé  chez les parents au premier degré d'un malade porteur d'un AAA 
. Une fréquence anormalement élevée d'AAA a été récemment mise  en évidence chez des malades atteints d'hypercholestérolémie familiale  
. Le  groupe sanguin O serait également plus fréquemment rencontré chez les porteurs  d'AAA 
.
Histologiquement, l'aorte abdominale contient plus de collagène et moins  d'élastine que l'aorte thoracique, ce qui la rend plus rigide et moins  distensible. Elle contient d'autre part un nombre d'unités lamellaires (unité  structurale de la média) moins important que ne le laisserait supposer son  diamètre. Les pressions s'exerçant sur la paroi artérielle sont régies par la  loi de Laplace. L'augmentation du rayon aortique et la diminution de l'épaisseur  entraînent une augmentation de la tension pariétale avec tendance naturelle à  l'accroissement du diamètre aortique. Quand le vaisseau est de forme  cylindrique, la tension pariétale est égale au produit de la pression  transmurale par le rayon 
.
Le stress pariétal exercé sur un vaisseau dépend en fait, non seulement de la  tension, mais également du pouvoir de ce vaisseau à résister à cette tension,  c'est-à-dire de son épaisseur et de la qualité de la paroi. La formule de  Peterson fait intervenir l'épaisseur de la paroi artérielle dans l'expression du  risque de rupture. Plus l'artère se dilate, plus la force exercée sur la paroi  entraîne une modification des composants histologiques : diminution des fibres  élastiques aux dépens des fibres collagènes ; il s'ensuit une augmentation de la  rigidité pariétale. Quand l'artère devient sphérique, l'acquisition d'un second  rayon lui permet d'augmenter sa résistance.
Il a été possible d'établir une corrélation entre le risque de rupture dans  les 5 ans qui suivent la découverte de l'anévrysme et la taille de celui-ci : il  est de 15 % si le diamètre est de 4 cm et de 75 % si le diamètre est à 8 cm.  L'accentuation de la courbe est nette pour le diamètre de 5 cm, qui constitue le  point critique de l'évolution anévrysmale.
Le thrombus mural pourrait sembler jouer un rôle tampon en augmentant  l'épaisseur artérielle. En fait, il ne constitue qu'un agent minime dans le  maintien de l'équilibre pariétal. Le rôle des calcifications est lui aussi très  modéré dans le maintien de cet équilibre. Leur présence représente plus un  phénomène évolutif surajouté, ne pouvant en aucun cas éviter la rupture. Les  points fixes constitués par les collatérales contraignent les artères à se  couder et à devenir tortueuses.
La présence d'un gros anévrysme aortique peut avoir des conséquences sur la  pression artérielle centrale, car il agit dans certains cas comme " amortisseur  ". Ainsi, la pression systolique qui monte chez un patient athéromateux aux  artères indurées est-elle compensée par la dilatation aortique, qui offre un  élément ralentisseur et compliant en série sur le système. En cas de mise à plat  par une prothèse non compliante, la conséquence hémodynamique sera une  augmentation de la pression systolique, nécessitant parfois un traitement  spécifique.
Les points fixes constitués par les artères lombaires contraindraient, selon  certains auteurs, les artères à se couder, notamment chez les patientsâgés et  hypertendus 
. Le  reflux diastolique sur la bifurcation aortique participerait à cette dilatation  artérielle 
.
Il existe une diminution des contenus en élastine et en collagène des parois  anévrysmales. La collagénase, enzyme protéolytique, est présente dans la paroi  des anévrysmes rompus 
. Cette  lyse du collagène est étayée par des études in vivo. Anidjar a réalisé un modèle  expérimental d'AAA par perfusion d'élastase dans l'aorte de rat 
. Cependant, dans les parois des anévrysmes aortiques, la mise  en évidence d'enzymes protéolytiques est très difficile et, comme le précise  Anidjar, les véritables enzymes lytiques des parois, et surtout les mécanismes  déterminant leur présence et leur mise en oeuvre, restent à déterminer.
La laparotomie pourrait provoquer une augmentation de l'activité  protéolytique circulante, ce qui expliquerait certaines ruptures anévrysmales  survenues après chirurgie abdominale 
.
Ils ont été impliqués dans la genèse des anévrysmes de l'aorte. Selon  Anidjar, cette carence pourrait jouer un rôle au moment de la maturation des  anévrysmes 
. Tilson a  montré, sur des prélèvements autopsiques, hépatiques, que le taux de cuivre est  abaissé chez les malades ayant un AAA 
. Cependant, d'autres auteurs ont montré que le taux de  cuivre de la paroi anévrysmale était élevé sur des prélèvements frais 
.
En 1986, Beckman a mis en évidence des infiltrats inflammatoires dans les  parois anévrysmales 
. Dans la  plupart des cas, existait un infiltrat au niveau de l'adventice. Ces  constatations ne doivent cependant pas amener à la dénomination abusive  d'anévrysmes dits " inflammatoires " de façon systématique. Ce terme doitêtre  employé seulement pour un anévrysme présentant une fibrose périaortique intense  
. Les macrophages sont, d'autre part, présents dans les  plaques d'athérome et dans les lésions athéromateuses expérimentales. La  présence d'une fragmentation des fibres élastiques est toujours associée à un  infiltrat inflammatoire important. D'autre part, les polynucléaires neutrophiles  et les macrophages peuvent produire des enzymes protéolytiques. La plasmine  serait un activateur puissant des proélastases et des collagénases.
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 Définition
Les anévrysmes inflammatoires de l'aorte abdominale (AAAI) sont une entité  clinique, radiologique, macroscopique et thérapeutique. Ils représentent environ  10 % de tous les anévrysmes abdominaux, avec des chiffres variables selon les  séries (1,1 à 10 %) mais, comme le précisent Suy et al, la variation de cette  incidence dépend des critères choisis : poussée douloureuse ou définition de la  Mayo Clinic :
- - paroi anévrysmale épaisse, aspect blanc nacré ;  
- - fibrose rétropéritonéale associée ;  
- - adhérences aux organes de voisinage et notamment, à la veine cave  inférieure, le duodénum, la veine rénale gauche, ce qui rend compte de la  difficulté du geste opératoire . 

 Anatomopathologie
Sur le plan macroscopique, l'anévrysme inflammatoire est caractérisé par une  paroi épaisse, fibreuse, avec fibrose périaortique, qui donne un aspect blanc,  nacré. La paroi postérieure de l'aorte est souvent normale.
Sur le plan microscopique, il n'existe que des signes inflammatoires non  spécifiques au niveau de la paroi. Il n'y a pas d'hémosidérine dans la fibrose  périaortique.

 Étiologie
L'hypothèse communément admise est celle d'une réaction auto-immune aux  composants athéromateux de la paroi anévrysmale (céroïde). D'autres hypothèses  ont été avancées : fibrose due à des microhémorragies répétées, compression des  vaisseaux lymphatiques par l'anévrysme et extravasation 
.

 Clinique
Les douleurs abdominales et lombaires, associées à une perte de poids, sont  relativement caractéristiques des anévrysmes inflammatoires : 66 % des patients  de la série de Suy et al présentaient des douleurs de ce type 
.
Les complications urinaires peuvent révéler ces anévrysmes. Selon Lesèche et  al, des complications urinaires peuvent survenir dans 41 % des cas 
. Des anuries révélatrices sont possibles 
.
Malgré l'engainement possible de la veine cave inférieure par la fibrose, les  oedèmes des membres inférieurs sont rares. De même les obstructions duodénales  sont exceptionnelles.
Les embolies distales et les ruptures seraient moins fréquentes que dans les  anévrysmes athéromateux. Les ruptures semblent plus volontiers postérieures, là  où la fibrose est moins développée, et peuvent évoluer sur un mode chronique, à  type de rupture cloisonnée.
Enfin ils sont asymptomatiques dans 5 à 20 % des cas selon les séries  
.

 Biologie
Classiquement, la vitesse de sédimentation (VS) est élevée (73 % des patients  de la série de Pennell 
). Mais sa  normalité n'exclut pas le diagnostic et dans certaines séries, il n'y a pas plus  d'anomalies de la VS dans les AAAI, que dans les AAA banals.

