Manifestations cardiaques des connectivites et des angéites nécrosantes



Julie Cosserat: Chef de clinique-assistant
Service de médecine interne, hôpital Foch, 40, rue Worth, 92150 Suresnes France
Olivier Blétry: Professeur des Universités, praticien hospitalier
11-049-A-10 (1997)



Résumé

L'atteinte cardiaque est fréquente au cours des maladies systémiques. Elle constitue parfois un élément diagnostique ou pronostique important. Au cours du lupus, le péricarde et l'endocarde sont le plus souvent touchés, alors que le syndrome des antiphospholipides (SAPL) lèse essentiellement les valves. L'atteinte cardiaque de la sclérodermie prédomine sur le péricarde et le myocarde. La dermatomyosite (DM) et la polymyosite (PM) se compliquent surtout de troubles du rythme et de la conduction. L'atteinte myocardique constitue un facteur de gravité de la périartérite noueuse (PAN) et de l'angéite de Churg et Strauss. Au cours de la polyarthrite rhumatoïde et du syndrome de Sharp, l'atteinte péricardique domine. Enfin, parmi les maladies systémiques moins souvent concernées par ces complications, les lésions les plus souvent retrouvées sont valvulaires au cours de la polychondrite atrophiante, coronaires et péricardiques au cours de la maladie de Wegener, et l'atteinte cardiaque est très rare au cours du syndrome de Gougerot-Sjögren.

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Plan

Introduction
Lupus érythémateux systémique
Syndrome primaire des antiphospholipides
Sclérodermie
Dermatomyosite et polymyosite
Périartérite noueuse
Angéite de Churg et Strauss
Polyarthrite rhumatoïde
Syndrome de Gougerot-Sjögren
Granulomatose de Wegener
Polychondrite atrophiante
Syndrome de Sharp
Complications cardiaques liées au traitement

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Les connectivites et les angéites nécrosantes forment un ensemble hétérogène ayant toutefois en commun la possibilité d'atteindre de multiples organes, et de rester actuellement des énigmes physiopathologiques, en dépit des progrès considérables de l'immunologie. Elles peuvent donc concerner chaque spécialiste, et sont le domaine de prédilection du médecin interniste. L'atteinte cardiaque est relativement fréquente au cours de ces pathologies, avec une expression clinique ou infraclinique, et fait parfois même partie des critères diagnostiques ou pronostiques. Bien que le domaine de ces maladies soit très vaste, nous avons arbitrairement arrêté la liste des sous-chapitres à dix pathologies : lupus érythémateux systémique (LES), SAPL, sclérodermie systémique, PM et DM, polyarthrite rhumatoïde, syndrome de Gougerot-Sjögren, syndrome de Sharp, polychondrite atrophiante PAN, angéite de Churg et Strauss et maladie de Wegener. Nous ferons successivement un rappel succinct des grandes caractéristiques de chaque maladie, puis une description des atteintes cardiaques incluant les données anatomopathologiques. Un dernier et bref paragraphe est consacré aux complications cardiaques des thérapeutiques utilisées, sans vouloir détailler celles-ci dans le cadre de ce texte.

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Le LES est une maladie auto-immune relativement fréquente, touchant neuf fois sur dix la femme, comportant des manifestations polyviscérales extrêmement variées et des anomalies biologiques propres (présence d'anticorps anti-ADN [anti-acide désoxyribonucléique] natif). Sa physiopathologie n'est pas connue. Sa symptomatologie clinique comporte des signes généraux et des atteintes viscérales dont les plus fréquentes sont cutanées, articulaires, rénales, neurologiques et cardiovasculaires. Le LES s'associe de façon fréquente au SAPL, dont les caractéristiques sont détaillées dans un autre paragraphe de cet article. La coexistence des deux pathologies est à l'origine d'un certain nombre de manifestations vasculaires et cardiaques particulières sur lesquelles nous reviendrons.
L'atteinte cardiaque fait partie des 11 critères diagnostiques établis par l'American Rheumatism Association (ARA) en 1982, par le biais de la péricardite. Elle peut concerner les trois tuniques, et se manifester sous la forme de péricardites, endocardites, coronaropathies, troubles de la conduction, et rarement de myocardites. Elle est présente dans 30 à 62 % des LES selon le moyen diagnostique, clinique, échographique ou autopsique [ 35 ].

La plus fréquente de ces manifestations est la péricardite, retrouvée cliniquement chez 20 à 30 % des patients, 30 à 40 % échographiquement, et 60 à 70 % histologiquement [ 60 ]. Elle peut survenir aussi au cours des lupus induits. Son expression clinique est non spécifique. Un épanchement pleural est fréquemment associé. L'échographie met en évidence un épanchement péricardique et/ou un épaississement. L'épanchement est généralement de petite abondance, et la rareté de la tamponnade explique le peu de données disponibles sur le liquide péricardique, qui est le plus souvent très inflammatoire, avec un taux de protides supérieur à 50 g/L. Le taux de glucose est habituellement bas, et l'ensemble peut évoquer une péricardite purulente. Des facteurs antinucléaires ou des cellules LE (lupus érythémateux) peuvent être isolés dans l'épanchement, et une baisse inconstante du complément peut être notée. L'évolution sous corticothérapie ou anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) est le plus souvent favorable, et les complications à type de tamponnade, de péricardite purulente ou de constriction sont très rares. En cas de tamponnade engageant le pronostic vital, le traitement associe péricardiocentèse et corticothérapie [ 60 ]. La survenue exceptionnelle d'une constriction, possible au cours des lupus induits, est une indication à la péricardectomie.
Des biopsies ne sont réalisées que lorsqu'il existe un doute diagnostique avec une péricardite tuberculeuse. L'étude anatomopathologique met en évidence des infiltrats inflammatoires avec dépôts fibrinoïdes et parfois présence de corps hématoxyliques et/ou de nécrose fibrinoïde. Des dépôts de complexes immuns ont parfois été visualisés en immunofluorescence. Lors du passage à la chronicité, on peut observer des dépôts calciques et des synéchies [ 60 ].

Il s'agit d'une cardiopathie congestive souvent difficile à diagnostiquer en raison de l'absence de spécificité des symptômes d'appel, qui peuvent être aussi la conséquence d'une hypertension artérielle, d'une fièvre ou d'une atteinte rénale sévère. Elle est retrouvée cliniquement dans près de 10 % des cas, mais anatomiquement chez neuf patients sur 10. Elle est moins sensible à la corticothérapie que la péricardite. Histologiquement, le myocarde peut être le siège de dépôts fibrinoïdes dans les septa intercellulaires et à proximité des vaisseaux, avec parfois atrophie des fibres myocardiques, réalisant un aspect de myocardite interstitielle [ 34 ].

Ils sont relativement rares, et peuvent être de siège auriculoventriculaire ou intraventriculaire (fig 1). Les troubles de la conduction concernent des patients jeunes, pour lesquels une atteinte dégénérative peut être exclue. L'apparition des troubles se fait souvent à distance de la poussée lupique, et persiste au décours de celle-ci [ 34 ]. Les antipaludéens de synthèse sont parfois responsables de troubles de la conduction iatrogènes [ 39 ] (fig 2). Le problème des blocs auriculoventriculaires congénitaux du lupus néonatal, liés à la cardiotoxicité des anticorps anti-Ro/anti-La, sort du cadre de cet article.



