Angine de poitrine par athérosclérose
coronarienne
M Bertrand
E Van Belle
Résumé. – Expression clinique de l’ischémie myocardique, l’angine de poitrine n’est ni une maladie, ni un
syndrome, mais simplement un symptôme. Ce caractère subjectif de la crise d’angine de poitrine explique que
le diagnostic clinique repose essentiellement sur l’interrogatoire qui est actuellement aidé par de nombreuses
méthodes objectives permettant le diagnostic de l’ischémie myocardique.
© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : angor, athérosclérose, ischémie, coronaire, scintigraphie, épreuve d’effort, coronarographie.
Historique
L’angine de poitrine a été décrite par Heberden [32] dans une
communication effectuée le 21 juillet 1768 au Collège royal des
médecins de Londres. Au cours de cette présentation publiée
seulement en 1772, Heberden [32] attira l’attention de ses confrères
sur un « désordre de la poitrine » qu’il proposa d’appeler « angina
pectoris » en raison de son siège et de son caractère constrictif. Dans
cette description, très complète et très remarquable, Heberden [32]
décrivit le mode de survenue de la crise qui survient électivement à
la marche, et qui peut s’aggraver avec la survenue de crises
spontanées nocturnes. Heberden n’évoque pas le mécanisme de
l’angine de poitrine car, du fait de la fréquence de la mort subite
dans cette affection, il n’a pas eu l’occasion d’autopsier des patients
atteints de ce symptôme. Le 14 mars 1795, sir John Hunter fit
l’autopsie d’un patient décédé subitement à 53 ans et trouva que
« les deux artères coronaires, depuis l’origine jusqu’à la naissance
de plusieurs de leurs branches, étaient transformées en de véritables
fragments d’os. » Toutefois, Hunter ne semble pas avoir rattaché les
symptômes de l’angor à l’atteinte coronarienne, et Jenner, dans une
lettre à Parry [48], publiée par celui-ci dans un livre de 1799 sur la
« syncope angineuse », raconte que, dès 1772, il s’était aperçu
« qu’en faisant une section transversale du coeur très près de sa base,
mon couteau tomba sur quelque chose de si dur et de si pierreux
que la lame en fut ébréchée [...] à un examen plus approfondi, je
m’aperçus que ce fragment pierreux n’était autre que les coronaires
transformées en de véritables tuyaux ossifiés. » Ceci fut confirmé
par Home, beau-frère de Hunter qui, à l’autopsie de ce dernier, luimême
angineux, trouva les coronaires complètement ossifiées. À
partir de cette date, diverses théories pathogéniques ont été avancées
et, en 1809, Burns établit le premier rôle joué par la discordance entre
les besoins en oxygène du coeur et l’impossibilité pour les coronaires
de les satisfaire. Il écrit à propos de l’ischémie d’un membre
garrotté : « lorsque l’on fait se mouvoir rigoureusement un membre
garrotté, il ne peut continuer le mouvement que durant un temps
très court, car il y a inadéquation entre l’énergie que le membre
reçoit et l’énergie qu’il dépense. Un coeur dont les coronaires sont
Michel Bertrand : Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Éric Van Belle : Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Service de cardiologie B et hémodynamique, hôpital cardiologique, boulevard du Professeur-Leclerq,
59037 Lille, France.
cartilagineuses ou ossifiées se trouve à peu près dans la même
situation. » La théorie de l’atteinte artérielle organique
athéroscléreuse reprise par Kreysig [36] en 1816 fut loin de faire
l’unanimité. Blackall [6] et Kreysig [36] évoquaient l’hypothèse d’un
spasme de l’artère coronaire précédant la création de lésions
organiques de celle-ci. Huchard [34], qui voulait faire de l’angine de
poitrine une entité anatomoclinique, ne reconnaissait qu’une seule
cause : la sténose organique des artères coronaires. Il écrivait : « toute
angine de poitrine se produisant spontanément, sans intervention
d’un acte nécessitant un effort, est une angine fausse, névralgique. »
Gallavardin [24] admettait l’existence de fréquentes lésions
coronariennes mais écrivait : « il y a enfin un élément qui échappe à
la vérification, c’est l’attitude spasmogène qui, dans le cas où les
lésions coronariennes sont minimes, peut toujours être mis en avant ;
l’autopsie ne révèle qu’un état statique compatible avec une fonction
normale au repos, elle ne donne aucune indication sur ce qui
intervient pour [...] les paroxysmes angineux. » En 1910, Osler [47],
dans sa célèbre lettre, disait qu’il ne connaissait pas de meilleure
explication de la douleur angineuse que le spasme d’une artère
coronaire. Ainsi, dès 1924, l’opposition entre l’angine de poitrine
secondaire (liée à l’augmentation des besoins en oxygène du coeur)
et l’angine de poitrine primaire (liée à une diminution du débit
coronaire), selon la théorie de Maseri [41, 42, 43], était déjà connue. De
1950 à 1973, la primauté des travaux anatomocliniques fait admettre
que l’angine de poitrine est pratiquement toujours liée à une
athérosclérose coronarienne. Quelques travaux discordants passent
même inaperçus. En 1959, Prinzmetal [54, 55] décrivit la variante
d’angine de poitrine qui porte son nom. La notion de spasme était
tellement décriée à l’époque, que Prinzmetal [54] évita d’employer le
mot « spasme » pour parler d’« occlusion coronaire par
augmentation anormale du tonus de la paroi d’une grosse artère à
demi rétrécie. » Parallèlement, se développaient les techniques
chirurgicales de revascularisation myocardique qui devaient aboutir
au premier pontage aortocoronaire réalisé de façon courante par
Favaloro [20] et Effler [17] dès 1967. Le développement d’une méthode
efficace de revascularisation myocardique devait amener le
perfectionnement des méthodes de diagnostic, en particulier
l’artériographie coronaire. Celle-ci, réalisée sélectivement par
Sones [60], devait connaître ultérieurement un succès étonnant :
limitée initialement aux patients rebelles à tout traitement médical,
l’artériographie coronaire diagnostique devait peu à peu s’imposer.
Cet examen est actuellement devenu une exploration de pratique
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 11-030-A-10
11-030-A-10
Toute référence à cet article doit porter la mention : Bertrand M et Van Belle E. Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés),
Cardiologie, 11-030-A-10, 2001, 20 p.
courante chez les sujets atteints d’insuffisance coronarienne et
d’angine de poitrine. En 1977, Gruntzig [31] réalisait la première
dilatation coronaire par ballonnet. Après quelques balbutiements
techniques qui confinaient la méthode aux lésions d’un seul
vaisseau, le procédé devait connaître rapidement une ascension
foudroyante, remplaçant complètement la chirurgie de pontage
aortocoronaire chez les patients porteurs d’une lésion
monotronculaire et ébréchant sérieusement les indications
chirurgicales des patients porteurs de lésions multitronculaires.
Renforcées par un arsenal médicamenteux toujours plus effectif et
plus important, les méthodes de revascularisation myocardique ont
transformé le pronostic fonctionnel et vital de l’angine de poitrine.