 Examens radiologiques
L'échographie abdominale est fiable pour apprécier le retentissement  urinaire, elle l'est beaucoup moins pour reconnaître les caractéristiques des  anévrysmes inflammatoires.
L'artériographie n'a aucun caractère spécifique dans ce contexte.
Le scanner et l'imagerie par résonance magnétique (IRM) sont les deux examens  de référence, nettement supérieurs à ceux de l'échographie dans le diagnostic  des AAAI 
.
Ces examens montrent une répartition en " cocarde " : la lumière artérielle,  le thrombus mural, puis la couronne hyperdense autour de la paroi aortique  calcifiée, mais surtout antérolatérale, sur 1,5 à 2 cm. Ils apprécient également  l'étendue de la fibrose périaortique, grâce à l'injection iodée, qui est parfois  difficile à différencier d'une rupture rétroaortique 
(fig  5).
L'IRM est, pour certains auteurs, le meilleur examen diagnostique de ces  anévrysmes réalisant l'aspect caractéristique en " peau d'oignon ", c'est-à-dire  une alternance de bandes claires et de bandes sombres :
- - lumière artérielle : signal peu intense ;  
- - thrombus : signal plus intense ;  
- - paroi aortique : signal de même tonalité que la lumière artérielle ;  
- - et la fibrose : signal d'intensité moyenne. 
Pour Tennant et al, cet examen permet un diagnostic positif dans 100 % des  cas et précise le niveau du collet et des artères rénales dans 97 % des cas  
.

 Traitement

 Traitement chirurgical
 C'est la mise à plat-greffe, mais la présence de la fibrose implique quelques  précautions.
- - Un repérage préopératoire des uretères est souvent réalisé sur des clichés  d'urographie (en fin d'artériographie). On constate parfois une médialisation  des uretères, avec rétrécissement au niveau du tiers moyen, responsable  d'urétérohydronéphrose. Le cathétérisme des uretères ne se discute qu'en cas  d'hydronéphrose. Il n'est pas réalisé par toutes les équipes. Le drainage des  cavités pyélocalicielles par néphrostomie présente un risque infectieux non  négligeable.  
- - Une dissection minimale est nécessaire, afin d'éviter les plaies des  organes de voisinage, veine rénale gauche, veine cave inférieure, et surtout les  plaies duodénales parfois inaperçues, mais responsables de décès  postopératoires. L'urétérolyse dans les fibroses rétropéritonéales est difficile  à réaliser, et plusieurs cas de plaies urétérales ont été rapportés .  
- - Un clampage suprarénal est parfois nécessaire, et une voie  rétropéritonéale permet souvent un meilleur contrôle du collet supérieur, une  mobilisation aisée du rein gauche, et évite la mobilisation duodénale. D'autre  part les remaniements inflammatoires sont moindres en postérolatéral. Aucune  étude randomisée n'a cependant permis d'affirmer la supériorité d'une des voies  d'abord.  
- - Le contrôle endoluminal des artères iliaques évite toute dissection  hasardeuse au contact des veines iliaques. 
Après la mise à plat-greffe de l'anévrysme, la fibrose régresse rapidement  dispensant de toute urétérolyse intempestive. L'examen histologique de la  fibrose et de la paroi anévrysmale a permis de constater une augmentation des  lymphocytes T 
.

 Traitement médical
 La corticothérapie a une efficacité certaine dans le traitement des fibroses  périaortiques, à la dose de 0,50 mg/kg pendant 6 à 9 mois, ou 100 mg/j de  prednisone pendant 1 mois 
. Elle réalise une véritable urétérolyse chimique, mais  ses effets sur la croissance anévrysmale sont discutés. Le risque de rupture  anévrysmale est probablement accru par les corticoïdes 
.

 Résultats
 Ils sont désormais comparables à ceux des anévrysmes athéromateux 
. Le schéma thérapeutique peutêtre ainsi résumé, en dehors de  l'urgence :
- - anévrysme inflammatoire isolé : mise à plat-greffe ;  
- - anévrysme inflammatoire et obstruction urétérale modérée : corticothérapie  per- et postopératoire et mise à plat-greffe ;  
- - anévrysme inflammatoire et insuffisance rénale : drainage des voies  urinaires, corticoïdes à fortes doses, chirurgie et enfin ablation des sondes ;  
- - anévrysme non opérable : pontage extra-anatomique et exclusion. 
Ils représentent une catégorie de maladies rares, au premier rang desquelles  se trouvent la maladie de Behçet, la maladie de Takayasu, plus  exceptionnellement la maladie de Horton et la maladie de Kawasaki, voire le  lupus.

 Maladie de Takayasu
C'est " la maladie des femmes sans pouls ". Elle associe des lésions  sténosantes et anévrysmales. Elle est fréquente au Japon et au Chili. Elle  touche la femme jeune, avec atteinte de l'aorte, des troncs supra-aortiques, des  artères viscérales, en particulier rénales. Les anévrysmes aortiques sont rares,  petits, plutôt sacculaires et évoluent spontanément vers la rupture. Ce sont  néanmoins les lésions sténosantes qui sont les plus fréquentes au niveau  aortique, associées à des atteintes rénales 
.

 Maladie de Behçet
La maladie de Behçet est une affection répandue dans le bassin méditerranéen.  L'atteinte du système vasculaire constitue l'un des critères du diagnostic, avec  une atteinte veineuse (thrombophlébites) très fréquente. L'atteinte artérielle  est beaucoup moins connue. C'est néanmoins l'une des causes de décès les plus  fréquentes, avec l'atteinte neurologique centrale chez ces patients. L'atteinte  de la média entraîne une fragilisation de la paroi aortique avec apparition de  lésions à l'emporte-pièce responsable de faux anévrysmes. La principale  caractéristique est le caractère récidivant de ces lésions, avec des ruptures  anastomotiques itératives, posant de graves problèmes chirurgicaux. L'atteinte  artérielle peut inaugurer la maladie, mais survient en général 3 à 8 ans après  le début de celle-ci 
. Sa  fréquence est difficile à apprécier, de 2,2 à 34 % selon les séries. Une  trentaine d'observations d'anévrysmes aortiques ont été récemment colligées  
. Les  patients présentant des anévrysmes rompus sont décédés.

 Maladie de Horton
Cette artérite à cellules géantes touche les sujetsâgés et concerne plus  volontiers les troncs supra-aortiques. Elle donne exceptionnellement des  anévrysmes aortiques 
.
Les anévrysmes infectieux de l'aorte abdominale sont caractérisés par une  évolution rapide vers la rupture 
.

 Fréquence
Les anévrysmes infectieux ne représentent que 0,5 % des anévrysmes artériels  et une étiologie infectieuse au niveau aortique n'est retrouvée que dans 1 à 2 %  des cas 
.

 Définition
Cormier les divise en trois groupes :
- - une greffe bactérienne se produit sur une aorte initialement non  ectasique, le plus souvent au niveau d'une plaque athéromateuse ;  
- - un abcès pariétal se produit dans l'anévrysme faisant discuter le rôle  d'une fistule aortoduodénale : infection primitive aortique ou contamination  secondaire par des germes venant de la lumière digestive ;  
- - une embolie au cours d'une maladie d'Osler. D'autres causes emboliques  infectieuses apparaîtront vraisemblablement de plus en plus avec la fréquence  accrue des toxicomanies par voie veineuse, après greffe cardiaque primaire, ou  directement au cours de septicémies, entrant alors dans le premier groupe  .  
Les anévrysmes athéromateux, d'aspect opératoire banal, posent de plus le  problème de la découverte d'un germe lors de l'examen bactériologique fait de  façon systématique lors de leur mise à plat. En effet 10 à 15 % des cultures  sont positives dans les examens systématiques des thrombi intra-anévrysmaux.  Pour Farkas et al qui ont analysé les résultats bactériologiques de 500 malades,  seuls les anévrysmes rompus avec signes infectieux généraux, et cultures  bactériologiques positives (paroi et/ou thrombus) correspondent à un anévrysme  infectieux 
.

