Angioplastie Facteurs de croissance Prolifération des cellules musculaires lisses et resténose




Ludovic Drouet: Professeur des Universités, chef de service, laboratoire d'hématologie
hôpital Lariboisière, 2, rue Ambroise-Paré, 75010 Paris France
11-918-A-10 (1995)



Résumé

L'angioplastie coronaire transluminale est largement utilisée dans le traitement des lésions significatives des coronaires puisque plus de 300 000 angioplasties sont réalisées tous les ans, uniquement aux États-Unis. En dépit d'un succès initial d'environ 90 % de dilatation, plus de 30 % vont voir leur bénéfice disparaître dans l'année par resténose. De très nombreux essais cliniques ont essayé de limiter cette resténose par utilisation de toutes les drogues actuellement disponibles et pouvant avoir un effet, qu'il s'agisse des nitrates, des bêtabloqueurs, des inhibiteurs de canaux calciques, des antiplaquettaires, des anticoagulants, des inhibiteurs de l'enzyme de conversion [ 48], [49 ]. Ces études suggèrent que tant que l'on ne connaîtra pas exactement les événements cellulaires et moléculaires qui sous-tendent la resténose, on n'aura pas de possibilité d'efficacité.

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Plan

Etat actuel des travaux
Implications thérapeutiques




Une grande variété de mécanismes a été impliquée dans le développement de la resténose survenant après angioplastie. Les plus importants sont la formation d'un thrombus mural, le " recoil " élastique et surtout une prolifération hyperplasique intimale [ 36 ]. La thrombose aiguë survient dans les minutes ou heures qui suivent l'angioplastie ; elle ne peut être prise en compte que pour un petit pourcentage de resténose, elle est probablement minimisée par les traitements antiplaquettaire et anticoagulant. Le " recoil " élastique est un problème beaucoup plus significatif et sa prévention a généré des attitudes thérapeutiques spécifiques. La discussion est centrée sur l'hyperplasie intimale, présentée comme l'événement clé de la resténose postangioplastie comme d'ailleurs un événement cellulaire capital participant à la progression des lésions chroniques d'athérosclérose. Le développement de l'hyperplasie intimale suivant la lésion du vaisseau et la resténose qui s'ensuit sont un phénomène complexe survenant en plusieurs phases [ 6], [52 ]. Les 48 premières heures sont caractérisées par une réponse inflammatoire incluant le recrutement de leucocytes au site de lésion et le développement d'un thrombus essentiellement plaquettaire. La deuxième phase commence vers la 24-48e heure après l'angioplastie et est caractérisée par la prolifération de cellules musculaires lisses dans la média du vaisseau, de la migration de ces cellules vers l'intima et de leur prolifération continue. Les stimuli de la migration et de la prolifération des cellules musculaires lisses pourraient donc être des facteurs de croissance et des cytokines provenant des plaquettes du thrombus, des leucocytes recrutés localement au site de lésion et des cellules de la paroi elle-même lésée ou stimulée pendant le processus d'angioplastie.
La troisième phase commence quelques jours après et persiste pendant quelques mois après l'angioplastie. Elle se caractérise essentiellement par la sécrétion d'une matrice extracellulaire par les cellules musculaires lisses ayant migré et proliféré, réalisant une néo-intima et entraînant une expansion globale de la lésion. Il est loin d'être établi si la régénération d'un endothélium sur cette néo-intima pourrait limiter la migration et la prolifération des cellules musculaires lisses et atténuer la sécrétion de matrices extracellulaires par ces cellules. Les nouvelles modalités de prévention de la resténose partent de la mise en évidence des facteurs cellulaires et moléculaires associés au développement de cette hyperplasie intimale. Et parmi les questions que l'on se pose le plus volontiers, les deux premières sont :

- quels sont ces facteurs (facteurs de croissance, agents vasoconstricteurs, cytokines...) responsables de cette stimulation des cellules musculaires lisses conduisant à leur migration et à leur prolifération ?
- quels sont les programmes génétiques activés par ces facteurs dans les cellules musculaires lisses ?