Angine de poitrine par athérosclérose
La cause essentielle et majeure de l’angine de poitrine est
l’athérosclérose coronarienne rétrécissant et obstruant
progressivement les artères coronaires épicardiques. À côté de cette
cause essentielle, il existe des cas où l’angine de poitrine peut
survenir en dehors de l’athérosclérose coronarienne, soit sur des
coronaires normales, soit sur des coronaires lésées par un autre
processus pathologique. Ces deux éventualités font l’objet d’un
chapitre séparé. Nous nous contentons ici d’envisager l’angine de
poitrine par lésions athéroscléreuses coronariennes.
ATHÉROSCLÉROSE CORONAIRE
Selon la définition de Lenègre, l’athérosclérose est une affection des
grosses et moyennes artères caractérisée par une infiltration
lipidique de l’intima (athérome) associée en proportion variable à
une infiltration collagène (sclérose), l’ensemble portant le nom
d’athérosclérose. Cette définition anatomopathologique permet
d’exclure de ce cadre la médiacalcose de Mönckeberg, affection
caractérisée essentiellement, d’une part par une calcification de la
média, d’autre part par l’artériosclérose touchant essentiellement les
fibres élastiques des artères de petit calibre. Les éléments initiaux de
l’athérosclérose sont caractérisés par les stries lipidiques. Ces fines
élevures se rencontrent dans les différentes artères et en particulier
au niveau du carrefour aortique. Ce sont en fait des dépôts
exclusivement lipidiques de cellules spumeuses. Les stries lipidiques
sont extrêmement fréquentes dans la deuxième décennie et en
particulier au niveau du carrefour aortique ou des artères iliaques :
elles ont pu être décelées chez des enfants de moins de 3 ans. Leur
nombre augmente progressivement avec l’âge. Toutefois, au niveau
des artères coronaires, ces éléments sont rares avant 10 ans, mais
leur fréquence augmente très nettement après l’âge de 20 ans,
comme l’ont montré les autopsies de jeunes sujets décédés
accidentellement. Il existe d’ailleurs une relation entre la précocité
d’apparition de ces stries graisseuses coronaires et la précocité
d’apparition des signes cliniques. La plaque fibreuse, extrêmement
fréquente, s’observe dès l’âge de 30 ans, voire plus tôt sur l’aorte et
les coronaires. C’est un épaississement circonscrit à l’intima, assez
ferme, de coloration blanchâtre ou grisâtre, de contours mal limités.
Le stade évolutif ultérieur est la plaque fibrolipidique très nettement
en relief sur la paroi ; elle a donc un caractère sténosant qui la rend
responsable des différents troubles ischémiques rencontrés en
clinique. En superficie, la plaque a une coloration grisâtre ou
jaunâtre, de consistance relativement dure, mais elle contient dans
son intérieur une substance molle et jaune : la bouillie
athéromateuse.
Au cours de leur vieillissement, les plaques vont devenir de plus en
plus dures et même se transformer en une plaque calcaire, stade
évolutif terminal indiquant l’ancienneté du processus. La
calcification peut intéresser la totalité de la plaque athéroscléreuse
ou se localiser seulement au niveau de la base d’implantation. La
topographie des lésions athéroscléreuses est variable. Au niveau des
artères coronaires, les plaques athéroscléreuses se localisent
essentiellement au niveau des segments proximaux : artère
interventriculaire antérieure, partie proximale et partie moyenne
(40 à 50 %), artère coronaire droite (30 %), artère circonflexe (27 %).
Les sténoses s’observent principalement au voisinage des
bifurcations artérielles ou au niveau des courbures artérielles, ce qui
conforte la théorie traumatique de l’athérosclérose avancée par
certains auteurs. Il est fréquent d’observer un chapelet de sténoses
étagées sur les différentes artères. Sur la section artérielle, on peut
distinguer deux sortes de plaques athéroscléreuses : les sténoses
athéroscléreuses concentriques rétrécissant de façon centripète la
lumière artérielle, tapissant la lumière interne de l’artère, et les
sténoses excentriques tapissant un arc plus ou moins étendu de la
paroi artérielle, ceci laissant libre un arc artériel sain qui garde toute
sa vasomotricité et peut donc être l’objet d’une vasoconstriction
inappropriée se surajoutant à la sténose athéroscléreuse. Dans cette
éventualité, un facteur fonctionnel peut donc se surajouter à
l’obstacle athéroscléreux organique.
L’impact de ces lésions sténosantes athéroscléreuses est variable
selon le territoire considéré : la sténose proximale de l’artère
interventriculaire antérieure menace un territoire myocardique
beaucoup plus large, beaucoup plus étendu que la zone
myocardique irriguée par une artère circonflexe sténosée à sa partie
distale.
Encore faut-il noter qu’il existe des notions de dominance
coronarienne très importante : classiquement, on parle de coronaire
dominante lorsque celle-ci donne naissance à l’artère
interventriculaire inférieure. En règle, c’est la coronaire droite qui
est dominante, c’est-à-dire descendant dans le sillon
auriculoventriculaire droit, se réfléchissant au niveau de la croix du
coeur pour donner naissance à l’interventriculaire inférieure. Cette
éventualité s’observe dans 80 % des cas. Dans 10 % des cas, c’est la
coronaire gauche qui est dominante, c’est-à-dire qu’il existe une
volumineuse artère circonflexe qui se réfléchit au niveau de la croix
du coeur pour donner naissance à l’interventriculaire inférieure.
Dans cette éventualité, toute la circulation coronaire est dépendante
de l’artère coronaire gauche, et la coronaire droite, très petite,
atrophique, se limite à sa partie initiale et à quelques branches
destinées au ventricule droit. Cette éventualité est rencontrée dans
10 % des cas. Enfin, dans environ 5 % des cas, la circulation
coronaire est dite équilibrée. Il va de soi qu’une lésion du tronc
coronaire gauche ou des lésions proximales de l’artère circonflexe et
de l’artère interventriculaire antérieure, survenant sur une coronaire
gauche dominante, sont extrêmement graves et menacent la totalité
du myocarde ventriculaire gauche.
Il faut enfin faire intervenir la notion de circulation collatérale. Cette
circulation collatérale s’établit de deux manières. Elle est dite
ipsilatérale quand il s’agit d’un réseau de néovaisseaux qui, par des
branches collatérales, rétablit la circulation entre la partie proximale
et distale d’une artère obstruée, par exemple à sa partie moyenne.
On parle de circulation collatérale controlatérale lorsque la coronaire
droite reprend en charge par exemple la partie distale d’une artère
interventriculaire antérieure oblitérée à sa partie moyenne ou
réciproquement. Les observations récentes effectuées au cours de
l’angioplastie coronaire amènent à penser que la circulation
coronarienne est un élément qui se développe instantanément mais
qui est également susceptible de disparaître lorsque la cause qui l’a
provoqué a disparu.
ÉVOLUTION DES LÉSIONS CORONAIRES
EN FONCTION DU TEMPS
On pourrait s’attendre à une évolution lente, inexorable, de
l’athérosclérose coronaire, oblitérant et rétrécissant progressivement
les lumières artérielles coronaires et aboutissant finalement à
l’occlusion totale des vaisseaux. Il n’en est rien : la maladie
coronarienne est en fait caractérisée par une évolution par poussées
caractérisées par des phases de stabilité, entre lesquelles s’intercalent
des poussées évolutives d’instabilité. Les travaux
anatomopathologiques de ces dernières années ont démontré les
causes de ces facteurs d’instabilité. Cette dernière est liée aux
variations dynamiques du calibre d’une sténose artérielle coronaire.