 Étiologie
Les mécanismes étiologiques ont été énoncés plus haut.
Les Salmonella cholerae et typhi murinum sont les germes les plus fréquemment  rencontrés dans les anévrysmes infectieux primaires, c'est-à-dire au cours d'une  septicémie. Les vésicules biliaires pathologiques sont des réservoirs potentiels  de salmonelles. Puis viennent les staphylocoques et les streptocoques.
Les staphylocoques dorés sont également rencontrés dans les anévrysmes des  endocardites infectieuses.
Quant aux anévrysmes de contiguïté, ils sont secondaires à des adénites  suppurées à staphylocoques dorés, Yersinia pseudotuberculosis, ou à des foyers  tuberculeux (mycobactéries) 
.
Le virus de l'immunodéficience humaine (HIV) peut entraîner des anévrysmes  infectieux primaires, à localisation aortique 
.

 Clinique
Le tableau complet, douleurs abdominales, masse battante, syndrome  infectieux, n'est présent selon Patra et al que dans 25 à 30 % des cas  
.  L'association fièvre et douleurs abdominales semble, en revanche, très  fréquente.

 Examens complémentaires
Les adénopathies, un épanchement, des bulles gazeuses périaortiques sur un  scanner ou une échographie sont des éléments en faveur d'un anévrysme  infectieux. L'aspect artériographique d'anévrysme sacciforme sur une artère  apparemment saine est classiquement en faveur de ce diagnostic, mais n'est  absolument pas spécifique 
.
Seule la preuve bactériologique est l'élément fondamental du diagnostic :  hémocultures, paroi, thrombus aortique. L'examen histologique peut aussi  apporter des éléments diagnostiques : présence de colonies microbiennes, tissus  nécrotiques.

 Traitement

 Traitement chirurgical
 Il comporte la résection large de tous les tissus nécrotiques infectés. Le  mode de revascularisation est fonction des habitudes des différentes équipes. La  revascularisation in situ est souvent faite dans le contexte de l'urgence  
. Certains  ont proposé l'utilisation des prothèses imprégnées d'antibiotiques, sans qu'une  efficacité formelle ne soit démontrée. Le lavage abondant, l'épiploplastie de  couverture font partie des mesures habituelles. L'utilisation des allogreffes in  situ est probablement la solution idéale, mais ces greffons sont rarement  disponible en urgence 
.
Les revascularisations extra-anatomiques (pontages axillobifémoraux) restent  des interventions logiques, mais responsables d'une lourde mortalité, 28 % pour  Fichelle et al 
.

 Traitement médical
 L'antibiothérapie est commencée avant la chirurgie, après de multiples  prélèvements bactériologiques. Elle sera adaptée aux différents germes retrouvés  dans la paroi et les tissus infectés. Elle est poursuivie au moins 6  semaines.
Ce sont des affections héréditaires touchant le tissu élastique. Elles sont  représentées par les maladies d'Ehlers-Danlos et de Marfan, cette dernière  touchant en fait plus volontiers l'aorte ascendante 
. Il est possible d'observer des localisations sous-rénales  isolées chez des malades atteints de Marfan sans autre localisation, voire même  d'en faire le diagnostic par un examen histologique 
. Elles posent des problèmes thérapeutiques en raison de  l'atteinte diffuse des artères, avec des risques de dissection lors du clampage,  rendant les anastomoses difficiles.
Ils résultent de la soufflure d'un faux chenal dans les suites d'une  dissection, habituellement à point de départ thoracique 
(fig 6).  L'anévrysme se présente avec deux chenaux circulants à l'ouverture. La  dilatation se fait aux dépens de la paroi externe fragilisée. Celle-ci est  constituée par le tiers externe de la média clivée par la dissection.  L'évolution selon Kieny et al peut se faire dans des délais allant au-delà de 10  ans, avec risque de rupture dans 30 à 40 % des cas 
. Cette entité ne mérite pas d'individualisation sur le plan  thérapeutique, hormis de rares cas où la dissection se poursuit sur les  vaisseaux iliaques.
Les anévrysmes post-traumatiques de l'aorte abdominale sous-rénale sont peu  fréquents comparés aux lésions de l'isthme. Quelques cas isolés ont été  rapportés 
. Ils sont  le plus souvent secondaires à des accidents de la voie publique, et concernent  des adultes jeunes. À unâge plus avancé, le diagnostic avec un anévrysme  athéromateux est parfois difficile.

 Anévrysmes thoracoabdominaux
Nous ne ferons que les citer car ils sortent du cadre de cette présentation.  Ils touchent la portion IV de l'aorte située entre le diaphragme et les artères  rénales ; mais ils n'y sont qu'exceptionnellement localisés, prolongeant plutôt  un anévrysme thoracique, précédant parfois un anévrysme sous-rénal ou  participant plus rarement à une dilatation complète de l'aorte.
Le risque opératoire est élevé parce que l'abord y est plus large  (thoracophrénolaparotomie), l'intervention plus longue et plus hémorragique, et  surtout parce que la plupart des viscères sont concernés par le clampage et les  réimplantations de leurs artères respectives. Ces interventions ne peuventêtre  réalisées que dans des centres très spécialisés comportant une réanimation et  utilisant des systèmes d'autotransfusion peropératoire. Le risque de paraplègie  est surtout important quand l'anévrysme déborde sur l'aorte thoracique  basse.

 Anévrysmes juxtra- et pararénaux
Si les anévrysmes purement sous-rénaux représentent 95 %, ils ont une  extension suprarénale dans 5 % des cas. Ils ne méritent une individualisation  qu'en raison du clampage sus- rénal quasi obligatoire à l'implantation de la  prothèse et au geste de revascularisation des artères rénales parfois nécessaire  : pontages, réimplantation en palette 
.
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L'anévrysme de l'aorte est une pathologie grave étant donné son risque  évolutif vers la rupture, mortelle dans 85 à 100 % des cas, et au moins chez 50  % des patients qui arrivent à l'hôpital 
. Le  nombre de décès par rupture d'AAA a été multiplié par 6 aux États-Unis entre  1951 et 1968 
. La  croissance moyenne d'un anévrysme est de 0,4 cm par an. Cette croissance est  régie par des facteurs hémodynamiques obéissant à la loi de Laplace. Mais cette  croissance peutêtre modeste ou nulle pendant plusieurs années avant de subir des  poussées expliquant l'augmentation brutale de petits anévrysmes. Chez un patient  porteur d'un AAA, le risque annuel de rupture est estimé à 6 %. C'est dire la  nécessité d'un dépistage précoce, et d'un traitement préventif de la rupture,  réalisé par des équipes entraînées, aboutissant, pour une chirurgie réglée, à  une mortalité inférieure à 5 %. Le risque de rupture est maximal pour les  diamètres supérieurs ou égaux à 7 cm mais des ruptures peuvent survenir pour des  anévrysmes de 3,5 à 4 cm 
.
Pour Limet, la croissance des anévrysmes est principalement exponentielle  
. Il  insiste sur la répétition des examens de surveillance, afin de dépister le  moment où la croissance va s'accélérer. Les croissances triphasiques ou  linéaires sont dues à l'affaiblissement de la paroi aortique par l'athérome, et  aux altérations de la matrice extracellulaire. Pour Limet, le tournant pourrait  correspondre à l'activation d'enzymes, responsables de la croissance des  anévrysmes 
. Il a en  effet démontré qu'il existait une relation linéaire entre l'accroissement du  diamètre et la diminution de la concentration en élastine de la paroi  aortique.
C'est le terme de la croissance, évolution inéluctable de la croissance  anévrysmale.

 Prérupture
À ce stade l'anévrysme est déjà compliqué mais malgré l'urgence, un bilan  préopératoire est réalisable et le risque opératoire comparable à une chirurgie  standard. L'anévrysme, jusqu'alors latent, subit une poussée inflammatoire au  niveau du tissu adventitiel, responsable de douleurs importantes mais il n'y a  pas d'hématome rétropéritonéal à proprement parler. L'anévrysme devient  douloureux spontanément et la palpation retrouve la masse, certes battante et  expansive, sensible, sans empâtement lombaire.
Une fièvre à 38°C est également possible avec une hyperleucocytose, une  anémie ou une VS accélérée, mais la douleur est incontestablement le signal  d'alarme qui doit faire hospitaliser le malade directement en milieu chirurgical  spécialisé.
Des examens morphologiques doivent impérativementêtre réalisés en urgence  :
- - l'échographie, car elle est facile à obtenir et affirme le diagnostic  d'anévrysme si celui-ci n'était pas connu, et confirme l'absence d'hématome  rétropéritonéal. La situation redevient donc celle d'un anévrysme à froid qu'il  importe d'analyser en urgence ;  
- - le scanner et l'artériographie, le bilan coronarien sont ensuite discutés,  en fonction de l'évolution clinique. Toute persistance, ou exacerbation de la  douleur représente pour nous une indication urgente. 