Les atteintes valvulaires au cours du lupus ont été caractérisées par Libman et Sacks, et retrouvées à l'autopsie sous la forme de lésions verruqueuses de quelques millimètres sur les valves, les cordages, et le muscle papillaire (fig 3). L'individualisation du SAPL a permis de rattacher une part importante de ces valvulopathies au SAPL. Plusieurs études ont souligné l'existence d'une fréquence très significativement accrue de lésions valvulaires lors des lupus avec anticorps antiphospholipides (APL) [ 54], [78 ]. Dans l'une d'entre elles, le taux de végétations et/ou d'insuffisance mitrale est de 16 et 38 % pour des patients porteurs d'un lupus avec SAPL, contre 1,2 et 12 % chez ceux n'ayant qu'un lupus isolé [ 54 ]. Les lésions prédominent généralement sur la valve mitrale. Elles peuvent parfois nécessiter un remplacement chirurgical. Il existe un risque de complications thrombotiques, emboliques et infectieuses, le diagnostic différentiel entre poussée lupique avec atteinte valvulaire cardiaque et endocardite infectieuse n'étant pas toujours simple. Une récente étude [ 94 ] a trouvé une fréquence de 61 % d'anomalies à l'échographie cardiaque transoesophagienne. Les lésions prédominantes étaient dans 51 % des cas des épaississements valvulaires, suivies par des végétations dans 43 % des cas, des régurgitations dans 25 % des cas, et des sténoses dans 4 % des cas. La surveillance échographique prospective met en évidence une certaine évolutivité de ces atteintes, progressive, mais parfois aussi régressive lors d'un contrôle effectué 2 ans 1/2 plus tard. Cette évolution semble indépendante de la maladie de fond, mais les données concernant la présence ou non d'anticorps APL sont manquantes. Les complications concernent un patient valvulaire sur cinq, et sont souvent à l'origine des décès relevés dans l'étude.

Les études anatomopathologiques nécropsiques trouvent des lésions dans 20 à 60 % des cas [ 72 ]. Elles mettent en évidence des dépôts de fibrine, de cellules endothéliales, d'infiltrats inflammatoires, ainsi que les lésions de fibrose, de nécrose, des néovaisseaux, et parfois des dépôts calciques et des corps hématoxyliques de Gross. Les techniques d'immunofluorescence permettent parfois d'isoler des dépôts d'immunoglobulines (Ig) et de complément.

L'atteinte coronaire est rare, et il s'agit le plus souvent de lésions d'athérosclérose liées à la corticothérapie [ 18 ], que de lésions d'artérite spécifique (fig 4). Elle concerne en moyenne 5 % des patients. Le risque relatif d'infarctus du myocarde au cours du lupus est de 9 par rapport à un groupe témoin. Les arguments permettant d'évoquer une vascularite sont cliniques, iconographiques et histologiques. Cette localisation s'inscrit généralement dans le contexte d'une maladie active et évolutive. L'angiographie est évocatrice si elle montre des anévrysmes coronaires multiples, moins spécifiques si elle retrouve des sténoses dont le caractère inflammatoire n'est pas facile à différencier d'une origine athéromateuse. L'histologie permet de trancher en mettant en évidence une panartérite nécrosante et thrombosante prédominant sur les petits vaisseaux intramyocardiques [ 59 ]. Les lésions d'athérosclérose accélérée semblent prédominer, et concernent les patients porteur d'un lupus ancien, avec une corticothérapie au long cours [ 61 ]. Elle serait responsable de 15 % de la mortalité de ces patients. L'influence délétère des corticoïdes sur le métabolisme lipidique peut être en partie contrebalancée par l'effet hypocholestérolémiant de l'hydroxychloroquine [ 84 ]. Le rôle de l'auto-immunité au cours de la genèse de l'athérome est enfin possible, comme en témoigne l'existence de modèles animaux traités avec succès par le cyclophosphamide [ 61 ].


L'existence d'un SAPL associé au lupus induit la survenue de quatre types de pathologies : les valvulopathies, les infarctus du myocarde, les cardiomyopathies et les thrombi intracardiaques. Il n'y a pas d'association avec les péricardites. Plusieurs études ont montré la prévalence accrue des valvulopathies au cours du LES avec SAPL [ 54], [65], [78 ], mais certains auteurs contestent ce lien [ 33], [67 ]. Les lésions comportent des épaississements valvulaires simples et des végétations. L'atteinte la plus fréquente est l'insuffisance mitrale. Le retentissement hémodynamique peut parfois imposer un remplacement valvulaire. Il existe par ailleurs un risque d'embolie systémique. La découverte d'une valvulopathie au cours d'une poussée de LES avec SAPL en climat fébrile peut tout à fait mimer un tableau d'endocardite infectieuse, qui peut authentiquement se greffer sur une valve lésée. Aucun critère clinique ou paraclinique ne permet de faire la part entre les deux affections. Une endocardite infectieuse peut elle-même être associée à la présence d'un taux faible d'anticorps APL. Il faut donc mettre en route une antibiothérapie empirique en cas de doute, d'autant qu'il existe de volumineuses végétations ou des signes de défaillance hémodynamique.
Au cours du lupus avec SAPL, le risque d'infarctus du myocarde a été mis en évidence chez des patients jeunes sans facteur de risque cardiovasculaire et sans corticothérapie au long cours [ 3 ]. Les lésions sont des thromboses sur artères saines, ou des microthromboses artériolaires coronaires. On ne dispose pas encore d'étude prospective permettant d'évaluer le risque d'infarctus du myocarde au cours du lupus avec et sans anticorps APL. Des resténoses itératives ont par ailleurs été décrites chez une patiente porteuse d'un anticorps antiprothrombinase après angioplastie transluminale.
La présence d'un SAPL peut aussi être associée à l'existence de cardiomyopathies révélées par des signes d'insuffisance cardiaque survenant en l'absence d'atteinte des gros troncs coronaires ou de valvulopathies hémodynamiquement significatives [ 15 ], ou de découvertes échographiques chez des patients asymptomatiques [ 74], [78 ]. L'examen histologique d'un patient de 33 ans atteint d'un SAPL et décédé d'insuffisance cardiaque a mis en évidence des thrombi plaquettaires extensifs dans les petites artères, avec des aires d'infarctus associées.
Enfin, des thrombi intracardiaques ont été mis en évidence dans toutes les cavités cardiaques au cours du SAPL, posant parfois le problème du diagnostic différentiel avec les myxomes [ 55], [66 ] (fig 5). Il existe alors un risque d'embolies artérielles périphériques en cas de localisation au coeur gauche.