Ainsi, à l’obstacle organique fixé athéroscléreux, peuvent s’ajouter
11-030-A-10 Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne Cardiologie
2
des aggravations intermittentes, diminuant le flux coronaire de façon
pratiquement subtotale, expliquant l’apparition de l’angine de
poitrine instable. Ces facteurs, qui avaient été suspectés par les
études expérimentales de Folts [22] et de Gertz [26], ont été confirmés
en pathologie humaine.
Ces variations peuvent être d’abord liées à un facteur vasomoteur
[43]. Sans parler de spasme vrai, une vasoconstriction physiologique
ou légèrement accentuée, surajoutée à une lésion athéroscléreuse,
est susceptible de déclencher une crise d’angine de poitrine
spontanée sévère, heureusement réversible. C’est là l’un des
mécanismes tout à fait typiques de l’angine de poitrine de
Prinzmetal par spasme artériel coronaire surajouté à une lésion
athéroscléreuse [4].
Mais surtout, les syndromes coronaires ischémiques aigus sont
déclenchés par une rupture de la plaque athéroscléreuse. Cette
rupture intervient à la suite de réactions inflammatoires provoquées
au niveau de la capsule fibreuse séparant le sang du coeur liquide
de la plaque.
Cette réaction inflammatoire est matérialisée sur le plan
histopathologique par l’apparition de nombreux macrophages, de
lymphocytes T. Ces différents éléments cellulaires sécrètent des
enzymes protéolytiques, les métalloprotéinases, qui « digèrent » la
capsule fibreuse.
La rupture de la plaque met en contact le matériel lipidique situé à
l’intérieur de celle-ci et le sang, ce qui peut déclencher des
phénomènes d’agrégation plaquettaire et de thrombose. La
thrombose peut se développer vers la lumière artérielle, il s’agit
alors d’un thrombus occlusif ou subocclusif. Suivant le caractère
complet ou incomplet de l’occlusion, on peut distinguer deux
éventualités : une thrombose subocclusive intermittente explique
alors la poussée d’instabilité de l’angine de poitrine ; dans d’autres
cas, la thrombose se complète, devient permanente, aboutissant à
une occlusion coronaire totale, responsable d’une diminution brutale
du flux en aval et d’une nécrose myocardique. Divers travaux ont
donc montré le lien extrêmement étroit entre l’angine de poitrine
instable et l’infarctus du myocarde, le dénominateur commun étant
la rupture de la plaque et l’apparition d’une thrombose.
Le caillot est essentiellement un caillot riche en plaquettes. Le
thrombus plaquettaire se forme en plusieurs étapes :
– adhésion des plaquettes aux structures sous-jacentes du vaisseau,
en regard de la rupture de plaque ;
– ceci entraîne l’activation plaquettaire, et par diverses voies, la
stimulation des récepteurs GpIIb-IIIa ;
– une fois activés, ces récepteurs, au nombre de 80 à 100 000,
répartis à la surface de chaque plaquette, se lient avec le fibrinogène
qui forme le lien entre les différentes plaquettes.
Ce caillot, riche en plaquettes, contient également des éléments
figurés du sang et de la fibrine.
Des observations réalisées par Falk ont montré que l’on pouvait
retrouver dans les petites artérioles des embolisations distales. Ces
embolisations distales créent des foyers minimes de nécrose
myocardique ; leur multiplicité constitue aussi des éléments de
dysfonctionnement ventriculaire gauche et elles peuvent donc être
amenées à compromettre la viabilité du myocarde et induire une
insuffisance cardiaque. Ces embolisations distales et ces foyers de
mininécrose sont prouvés, sur le plan biologique, par l’élévation des
troponines T ou I. Ils compromettent le pronostic à moyen et long
termes des patients ayant fait un épisode d’angine de poitrine
instable.
FACTEURS DE RISQUE D’ATHÉROSCLÉROSE
L’athérosclérose coronarienne est un véritable fléau social. La
mortalité par maladie des coronaires était, en France, de 142/100 000
hommes et de 36/100 000 femmes en 1992. Néanmoins, il existe une
tendance encourageante, avec une diminution au cours des
15 dernières années, sauf dans les pays de l’Est où il existe même
une tendance à la progression. On ignore complètement le
mécanisme exact de l’athérosclérose coronarienne et de
l’athérosclérose en général. On sait seulement identifier des
populations à risque, c’est-à-dire les facteurs de risque
d’athérosclérose coronarienne.
¦ Tabac
Le rôle du tabac est considérable. La plupart des athéroscléreux
coronariens sont des fumeurs et des grands fumeurs. En particulier,
les patients porteurs de spasme artériel coronaire surajouté à des
lésions athéroscléreuses sont des fumeurs considérables (60 à
80 cigarettes/j).
¦ Dyslipoprotéinies
Les dyslipoprotéinies constituent également un facteur de risque très
important. Toutes les études s’accordent en effet à démontrer
l’importance des perturbations lipidiques au cours de
l’athérosclérose et de l’athérosclérose coronarienne. Le rôle essentiel
est joué par le cholestérol. Il est particulièrement important que ce
soit diverses fractions du cholestérol qui soient impliquées : un taux
élevé de low density lipoproteins (LDL) cholestérol a un effet négatif,
tandis qu’un taux élevé de high density lipoproteins (HDL) cholestérol
a un effet protecteur.
L’existence d’une hypertriglycéridémie est plus ou moins discutée
comme facteur de risque chez l’homme et non chez la femme.
¦ Hypertension artérielle
Elle est classiquement un facteur de risque d’athérosclérose. En
réalité, diverses études réalisées au cours de ces dernières années
ont montré que l’hypertension artérielle était un facteur de risque
très important pour les accidents vasculaires cérébraux, mais que
son rôle était plus limité en matière de pathologie coronarienne.
Diverses études ont ressuscité récemment le rôle de l’hypertension
artérielle dans la genèse de l’athérosclérose coronaire.
¦ Diabète
C’est certainement un élément très important : le diabétique fait plus
fréquemment et plus précocement de l’athérosclérose, en particulier
coronarienne, qu’un sujet non diabétique. Les lésions coronaires du
diabétique sont habituellement diffuses et également plus longues.
On a dit que les artères du diabétique se caractérisaient par leur
petit calibre. En fait, il s’agit le plus souvent d’une réduction de la
lumière liée à un manchon athéroscléreux diffus, enfermant sur une
très grande longueur les segments coronaires correspondants. Il
convient de mentionner que, en raison de la neuropathie diabétique,
l’expression clinique est beaucoup moins « parlante » que dans
l’athérosclérose commune du non-diabétique et que l’ischémie est le
plus souvent indolore.
¦ Obésité
Bien que classique, l’obésité n’est pas considérée comme un facteur
de risque majeur d’athérosclérose. Cependant, l’obésité va
généralement de pair avec des perturbations du métabolisme
glucidique et du métabolisme lipidique.