 Rupture anévrysmale
Elle peut se faire dans la grande cavité abdominale, dans le rétropéritoine  ou dans un organe adjacent (veine cave inférieure, duodénum, voire un uretère).  Rarement l'anévrysme est découvert au stade de rupture chronique, et son  existence a même été contestée jusqu'à la première description faite en 1961 par  Szylagyi 
. Pour  Chaillou et al, cette rupture cloisonnée évolue toujours vers la rupture franche  dans un délai impossible à préciser 
. Il  s'agit parfois d'une découverte peropératoire.

  Rupture rétropéritonéale 
 Elle associe une douleur abdominale à irradiation postérieure et un collapsus  hémorragique. Le diagnostic d'anévrysme (si celui-ci n'était pas connu) peutêtre  difficile. Il existe une défense abdominale, et la palpation retrouve une masse  profonde, battante et douloureuse ayant perdu son caractère expansif : il s'agit  de l'hématome rétropéritonéal sous tension. Le diagnostic doitêtre étayé par un  seul examen réalisé en urgence, à condition qu'il ne retarde en rien une  intervention salvatrice : l'échographie abdominale. Le traitement chirurgical  urgent doitêtre fait par des chirurgiens entraînés, mais tout transfert comporte  un risque vital majeur.
L'ouverture du péritoine d'emblée peutêtre fatale, par " levée " de la sangle  abdominale qui maintient encore une hémostase précaire. Le contrôle de l'aorte  thoracique par thoracotomie ou sternotomie est parfois réalisé. Le clampage  comporte des risques de plaies veineuses importantes (veine splénique, veine  rénale gauche). Le taux de mortalité reste très élevé 50 à 70 % par collapsus,  infarctus du myocarde, colite ischémique 
.

 Rupture intraduodénale
 Il s'agit d'un tableau rare, 0,04 à 0,07 % dans les séries autopsiques (plus  fréquent en cas de faux anévrysme sur prothèse). Comme le précisent Bacourt et  al, son étiologie n'est pas toujours univoque : anévrysme infectieux vrai,  anévrysme athéromateux surinfecté, ou fistule digestive primaire sur anévrysme  non septique 
. Ses  fistules se situent dans 8 % des cas sur le duodénum (D3, le plus souvent). Mais  des localisations jéjunales sont possibles 
.
Son installation souvent insidieuse peut faire errer le diagnostic. Des  hémorragies digestives basses, peu abondantes, accompagnées d'épisodes  septicémiques (30 % des cas), à hémocultures positives, avec des douleurs  abdominales sont les signes révélateurs. Ils constituent une triade présente  dans environ 33 % des cas.
Cette hémorragie basse peutêtre fatale. La découverte d'un anévrysme à la  palpation dans ce contexte doit faire envisager la fistulisation duodénale,  surtout s'il est sensible (participation inflammatoire).
L'examen le plus fiable pour l'affirmer est la fibroscopie, qui retrouve une  ulcération sur la face postérieure du troisième duodénum. La TDM apporte des  éléments en faveur du caractère septique de l'anévrysme : image gazeuse,  épanchement périaortique.
L'intervention est difficile du fait du risque septique, et rejoint dans ses  principes, la chirurgie pour prothèse aortobifémorale septique : excision des  tissus nécrotiques, revascularisation extra-anatomique ou in situ (homogreffes  artérielles), associées à la suture de la brèche digestive. La mortalité globale  est de 50 % 
.

 Rupture dans la veine cave inférieure
 Elle est rare. Sa fréquence varie de 1 à 4 % des anévrysmes rompus 
. Toutes les formes d'AAA peuvent entraîner des fistules  aortocaves, mais principalement les anévrysmes athéromateux et les anévrysmes  infectieux 
. L'urgence est cette fois hémodynamique : la rupture  dans la veine cave inférieure entraîne une fistule artérioveineuse à gros débit.  L'évolution vers l'insuffisance cardiaque aiguë peutêtre très rapide. La douleur  et l'état de choc (présent seulement dans 30 % ces cas) constituent des signes  d'appel, mais la pression artérielle initiale peutêtre normale, contrastant avec  une franche accélération du pouls. La palpation de l'abdomen perçoit une masse  battante avec un thrill continu à renforcement systolique et l'auscultation  retrouve un souffle continu. Souvent sont associés des oedèmes des membres  inférieurs, une hématurie, voire une embolie pulmonaire (migration d'un thrombus  intra-anévrysmal dans la veine cave).
La localisation de la fistule est au mieux appréciée par une artériographie,  le scanner montrant une opacification de la veine cave inférieure, pendant  l'opacification artérielle.
L'intervention consiste à fermer la fistule aortocave par l'intérieur de  l'anévrysme précédemment contrôlé et ouvert. L'occlusion temporaire de la veine  cave par des sondes à ballonnets peut stopper l'hémorragie. Le clampage de la  veine cave sous-rénale est nécessaire pour éviter les embolies peropératoires et  effectuer l'hémostase.