De nombreux agents intervenant dans la régulation et la prolifération des cellules musculaires lisses sont mis en évidence dans les modèles expérimentaux de lésion vasculaire par sonde à ballonnet gonflable [ 6], [16], [24], [34], [38], [49], [52 ]. Ces facteurs comprennent le " platelets derived growth factor " (PDGF), le " basic Fibroblast Growth Factor " (bFGF), le " Transforming Growth Factor beta " (TGF), l'angiotensine II, l'alphathrombine. Le PDGF, isolé à partir des granules alpha-plaquettaires a été originellement présenté comme étant le mitogène nécessaire pour la prolifération des cellules musculaires lisses après lésion pariétale [ 53 ]. C'est un puissant mitogène pour beaucoup de cellules in vitro, mais différents laboratoires ont plus récemment suggéré qu'il ne jouait pas un rôle clé dans la prolifération des cellules musculaires lisses in vivo [ 11], [15 ]. L'exemple typique est donné par les rats rendus thrombopéniques dont la carotide est lésée par une sonde à ballonnet gonflable. Aucune plaquette n'est bien sûr présente, mais la prolifération de cellules musculaires lisses est identique à celle observée chez les animaux contrôles [ 17 ]. D'autres facteurs que les facteurs plaquettaires sont nécessaires pour stimuler la prolifération des cellules musculaires lisses et par contre l'absence de plaquettes retarde la migration des cellules musculaires lisses de la média vers l'intima. Le PDGF pourrait donc être un facteur de migration mais pas de prolifération des cellules lisses musculaires artérielles. La prolifération des cellules musculaires lisses est corrélée au degré de lésion pariétale stimulatrice. Les lésions expérimentales par sonde à ballonnet gonflable induisent, certes, une lésion endothéliale, mais aussi une lésion grave et profonde de la paroi artérielle des animaux [ 7], [8 ]. Si au lieu de cette lésion profonde, on induit une lésion superficielle par une boucle de fil en nylon fin, la prolifération de cellules musculaires lisses dans la média est 10 à 15 fois plus faible que celle observée après lésion par sonde à ballonnet gonflable [ 9 ]. Le signal mitogénique dans de telles conditions n'est pas clairement défini mais il pourrait s'agir de facteurs libérés par les cellules lésées. Le bFGF est un puissant facteur de prolifération pour les cellules musculaires lisses, in vitro mais n'est pas sécrété [ 1], [14], [25], [26], [54 ], car le gène du bFGF ne comporte pas le peptide signal, nécessaire à la sécrétion par les voies habituelles de la molécule. Le bFGF pourrait être libéré lors de la lésion cellulaire [ 31], [44 ]. Il n'y a pas de bFGF circulant, donc si le bFGF joue un rôle, cela ne peut être que le bFGF local. Les cellules musculaires lisses de média artérielle normale expriment le bFGF [ 46 ]. Le bFGF est mitogène pour les cellules musculaires lisses in vivo lorsqu'on en injecte par voie générale aux animaux dont la paroi vasculaire a été lésée par sonde à ballonnet gonflable : on potentialise par 4 ou 5 la prolifération des cellules musculaires lisses de la média [ 34 ]. Le bFGF libéré par lésion des cellules musculaires lisses jouerait un rôle mitogène local. Plus la lésion est grave et profonde, plus la libération de bFGF et la prolifération seraient importantes. Expérimentalement, un anticorps anti-bFGF bloque la prolifération des cellules musculaires lisses confirmant l'hypothèse que le bFGF est un mitogène clé [ 16], [35], [49 ]. Le bFGF a une forte affinité pour les matrices extracellulaires, mais il semble que dans la paroi artérielle, il soit surtout contenu en intracellulaire [ 18], [50], [51 ]. Le rôle antiproliférant de l'héparine pourrait être expliqué par une capture du bFGF libéré au cours de la lésion cellulaire. Mais plusieurs autres facteurs de croissance ont une affinité pour l'héparine, donc l'effet inhibiteur de l'héparine n'est peut-être pas univoque vis-à-vis du bFGF. Sur les cellules musculaires lisses, il existe plusieurs classes de récepteur au bFGF. Or, l'injection de bFGF en l'absence de lésions n'induit pas de prolifération de cellules musculaires lisses [ 10], [14], [34 ]. Il faudrait donc une collaboration entre les stimulants mitogéniques. Ainsi, la chaîne B du PDGF qui est faiblement mitogène potentialise fortement le bFGF [ 37 ]. La prolifération intimale des cellules musculaires lisses semble donc être un phénomène réactionnel à la lésion cellulaire nécessitant la coopération de plusieurs facteurs de croissance parmi lesquels le bFGF ne serait qu'un des participants. La relation temporelle est aussi à prendre en considération. Après lésion pariétale, les cellules musculaires lisses prolifèrent dans la média, migrent vers l'intima où elles continuent leur prolifération pendant plusieurs semaines. Les anticorps anti-bFGF bloquent la prolifération des muscles lisses dans la média, mais n'empêchent pas la prolifération dans l'intima des cellules musculaires lisses qui y ont migré [ 46 ] suggérant donc que la prolifération des cellules musculaires lisses dans l'intima utilise des mécanismes différents de la prolifération dans la média. A côté de la prolifération dans la média et dans l'intima, une étape importante est la migration de ces cellules musculaires lisses depuis la média vers l'intima. Le blocage du PDGF par les anticorps [ 16 ] ou la stimulation par injection chronique de chaîne B du PDGF [ 30 ] montrent que le PDGF est un facteur de migration des cellules musculaires lisses. Les mécanismes de migration de ces cellules musculaires lisses sont communs à toutes les migrations cellulaires (par exemple métastases cancéreuses) et correspondent à l'apparition d'une activité plasminique de membrane (à la fois activité u-PA et activité t-PA [ 5], [29 ]). Ainsi, les inhibiteurs de la fibrinolyse, tel l'acide tranexamique, réduisent la migration des cellules musculaires lisses dans l'intima de manière expérimentale [ 29 ], alors qu'ils n'inhibent pas la prolifération des cellules musculaires lisses. Les facteurs impliqués dans la prolifération et la migration des cellules musculaires lisses sont très nombreux, les attitudes thérapeutiques s'opposant à un seul de ces facteurs seront inefficaces du fait de la possibilité d'action de tous les autres agonistes présents sur le site de la lésion. Si on ne peut pas s'opposer individuellement à chacun des facteurs, on pourrait essayer de s'opposer aux mécanismes intracellulaires de transduction des signaux d'activation communs à plusieurs si ce n'est à tous les agents de prolifération. Ces mécanismes ont été étudiés dans des cellules musculaires lisses animales cultivées in vitro à partir d'artères en particulier d'aorte normale ou d'aorte stimulée par passage d'une sonde à ballonnet gonflable. L'ARNm des gènes activés soit in vitro par des facteurs de croissance en particulier du PDGF, soit in vivo par sonde à ballonnet gonflable, correspond à des gènes ubiquitaires et traducteurs de l'activation cellulaire par exemple c-fos, c-myc mais aussi à des gènes spécifiques des cellules musculaires lisses tels des facteurs chémoattractants pour les monocytes en particulier JE, KC [ 39], [56 ]. Cette expression pourrait participer à la compréhension de l'infiltration pariétale par les neutrophiles et les monocytes au cours de la resténose comme d'ailleurs au cours de l'évolution des lésions d'athérosclérose. Ceci est d'autant plus important que l'on connaît le rôle des leucocytes et, en particulier, des monocytes dans l'infiltration lipidique des lésions. Pour les mêmes stimulations, les cellules musculaires lisses expriment les facteurs chémotactiques pour les leucocytes et le facteur tissulaire [ 40 ]. Au repos l'activité facteur tissulaire est élevée dans l'adventice mais extrêmement faible dans la média. Après stimulation in vivo, l'activité facteur tissulaire reste identique dans l'adventice mais s'élève de façon importante dans la média environ 2 heures après la lésion et restera à ce taux élevé pendant au moins 48 heures. Cette expression du facteur tissulaire traduit l'activation de la coagulation à l'intérieur de la paroi vasculaire elle-même aboutissant à la génération de thrombine, dont le rôle procoagulant mais aussi activateur pour les cellules est important. Même