¦ Hérédité
L’hérédité cardiovasculaire doit être examinée avec précaution. Il
existe indiscutablement des cas « héréditaires » : il en est ainsi dans
les xanthomatoses hypercholestérolémiques familiales. Les variétés
homozygotes présentent très rapidement et très précocement des
manifestations coronariennes à type d’angine de poitrine ou
d’infarctus du myocarde. Ces cas sont heureusement peu fréquents.
Il n’en est pas moins vrai que l’observation clinique courante
mentionne assez fréquemment des familles de coronariens et l’on
peut considérer qu’un sujet dont l’un des parents ou des collatéraux
ont présenté, avant l’âge de 50 ans, des signes d’ischémie
myocardique a plus de risques qu’un autre sujet de faire un accident
coronarien. Cependant, aucun élément génétique n’a été retrouvé
dans ce cadre précis.
Cardiologie Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne 11-030-A-10
3
À ces facteurs de risque classiques s’ajoutent les stress et les facteurs
psychologiques. Certes, il est courant de signaler des crises d’angine
de poitrine survenues à l’occasion d’une grande colère, d’un drame
professionnel ou d’une contrariété immense. Il s’agit là en fait
d’anecdotes où l’accident a été révélé par une stimulation
adrénergique extrêmement intense. Certains auteurs ont tenté
d’individualiser des types psychologiques de candidats à la maladie
coronarienne : par exemple, les sujets hyperactifs, ambitieux, à
l’esprit compétitif, ayant une frénésie compulsive d’activité (type A).
En réalité, les travaux de ces dernières années n’ont pas confirmé
cette première impression.
Enfin, il est classique de signaler que la sédentarité favoriserait
l’insuffisance coronarienne.
En réalité, si la maladie coronarienne semble résulter d’une
conjuration, aucun des conjurés isolément, sauf peut-être le tabac et
les dyslipidémies, ne mérite réellement la peine capitale.
Physiopathologie de l’angine
de poitrine
L’angine de poitrine résulte d’une ischémie myocardique, c’est-àdire
d’une discordance entre les besoins et les apports en oxygène
au niveau du myocarde. Avant d’envisager ce problème et ses
conséquences, il apparaît donc indispensable d’envisager un rappel
de la physiologie coronarienne.
RAPPEL DE LA PHYSIOLOGIE CORONARIENNE
À chaque instant, au niveau des cellules myocardiques, doit exister
un équilibre entre les apports et les besoins en oxygène. Ceci amène
donc à considérer les besoins en oxygène du coeur (fig 1). Parmi les
nombreux facteurs responsables des besoins en oxygène, trois
d’entre eux ont une importance capitale :
– la fréquence cardiaque : il existe une relation linéaire entre les
besoins en oxygène du myocarde et la fréquence cardiaque ;
– la tension pariétale intraventriculaire gauche : elle est dépendante,
d’après la loi de Laplace, du volume et de l’épaisseur pariétale
ventriculaires gauches et de la pression systolique intracavitaire ;
– l’état contractile du ventricule gauche : il est extrêmement
important.
Toutes les circonstances physiologiques ou pathologiques
responsables d’une augmentation de l’un de ces trois paramètres
(effort, tachycardie, hypertension, drogues inotropes positives, etc)
entraînent une augmentation parallèle des besoins en oxygène.
En pratique clinique courante, l’évaluation des besoins en oxygène
du myocarde peut se faire à partir de deux indices :
– la mesure de la fréquence cardiaque, dont les variations sont un bon
reflet des besoins en oxygène du myocarde ;
– l’index tension/temps, qui a été proposé à partir du produit de la
fréquence cardiaque et de la surface située sous la courbe de
pression asystolique jusqu’à la fermeture des sigmoïdes aortiques.
Plus souvent, on emploie le double produit (terme impropre car un
produit est toujours double), c’est-à-dire fréquence cardiaque
multipliée par pression artérielle systolique. Sarnoff a introduit un
autre indice (TTE) : TTE = F × P × Tej (Tej : temps d’éjection).
Diverses études hémodynamiques ont montré une corrélation
satisfaisante entre les besoins en oxygène du coeur et le double ou le
triple produit. Ces différents indices sont donc très utilisés en
clinique humaine. La quantité d’oxygène délivrée au niveau du
myocarde (MV˙ O2) n’est autre que le produit du débit coronaire Q et
de la différence artérioveineuse coronaire en oxygène (DAO2) :
MV˙ O2 = Q × DAO2.
La différence artérioveineuse en oxygène au niveau des coronaires
peut être mesurée en étudiant les contenus en oxygène du sang
aortique et du sang veineux coronaire, qui draine la presque totalité
du sang coronaire gauche. Il s’avère que le contenu en oxygène du
sinus coronaire est le plus faible de l’organisme : ceci indique donc
que le coeur extrait au maximum l’oxygène. Il apparaît donc que,
même dans les circonstances pathologiques les plus extrêmes,
l’extraction d’oxygène ne peut être augmentée, et que ce facteur peut
être considéré comme une constante. Il en résulte donc que les
besoins en oxygène du coeur sont directement proportionnels aux
variations du débit coronaire (fig 2).
Celui-ci est assuré par les artères coronaires qui, sur le plan
physiologique, comportent deux parties :
– les artères épicardiques de 2 à 3mm de diamètre, les seules
visibles en pratique sur l’angiographie coronaire, cheminent à la
surface même du myocarde ;
– les artérioles coronaires naissent à angle droit des artères
épicardiques et plongent dans l’épaisseur du myocarde, de
l’épicarde vers l’endocarde. Ces artérioles, invisibles sur
l’angiographie coronaire, assurent le débit nutritionnel effectif du
muscle strié myocardique. Situées dans l’épaisseur même de la paroi
ventriculaire, elles subissent les contraintes mécaniques de la
contraction cardiaque. Chez l’homme, la circulation coronarienne est
quasiment de type terminal ; les anastomoses entre les différents
territoires artériels préexistent à l’état virtuel chez le sujet normal et
ne deviennent fonctionnelles qu’en cas d’insuffisance coronarienne.
Les artérioles myocardiques assurant le débit nutritionnel effectif du
myocarde représentent, chez le sujet normal, 90 % des résistances à
l’écoulement du sang à travers le réseau coronaire. Cheminant de
l’épicarde vers l’endocarde, elles sont soumises tout au long du cycle
cardiaque aux pressions régnant au sein même de la paroi
ventriculaire gauche.
En diastole, cette pression « intramurale » est au plus égale à la
pression télédiastolique du ventricule gauche, et donc très largement
inférieure à la pression de perfusion des coronaires. Il en résulte que
Fréquence Tension pariétale Contractilité
Métabolisme
de base
Dépolarisation Maintien
de l'état actif
MVO2
1 Principaux déterminants de la consommation myocardique d’oxygène. La fréquence
cardiaque, la tension pariétale et la contractilité myocardique sont les trois plus
importants.
Principe de Fick
Q = MVO2 / (AO2 - VO2)
MVO2 = consommation d'oxygène myocardique
AO2 = concentration artérielle en oxygène
VO2 = concentration en oxygène du sinus coronaire
(AO2 - VO2) = k = constante
Q = MVO2 / Kk
2 Éléments permettant le
calcul du débit cardiaque
selon le principe de Fick.