 Complications thromboemboliques
 Elles sont curieusement rares, malgré l'importance des thrombi  intra-anévrysmaux 
. Dans une série de  426 embolies périphériques, Darling et al ne retrouvent un anévrysme iliaque ou  aortique que dans 1,5 % des cas 
. Un  fragment de ce thrombus peut se mobiliser dans la circulation et se bloque au  niveau d'une bifurcation artérielle, entraînant une ischémie aiguë d'un membre  inférieur. Le traitement de l'ischémie aiguë prime et le bilan étiologique  permet la découverte de l'anévrysme.
Exceptionnellement, la thrombose anévrysmale intraluminale se complète  
 . Le tableau est  celui d'un syndrome de Leriche avec ischémie bilatérale des membres inférieurs  et impuissance, la gravité du syndrome dépendant de l'existence ou non d'une  circulation collatérale. Il est en règle d'installation brutale et de pronostic  catastrophique dans les pathologies ectasiantes. L'intervention consiste à  rétablir une circulation normale au niveau des membres inférieurs et au moins  d'une hypogastrique (risque périnéal et colique), soit à l'aide d'une  intervention directe après angiographie, soit à l'aide d'un montage  extra-anatomique laissant l'anévrysme en place (la thrombose de l'anévrysme  éliminant le risque de rupture).
Les embolies fibrinoplaquettaires " en pluie " dans le lit d'aval, expliquent  sa détérioration progressive : l'association d'une artérite distale et d'un  anévrysme de l'aorte abdominale plaide de toute façon pour une attitude  chirurgicale.
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L'AAA est le plus souvent asymptomatique : plus de 60 % des cas selon Kieny  et al 
. La  présence de douleurs traduit déjà le stade des complications ou des poussées  inflammatoires. Tout anévrysme douloureux de l'aorte abdominale sous-rénale  nécessite une hospitalisation en urgence dans un service de chirurgie  vasculaire. Les signes fonctionnels amenant à consulter sont multiples mais non  spécifiques. Parfois des troubles digestifs orientent vers une maladie ulcéreuse  duodénale, une affection colique ou une pathologie vésiculaire 
. L'association d'un ulcère gastroduodénal à un anévrysme de  l'aorte abdominale est par ailleurs fréquente : une étude autopsique a montré  une forte incidence d'ulcères gastroduodénaux chez des malades porteurs d'un  anévrysme de l'aorte. Des douleurs lombaires peuvent faire discuter une arthrose  rachidienne ; une claudication intermittente associée doit faire pratiquer un  bilan vasculaire, et conduit parfois à la découverte d'un anévrysme aortique.  Cette claudication peutêtre due à des lésions sténosantes iliofémorales ou à une  destruction du lit d'aval par emboles successifs. Enfin, la découverte est  souvent fortuite par la palpation abdominale ou par le malade lui-même.  Insistons cependant sur la fréquence actuelle des anévrysmes découverts lors  d'une échographie abdominale demandée pour une autre pathologie.
Classiquement, l'AAA sous-rénale est une masse battante, expansive, non  douloureuse, médiane ou légèrement latéralisée à gauche. La possibilité de  glisser le tranchant de la main entre le pôle supérieur de l'anévrysme et  l'auvent costal traduit le caractère sous-rénal de la masse (signe de De Bakey).  La présence d'un souffle n'est pas un argument en faveur du diagnostic,  l'absence de souffle ne peutêtre retenue contre lui. Parfois une légère douleur,  ou tout au moins une sensibilité spécifique, est retrouvée à la palpation : elle  doit évoquer une participation inflammatoire.
Une masse abdominale transmettant les battements de l'aorte chez l'obèse, une  aorte déroulée chez le sujetâgé ou chez une femme jeune aux artères  hyperpulsatiles, sont des diagnostics différentiels. En fait, la discussion  n'existe qu'avec un anévrysme de petite taille. Dans tous ces cas, l'échographie  abdominale permet un diagnostic facile.
Une ischémie aiguë de membre inférieur, par migration embolique, peut révéler  un anévrysme aortique. L'échographie abdominale doit faire partie du bilan de  toute ischémie aiguë embolique de jambe.
Les anévrysmes inflammatoires représentent une entité particulière,  caractérisée par des douleurs abdominales et lombaires importantes associées à  un amaigrissement, une anorexie et un syndrome inflammatoire biologique. Des  coliques néphrétiques ou des anuries sont parfois révélatrices de ces anévrysmes  en raison de la fibrose rétropéritonéale associée 
.
Les anévrysmes infectieux de l'aorte abdominale associent classiquement une  fièvre, des douleurs spontanées abdominales ou lombaires et l'existence d'une  masse abdominale pulsatile 
.
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L'intérêt des différents examens radiologiques de l'aorte abdominale a été  récemment rappelé par Sapoval et al 
.
Cet examen met en évidence des calcifications dans environ 70 % des cas 
(fig 13)  ; il n'est cependant contributif qu'avec des clichés de profil et de pénétration  correcte. Nous considérons que la radiographie d'abdomen sans préparation ne  peut en aucun casêtre considérée comme un moyen de diagnostic fiable.
C'est l'examen de référence dans le diagnostic et la surveillance des AAA.  L'échographie est une technique non invasive, peu onéreuse, reproductible dont  la fiabilité est de 95 %. Son seul inconvénient est d'être opérateur dépendante.  C'est dire la nécessité de répéter les examens de surveillance par un même  opérateur entraîné. L'examen utilise des sondes de 3,5 ou 3,75 MHz. L'étude de  l'aorte nécessite des coupes axiales et longitudinales. La mesure du diamètre  axial est plus exacte que celle du diamètre antéropostérieur. Ce dernier est  comparé au diamètre de l'aorte sus- et sous-jacente. L'échographie méconnaît  cependant les calcifications et peutêtre limitée par l'obésité et les gaz  intestinaux ; elle montre deux zones, le thrombus périphérique faiblement  échogène et la lumière centrale circulante. Elle est réalisée dans les  suspicions de ruptures d'anévrysmes, si la présence d'un hématome  rétropéritonéal est authentifiée, en raison de la disponibilité de cet examen  dans la plupart des centres 
.
C'est à notre avis l'examen de référence dans le diagnostic préopératoire et  le bilan des AAA. Les nouvelles générations de scanner (hélicoïdal) procurent de  plus une définition supérieure de l'image et des mensurations très précises  indispensables en vue de traitement endoluminal 
. La  quantité de produit de contraste nécessaire est moindre 
.
L'étude aortique comporte, en scanner traditionnel, des coupes jointives (de  3 à 5 mm). L'anévrysme est ainsi mesuré en hauteur, et ses limites sont définies  : extension aux artères iliaques, hypogastriques ou aux artères rénales. La TDM  permet surtout de repérer les anomalies rénales, ou veineuses associées. Cet  examen donne une image morphologique fiable, reproductible, non opérateur  dépendante. Il permet une mesure précise du diamètre, l'étude des organes  adjacents. L'extension du thrombus mural, l'existence des calcifications, les  zones de soufflures pariétales, l'érosion des corps vertébraux sont parfaitement  visualisés. La présence d'un hématome rétropéritonéal, et sa diffusion dans le  psoas sont également bien vues. Des calcifications intraluminales sont parfois  observées, pouvant évoquer une dissection ancienne 
(fig 14).  Les insuffisances du scanner sont le manque de précision dans la mesure des  diamètres lorsque l'aorte présente une angulation importante, et l'absence de  repérage fiable des artères rénales accessoires, ou de la mésentérique  inférieure. Aucun examen complémentaire ne doit cependant faire retarder une  intervention urgente.
Les reconstructions 3D permettent d'améliorer la définition des limites des  anévrysmes. Elles donnent une impression de relief en ne gardant que les pixels  externes les plus proches de l'opérateur et en les ombrant.
Elle constitue encore la méthode de référence indispensable à toute chirurgie  préalable pour de nombreuses équipes. L'avènement des nouvelles techniques  scanographiques et de l'IRM aurait pu en limiter l'usage, mais elle est pour  l'instant nécessaire pour déterminer la faisabilité de la technique  endovasculaire 
.  Elle est réalisée à l'aide d'un cathéter d'angiographie marqué. Les  renseignements attendus de l'artériographie ont été rappelés par Mialhe et al  
 :
- - état et calibre de l'aorte sus-jacente, en sachant que l'artériographie  n'est pas un bon examen pour la mesure du diamètre anévrysmal, puisqu'elle  n'opacifie que le chenal circulant ;  
- - disposition, nombre des artères rénales, perméabilité des artères  digestives, état de la circulation pelvienne et notamment des artères  hypogastriques et de la mésentérique inférieure. Le risque de couverture de  l'une ou l'autre de ces artères peut avoir des conséquences dramatiques ;  
- - hauteur et calibre des collets anévrysmaux avec étude de face et de profil  ;  
- - état des artères iliaques, taille, sinuosité, orientation, qui présagent  de difficultés lors de la mise en place du dispositif endoluminal. L'existence  de lésions sténosantes doit égalementêtre notée, mais leur retentissement est  apprécié au mieux par l'écho-doppler artériel des membres inférieurs ;  
- - enfin l'état du lit d'aval doitêtre correctement évalué : anévrysmes  associés, embolies distales. 
Cette méthode coûteuse, peu disponible, n'a pas de place véritable dans le  diagnostic préopératoire des AAA. Mais elle pourrait supplanter, à terme,  l'angiographie. Pour l'analyse de l'aorte les séquences d'écho de spin pondérées  T1 permettent d'obtenir des images suffisantes. Le sang circulant apparaît en  noir sur les clichés, c'est-à-dire un signal nul, mais en raison des phénomènes  d'entrée et de sortie de coupe, il peutêtre blanc 
.
Pour clore cette énumération nous citerons les conclusions de Tennant et al  qui ont comparé trois méthodes diagnostiques (échographie, TDM, IRM) et leur  performance dans le repérage des limites des anévrysmes aortiques, et la  détection de phénomènes inflammatoires associés 
. Cette étude prospective portait sur une série de 79 AAA,  dont 15 anévrysmes inflammatoires. Les auteurs ont ainsi montré que  l'échographie avait échoué dans le repérage exact du collet anévrysmal dans  trois cas d'anévrysmes inflammatoires, et dans 15 cas d'anévrysmes non  inflammatoires. Elle n'a également jamais pu distinguer précisément l'origine  des artères rénales, et n'a jamais pu différencier anévrysmes inflammatoires et  non inflammatoires. Le caractère inflammatoire a puêtre précisé dans tous les  cas en TDM, et le niveau des artères rénales a été incorrect dans deux cas  d'anévrysmes inflammatoires, et quatre cas d'anévrysmes non inflammatoires. En  revanche, l'IRM a identifié tous les anévrysmes inflammatoires, précisé  exactement tous les collets, le niveau des artères rénales, et visualisé leur  émergence sauf dans deux cas. Cette technique non invasive semble la plus  prometteuse pour l'évaluation future des AAA.
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Cette recherche doitêtre une obsession chez le médecin traitant,  l'anesthésiste, le cardiologue, l'angiologue et le chirurgien. Les  contre-indications doiventêtre réduites au strict minimum, étant donné le  bénéfice sur l'espérance de vie de la chirurgie 
. Seules des affections fatales à court terme (néoplasies,  sida évolué, bronchopathie oxygénodépendante ou altération majeure de la  fonction ventriculaire gauche), sont susceptibles de récuser les patients. Les  indications doivent rester très larges. Il n'y a pas de limite d'âge, mais les  risques chirurgicaux, de même que ceux de l'abstention, doiventêtre bien compris  par tous 
. La  recherche d'un foyer infectieux est impérative : ORL, trouble trophique distal  notamment.
C'est la première atteinte associée à déceler 
. Elle est responsable de 60 à 70 % des décès postopératoires  après cure d'AAA 
.  L'atteinte coronarienne des populations de malades présentant un AAA, est de 40  à 60 % 
. Elle est  fréquemment sous-estimée car silencieuse : 20 % des malades asymptomatiques  auraient des lésions sévères. L'étude de Hertzer et al a bien montré que  l'incidence de la coronaropathie, chez les porteurs d'un AAA, était la plus  élevée de tous les malades vasculaires 
. De plus  tous les malades aux antécédents d'infarctus, d'angor, ou ayant des anomalies  sur l'électrocardiogramme de base ont des atteintes bi- ou tritronuclaires sur  la coronarographie. L'évaluation du risque coronarien est l'objet de nombreuses  controverses. L'examen clinique et un interrogatoire policier sont les premiers  éléments de cette enquête.
L'électrocardiogramme d'effort est un test de référence, mais son  interprétation est difficile chez des patients artéritiques qui claudiquent, ou  chez des patients sous bêtabloqueurs.
L'échocardiographie détecte les anomalies de la contraction myocardique, les  zones d'akinésie témoins d'infarctus anciens et d'éventuelles anomalies  associées : valvulopathies, thrombus intracavitaires.
La scintigraphie au thallium-dipyridamole, qui simule une épreuve d'effort,  provoque une vasodilatation des artères coronaires. Les coronaires sténosées ne  se dilatent pas et leurs territoire correspondants sont vascularisés par des  collatérales émanant des coronaires saines : ce sont les images précoces. Puis  par vasodilatation secondaire, elles reperfusent leurs territoires : on obtient  des images tardives de redistribution (3 à 4 heures plus tard). Ce phénomène  traduit l'existence d'une zone myocardique viable, en aval d'une sténose donc  susceptible d'être revascularisée préventivement. Ces images sont des marqueurs  prédictifs d'événements cardiaques postopératoires. Cet examen peu invasif  semble néanmoins d'une fiabilité incertaine, et d'une valeur prédictive  médiocre. Pour Baron et al, la redistribution ne préjuge en rien des  complications postopératoires 
. Dans cette  étude Baron et al ont montré que chez les patients suspects d'ischémie  myocardique, seule la coronarographie donnait un reflet objectif de l'atteinte  coronarienne. Trois attitudes semblent donc se dégager :
- - patient asymptomatique, sans antécédent, avec électrocardiogramme de base  et d'effort normaux : aucun test supplémentaire ;  
- - patient " coronarien " connu : coronarographie ;  
- - patient paucisymptomatique : test intermédiaire ? échocardiographie de  stress (à la dobutamine), scintigraphie au thallium, peut-être, mais seule la  coronarographie donne des réponses indiscutables. 
L'examen des creux poplités et des scarpas, la palpation des pouls distaux  font partie de l'examen clinique initial. Un anévrysme poplité est associé dans  40 % des cas à un anévrysme aortique. Ces localisations doiventêtre connues, en  raison du risque de thrombose postopératoire.
Dans la littérature, l'altération de la fonction respiratoire est retrouvée  chez 25 à 33 % des malades présentant un anévrysme de l'aorte abdominale  
. Les  explorations fonctionnelles respiratoires sont systématiques avant toute  chirurgie aortique réglée. L'altération de la ventilation est en effet présente  chez plus de 30 % des patients porteurs d'un AAA 
. La bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) est un  facteur favorisant et aggravant de la rupture anévrysmale 
. La fréquence des complications respiratoires serait  importante en cas de capacité vitale forcée inférieure à 70 %, et de rapport de  Tiffeneau inférieur à 65 % 
.
Les antécédents, l'examen clinique, doivent faire rechercher une pathologie  carotidienne vertébrale ou sous-clavière associée. L'écho-doppler des vaisseaux  du cou est indispensable avant toute chirurgie aortique, toute sténose  carotidienne supérieure à 70 % étant à notre avis à traiter avant  l'anévrysme.
L'interrogatoire, les dosages biologiques sont la base de cette recherche.  L'échographie rénale, l'écho-doppler, voire l'urographie intraveineuse étant  réalisés au moindre doute.
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 Mise à plat-greffe
C'est la technique de référence. Elle a évolué dans les dernières années vers  une simplification.