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Le SAPL a été individualisé par Harris en 1987 et défini par l'association d'événements cliniques à la présence d'anticorps APL. Ceux-ci doivent être mis en évidence à l'occasion de deux dosages successifs à 3 mois d'intervalle, et comportent actuellement en routine la recherche d'un anticoagulant circulant de type lupique ou antiprothrombinase, et celle des anticorps anticardiolipine de type IgG et IgM. Les événements cliniques sont la survenue de thromboses artérielles ou veineuses, et d'avortements à répétition. Le SAPL peut être isolé et primitif (SPAPL), ou évoluer dans le cadre d'une maladie systémique, la plus fréquente étant le LES. Nous n'aborderons ici que les atteintes cardiaques du SPAPL, les autres étant traitées dans le texte concernant le LES.
L'individualisation récente de ce syndrome en a fait l'objet de nombreuses publications parfois contradictoires, comportant des interrogations non résolues. On ne sait pas affirmer de façon formelle si les APL sont la cause ou la conséquence des pathologies qui leur sont associées. Le risque de survenue d'une complication cardiaque chez des patients ayant des APL découverts fortuitement n'est pas non plus précisément connu. Les études prospectives ultérieures ainsi que les progrès dans la compréhension de la pathogénie des lésions induites par les anticorps APL apporteront dans l'avenir les réponses aux questions restant actuellement en suspens.
La physiopathologie des lésions induites par les APL n'est que partiellement élucidée, et a été étudiée en partie grâce à des modèles animaux. De nombreux mécanismes ont été proposés pour expliquer la formation des thrombi au cours du SAPL : lésions endothéliales et inhibition du relargage de la prostacycline, augmentation de l'agrégation plaquettaire, inhibition des anticoagulants endogènes, interactions avec la fibrinolyse. Certains caractères permettent de préciser la pathogénicité des anticorps APL : leur titre élevé, leur pérennité, la sous-classe IgG, et la présence associée d'anticorps anti-2GP1, cofacteur de la liaison avec la cardiolipine, et peut-être seule cible véritable des anticorps APL [ 86 ]. Les thromboses surviennent sur des parois vasculaires non inflammatoires, ce qui différencie nettement le SAPL des vascularites systémiques [ 86 ]. Elles peuvent toucher les artères et les veines de tous calibres et toutes topographies.
Les atteintes cardiaques rapportées dans la littérature sont en premier lieu des atteintes valvulaires dont la traduction clinique est inconstante. Des anticorps APL ont été détectés dans les lésions, suggérant leur rôle pathogène direct [ 48 ]. Les autres sont coronaires, myocardiques, ou sont constituées par la survenue de thrombi intracardiaques. Il n'y a pas d'association significative entre anticorps APL et péricardites. La survenue d'une péricardite en l'absence d'infarctus du myocarde ou d'insuffisance rénale sévère constitue même un critère d'exclusion du SAPL primaire [ 88 ]. L'hypertension artérielle pulmonaire primitive ou secondaire à une maladie thromboembolique sort du cadre strict de l'atteinte cardiaque.

Une étude échographique prospective concernant la fonction diastolique du ventricule gauche a été réalisée chez 18 patients ayant un SPAPL primitif, comparés à 18 sujets contrôles [ 22 ]. Celle-ci a mis en évidence un trouble de la relaxation myocardique chez les patients, en dépit de l'absence de symptômes cliniques. Les résultats de ce travail ont été confirmés par une autre étude portant sur 10 malades [ 45 ]. L'atteinte de la fonction diastolique était à nouveau signalée, associée à une conservation des paramètres systoliques et de la fraction d'éjection.

Elles sont fréquentes au cours du SPAPL, et concernent en moyenne un tiers des patients [ 13], [32], [55], [108 ]. Les lésions prédominantes concernent le coeur gauche, avec un épaississement simple des valves sans végétations associé ou non à une incompétence pouvant nécessiter un remplacement valvulaire. Les complications potentielles, outre la défaillance hémodynamique, sont les embolies artérielles, notamment cérébrales, et de rares greffes oslériennes [ 86 ]. L'analyse histologique des valves montre essentiellement des lésions fibrosantes, et peu ou pas d'images de thrombose [ 61 ]. Le rôle joué par les APL n'est donc pas clairement établi. Des dépôts d'anticorps anticardiolipine ont toutefois été retrouvés dans le sous-endothélium valvulaire [ 48], [61 ].
En dehors du SAPL, l'étude de la prévalence des APL chez des patients candidats à un remplacement valvulaire montre des pourcentages variant de 4 à 30 % [ 12], [29 ]. Au cours d'une étude concernant des patients porteurs d'insuffisance aortique ou mitrale, le pourcentage est le même quelle que soit l'étiologie de la valvulopathie, et il s'élève proportionnellement au nombre de valves atteintes, tendant à faire des APL un marqueur de la maladie valvulaire indépendant [ 5 ]. Il ne semble pas y avoir d'augmentation du risque thrombotique vasculaire chez ces patients au décours de la chirurgie, mais ces études sont faites chez des patients dont certains sont sous anticoagulants au long cours en raison de la mise en place d'une valve artificielle [ 12], [29 ].

La survenue d'un infarctus du myocarde a concerné 2 % des patients ayant un SPAPL et suivis pendant 5 ans [ 95 ]. Les thromboses touchent soit les gros troncs coronaires, soit les petites artérioles, comme cela a été montré lors de biopsies endomyocardiques ou d'études autopsiques [ 61], [77 ].
Dans la population générale, les études concernant le risque de survenue d'une nouvelle nécrose myocardique ou d'une complication vasculaire chez des patients survivants d'un infarctus du myocarde ont des résultats contradictoires. Certains n'ont pas trouvé de relation entre infarctus du myocarde, présence d'APL, et récidive d'un événement thrombotique [ 85 ]. D'autres formulent la conclusion inverse [ 61 ]. Une des plus récentes est en faveur d'une liaison entre les deux phénomènes [ 109 ]. Elle étudie le devenir de 124 patients âgés de moins de 65 ans survivants d'un infarctus du myocarde. Près de 14 % d'entre eux avaient des APL, et le risque de récidive de l'infarctus ou d'un autre accident thrombotique a été significativement plus élevé dans le groupe étudié (41 % versus 4 % et 35 % versus 10 % pour chaque événement), sur une période de 1 an 1/2. Les APL ont constitué alors un facteur de risque indépendant, n'étant donc pas une simple réponse immunologique à la lésion myocardique. Ces auteurs confirment par ailleurs le fait que les APL ne s'élèvent pas significativement au décours d'un infarctus du myocarde, alors que la chirurgie cardiaque semble responsable d'une augmentation de leur taux [ 61 ].

Toutes les cavités cardiaques sont concernées par la survenue de thrombi au cours du SAPL, posant d'une part le problème du diagnostic différentiel avec les myxomes [ 55], [66 ], d'autre part celui des embolies artérielles périphériques en cas de localisation au coeur gauche. Les cas actuellement rapportés l'ont été uniquement au cours du SAPL secondaire avec LES.

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C'est une maladie rare d'étiologie inconnue, parfois associée à des facteurs d'environnement (silice), caractérisée par une atteinte généralisée du tissu conjonctif et de la microcirculation entraînant une fibrose et une oblitération vasculaire dont les localisations prédominantes sont la peau, le poumon, le tube digestif et le rein. Un syndrome de Raynaud est présent dans 95 % des cas, et précède de une à plusieurs années l'apparition des signes cutanés. La sclérodermie systémique comprend deux types distincts par leurs manifestations cliniques dominantes, l'extension des lésions cutanées, les marqueurs biologiques, et le pronostic global : la forme cutanée diffuse avec anticorps anti-Scl 70, et la forme cutanée limitée, ou CREST syndrome (calcinose sous-cutanée ; syndrome de Raynaud ; atteinte oesophagienne ; sclérodactylie ; télangiectasies), avec anticorps anticentromères. L'atteinte cutanée constitue une gêne fonctionnelle et esthétique majeure, alors que les manifestations polyviscérales, en particulier rénales, pulmonaires et cardiaques conditionnent le pronostic.
Les atteintes cardiaques sont fréquentes (75 % des patients), peuvent être asymptomatiques [ 2 ] et concernent le péricarde, les voies de conduction, le myocarde, et plus rarement les coronaires [ 7 ]. L'atteinte de l'endocarde est exceptionnelle et discutée. Elles peuvent être autonomes, ou être la résultante du retentissement d'une hypertension artérielle secondaire à l'atteinte rénale, ou de manifestations pulmonaires avec hypertension artérielle pulmonaire.

Sa fréquence varie en fonction des moyens d'explorations : elle est cliniquement présente dans 7 % des cas d'une série de 210 patients [ 69 ], échographiquement chez près de la moitié des cas lors d'études systématiques [ 100 ], et anatomopathologiquement deux fois sur trois [ 69], [81 ] (il s'agit de péricardites fibreuses, fibrineuses ou d'épanchements) (fig 6).