si les gènes induits lors de l'activation de cellules musculaires lisses (comme JE, KC, facteur tissulaire) semblent jouer un rôle important d'un point de vue physiopathogénique, ils sont loin d'être les seuls. La stimulation induit l'expression de nombreux autres gènes dans les cellules musculaires lisses au voisinage des lésions pariétales. Certains de ces gènes codent pour des protéines connues par exemple l'isoforme musculaire de la lacticodéshydrogénase (LDH), la thrombospondine, l'ostéospontyne, la lysine oxydase. La LDH joue un rôle important dans le métabolisme cellulaire et dans la régulation de l'acide lactique. La thrombospondine est un cofacteur de l'agrégation plaquettaire mais elle intervient dans la prolifération cellulaire et sa production dans les cellules musculaires lisses est régulée par les facteurs de croissance. L'ostéospontyne régule la matrice osseuse, mais sa fonction dans les cellules musculaires lisses [ 20 ] de même que la fonction de la lysine oxydase sont inconnues. Il semble donc que l'ensemble de ces molécules ait un rôle dans les matrices extracellulaires et peut-être dans leur adaptation à la lésion vasculaire. D'autres gènes sont exprimés au cours de l'activation cellulaire comme le pRASM 20 qui code pour une protéine dont la fonction est totalement inconnue. Les travaux résumés ci-dessus ont essayé d'identifier le programme génétique cellulaire survenant en réponse à une lésion vasculaire. On attend de ces connaissances des stratégies thérapeutiques pour limiter la resténose (et la progression de l'athérosclérose). Plusieurs étapes thérapeutiques ont été proposées. Les voies hormonales et en particulier les corticostéroïdes qui à forte dose ont un effet inhibiteur sur les proliférations cellulaires et sur la réaction inflammatoire, ont bien entendu été essayés sur les cellules musculaires lisses où ils limitent leur prolifération et leur migration. Ils diminuent l'expression de ARNm pour JE induit par le PDGF mais ils n'influencent pas l'expression de ARNm pour KC [ 47 ]. L'inhibition du processus inflammatoire au niveau cellulaire ou moléculaire est donc une stratégie thérapeutique pour limiter la réponse vasculaire à la lésion pariétale (voire la progression de l'athérosclérose). On a évoqué la génération de thrombine à la surface et dans les parois lésées. La thrombine est un facteur de stimulation et de prolifération. Les cellules musculaires lisses stimulées dans les lésions d'angioplastie (ou dans les lésions d'athérosclérose) expriment les récepteurs à la thrombine. L'antagonisme spécifique de la génération de thrombine, de l'activité de la thrombine ou des récepteurs à la thrombose constitue donc une voie potentielle. Les premiers résultats (en particulier ceux avec l'hirudine dans l'étude EPIC) montrent qu'ils ont un certain degré d'efficacité et qu'ils pourraient donc faire partie de stratégie thérapeutique, mais les études récentes plus larges ne le confirment pas. Beaucoup de facteurs de prolifération ont un " signaling " intracellulaire commun passant par l'activation de protéine-kinases, la stimulation de phospholipases aboutissant à une mobilisation du calcium intracellulaire. L'inhibition d'un ou plusieurs de ces intermédiaires pourrait au niveau des cellules musculaires lisses inhiber la réponse mitogène à une grande variété d'agonistes. L'augmentation du calcium intracellulaire par l'utilisation d'un ionophore calcique type ionomycine induit l'expression KC du facteur tissulaire, des proto-oncogènes c-fos c-myb [ 5], [39], [56 ] ; en revanche, n'a pas d'effet sur l'expression de JE. En corollaire, l'inhibition de l'élévation intracytoplasmique de calcium bloque l'induction KC du facteur tissulaire ainsi que celle de c-fos. Ces mécanismes de " signaling " intracellulaire représentent donc un moyen potentiel d'inhiber des voies entières d'action des agents mitogènes. Le problème est que ces " signaling " intracellulaires sont peu ou pas spécifiques de la cellule musculaire lisse. Et ces blocages devraient en l'état de nos connaissances avoir énormément d'autres effets secondaires. De