11-030-A-10 Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne Cardiologie
4
l’écoulement sanguin à travers les artérioles pendant cette période
de la révolution cardiaque s’effectue aisément.
En systole, au contraire, la pression intracavitaire ventriculaire
gauche se transmet à la paroi ventriculaire en décroissant de façon
linéaire de l’endocarde vers l’épicarde. Ainsi, au niveau des couches
sous-endocardiques du myocarde, la pression systolique est voisine
de la pression intracavitaire et se trouve donc largement supérieure
à la pression de perfusion des coronaires. Les couches sousendocardiques
ne sont pas vascularisées en systole.
Ces diverses considérations expliquent la prédominance diastolique
du flux sanguin coronaire, et plus encore, la perfusion exclusivement
diastolique des couches profondes sous-endocardiques du
myocarde. Il en résulte donc une plus grande vulnérabilité à
l’ischémie de ces zones qui sont les premières à souffrir en cas
d’insuffisance coronarienne. De plus, lors de l’effort musculaire, le
raccourcissement des diastoles, consécutif à la tachycardie, contribue
encore à majorer la souffrance de ces zones sous-endocardiques en
diminuant leur temps effectif de perfusion. La régulation entre les
apports et les besoins myocardiques s’effectue essentiellement sous
l’influence de la vasomotricité coronarienne. La vasodilatation, à
régulation métabolique, concerne essentiellement, sinon
exclusivement, les artères assurant le débit nutritionnel effectif du
muscle myocardique, c’est-à-dire les artérioles intramyocardiques.
Les artères épicardiques sont en effet moins sensibles aux variations
de concentration des différents métabolites. En cas d’insuffisance,
même de brève durée, de l’approvisionnement en adénosine
triphosphate (ATP) au niveau des cellules, il se produit une
accumulation de produits issus du métabolisme anaérobie. Parmi
ces substances vasodilatatrices, ont été établis les rôles de diverses
substances, en particulier d’un médiateur primordial qui est
l’adénosine. Produit de dégradation de l’ATP, l’adénosine
s’accumule en excès au sein du tissu myocardique lorsque l’ATP a
perdu ses liaisons phosphore riches en énergie. L’adénosine est l’un
des plus puissants vasodilatateurs endogènes connus et semble être
le facteur principal de la régulation métabolique du calibre des
artérioles intramyocardiques. Au cours de ces dernières années,
différents facteurs ont été également individualisés : au niveau des
cellules endothéliales, il existe un facteur relaxant vasodilatateur qui
disparaît lorsque l’on effectue une dénudation et une abrasion de la
paroi artérielle, et un facteur vasoconstricteur, l’endothéline, de
découverte récente. Ces différents facteurs expliquent les
modifications de la vasomotricité, en particulier au niveau des
artères coronaires épicardiques, cependant que la régulation
nerveuse de celle-ci peut intervenir. En bref, le système sympathique
adrénergique est susceptible, lorsqu’il est stimulé, d’avoir un effet
chronotrope positif accélérant la fréquence cardiaque et un effet
inotrope positif majorant la force contractile du myocarde. Ceci
implique une augmentation importante des besoins en oxygène du
myocarde, suivie d’une riposte caractérisée par une augmentation
du débit coronaire.
Le rôle du parasympathique est plus confus : l’injection
d’acétylcholine détermine des réactions extrêmement diverses, selon
l’intégrité ou non de l’endothélium vasculaire. Ainsi, l’injection
d’acétylcholine a classiquement, sur une paroi artérielle saine, un
effet vasodilatateur, mais injectée sur une artère qui a été dénudée et
donc privée de son endothélium, elle déclenche, à des doses
diverses, des phénomènes vasoconstricteurs.
CAUSES DE L’ISCHÉMIE MYOCARDIQUE
L’ischémie myocardique résulte de la discordance entre les besoins
et les apports en oxygène au niveau du myocarde. Il peut donc
exister deux grandes causes d’ischémie myocardique (fig 3) :
– l’ischémie myocardique provoquée par une augmentation des
besoins en oxygène du coeur, non compensée par une augmentation
concomitante de l’apport ;
– une diminution brutale de l’apport en oxygène au niveau du
myocarde sans modification concomitante des besoins en
oxygène [41].
L’augmentation des besoins en oxygène du coeur, non compensée
par une augmentation concomitante du débit coronaire, est le
mécanisme habituel de l’angine de poitrine d’effort (cf fig 5B). Ceci
fait intervenir la notion de réserve coronaire. Celle-ci se définit par
le rapport du débit coronaire maximal au débit coronaire de repos.
Physiologiquement, la réserve coronaire normale est de 4 à 4,5.
Gould [29, 30] a montré que la réserve coronaire à l’effort restait
normale tant que la sténose coronaire était inférieure à 50 % (fig 4).
Lorsque la sténose devient plus serrée, la réserve diminue, et ce n’est
que pour des rétrécissements subtotaux que le flux diminue au
repos.
Lorsqu’il existe des lésions artérielles coronaires plus ou moins
sténosantes, on note une amputation notable de la réserve coronaire
à 1,1 ou 1,2. Ceci indique donc que, pour un certain niveau d’effort
impliquant un besoin déterminant en oxygène du myocarde, un
seuil ischémique apparaît en raison de l’amputation de la réserve
coronaire.
Théoriquement donc, l’ischémie myocardique d’effort se
caractériserait par un seuil fixe, déterminé pour une valeur fixe des
besoins en oxygène du coeur, évaluée par exemple par le double
produit.
Si l’effort disparaît, les besoins en oxygène du myocarde diminuent.
Il survient de nouveau une adéquation entre les besoins et les
apports en oxygène, et l’ischémie myocardique disparaît ainsi que
sa manifestation clinique d’angine de poitrine. Ainsi se trouve
expliqué le caractère essentiel de survenue à l’effort de l’angine de
poitrine.
Dans certaines circonstances, les besoins en oxygène du myocarde
sont inchangés et le débit coronaire s’effondre (fig 5D) ; c’est dire
que cette ischémie myocardique apparaît en dehors de tout effort
lorsque le sujet est au repos : il s’agit donc d’une ischémie
myocardique de repos, caractérisée par une diminution importante
du débit coronaire qui résulte d’une obstruction mécanique (spasme
Fréquence
Tension pariétale
Contractilité
Débit coronaire
(A-V) O2
Besoins
d'oxygène
Apport
d'oxygène
3 L’ischémie est caractérisée par le déséquilibre entre les besoins (fréquence cardiaque,
tension pariétale et contractilité) et les apports d’oxygène, c’est-à-dire le débit coronaire.
0 % 50 % 100 %
Débit coronaire
Effort
Repos
Réduction du diamètre de l'artère
4 Expérience de Gould. Au repos, il faut une occlusion subtotale de l’artère coronaire
pour réduire significativement le débit coronaire. À l’effort, une réduction de 50 % du
diamètre réduit significativement le débit.
Cardiologie Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne 11-030-A-10
5
ou thrombose). La caractéristique clinique essentielle de ce type
d’angine de poitrine est son mode de survenue au repos, et surtout
le fait que, par des enregistrements Holter fréquents de la pression
artérielle, on note l’absence de modification du double produit,
caractéristique des besoins en oxygène précédant la survenue de
l’ischémie myocardique. Il faut bien insister sur le fait que ces deux
paramètres ne varient pas avant l’impression de l’ischémie car,
pendant l’ischémie qui s’accompagne de douleurs, celle-ci peut, par
stimulation adrénergique, déclencher une élévation secondaire de la
fréquence cardiaque et de la pression artérielle.