Elles sont cliniquement de deux types, de signification différente : aigu, sans pronostic péjoratif, et chronique, parfois annonciateur de crise rénale de sclérodermie. Le liquide est peu cellulaire (environ 500 cellules/mm3), et riche en protides. Il peut parfois s'agir aussi de transsudats [ 34 ]. Les tamponnades sont très rares [ 97 ], et favorisées par la diminution de la compliance péricardique induite par la fibrose. Une péricardite constrictive calcifiante a été exceptionnellement décrite [ 82 ]. La prescription de corticoïdes au cours du traitement des péricardites est controversée, car en dépit de leur efficacité dans cette indication, elle a été incriminée dans la survenue des crises rénales de la maladie.

Elle est fréquente, et constitue un élément pronostique péjoratif, pouvant être à l'origine du décès des patients [ 27], [51 ]. Lors des études anatomopathologiques, elle est estimée à 80 % des cas [ 23 ]. Elle est liée à un trouble de la microcirculation coronaire améliorée au long cours par la nifédipine [ 50 ]. L'hypothèse de spasmes artériels, ou syndrome de Raynaud du coeur, a été soulevée [ 27 ]. Les lésions histologiques sont constituées par des foyers de fibrose disséminés dans tout le myocarde, avec des aspects identiques à toutes les atteintes tissulaires de la maladie . Ils sont secondaires à l'augmentation des dépôts de collagène résultant de l'hyperactivité des fibroblastes probablement secondaire aux anomalies microvasculaires. Le syndrome de Raynaud du coeur serait à l'origine des images de nécrose par bandes de contraction, constituées de bandes éosinophiles transversales représentant la condensation d'éléments contractiles entre des zones de granularité accrue. Ces lésions histologiques ne sont pas spécifiques de la sclérodermie [ 17], [28 ].


L'insuffisance cardiaque est le risque évolutif ultime. L'étude échocardiographique a mis en évidence des troubles de relaxation du ventricule gauche [ 8 ], analysés comme le témoin de la fibrose myocardique. Les anomalies de perfusion constatées lors de la réalisation de scintigraphies au thallium d'effort sont un facteur de risque de la survenue de complications cardiaques mortelles [ 50], [101 ].

Lors des études prospectives avec des électrocardiogrammes ambulatoires, des anomalies sont retrouvées dans 50 à 67 % des cas [ 20], [57 ], alors que les électrocardiogrammes de repos sont normaux dans 57 à 63 % des cas. Les anomalies les plus fréquentes sont les extrasystoles auriculaires et ventriculaires, et les tachycardies supraventriculaires. Elles concernent au même titre les deux formes de sclérodermie. La mortalité globale et le risque de mort subite semblent corrélés à la présence des extrasystoles ventriculaires. La perfusion de prostacycline utilisée dans le traitement des syndromes de Raynaud peut, elle aussi, être à l'origine de la survenue d'extrasystoles ventriculaires régressives à l'arrêt du traitement. Les troubles de la conduction sont peu fréquents, et peuvent comporter des blocs de différents degrés, allant jusqu'à la nécessité de mise en place d'un pace-maker [ 81 ]. Des blocs de branche isolés sont possibles.

Elle est relativement peu fréquente. Les douleurs thoraciques peuvent être difficiles à interpréter, liées à une péricardite, à une origine pariétale, à la fibrose pulmonaire. La survenue d'infarctus du myocarde est rare et en rapport avec un spasme artériel, la coronarographie étant normale. Des aspects de pseudonécrose peuvent exister à l'électrocardiogramme sans insuffisance coronaire. Des études ont toutefois montré que la capacité de dilatation coronaire était très réduite chez les patients sclérodermiques, liée à une anomalie des petites artères, et à l'origine du développement de la myocardiopathie sclérodermique. Il peut aussi exister un spasme lié au froid [ 51 ]. L'ensemble de ces anomalies est très sensible à la nifédipine, comme en témoignent les données obtenues lors des scintigraphies au thallium [ 50 ]. L'effet de ce traitement au long cours n'est cependant pas connu.

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La DM et la PM sont des maladies systémiques comportant une atteinte musculaire striée dominante. Elles se différencient cliniquement par la présence de signes cutanés pour la DM, et par des caractéristiques génétiques et physiopathologiques propres, l'une étant liée principalement à des anomalies de l'immunité cellulaire (PM), l'autre de l'immunité humorale (DM) avec atteinte vasculaire. Leurs atteintes extramusculaires sont communes, et elles seront donc traitées indifféremment ici. Elles comportent un déficit musculaire myogène prédominant aux ceintures, bilatéral, symétrique et non sélectif, avec une possibilité d'atteinte pharyngée engageant le pronostic vital. Des myalgies sont le plus souvent associées. Sur le plan biologique, le syndrome inflammatoire est présent une fois sur deux, et l'élévation des enzymes musculaires dans 75 à 85 % des cas. Il n'y a pas d'auto-anticorps parfaitement spécifiques. L'élément diagnostique essentiel est la biopsie musculaire, qui montre la présence de zones de nécroses des fibres musculaires, de foyers de régénération, et d'infiltrats inflammatoires de cellules mononucléées. Enfin, 15 à 20 % des myosites, et plus particulièrement des DM, sont associées à la présence d'un cancer, justifiant sa recherche exhaustive lors du diagnostic.
Les manifestations cardiaques sont cliniquement rares au cours des PM et DM. Elles font partie de la description initiale d'Oppenheim. Elles touchent 3 à 6 % des patients [ 10], [14 ]. Lorsque l'on emploie des méthodes d'examens sophistiquées, ce pourcentage peut atteindre 100 %, avec une expression clinique une fois sur trois (dyspnée, palpitations, douleurs thoraciques) [ 4 ]. Cette atteinte représente un facteur de gravité de la maladie, puisqu'elle peut être à l'origine du décès [ 46 ]. Elle est parfois sévère et inaugurale [ 96 ]. Il n'y a pas de parallélisme avec l'atteinte musculaire squelettique. Il n'est pas possible d'évoquer une atteinte cardiaque spécifique sur le dosage isolé de la fraction MB des créatine phosphokinases (CPK), car elle s'élève spontanément au cours de toute régénération musculaire. Au cours d'une étude échographique prospective concernant 26 patients, 40 % avaient des anomalies (épanchement péricardique, cardiomyopathie dilatée, hypertrophie septale, prolapsus mitral). La fonction diastolique était normale chez sept patients en phase chronique [ 105 ].

Les péricardites sont rares, absentes de deux séries autopsiques (24 sur 46, essentiellement aiguës, exceptionnellement compliquées de tamponnade ou constrictives [ 104 ]. Une péricardite purulente peut survenir sur ce terrain immunodéprimé par la thérapeutique.

L'insuffisance cardiaque congestive est rare [ 10 ] au cours des études cliniques, mais ses lésions sont logiquement plus fréquentes lors des travaux autopsiques où elles peuvent concerner jusqu'à 45 % des patients [ 24 ]. Elle peut être à l'origine du décès [ 68 ]. L'étude anatomopathologique réalisée lors de nécropsie ou de biopsies endomyocardiques montre alors des infiltrats de cellules mononucléées, une fibrose localisée, des zones de nécrose et des myocytes dégénérés [ 24], [46 ]. Ces anomalies histologiques peuvent être présentes en dehors de toute symptomatologie d'insuffisance cardiaque [ 24 ].

La fréquence du prolapsus valvulaire mitral n'a été notée que dans une étude, et n'a pas été confirmée [ 37 ]. Il n'y a pas d'atteinte spécifique de l'endocarde. En présence d'une valvulopathie emboligène, l'association des PM et DM à un cancer dans 15 à 20 % des cas doit faire évoquer le diagnostic d'endocardite marastique.