nombreux agents pharmacologiques qui se sont montrés efficaces à prévenir la prolifération de cellules musculaires lisses ont été inefficaces chez les grands mammifères et plus encore au cours des essais [ 43 ]. Cet échec peut être dû en grande partie à l'impossibilité de faire tolérer par les grands mammifères les très fortes doses utilisées de manière systémique chez les petits rongeurs. C'est la raison pour laquelle ont été dessinées des sondes à ballonnet perforé pour délivrer localement de fortes doses d'agents pharmacologiques pendant ou juste après l'angioplastie. Quoi qu'il en soit, les produits de recombinaison génétique ont un coût prohibitif pour les traitements chroniques et d'un point de vue pratique, il était extrêmement difficile de maintenir une délivrance locale dans les vaisseaux pendant des jours, voire des semaines. Les tentatives les plus attractives d'action pour prévenir la resténose viennent probablement des tentatives de manipulations des gènes et de leur expression dans les parois vasculaires. Les premiers ont montré qu'en utilisant des sondes oligonucléotidiques dirigées contre un gène lié au processus mitogène c-myb, on bloquait l'hyperplasie intimale suivant la lésion par sonde à ballonnet gonflable dans les carotides de rat. c-myb est un proto-oncogène qui code pour une protéine se liant à l'ADN. Il est induit par un grand nombre de facteurs de croissance et on pense qu'il joue un rôle important dans la régulation de la croissance et du développement. Le traitement de cellules musculaires lisses d'aorte de rat en culture avec des oligonucléotides antisens complémentaires de l'extrémité 5' de ARNm de c-myb prévient la synthèse de la protéine c-myb. Pour déterminer si cette approche serait efficace in vitro, la sonde antisens oligonucléotidique c-myb a été ajoutée dans une solution pluronique à la surface adventitielle du vaisseau sous forme d'un gel, constituant ainsi un réservoir. L'inhibition de l'expression de c-myb par les cellules musculaires lisses de la paroi inhibe la prévention de l'hyperplasie intimale à 2 semaines alors que les animaux traités avec une sonde sens ont virtuellement une hyperplasie intimale habituelle. A côté de l'utilisation d'oligonucléotides antisens la thérapie génique semble être une approche particulièrement adaptée, Nabel et coll. [ 45 ] les premiers ont démontré la possibilité de transfert de gènes, soit par rétrovirus, soit par lipofection dans les vaisseaux périphériques du porc. Mais, l'expression des protéines de recombinaison génétique obtenues avec cette technique [ 4], [33 ] était à un taux beaucoup trop faible pour que l'on puisse espérer que ce soit thérapeutiquement efficace. Les études in vitro [ 42 ] ont montré que grâce aux adénovirus, on pouvait obtenir in vitro un taux de transfection d'environ 100 % dans les cellules musculaires lisses de paroi vasculaire, alors qu'avec les techniques conventionnelles de transfert de gène (précipitation au phosphate de calcium, lipofection DEAE-dextran, électroporation) on obtient moins de 10 % de modifications spécifiques des cellules traitées. Des adénovirus, vecteurs de molécule recombinante, ont été utilisés dans les vaisseaux périphériques de mammifères [ 32], [57 ] en obtenant une modification des cellules endothéliales ou des cellules musculaires lisses selon qu'on les applique sur des vaisseaux intacts ou sur les vaisseaux déendothélialisés. Les études préliminaires de transfection de Lucipherase ont montré une efficacité du transfert de gène in vivo à la 4e heure avec une persistance de l'expression pendant au moins 14 jours [ 2 ]. De nombreux problèmes techniques restent encore à résoudre, par exemple, l'adénovirus, la distribution d'expression de gène transféré dans les cellules de la paroi vasculaire, la possibilité de réponse immunitaire aux adénovirus. Restera à résoudre la cible avec soit la possibilité de s'attaquer à une voie spécifiquement stimulée par un seul type de facteur de croissance, par exemple en faisant exprimer des antagonistes de récepteur ou en faisant sécréter des facteurs solubles de liaison