 Voies d'abord
 Elles dépendent des habitudes de chaque opérateur. La laparotomie médiane est  la plus utilisée : 92,5 % des voies d'abord réalisées chez 780 malades dans  l'étude de l'Association universitaire de recherche en chirurgie (AURC)  
. Elle est  simple, permet une exploration complète de la cavité péritonéale, un contrôle  correct du collet supérieur sous- ou juxtarénal et des artères iliaques. Ses  principaux reproches sont :
- - l'amputation de la capacité respiratoire, jusqu'à 50 % chez certains  patients. Cette altération de la fonction ventilatoire est due à la limitation  de l'amplitude des mouvements par la douleur et est aggravée par des  bronchopathies préexistantes. Elle peutêtre limitée par des analgésies  péridurales, une prise en charge kinésithérapique active pré- et postopératoire  ;  
- - la traction peropératoire sur les anses intestinales entraîne une  diminution des pressions artérielles systoliques et diastoliques, avec chute des  résistances vasculaires systémiques, aboutissant à une augmentation de la  fréquence et du débit cardiaque. Ces phénomènes seraient dus à la libération de  prostaglandines  ;  
- - les complications pariétales postopératoires. Les patients atteints  d'anévrysmes de l'aorte abdominale ont un diastasis des muscles droits, et font  plus fréquemment que d'autres opérés de l'abdomen des éventrations  postopératoires. La voie d'abord transversale diminuerait ces éventrations ;  
- - le retard à la reprise du transit intestinal est aussi un inconvénient de  cette voie, avec l'inconfort d'une sonde nasogastrique pendant plusieurs jours  pour les malades. 
La voie rétropéritonéale a des avantages théoriques, mais une étude  prospective randomisée n'a, en 1990, montré aucune différence significative pour  la plupart des critères utilisés. Les patients semblent cependant reprendre plus  vite leur transit et avoir moins de douleurs. En revanche, les complications  pulmonaires postopératoires n'étaient pas améliorées de façon significative  
. Cette  voie semble cependant avoir des indications électives : abdomen hostile  (radique, multiopéré, antécédents infectieux), anévrysmes inflammatoires, collet  haut situé.

 Technique opératoire
 Nous décrirons brièvement la technique par voie médiane transpéritonéale.  Après laparotomie médiane verticale, le duodénum et les anses grêles sont  refoulés. Le péritoine pariétal postérieur est incisé. On contrôle d'abord le  collet de l'anévrysme sans faire le tour de l'aorte, le clamp étant serré au ras  du rachis 
(fig 20).  Puis les iliaques sont également contrôlées sans dissection trop importante (on  évite ainsi les plaies urétérales et des veines iliaques). L'anévrysme est  ensuite ouvert, c'est-à-dire mis à plat : le thrombus estôté et mis en culture  selon les équipes. Les artères lombaires qui refluent sont aveuglées, par  l'intérieur du sac, de même que l'artère mésentérique inférieure. Cette artère  est parfois réimplantée dans la prothèse : ceci dépend de l'état de la  vascularisation du petit bassin, et des artères hypogastriques. La prothèse est  alors cousue par l'intérieur de la poche anévrysmale, au niveau du collet  supérieur, puis inférieur. La prothèse est un tube droit en cas d'anévrysme  aortique, ou une prothèse bifurquée, le plus souvent bi-iliaque, en cas  d'anévrysmes iliaques associés 
(fig 21).  Après purge du corps prothétique, on rétablit la circulation sanguine. Ce  déclampage nécessite une parfaite collaboration chirurgien-anesthésiste en  raison des modifications hémodynamiques induites par cette chasse sanguine  distale. La coque anévrysmale est ensuite refermée sur la prothèse, afin de  séparer la prothèse du duodénum et d'éviter une complication devenue ainsi rare  : la fistule duodénale. Aucun drain n'est habituellement justifié. En cas de  rupture anévrysmale un clampage thoracique ou par sternotomie peut permettre de  contrôler un état de choc majeur 
.