Les plus fréquentes des anomalies cardiaques des PM et DM sont électriques, et n'ont pas forcément de traduction clinique. Elles concernent jusqu'à 70 à 80 % des patients [ 24], [105 ], et tous les troubles du rythme ou de la conduction sont possibles, associés à des anomalies de la repolarisation et éventuellement des signes d'hypertrophie ventriculaire droite ou gauche. La pratique systématique du holter permet de retrouver des troubles du rythme dans 73 % des cas au cours d'une étude prospective [ 105 ]. L'existence d'anomalies électriques semble conditionner la survenue d'une atteinte clinique [ 14 ]. La symptomatologie correspondante comporte des palpitations et des syncopes. La mise en place d'un stimulateur cardiaque peut être discutée, car ces troubles peuvent être sensibles à la thérapeutique, mais aussi être corticodépendants ou corticorésistants et exposent à un risque de mort subite par bloc auriculoventriculaire [ 14 ]. Leur localisation est plutôt infrahissienne. Les études histologiques montrent des lésions fibreuses des voies de conduction, avec ou sans infiltration lymphocytaire [ 46 ].

L'atteinte coronaire peut exister en dehors de toute corticothérapie [ 34 ], avec des aspects électriques de pseudonécrose, qui peuvent être aussi évocateurs d'une microangiopathie conduisant par la suite à une sclérose interstitielle diffuse et une myocardiopathie [ 68 ]. Les lésions peuvent comporter par ailleurs une prolifération de la média et de l'intima ou une sclérose vasculaire [ 24], [46 ].

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Dès la première description de Küssmaul et Maier en 1866, l'existence d'une atteinte cardiaque a été signalée au cours de la PAN, sous la forme d'une coronarite nodulaire. Cette angéite nécrosante évoluant par poussées est caractérisée par la gravité de son pronostic spontané, et comporte, comme toutes les affections appartenant à ce groupe nosologique, une lésion aiguë segmentaire entraînant une réaction inflammatoire secondaire évoluant en plusieurs stades. Celle-ci touche les artères musculaires de petit et moyen calibre (500 m de diamètre). La lésion initiale associe une nécrose fibrinoïde prédominant dans la média, et un granulome inflammatoire polymorphe infiltrant toute la paroi. Elle peut se compliquer d'une thrombose par le biais de modifications intimales associées. Des microanévrysmes se constituent, conséquence des nécroses pariétales localisées. La cicatrisation se fait par le biais d'une disparition des zones nécrotiques, et d'une évolution de granulome vers la fibrose aspécifique, pérennisant les destructions et thromboses déjà constituées. Le nombre et le siège des lésions sont très variables, et expliquent le polymorphisme clinique de la maladie. Tous les organes peuvent être atteints, le plus souvent en association à une altération importante de l'état général et à une fièvre. L'atteinte pulmonaire est exceptionnellement documentée. Les plus souvent touchés sont les nerfs périphériques, les articulations, le muscle, le coeur, le rein et la peau. Le diagnostic est fait grâce à la biopsie musculaire, et en l'absence de preuve histologique, devant la présence de microanévrysmes lors d'une artériographie, ou en fonction d'un certain nombre de critères cliniques. Aucune manifestation biologique n'est spécifique, le syndrome inflammatoire est pratiquement constant, avec dans un cas sur deux une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles. L'antigène HbS est présent chez 10 à 40 % des patients. La recherche d'anticorps anticytoplasme de polynucléaires neutrophiles (ANCA) est positive dans 11 % des PAN liées au virus B et 27 % des autres formes. Ces autoanticorps, décrits pour la première fois en 1982, ont une spécificité très élevée (de 94 à 99 %) pour le groupe des vascularites nécrosantes systémiques et/ou des glomérulonéphrites rapidement nécrosantes pauci-immunes.
L'atteinte cardiaque concerne essentiellement le myocarde, de façon directe par le biais des artérioles coronaires, ou indirectement par celui de l'hypertension artérielle, qui touche un tiers des patients [ 40 ]. L'atteinte péricardique est secondaire, et les manifestations endocardiques sont exceptionnelles. Ces dernières doivent faire avant tout remettre en cause le diagnostic, et discuter ceux d'endocardite marastique, d'endocardite bactérienne ou de myxomes [ 87 ]. L'existence d'un souffle est notée dans un quart à deux tiers des cas selon les études, ceux-ci ne correspondant pas à une atteinte valvulaire organique [ 49 ]. Il existe toutefois d'exceptionnelles observations de lésions valvulaires documentées spécifiques [ 62 ].

La fréquence clinique, électrique (fig 9) ou radiographique des anomalies cardiaques varie de 10 % [ 31 ] à 40 % [ 7 ], alors qu'elle atteint près de 80 % lors des études histologiques autopsiques [ 49 ]. Au cours d'une série de 54 patients [ 7 ], l'anomalie clinique la plus fréquente était la tachycardie, précédant parfois de plusieurs mois les autres signes de la maladie, et peu sensible au traitement bêtabloqueur ou digitalique. Tous les patients concernés avaient au moins un signe d'atteinte myocardique. L'insuffisance cardiaque venait en seconde position (28 % de tous les patients), gauche ou globale, exceptionnellement droite, l'insuffisance cardiaque gauche le plus souvent considérée comme spécifique de la PAN, s'inscrivant dans le cadre d'une maladie pluriviscérale classique. Moins d'une fois sur deux elle était liée (au moins en partie) à une hypertension artérielle ou une atteinte rénale. Le mécanisme de l'atteinte spécifique est attribué essentiellement à une origine vasculaire, en dépit de la faible expression clinique angineuse. La fréquence des infarctus était de 62 % au cours d'une série autopsique [ 49 ]. Les douleurs thoraciques d'angor sont très rarement rapportées, mais on a décrit des PAN se présentant comme des infarctus du myocarde récurrents [ 79 ]. Les lésions peuvent alors comporter soit une atteinte des gros troncs coronaires, comme dans l'observation princeps [ 49 ], soit des lésions artériolaires entraînant des nécroses focales petites et disséminées.

Les données histologiques proviennent essentiellement des autopsies, mais peuvent aussi être obtenues par biopsie endomyocardique [ 102 ]. Les résultats des études varient selon la date de leur réalisation : avant ou après l'introduction des corticoïdes et des immunosuppresseurs dans la thérapeutique. La maladie était initialement constamment mortelle, et des lésions de vascularite active étaient alors retrouvées. Celles-ci s'éteignent très rapidement après l'introduction du traitement, laissant place à des lésions refroidies comportant une fibrose intimale importante entraînant une occlusion complète des vaisseaux avec infarcissement secondaire. Pour certains auteurs, les constatations histologiques ne sont pas différentes avant et après l'ère de la corticothérapie [ 98 ]. Sur une série de 36 patients, la moitié avaient des lésions coronaires. Les lésions les plus sévères touchaient les petits vaisseaux sous-épicardiques plus que les artères intramyocardiques profondes. Parmi ceux ayant l'atteinte la plus grave, 40 % avait une myocardite interstitielle diffuse modérée. Une fibrose microscopique périvasculaire était présente chez 21 patients. Une péricardite fibrineuse était retrouvée dans 19 % des cas (les patients avaient tous sauf un une atteinte rénale), alors que des lésions péricardiques fibreuses existaient chez 8 % des patients.