des facteurs de croissance. Mais comme les voies d'activation ne sont probablement pas mono- mais plurifactorielles, l'opposition à des voies communes de transfert du message de prolifération semble donc la possibilité thérapeutique la plus prometteuse pour prévenir la resténose. Jusqu'à maintenant on avait tendance à réduire la resténose à une prolifération des cellules musculaires lisses et l'inhibition de la resténose à une inhibition de cette prolifération mais cela semble être une solution trop simple. Un nouveau concept émerge, celui du " modeling " ou du " remodeling " vasculaire qui vient rajouter une dimension supplémentaire à la complexité du processus de resténose [ 21], [22], [28 ]. Le processus de " remodeling " est celui par lequel le vaisseau s'adapte à la physiologie (contraintes de cisaillement à l'interface pariétale et tension de la paroi par elle-même), comme à la pathologie (par exemple la compensation dilatatrice lors de la formation des plaques). Il semble que les mesures adaptatives se fassent pour maintenir des contraintes de cisaillement et la tension pariétale a des valeurs de base. Ainsi, l'augmentation des contraintes de cisaillement induit l'augmentation du diamètre vasculaire jusqu'à ce que ces contraintes de cisaillement soient ramenées aux valeurs de base. L'augmentation du diamètre vasculaire induit les modifications de l'épaisseur pariétale par action sur la structure et la composition en tendant à s'opposer à l'augmentation de la tension pariétale [ 13], [23], [41 ]. A l'inverse, une réduction des contraintes de cisaillement en dessous des conditions de base s'accompagne d'une diminution de diamètre et correspond à des modifications de la composition pariétale en réponse à la réduction de la tension pariétale. L'intima participe à ces réactions compensatrices sous forme d'épaississement intimal tendant à réduire la lumière et à augmenter le débit quand les contraintes de cisaillement à la paroi sont réduites en dessous des valeurs de base normales [ 3], [19], [58 ] ou pour augmenter l'épaisseur pariétale, réduisant ainsi la tension pariétale lorsque les pressions ou le diamètre sont augmentés [ 41 ]. On peut donc supposer que les déformations et les ruptures pariétales induites par l'angioplastie vont entraîner des redistributions locales et focales à la fois des contraintes de cisaillement et de la tension pariétale, et induire les réactions adaptatives à la fois dans l'intima, dans la média et dans les lésions. Ces changements se traduiront comme des modifications de paroi, du diamètre et finalement des modifications globales de l'artère. Si ces modifications empêchent la contrainte pariétale et la tension pariétale d'atteindre ou de rétablir les conditions de base, la réaction proliférative intimale est supposée se poursuivre et continuer jusqu'à ce que la resténose survienne. Il faudrait donc que les conditions de base soient restaurées avant que le processus de remodeling de l'intima se traduise par une resténose et qu'ainsi, la prolifération réactionnelle soit stoppée et se stabilise avec maintien d'une lumière vasculaire perméable. Ainsi, les facteurs qui empêchent la stabilisation et le maintien d'une lumière perméable (déformabilités irréductibles dues à la présence de plaques fibreuses denses ou de calcification) de même que la persistance de faibles débits locaux (sténoses athéroscléreuses proximales ou distales) ou même réduction du débit cardiaque sont des facteurs de resténose. La prise en compte de ces mécanismes fort différents de la considération jusqu'à maintenant admise que la resténose n'est qu'une réaction cicatricielle à une lésion pariétale montre que si ce remodeling joue un rôle véritable comme on connaît peu ou pas les mécanismes qui le sous-entendent, on peut imaginer qu'avec les interventions thérapeutiques les plus sophistiquées type thérapie génétique s'opposant à la prolifération cellulaire, on n'a peut-être pas, même en cas de succès, trouver un moyen qui sera toujours efficace de prévenir la resténose post-angioplastie.

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