En fait, le plus souvent, les deux mécanismes s’intriquent (fig 5C).
Ainsi, des variations notables de vasomotricité surviennent dans les
premières heures de la journée, entre 4 h et 8 h du matin. Ceci
explique que chez un sujet porteur de sténoses athéroscléreuses, les
crises puissent être plus fréquentes à l’effort et pour des efforts plus
minimes lorsque ceux-ci sont accomplis le matin, au froid, dans le
vent, tous facteurs responsables d’une vasoconstriction surajoutée
aux lésions. À l’inverse, les mêmes efforts pratiqués l’après-midi, en
atmosphère chaude ou fermée, sont susceptibles de ne survenir que
pour des efforts beaucoup plus importants.
Ainsi donc, à l’intérieur même de l’ischémie myocardique d’effort,
caractérisée par l’augmentation des besoins en oxygène du coeur non
compensée par une augmentation parallèle des apports en oxygène,
on peut noter une variation du seuil ischémique (fig 5) dépendant
de ces facteurs vasomoteurs surajoutés. II s’agit alors le plus souvent
d’une ischémie myocardique de mécanisme mixte.
Au terme de cette étude physiopathologique, on peut ainsi
remarquer qu’il existe donc une explication aux différents aspects
de l’angine de poitrine d’effort, de repos ou mixte.
CONSÉQUENCES DE L’ISCHÉMIE MYOCARDIQUE
L’ischémie myocardique détermine une cascade de conséquences
dont la traduction est variable (fig 6).
En quelques secondes, on observe des perturbations importantes de
la relaxation du myocarde. Le paramètre le plus souvent mesuré en
ce domaine (inutilisable en pratique de routine) est le temps de
relaxation myocardique, déduit de la courbe de pression
ventriculaire gauche ou du pic négatif de dP/dt, de la courbe de
pression ventriculaire gauche. Ces paramètres indiquent
indiscutablement l’apparition d’un allongement de la relaxation
myocardique dès les premières secondes de l’ischémie. Puis,
surviennent des perturbations de la fonction diastolique du
ventricule gauche et également de la fonction systolique. Ceci
explique l’élévation de la pression télédiastolique du ventricule
gauche, qu’il est relativement facile de mesurer au cours des
ischémies réalisées lors du cathétérisme cardiaque. Ce n’est qu’un
peu plus tard que surviennent des anomalies métaboliques qui sont
caractérisées par la production d’acide lactique au niveau du sinus
coronaire. Cette production d’acide lactique traduit le métabolisme
anaérobie qui existe au niveau du myocarde et l’impossibilité,
compte tenu de la privation d’oxygène, de faire rentrer le glucose
dans le cycle de Krebs.
Normalement, il existe une extraction myocardique d’acide lactique
dont le taux dans le sinus coronaire est inférieur au taux artériel. En
cas d’ischémie myocardique, il survient une production d’acide
lactique dans le sinus coronaire, c’est-à-dire que le taux dans cette
cavité est supérieur au taux artériel.
Ce n’est que plus tardivement que surviennent les manifestations
électrocardiographiques. Suivant l’importance de l’ischémie, on
distingue des sus-décalages du segment ST, traduisant généralement
une ischémie massive transmurale, par opposition à des
modifications électrocardiographiques à type de sous-décalages du
segment ST, traduisant le plus souvent la souffrance des couches
sous-endocardiques.
PHYSIOPATHOLOGIE DE LA DOULEUR
Le coeur est richement innervé, mais cette innervation est complexe
et relativement mal connue. On sait que l’innervation cardiaque
provient des nerfs sympathiques et pneumogastriques droits et
gauches. Les fibres sympathiques viennent des chaînes
sympathiques cervicales droite et gauche. Il existe en outre des fibres
venant directement des deuxième, troisième, quatrième et cinquième
ganglions sympathiques dorsaux. Les fibres parasympathiques
proviennent des pneumogastriques et de leurs branches récurrentes
droites et gauches. L’ensemble des fibres sympathiques et
parasympathiques forme les nerfs cardiaques qui envoient des
rameaux au myocarde, au tissu nodal et aux artères coronaires.
Les nerfs cardiaques sont au nombre de trois : supérieur, moyen et
inférieur. Ces nerfs se résolvent en un riche feutrage de fibres
schématisé en trois plexus, antérieur ou préaortique, postérieur ou
rétroaortique et enfin, situé sous la crosse de l’aorte dans le
quadrilatère de Wrisberg où il forme un large amas nerveux, le
plexus sous-aortique.
Le plexus préaortique est formé surtout de fibres nerveuses
provenant du sympathique et du parasympathique gauche et de
quelques filets nerveux du sympathique droit. Le plexus
rétroaortique est riche et comporte des filets venant du
pneumogastrique droit, des deux récurrents et du sympathique. Le
plexus sous-aortique est constitué d’une lamelle nerveuse s’étalant
dans le quadrilatère de Wrisberg, à droite du ligament artériel, entre
Débit coronaire (mL/min)
Réserve coronaire
Repos
Effort maximal
(FT = 220 - âge)
MVO2 (F x P)
Débit coronaire (mL/min)
MVO2 > débit
Repos
Effort maximal
MVO2 (HR x P)
Seuil ischémique
Débit coronaire (mL/min)
Effort en atmosphère froide
Repos
MVO2 (F x P)
Seuil ischémique
variable
Effort en atmosphère chaude
Débit coronaire (mL/min)
Repos
MVO2 (F x P)
MVO2 : inchangée
Débit diminué
5 Différents types d’ischémies à l’effort.
A. Sujet normal.
B. Ischémie d’effort créée par un excès de besoins en oxygène non compensé par une
élévation parallèle du débit coronaire.
*A *B *C *D
C. Ischémie à seuil variable.
D. Ischémie de repos créée par une interruption brutale du débit coronaire (spasme,
thrombose).
Temps
Début de l'ischémie
Douleur
Modifications ECG
Production de lactates
Ptd VG
Relaxation VG
6 Cascade ischémique. Après initiation de l’ischémie, apparaissent dans l’ordre :
la diminution de la relaxation myocardique, une élévation de la pression télédiastolique
ventriculaire gauche (Ptd VG), une production de lactates dans le sinus coronaire,
les modifications électrocardiographiques (ECG), et enfin la douleur angineuse.
11-030-A-10 Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne Cardiologie
6
la face inférieure de l’aorte et la bifurcation de l’artère pulmonaire.
Le plexus sous-aortique, qui rassemble la presque totalité des filets
postérieurs, émet des filets nerveux qui s’anastomosent avec le
plexus préaortique. Il existe un filet principal descendant devant ou
derrière l’artère pulmonaire, gagnant le tronc coronaire gauche et se
divisant comme ce vaisseau. Un autre filet descend vers la coronaire
droite en passant en avant ou en arrière de l’origine de la racine de
l’aorte. Deux rameaux accompagnent la coronaire droite dans le
sillon auriculaire ou ventriculaire, en donnant des branches
collatérales qui suivent le vaisseau jusqu’à l’interventriculaire
postérieure. De même, l’artère coronaire gauche est accompagnée
pendant tout son trajet par des filets suivant la direction générale
du vaisseau, sans suivre cependant parfaitement les contours de
l’artère.