L'atteinte cardiaque constitue 12 % des causes de mortalité dans une série de 165 patients [ 19 ], par le biais essentiellement de l'insuffisance cardiaque terminale, plus rarement d'infarctus du myocarde ou de troubles du rythme. Les causes cardiovasculaires sont au deuxième rang, après les décès d'origine infectieuse. Une part d'entre elles est imputée aux conséquences du traitement stéroïde, moins par le biais d'une athérosclérose accélérée que par celui de la constitution de lésions scléreuses empêchant en partie le développement d'une circulation collatérale. La cardiomyopathie fait partie des cinq facteurs pronostiques péjoratifs isolés dans une série prospective de 342 patients ayant une PAN ou une maladie de Churg et Strauss [ 41 ].

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L'angéite granulomateuse de Churg et Strauss se distingue de la PAN par l'existence de lésions segmentaires artérielles et veineuses de petit calibre, avec un infiltrat pariétal et périvasculaire riche en polynucléaires éosinophiles, et par son tropisme pulmonaire. Sa symptomatologie comporte un asthme grave, une hyperéosinophilie sanguine (supérieure à 1 000/mm3) et tissulaire (qui constitue elle-même des lésions extravasculaires, comprenant des éosinophiles et des granulomes épithélioïdes et à cellules géantes), et des atteintes viscérales très proches de celles de la PAN. L'atteinte des vaisseaux pulmonaires est constante. Des ANCA sont présents dans environ deux tiers des cas. Une élévation des IgE sériques est notée chez 75 % des patients. Les signes systémiques de l'affection surviennent environ 3 ans après le début d'une maladie asthmatique.
L'atteinte cardiaque est une cause importante de morbidité et de mortalité. Elle concerne environ 50 % des patients, et fait partie des facteurs de gravité, comme au cours de la PAN [ 41 ]. Elle comporte essentiellement des épanchements péricardiques, des myocardites sévères, et dans 50 % des cas des anomalies électrocardiographiques [ 58 ]. Dans une revue de la littérature rassemblant 10 patients, une atteinte péricardique était présente six fois, myocardique neuf fois, avec un décès lié à une insuffisance cardiaque congestive [ 44 ]. Ces auteurs rapportent eux-mêmes une observation de tamponnade avec cardiomyopathie biventriculaire, et amélioration spectaculaire sous corticothérapie. L'insuffisance cardiaque gauche s'observe dans 25 à 85 % des cas. L'atteinte myocardique peut être globale ou segmentaire [ 21 ]. Elle peut être autonome, ou la conséquence de nécroses par le biais d'une artérite touchant les petites artères intramyocardiques. L'étude échocardiographique montre une hyperéchogénicité myocardique intéressant le septum et la paroi postérieure. Le doppler cardiaque met en évidence une insuffisance mitrale dans 50 % des cas, en rapport avec une fibrose des muscles papillaires. Le ventricule gauche peut être dilaté, avec une baisse de la fraction de raccourcissement et une hypokinésie globale en l'absence d'atteinte valvulaire significative [ 21 ].
Les données histologiques comportent des péricardites fibreuses et fibrineuses, des granulomes nécrosants extravasculaires myocardiques, des infiltrats inflammatoires myocardiques à éosinophiles avec nécrose cellulaire, des thrombus endomyocardiques et intracavitaires, ainsi qu'une vascularite coronarienne, alors que la survenue clinique d'infarctus du myocarde est exceptionnelle. La ponction du liquide péricardique peut ramener un liquide avec des cellules inflammatoires en quantité variable, avec ou sans éosinophiles.

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La polyarthrite rhumatoïde est une maladie touchant essentiellement la femme, caractérisée par la survenue d'arthrites chroniques destructrices aboutissant à des déformations caractéristiques invalidantes. Aux atteintes articulaires peuvent s'associer des lésions extra-articulaires touchant essentiellement la peau (nodosités sous-cutanées), les organes hématopoïétiques (syndrome de Felty), le poumon, l'appareil neuromusculaire, l'oeil ou le coeur. La maladie peut enfin se compliquer d'une vascularite et d'une amylose.
L'atteinte cardiaque concerne cliniquement 2 à 10 % des patients, et 30 à 50 % lors des études échocardiographiques ou anatomiques [ 75 ]. Elle est dominée par la péricardite rhumatoïde, décrite par Charcot dès 1881. Les nodules rhumatoïdes sont eux-mêmes à l'origine d'une atteinte spécifique de la maladie.

Elle concerne cliniquement environ 1 % des patients, alors qu'au cours des études échocardiographiques et autopsiques, elle est retrouvée dans 30 à 50 % des cas [ 53 ]. Dans une série de 41 observations colligées à la Mayo Clinic [ 43 ], il s'agissait dans trois quarts des cas de formes aiguës, beaucoup plus rarement récidivantes, chroniques ou constrictives, touchant autant les hommes que les femmes. Cet équilibre est probablement lié à la plus grande fréquence de formes avec atteinte extra-articulaire masculines. Elle survient le plus souvent au cours de polyarthrites rhumatoïdes séropositives évoluant depuis de nombreuses années, associées à d'autres atteintes extra-articulaires telles que les nodules sous-cutanés, les lésions oculaires, ou les vascularites [ 53 ]. Elle peut parfois être découverte alors que la maladie est totalement éteinte [ 52 ], et exceptionnellement précéder l'apparition des signes articulaires.
La symptomatologie clinique est sans particularité. La survenue d'une constriction ou d'une tamponnade est rare, mais caractéristique de la polyarthrite rhumatoïde au sein des collagénoses [ 26 ]. Le liquide péricardique est inflammatoire, de formule mixte, riche en fibrine, avec un taux de complément abaissé par rapport au taux sérique, et la présence de facteurs rhumatoïdes [ 53 ].
Il n'y a pas d'attitude thérapeutique propre définie. Le traitement comporte trois volets : celui de l'affection rhumatismale elle-même (reposant le plus souvent sur les corticoïdes, les AINS, parfois sur les immunosuppresseurs), associé éventuellement à un traitement symptomatique à visée cardiaque, et à des gestes de décompression en cas d'urgence ou de mauvaise tolérance : péricardocentèse, péricardectomie. Les péricardites constrictives constituent une indication opératoire formelle. L'injection intrapéricardique de corticoïdes a été proposée [ 53 ] lors de ponctions péricardiques évacuatrices pour tamponnade.

Les atteintes valvulaires sont relativement fréquentes échographiquement [ 106 ], mais n'ont qu'inconstamment une traduction clinique. Elles touchent par ordre de fréquence décroissante les valves mitrales, aortiques, tricuspides et pulmonaires [ 93 ], et peuvent concerner une ou plusieurs valves. Les lésions cliniquement décelables sont les insuffisances et les rétrécissements aortiques ou mitraux. Leur aspect échocardiographique et macroscopique est peu différent de celui du rhumatisme articulaire aigu. L'insuffisance aortique est la plus préoccupante, comportant un risque de décompensation avec mauvaise tolérance hémodynamique nécessitant le remplacement chirurgical en urgence [ 6], [76 ]. L'étude anatomopathologique des valves peut mettre en évidence deux types d'aspects histologiques. Le premier, majoritaire, est aspécifique et comporte une fibrose associée à des infiltrats inflammatoires chroniques, avec un épaississement des valves. Le second est celui de nodules rhumatoïdes d'histologie typique, avec des plages de nécrose fibrinoïde et une infiltration inflammatoire périnécrotique composée de lymphocytes, d'histiocytes, et de polynucléaires. La nécrose complète d'un nodule valvulaire peut entraîner sa fistulisation et une incompétence valvulaire aiguë avec insuffisance cardiaque [ 6 ].