 Choix du matériel
 Il est fonction des habitudes des chirurgiens, le Dacron
®  (polyester) étant le plus utilisé, mais aucune étude randomisée n'a confirmé sa  supériorité par rapport au PTFE (polytétrafluoroéthylène) 
. Les prothèses en polyester imprégnées, en tricots chaînés  assurant une étanchéité immédiate sont les plus employées.

 Exclusion et pontage extra-anatomique
Berguer et al ont résumé les indications de cette technique qui doit rester  d'indication anecdotique dans le traitement des AAA 
. Karnody et al ont utilisé cette technique pour 60 malades à  haut risque 
. La  technique consistait en une ligature des artères distales et réalisation d'un  pontage extra-anatomique, type axillofémoral. Ce type d'intervention doitêtre  réalisé chez des malades à très haut risque chirurgical, ou comme dans le cas de  Berguer, chez un malade atteint d'un lymphome rétropéritonéal. En effet, cette  intervention simple peut se compliquer de coagulopathies de consommation,  d'échec de thrombose, puisque la ligature est unipolaire. La rupture est alors  possible, puisque l'anévrysme reste alimenté par les artères lombaires. Le  thrombus peut également s'étendre aux artères d'amont : artères rénales et  digestives.

 Traitement endoluminal

 Démarche expérimentale et homologation
 L'implantation d'une endoprothèse, dans cette pathologie, a pour but  d'exclure la poche anévrysmale, de diminuer la pression du sang circulant sur  cette coque et de conserver la perfusion distale.
La sélection des patients nécessite des critères anatomiques basés sur les  examens paracliniques, notamment le scanner, et pour l'instant l'artériographie  
. Mais,  même si des améliorations autoriseront peut-être le traitement de l'artère sur  toute sa hauteur, on voit d'emblée que la chirurgie gardera des indications. En  effet, il n'est pas anodin de couvrir en même temps artères hypogastriques et  mésentérique inférieure, en raison du risque de colite ischémique et d'ischémie  pelvienne. Ce qui explique le choix des indications actuelles, souvent "  compassionnelles ". Il existe donc déjà un biais dans les indications.
La classification actuellement proposée comprend cinq stades et a été  rappelée par Cormier et al 
 :
- - type 0 : absence de collet supérieur ; les systèmes actuellement  disponibles ne permettent pas de traiter ces lésions et menacent de recouvrir  les ostia des artères rénales ;  
- - type I : collet supérieur de 15 à 20 mm de haut sous l'artère rénale la  plus basse ; collet inférieur d'au moins 20 mm de haut jusqu'à la bifurcation du  carrefour aortique ; possible traitement endoluminal par tube aorto-aortique ;  
- - type II : collet supérieur adéquat ; absence de collet inférieur ; pas  d'anévrysme iliaque ;  
- - type III : idem, mais anévrysme iliaque associé. Pour les types II et III,  des prothèses bifurquées sont possibles, ou des prothèses dégressives associées  à des pontages fémoro-fémoraux croisés ;  
- - type IV : comprend un ou deux anévrysmes iliaques étendus à la bifurcation  iliaque, et le risque de nécrose pelvienne ou nécrose grave. 

 Matériel et techniques
 Les types de prothèse disponibles sont :
- - les endoprothèses de type Stent-graft, qui sont des prothèses vasculaires  classiques avec deux systèmes d'attache métallique aux extrémités ;  
- - les endoprothèses couvertes, avec un support métallique sur toute leur  longueur. 
Les principaux systèmes évalués ont récemment été répertoriés par Mialhe et  al 
.
- - Stent-graft de Parodi.  
- - Le graft Attachment Device de White-Yu.  
- - L'endograft EVT.  
- - L'endoprothèse Stentor bifurquée de Mialhe.  
- - L'endoprothèse de Chuter-Gianturco.  
- - Le pontage endoluminal Corvita.  
- - Le stent " cotricoté " Meditech. 
Les différentes techniques de traitement endovasculaire des anévrysmes  doivent beaucoup aux travaux de Parodi 
. La mise  en place de ces dispositifs nécessite un abord chirurgical en raison du calibre  des introducteurs (18, 24 F). Les lésions semblant le plus facilement  accessibles sont les anévrysmes de la partie moyenne de l'aorte abdominale. La  mise en place des prothèses bifurquée nécessite parfois l'exclusion d'un des  anévrysmes iliaques et la réalisation d'un pontage croisé.
Avant d'entamer la mise en place d'un tel matériel chez l'homme, il est  souhaitable de disposer de données expérimentales, mais comme le précise Long,  aucun modèle animal n'est parfaitement satisfaisant 
.
Les indications doiventêtre larges et sont basées sur la taille de  l'anévrysme, l'existence de douleurs ou de complications. La taille au-delà de  laquelle l'indication chirurgicale est retenue est fréquemment discutée  
. Tous les anévrysmes doiventêtre opérés étant  donné leur risque inéluctable de rupture dès qu'ils atteignent 5 cm. Les courbes  actuarielles de survie comparant l'évolution spontanée et les malades traités  sont particulièrement significatives sur ce point 
. Seule l'altération de l'état général, une affection  engageant le pronostic vital, ou une atteinte respiratoire ou cardiaque grave,  représentent des contre-indications au traitement. Il est à notre avis  incohérent de penser que ces patients seront d'excellents patients pour le  traitement endoluminal. En effet ces indications dites compassionnelles peuvent  se transformer en indications hémostatiques urgentes en cas de complications de  la procédure. Il est sans doute peu probable que des patients soient laissés  sans intervention de sauvetage en cas de complications, mais quel sera le  pronostic de ces malades, récusés pour une chirurgie froide, et qui sont opérés  dans des conditions encore plus mauvaises ?

 Traitement chirurgical
Les résultats de la chirurgie sont bons pour la chirurgie réglée, avec une  mortalité inférieure à 4 % 
. La  mortalité reste très élevée pour les anévrysmes rompus variant selon les séries,  et selon l'inclusion ou non dans ces séries des anévrysmes opérés en urgence,  des ruptures chroniques, ou des découvertes opératoires qui sont en fait des  chirurgies réglées sur des malades préparés. Une augmentation de la morbidité et  de la mortalité a été rapportée en cas de chirurgie rénale combinée 
.