Les substances algogènes libérées en cas d’ischémie myocardique
stimulent les fibres nerveuses. La projection douloureuse se fait dans
l’aire des racines sensitives correspondantes. En cas de stimulus plus
intense, l’irradiation peut être plus étendue et même se propager à
des territoires éloignés. Il convient de remarquer qu’il n’existe aucun
parallélisme entre l’étendue de l’ischémie et l’intensité de la douleur.
Clinique
Angine de poitrine d’effort stable
La sémiologie de la crise de l’angine de poitrine, magistralement
décrite par Heberden [32] en 1772, reste valable aujourd’hui. On a déjà
souligné la nécessité d’un bon interrogatoire, précis, méthodique et
surtout non suggestif.
DOULEUR : MAÎTRE SYMPTÔME
¦ Siège
Le siège est médian, rétrosternal, étendu en barre d’un pectoral à
l’autre. La douleur est volontiers étalée et le malade la désigne bien
de la main posée à plat sur le thorax. En revanche, une douleur
latéralisée, localisée le plus souvent à la région sous-mammaire ou
périmammaire gauche, n’est pas caractéristique d’une crise d’angine
de poitrine.
¦ Irradiations
Elles sont variables. Classiquement, l’irradiation se fait vers le
membre supérieur gauche. Dans ce cas, la douleur croise le
précordium, gagne l’épaule et le membre supérieur gauche et suit le
territoire du nerf cubital jusqu’aux faces dorsale et palmaire de la
main. La douleur peut « sauter » au poignet, aux doigts, sans
atteindre une autre partie du membre supérieur. C’est une
irradiation classique bien connue des malades. Cette irradiation n’est
ni constante, ni spécifique. Beaucoup plus caractéristiques sont les
irradiations vers les régions maxillaires inférieures, les dents, ou
encore les irradiations bilatérales vers les deux épaules, les deux
bras, les coudes et les poignets où la douleur donne volontiers une
sensation de bracelet, de menottes trop serrées.
¦ Intensité
L’intensité de la crise est variable. Qu’elle soit légère, forte ou
excruciante, elle a le caractère constrictif souligné par Heberden [32] :
angor signifie striction. La sensation d’étranglement, de constriction,
de thorax serré dans un étau, de thorax écrasé, se retrouve volontiers
à la description des patients. Il est plus rare qu’il s’agisse d’une
impression de brûlure intense, de chaleur pénible ou de cuisson.
Généralement, cette douleur est « sobre » ; elle ne s’accompagne ni
de dyspnée, ni de palpitation, ce qui la différencie des douleurs trop
complaisamment décrites par les patients à type de pincements, de
piqûres, d’élancements qui ne sont généralement pas du ressort de
l’angine de poitrine vraie. La classique angoisse, très évocatrice, est
heureusement inconstante ou rarement avouée par le patient.
¦ Mode de survenue
Il est extrêmement caractéristique dans cette forme clinique prise
pour type de description. L’angine de poitrine survient
essentiellement lors de l’effort, en particulier d’un effort
physiologique fréquemment accompli : la marche. La douleur
apparaît après un périmètre de marche variable, fonction de la
sévérité de l’ischémie myocardique. Le mode de survenue à la
marche est fonction de certains paramètres adjacents : vitesse de la
marche, marche en montée, par temps froid, contre le vent ou en
période postprandiale. La douleur cesse presque immédiatement,
dès la cessation de l’effort. Compte tenu de l’intensité de la douleur,
ceci explique que l’effort soit immédiatement arrêté et qu’en règle
générale la durée de la douleur soit brève. Elle ne dure que de
quelques secondes à 3 ou 4 minutes. Ce qui est donc extrêmement
caractéristique de l’angine de poitrine d’effort stable commune, c’est
son mode de survenue à l’effort et sa cessation avec l’arrêt de l’effort.
Par comparaison avec la douleur de l’artérite des membres
inférieurs, on a dit de la douleur angineuse qu’elle était la
« claudication intermittente du coeur ». La marche (effort
dynamique) constitue le facteur habituel déterminant les crises
d’angine de poitrine, mais d’autres types d’exercices physiques
peuvent déclencher des douleurs : porter un objet lourd, changer
une roue de voiture (effort statique).Toutefois, la douleur peut
survenir au cours d’efforts particuliers : défécation, émotions très
vives. Il convient en particulier d’insister sur la fréquence des
douleurs au cours des rapports sexuels et ce symptôme rarement
mentionné spontanément par les patients est presque constamment
retrouvé lors des questionnaires.
La cessation de la crise d’angine de poitrine s’accompagne parfois
de phénomènes postcritiques, pouvant être à l’origine d’erreurs
diagnostiques : aérophagie, paresthésie, fourmillements,
engourdissement des membres supérieurs, sensation de sudation
localisée ou polyurie. Ces manifestations ne sont ni habituelles, ni
caractéristiques et en règle générale risquent fort d’égarer le
diagnostic.
¦ Action de la trinitrine
Le dernier caractère classique de la crise d’angine de poitrine est
l’action immédiate, élective, de la trinitrine. Il faut pourtant se
garder d’admettre sans critique cette assertion des patients :
– il faut faire préciser si le patient a croqué ou non la dragée de
nitroglycérine ;
– il est nécessaire que la sédation soit rapide (dans les 3 à 4 minutes
qui suivent l’administration du produit).
Autrefois, cette action spectaculaire de la trinitrine constituait un
véritable test diagnostique. On sait aujourd’hui que la sédation de
la douleur à la trinitrine n’a pas une valeur pathognomonique et
qu’elle peut être obtenue dans différentes circonstances pouvant
simuler la crise d’angine de poitrine : hépatalgie d’effort, oedème
pulmonaire d’effort, spasmes oesophagiens.
L’ensemble de ces symptômes peut s’intriquer dans des tableaux
fonctionnels extrêmement divers. On garde présent à l’esprit que les
critères fondamentaux de l’angine de poitrine sont :
– la survenue à l’effort et la disparition avec l’arrêt de celui-ci ;
– le siège et le caractère constrictif de la douleur ;
– la brève durée de la crise.
EXAMEN CLINIQUE
Il arrive rarement que l’on puisse procéder à l’examen clinique du
patient pendant une crise d’angine de poitrine. Dans les rares cas où
cela a pu être effectué, on remarque que le coeur est parfaitement
normal. Dans quelques cas, on a pu noter l’existence d’un bruit de
galop gauche traduisant l’insuffisance ventriculaire gauche
consécutive à l’ischémie, et il existe quelques rares observations de
souffle systolique observé pendant la crise d’angine de poitrine et
relatif à l’ischémie myocardique du pilier postérieur de la mitrale
créant une régurgitation mitrale.
Cardiologie Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne 11-030-A-10
7
Le plus souvent, l’examen clinique est réalisé en dehors de la crise :
il est donc le plus souvent normal. Il s’attache à préciser le niveau
de la pression artérielle, recherche des signes cliniques de
dyslipidémie (xanthomes tendineux, xanthélasma). L’examen
clinique s’efforce d’ailleurs de déterminer l’importance exacte des
différents facteurs de risque.