Les nodules rhumatoïdes peuvent eux aussi être responsables d'une atteinte cardiaque spécifique dont l'expression varie en fonction de l'importance des lésions. Ils ont été localisés dans le péricarde (fig 10), l'épicarde, le myocarde, l'endocarde, l'oreillette, le septum, les anneaux et les feuillets valvulaires [ 11 ]. Ils infiltrent parfois les tissus de façon microscopique, mais peuvent aussi atteindre la taille des nodules sous-cutanés. Ils peuvent alors se présenter sous la forme de masses auriculaires [ 103 ], dont le diagnostic différentiel est celui d'un hématome, d'une tumeur, d'un corps étranger, d'un abcès ou d'une variante anatomique. Ils sont parfois responsables du décès, lorsqu'ils entraînent des troubles du rythme ou de la conduction par le biais d'une infiltration du tissu nodal [ 1], [16 ]. Ils pourraient aussi être à l'origine de dysfonctions et d'arythmies ventriculaires sévères secondaires aux altérations pariétales [ 16 ]. Le traitement par le méthotrexate à faibles doses a été rendu responsable d'une accélération de la croissance des nodules rhumatoïdes, et pourrait donc avoir un effet délétère sur l'atteinte cardiaque [ 56 ].


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Le syndrome de Gougerot-Sjögren est défini par l'association d'un syndrome sec oculaire et buccal à la présence d'auto-anticorps anti-SSA et anti-SSB et de lésions histologiques évocatrices. Il peut être primitif et isolé, ou secondaire et associé à une connectivite bien définie. Il est plus fréquent chez les femmes et survient de façon prédominante autour de la ménopause [ 9 ]. L'infiltrat lymphoplasmocytaire responsable du tarissement des sécrétions peut concerner l'ensemble des glandes exocrines, et se compliquer de la survenue d'un véritable syndrome lymphoprolifératif. Plusieurs maladies auto-immunes peuvent y être associées, tout particulièrement thyroïdiennes ou hépatiques.
L'atteinte cardiaque autonome est extrêmement rare au cours du syndrome de Gougerot-Sjögren primitif, mais elle peut être liée aux connectivites éventuellement associées. La transmission par la mère d'anticorps anti-SSA aux foetus au cours de la grossesse est susceptible d'être à l'origine de blocs auriculoventriculaires congénitaux. La localisation de l'antigène SSA dans le tissu de conduction du foetus a été déterminée [ 25 ]. Le risque de survenue d'un tel accident est 500 fois plus important que dans la population générale pour certains auteurs [ 73 ].
En revanche, un bloc auriculoventriculaire complet a été exceptionnellement rapporté chez les adultes atteints de syndrome de Gougerot-Sjögren primitif [ 64 ]. La cause de la résistance relative du tissu de conduction adulte aux anticorps anti-Ro n'est pas connue. Une étude échocardiographique prospective effectuée chez 64 patients et 21 sujets contrôles [ 42 ] a montré les anomalies suivantes : il existait une seule péricardite aiguë, et un aspect de péricarde anormalement échogène chez 21 patients. Cette anomalie a été rapportée à la survenue antérieure d'une péricardite asymptomatique. La fonction systolique ventriculaire gauche était la même chez les patients et le groupe contrôle alors que la fonction diastolique était altérée chez 21 de 42 patients chez lesquels elle a pu être évaluée. Il n'y avait pas de corrélation entre ces altérations, l'existence d'une anomalie péricardique et les données biologiques, mise à part une plus grande fréquence d'anticorps anti-SSB positifs chez les patients ayant une dysfonction diastolique ventriculaire gauche. L'incidence pronostique de ces anomalies n'est actuellement pas connue.

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La granulomatose de Wegener est une angéite nécrosante rare dont la description-titre date de 1936. Elle se caractérise par un tropisme pour les voies aériennes supérieures, le poumon et le rein, et des lésions associant une vascularite nécrosante et un granulome lymphoplasmocytaire et à cellules géantes. La mise en évidence d'ANCA de type c dans le sérum des patients suspects de cette pathologie constitue un argument d'orientation important dans la démarche diagnostique. Le pronostic spontanément mortel a été transformé par le traitement immunosuppresseur associant cyclophosphamide et corticoïdes.
La fréquence de l'atteinte cardiaque varie selon les séries de 6 % [ 47 ] à 44 % [ 89 ], les taux les plus élevés correspondant aux patients les plus graves ou aux données autopsiques. Elle se présente le plus souvent sous la forme d'une péricardite (50 %), d'une artérite coronaire (50 %) avec infarctus du myocarde dans 11 % des cas, d'une myocardite (25 %), d'une atteinte endocardique ou valvulaire (21 %), avec des troubles du rythme et de la conduction dans 17 % des cas [ 30 ].
Les péricardites surviennent de façon isolée ou associées à d'autres atteintes, et peuvent parfois être découvertes lors des autopsies. Elles se compliquent parfois de tamponnade ou de constriction. Dans de rares cas, elles sont liées à l'insuffisance rénale terminale [ 36 ].
Les myocardites peuvent être à l'origine d'une insuffisance cardiaque ou entraîner une myocardiopathie. Elles peuvent s'accompagner de troubles du rythme et d'aspect de masse intraventriculaire [ 36 ].
Les troubles de la conduction sont la conséquence des lésions des artères nourricières des tissus de conduction ou d'une localisation du granulome. Il peuvent être de tous types, jusqu'au bloc auriculoventriculaire complet, et ne sont pas toujours régressifs sous traitement, nécessitant alors l'appareillage [ 38 ]. Les troubles du rythme comportent des fibrillations, des tachycardies et des flutters auriculaires, ainsi que des tachycardies ventriculaires liées à l'ischémie, la dilatation ou les masses ventriculaires [ 36 ].
L'artérite coronaire peut être à l'origine de sténoses, d'infarctus du myocarde parfois silencieux [ 83 ] et de décès.
Les atteintes valvulaires sont primitives ou secondaires aux dilatations ventriculaires ou aortiques. Lorsqu'elles s'accompagnent de signes généraux, elles peuvent prendre le masque d'endocardites bactériennes à hémocultures négatives, bien sûr non contrôlées par l'antibiothérapie [ 36], [38 ].

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C'est une pathologie inflammatoire rare d'étiologie inconnue touchant prioritairement les cartilages des oreilles, du nez, et de l'arbre trachéal et bronchique [ 66 ]. L'existence d'atteintes viscérales et de structures non cartilagineuses lui confère le statut de maladie systémique. Elle touche autant les femmes que les hommes, avec un âge moyen de début de 44,6 ans. Les symptômes les plus fréquents sont les chondrites, élément nécessaire du diagnostic, les atteintes articulaires et oculaires. L'atrophie cartilagineuse progressive donne aux patients un faciès de boxeur, avec un nez déformé en " pied de marmite " par effondrement de la cloison nasale. La première cause de décès est l'atteinte laryngée et trachéobronchique. Les lésions cardiovasculaires sont présentes chez 25 % des patients [ 70 ], et sont la seconde cause de décès, en particulier par le biais de la rupture d'anévrysmes aortiques. Les anomalies cardiaques les plus fréquentes sont les valvulopathies, dont le risque évolutif prédominant est l'insuffisance cardiaque. Les autres atteintes comportent les troubles du rythme et de la conduction, et plus rarement des myocardites et des péricardites.
Dans une revue de la littérature colligeant 426 observations [ 71 ], les auteurs rapportent 16 % d'atteintes cardiaques, parmi lesquelles une localisation valvulaire dans 60 % des cas, des troubles de la conduction dans 26 % des cas, du rythme dans 7 % des cas, une atteinte myocardique dans 14 % des cas, et une péricardite dans 22 % des cas. Le délai moyen d'apparition est de 6 ans après le début de la maladie.
Les péricardites n'ont pas de caractère spécifique, et les myocardites correspondent à une fibrose interstitielle parfois associée à une hypertrophie des fibres myocardiques.
Les troubles du rythme touchent l'étage auriculaire, sous forme de tachycardie sinusale, d'arythmie complète par fibrillation auriculaire ou de flutter. Les troubles de la conduction comportent des blocs auriculoventriculaires de degrés variables, parfois associés à une insuffisance aortique, mais parfois autonome. Il existe alors des infiltrats inflammatoires du faisceau de His à l'étude histologique [ 71 ].
Les lésions valvulaires concernent en premier lieu la valve aortique, sous la forme d'une fuite liée essentiellement à la dilatation de l'anneau aortique, moins souvent à des lésions propres des valves qui peuvent être elles-mêmes isolées. La valve mitrale peut elle aussi être touchée, l'insuffisance mitrale étant elle aussi secondaire à la fois à la dilatation de l'anneau et aux altérations dystrophiques progressives. L'atteinte tricuspidienne est exceptionnelle, et jamais isolée. L'étude anatomopathologique de ces valves met en évidence une dégénérescence myxoïde, une sclérose et une destruction de l'armature élastique [ 71], [107 ]. L'évolution de ces valvulopathies se fait vers l'insuffisance cardiaque.
Outre le traitement comportant une corticothérapie, la dapsone, et éventuellement le recours à d'autres immunosuppresseurs dans les formes sévères, les atteintes valvulaires peuvent faire l'objet d'une chirurgie de remplacement. Les risques spécifiques sont liés à la fragilité des sutures secondaire à la corticothérapie antérieure et aux lésions propres de la pathologie, et comportent un risque de désinsertion secondaire.