 Traitement endoluminal
Les résultats de Palmaz ont été récemment rappelés lors de la première  réunion " High Tech en angioplastie périphérique " en 1995 
. À partir de travaux expérimentaux chez l'animal, il a montré  les limites de la technique du traitement endoluminal des anévrysmes de l'aorte  abdominale. Il a utilisé une endoprothèse métallique recouverte de PTFE. L'étude  anatomopathologique chez le chien a mis en évidence l'existence d'une néo-intima  recouvrant la quasi-totalité de la prothèse, sans lésion mécanique pariétale.  Mais des questions persistent quant au devenir des prothèses à long terme et des  fuites même minimes qui demeurent encore fréquentes après mise en place du  matériel, essentiellement du fait d'un défaut d'hermétisme au niveau des  anastomoses. De plus, on ne peut préjuger à long terme, ni de l'absence du  risque de rupture après exclusion endoluminale, ni du devenir des lombaires  réalimentant à contre-courant la coque anévrysmale exclue. Des ruptures tardives  sont cependant décrites, des embolisations distales également (dont deux fatales  dans la série de Parodi) 
.
Dans la série de Blum et al, 26 prothèses dont 23 bifurquées ont été  implantées, avec un suivi court de 8 jours à 8 mois. Le taux de succès initial  est de 96 %. Des fuites de l'endoprothèse supérieures à 3 mois ont nécessité la  mise en place de nouvelles prothèses. Chez sept des 26 patients, des fuites  résiduelles mineures se sont spontanément thrombosées dans un délai de 7 jours.  Mais le taux de complications reste important : 20 % 
.
Les premiers résultats du protocole multicentrique américain, sous contrôle  de la Food and Drugs Administration (FDA), ont été publiés 
. Il concerne 46 patientsâgés de 54 à 84 ans, avec des  anévrysmes de 3,8 à 7,1 cm de diamètre. Les patients ont été traités par deux  types de prothèses, qui sont en fait des modèles " évolutifs ". Le taux de  succès d'implantation initial est de 85 %, avec une durée moyenne d'intervention  de 194 minutes. Les conversions chirurgicales sont au nombre de sept. Elles sont  dues à des sténoses iliaques associées, un mauvais déploiement, ou une migration  du dispositif. Aucun décès n'est survenu. La durée moyenne du séjour hospitalier  est de 3,8 jours. Il n'a pas été noté d'embolies distales graves, d'ischémie  pelvienne ou digestive, ou d'amputations de membres. Les complications  rapportées par les auteurs sont : un infarctus du myocarde, huit traumatismes  artériels iliofémoraux, nécessitant tous une réparation chirurgicale, sept  infections de scarpa. La persistance d'une prise de contraste périprothétique a  été notée initialement sur 17 contrôles, mais neuf d'entre elles se sont  résolues spontanément. Pour les huit malades restants, un a été réopéré en  raison d'une augmentation de la taille de l'anévrysme, et un autre a eu une  angioplastie transluminale afin de réexpandre l'endoprothèse. Six patients sont  donc suivis de 6 à 27 mois avec des fuites périprothétiques ou des retours par  les artères lombaires. Des fractures du système d'ancrage ont été identifiées  chez neuf patients, nécessitant une ablation chirurgicale. L'endoprothèse dans  le traitement de l'anévrysme aortique semble prometteuse, même si les  conclusions de l'Agence nationale pour le développement et l'évaluation médicale  (ANDEM) rapportées par Chiche et al font état de 38 % d'échecs dont 10 % de  décès directement imputables à la procédure 
.

 Infarctus du myocarde
C'est une complication grave, qui représente encore la principale cause de  morbidité et de mortalité de ces malades. La moitié de ces décès postopératoires  précoces ou tardifs sont d'origine coronarienne. Ce risque myocardique existe  dès l'induction anesthésique, lors des phases de clampage et de déclampage  aortique, et lors du réveil. C'est dire l'importance d'un monitoring précis et  permanent 
. La  détection de toute souffrance myocardique préopératoire est donc une absolue  nécessité, les revascularisations coronariennes étant réalisées avant la mise à  plat-greffe.

 Colite ischémique et complications digestives
C'est après la pathologie cardiaque, la deuxième cause de mortalité chez les  opérés d'anévrysme de l'aorte 
. Sa  fréquence est de 0,3 à 10 % des séries selon Farkas et al, mais sa traduction  clinique est d'environ 3 %. La durée du clampage, l'état de la vascularisation  pelvienne (artère mésentérique inférieure, artères hypogastriques), le bas débit  prolongé en sont les facteurs principaux. Le rôle des radicaux libres lors de  l'ischémie-reperfusion est également évoqué. C'est une complication grave qui se  traduit par une reprise trop rapide et diarrhéique du transit. L'état de choc et  l'acidose métabolique complètent le tableau. La colonoscopie doitêtre faite au  moindre doute. C'est elle qui guide l'attitude thérapeutique : abstention et  surveillance, ou chirurgie d'exérèse, grevée d'une lourde mortalité, puisque le  décès varie selon les séries de 30 à 100 % 
. Le  bénéfice préventif de la réimplantation de l'artère mésentérique inférieure  reste discuté.

 Complications pulmonaires
Elles sont fréquentes, plus de 50 %, mais pas toujours graves. Les  pneumopathies de base sont les principales. Elles doiventêtre prévenues par un  sevrage tabagique préopératoire, une préparation kinésithérapique intense. La  voie rétropéritonéale ne semble pas diminuer de façon significative ces  complications. La ventilation mécanique prolongée est en revanche un facteur de  gravité 
.

 Complications rénales
Elles sont plus rares ; elles peuventêtre favorisées par des artères rénales  pathologiques (qui peuventêtre traitées en même temps que l'anévrysme), par un  collapsus peropératoire ou par des emboles dans les lumières artérielles lors du  clampage aortique. Le clampage supra-aortique pour le contrôle de l'aorte, la  ligature de la veine rénale gauche sont parfois responsables de tubulopathies  transitoires. La dialyse peutêtre nécessaire notamment après chirurgie  d'anévrysme rompu. C'est un facteur de mauvais pronostic.

 Complications dues à la prothèse
Elles nécessiteraient à elles seules un chapitre abondant, même si elles sont  relativement rares.
- - L'infection de prothèse : complication majeure. Elle reste rare (0,5 à 1,5  %) . C'est  une catastrophe responsable d'une lourde mortalité (70 % avant l'utilisation des  allogreffes artérielles), et d'une morbidité importante (plus de la moitié des  patients seront amputés). Elle ne correspond pas toujours à une faute  chirurgicale, mais la contamination à partir de la peau est un élément majeur.  L'existence d'un trouble trophique distal, un défaut de recouvrement de la  prothèse dans l'abdomen sont également des facteurs de sepsis.  
- - Les faux anévrysmes anastomotiques, aux multiples étiologies (mécanique,  infectieuse, dégénérescence artérielle) et qui correspondent à des dilatations  constituées de thrombus, de prothèse, de paroi artérielle native, et de tissus  inflammatoires. Ils nécessitent une prise en charge chirurgicale, car leurs  risques évolutifs sont les mêmes que les " vrais " anévrysmes (fig 22).   
- - La thrombose de prothèse a des étiologies multiples : infection, embole  d'origine cardiaque, ou d'un faux anévrysme anastomotique, détérioration du lit  d'aval. Son traitement n'est pas univoque : remplacement, thrombectomie  chirurgicale ou radio-interventionnelle. 

 Chylopéritoine
C'est une complication exceptionnelle. Dans une revue de littérature de 1981  à 1992, Pabst et al n'ont trouvé que 22 cas auxquels ils ont ajouté cinq cas  personnels 
. Cette  complication correspond à un épanchement ascitique stérile de lymphe  intrapéritonéale qui apparaît en moyenne 18 jours après l'intervention (avec des  extrêmes de 7 à 120 jours). Leur traitement par nutrition parentérale et  triglycérides à chaînes légères suffit le plus souvent, la chirurgie n'étant  réservée qu'aux épanchements enkystés. Les épanchements récidivants nécessitent  parfois des dérivations péritonéales par shunts.

 Complications sexuelles
L'éjaculation rétrograde par section des nerfs présacrés est présente chez  environ 30 % des patients opérés d'anévrysmes de l'aorte abdominale 
. Sa prévention passe par l'absence de dissection de l'artère  iliaque primitive gauche notamment, mais elle est parfois difficile à éviter. Il  faut à notre avis en informer les patients en préopératoire.

 Autres complications
Nous ne ferons que les citer, car elles sont très rares, voire  exceptionnelles :
- - l'ischémie médullaire, par naissance anormale d'une artère d'Adamkiewicz ;   
- - les lésions urétérales directes, qui peuvent se voir dans la chirurgie des  anévrysmes iliaques. 

 Évolution de la maladie athéromateuse
C'est une complication évolutive tardive.
La détérioration du lit d'aval, l'apparition de nouvelles localisations  athéromateuses imposent un suivi régulier de ces patients 
(fig 23).  Seuls les antiagrégants plaquettaires ont prouvé leur efficacité à long terme  dans la prévention coronarienne et cérébrovasculaire. Les mesures  hygiénodiététiques, la prise en charge multidisciplinaire sont indispensables.  Nous terminerons en insistant sur la prévention, l'éducation et la surveillance  par le médecin traitant, le dépistage écho-doppler annuel des complications et  la détection de nouvelles localisations anévrysmales.