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L'existence de connectivites intriquées difficilement classables, comportant des caractéristiques cliniques et/ou biologiques appartenant à plusieurs pathologies différentes a fait proposer à Sharp la création d'une nouvelle appellation, celle de mixed connective tissue disease (MCTD) [ 99 ]. Les signes cliniques appartiennent au LES, à la sclérodermie, aux DM et à la polyarthrite rhumatoïde. Il existe des autoanticorps particuliers à taux élevés dirigés contre un antigène de nature ribonucléoprotéique du noyau (anticorps anti-RNP).
La survenue d'une péricardite fait partie des critères diagnostiques mineurs de la MCTD proposés par Sharp en 1986. L'atteinte cardiaque ne concerne que le myocarde ou le péricarde. Il n'existe pas d'atteinte valvulaire spécifique.
Une péricardite aiguë est survenue chez 16 % des patients de Sharp [ 99 ] et chez 25 % de ceux de Oetgen [ 80 ]. Dans cette série de 16 patients, 38 % avaient une anomalie cardiaque clinique ou paraclinique, la plus fréquente étant une péricardite, suivie par une hypertrophie septale asymétrique et une dilatation ventriculaire gauche. L'échographie montrait un épanchement et/ou un épaississement péricardique. La survenue d'une tamponnade ou d'une péricardite purulente est signalée, mais exceptionnelle. Les autres atteintes comprenaient des anomalies auscultatoires, une cardiomyopathie, des troubles du rythme et de la conduction. Cette fréquence clinique est inférieure à celle des anomalies histologiques observées lors des études autopsiques : sur huit patients décédés (dont trois de cause cardiaque) ayant un syndrome de Sharp, sept avaient des anomalies histologiques à type de fibrose, infarctus et artérite [ 80 ]. Les myocardites n'ont pas de mode de présentation particulier, et sont parfois la cause du décès du patient [ 63 ]. Des troubles du rythme et de la conduction allant jusqu'au bloc auriculoventriculaire sont possibles, ainsi que celle d'un bloc auriculaire complet chez l'enfant d'une mère ayant une connectivite mixte [ 91 ]. L'étude anatomopathologique d'un patient ayant eu un bloc auriculoventriculaire, mais décédé d'une embolie pulmonaire, a montré la présence de lésions fibroélastosiques diffuses mais modérées du noeud sinusal dans un coeur aux cavités hypertrophiées et dilatées comportant des foyers d'infiltration lymphoplasmocytaire et une fibrose interstitielle [ 92 ].

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Le traitement des maladies systémiques repose sur l'emploi isolé ou en association de différentes classes pharmacologiques, et des échanges plasmatiques. Les différentes substances utilisées sont les AINS, la colchicine, les corticoïdes, les antipaludéens de synthèse, les dérivés de l'or et les dérivés thiolés, l'interféron gamma (pour la sclérodermie), les immunosuppresseurs (comprenant le cyclophosphamide, l'azathioprine, le méthotrexate, le chlorambucil et la ciclosporine), ainsi que les Ig à fortes doses par voie intraveineuse. Les analogues stables de la prostacycline sont par ailleurs utilisés au cours du traitement du syndrome de Raynaud sévère et des ischémies distales. Les stratégies utilisées ne sont pas l'objet de ce texte. Les principaux effets secondaires cardiaques seront cités pour mémoire sans être détaillés [ 39 ].
L'emploi des AINS et des dérivés de l'or ou thiolés n'expose pas à des complications cardiologiques, en dehors des cardiomyopathies d'hypersensibilité secondaires à l'indométacine. Ces lésions peuvent aussi être observées au décours de la prise de colchicine [ 90 ]. Il faut bien sûr avoir à l'esprit la possibilité rare d'induction de syndromes auto-immuns comportant eux-mêmes une composante cardiaque (lupus, polymyosite, Gougerot-Sjögren...) au cours des traitements par les dérivés thiolés. Les corticoïdes ont une action sur le métabolisme lipidique entraînant une hypertriglycéridémie, qui peut s'associer à l'hypertension artérielle et aux anomalies glucidiques secondaires au même traitement pour favoriser une athérosclérose précoce entraînant un pic de mortalité retardé chez des patients traités au long cours par la corticothérapie. L'administration des glucocorticoïdes à fortes doses par voie veineuse (bolus) a été exceptionnellement à l'origine de troubles du rythme cardiaque, d'infarctus, voire de mort subite, sans doute par le biais de troubles ioniques préexistants non corrigés. Les antipaludéens de synthèse exposent à des complications tardives rares et potentiellement graves, avec la survenue de bloc auriculoventriculaire (fig 2) et de myocardite toxique [ 90 ]. L'interféron gamma peut avoir des effets secondaires cardiaques tels que la tachycardie, et de façon discutée, est incriminé dans la survenue de péricardites, myocardites, troubles du rythme et nécrose myocardique, mais chez des patients ayant des facteurs de risque préexistants [ 39 ].
Parmi les immunosuppresseurs, le cyclophosphamide peut être responsable de myocardite toxique [ 90 ], et son administration par voie intraveineuse à forte dose comporte des risques de survenue d'oedème aigu du poumon par le biais de l'hyperhydratation nécessaire à la limitation de ses effets sur la vessie. L'azathioprine, le méthotrexate, le chlorambucil et la ciclosporine n'ont pas de conséquences délétères sur le coeur. Les Ig intraveineuses à forte dose ont été exceptionnellement responsables d'infarctus du myocarde par le biais de l'hyperviscosité qu'elles entraînent. Les échanges plasmatiques sont à l'origine de complications cardiovasculaires dont certaines peuvent entraîner le décès des patients : troubles du rythme, oedèmes aigus du poumon, défaillance cardiocirculatoire, insuffisance coronaire. Ces effets sont liés aux modifications hémodynamiques induites par la technique, et sont potentiellement évitables par le biais de la sélection préalable rigoureuse des patients. Enfin, les dérivés de la prostacycline utilisés par voie intraveineuse peuvent être à l'origine de troubles du rythme cardiaque (tachycardie, arythmie, extrasystoles).

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