Il ne faut pas pour autant négliger l’examen physique et en
particulier celui du thorax. Celui-ci permet parfois de retrouver des
douleurs provoquées par la palpation au niveau du sternum, de la
jonction chondrocostale ou de la conjonction chondrosternale. On
peut noter également parfois des douleurs à la palpation et au
pincement du tissu cellulaire sous-cutané : tous ces éléments de
douleur provoquée par la palpation sont contre le diagnostic
d’angine de poitrine et évoquent fortement une origine pariétale.
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES
Ainsi, l’examen physique n’est d’aucun secours pour établir le
diagnostic d’angine de poitrine, évoqué essentiellement par
l’interrogatoire et la description subjective du patient. Dans ces
conditions, le diagnostic de l’angine de poitrine repose sur deux
groupes d’examens fondamentaux : les premiers, non invasifs, sont
dominés par l’électrocardiogramme (accessoirement de repos mais
surtout d’effort), et aussi par l’artériographie coronaire.
¦ Électrocardiogramme de repos
L’électrocardiogramme de repos est le plus souvent décevant : 75 %
des patients ont, en dehors des crises, un électrocardiogramme de
repos strictement normal. Vingt-cinq pour cent des patients
présentent cependant des anomalies qui peuvent être regroupées
selon les rubriques suivantes :
– l’aspect de courant de lésion sous-endocardique (fig 7). Dans cette
éventualité, le tracé électrocardiographique retrouve généralement
dans les dérivations Dl, VL, V5 et V6, un sous-décalage du segment
ST horizontal ou obliquement descendant ayant une amplitude d’au
moins 1 mm. Il est classique également de signaler l’allongement de
l’espace QT, évalué par rapport au QT théorique rapporté à la
fréquence cardiaque ;
– des signes d’ischémie sous-épicardique caractérisés par des ondes
T négatives, pointues et symétriques (fig 7) ;
– l’électrocardiogramme de repos peut encore noter des ondes Q,
séquelles de nécrose myocardique ancienne, connue ou passée
inaperçue ;
– l’enregistrement électrocardiographique peut noter l’éventualité
d’un trouble de conduction, en particulier d’un bloc complet de
branche droit ou gauche qui n’a aucune valeur pour affirmer ou
infirmer le diagnostic.
Il faut donc bien insister sur la fréquence des électrocardiogrammes
strictement normaux. Ceci s’explique par le fait qu’au repos, sauf
dans le cas de sténose hyperserrée, il n’existe pas d’ischémie
myocardique. Il est prouvé qu’un sujet peut avoir un
électrocardiogramme de repos strictement normal avec une
obstruction sévère et étendue de deux ou trois troncs coronariens. Il
est donc anormal et illicite de rassurer un patient parce qu’il a un
électrocardiogramme de repos normal.
¦ Épreuve d’effort
Dans cette forme classique d’angine de poitrine d’effort stable,
l’épreuve d’effort constitue donc le test le plus utilisé. C’est un
élément capital du diagnostic de l’ischémie myocardique. On
rappelle que l’électrocardiogramme d’effort doit être réalisé dans des
conditions extrêmement strictes : il faut tout d’abord utiliser un
effort calibré et obtenu soit par la marche sur tapis roulant selon le
protocole de Bruce, soit par l’une de ses variantes. L’effort sur tapis
roulant offre l’immense avantage d’obtenir des consommations
d’oxygène beaucoup plus élevées et d’être beaucoup plus
physiologique. Toutefois, le matériel est coûteux, relativement
fragile, et certains utilisent un cycloergomètre à charge, de type
hyperbolique où, dans une certaine limite de vitesse de rotation, la
charge peut être considérée comme constante. Dans cette
éventualité, et pour un test diagnostique, il est utile d’effectuer une
montée en charge rapide, par exemple augmenter toutes les minutes
la charge de 20 W. Il faut bien entendu enregistrer le tracé
électrocardiographique non seulement avant, mais surtout pendant
et après l’arrêt de l’effort. Il est donc nécessaire d’obtenir un tracé
d’excellente qualité. Ceci implique un certain nombre de
précautions : un nettoyage parfait de la peau avec un mélange
alcool-éther, nécessité d’aviver les surfaces cutanées et d’utiliser des
électrodes d’excellente qualité avec peu de pâte conductrice.
L’application des électrodes doit être parfaite, de telle manière que
lors de l’effort maximal, les sudations abondantes du patient ne
viennent pas les décoller. Il est hautement souhaitable d’obtenir les
12 dérivations conventionnelles et l’électrocardiogramme pendant
l’effort. Il est nécessaire de surveiller une au moins, ou mieux trois
dérivations, sur un moniteur de surveillance pendant la totalité de
l’épreuve. Enfin, il faut insister sur l’importance actuelle de
l’informatique dans l’obtention de tracés électrocardiographiques
d’effort de qualité. La numérisation du signal, son moyennage,
permettent d’obtenir ainsi des tracés analysables de façon objective
et indépendamment de l’intervention de l’observateur humain. En
effet, le calcul du sous-décalage du segment ST et le calcul de la
pente, sur l’ordinateur, sont absolument indispensables à un
diagnostic de qualité.
Les risques de l’épreuve d’effort sont actuellement quasi nuls,
pourvu que les précautions de sécurité soient assurées : monitoring
complet de l’électrocardiogramme sur oscilloscope pendant la durée
de l’effort et matériel de réanimation à la disposition du médecin
réalisant l’épreuve (défibrillateur, matériel d’intubation et de
ventilation, solution de bicarbonate ou de tris-hydroxyméthylaminométhane
[THAM]). Si les conditions de sécurité et le respect
des contre-indications et des critères d’arrêt sont satisfaits, l’épreuve
d’effort électrocardiographique peut être actuellement considérée
comme pratiquement sans risque. Il faut cependant rappeler les
contre-indications à l’épreuve d’effort : angine de poitrine instable,
infarctus du myocarde très récent, arythmie complète ou flutter, bloc
auriculoventriculaire ou bloc complet de la branche gauche. Dans le
cas d’une épreuve diagnostique d’ischémie myocardique, l’épreuve
d’effort est contre-indiquée si le patient présente des signes
d’insuffisance cardiaque. Les insuffisances respiratoires aiguës
sévères sont écartées, au même titre que le sujet ayant présenté une
embolie pulmonaire récente. Les hypertensions artérielles
systémiques sévères sont également une contre-indication classique.
Les critères d’arrêt de l’épreuve d’effort sont classiques :
– les critères sont d’abord cliniques : dyspnée d’effort importante,
syndrome d’inadaptation à l’effort caractérisé par une fatigue
musculaire intense, une tendance lipothymique, une tendance à
l’ataxie. L’apparition de pâleur, ou au contraire de cyanose
importante, justifie la prudence et l’arrêt de l’effort. Sur le plan
7 Aspects électrocardiographiques de courant de lésion sous-endocardique (A) et de
courant d’ischémie sous-épicardique (B).
*A *B
11-030-A-10 Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne Cardiologie
8
tensionnel, la tension artérielle, qui doit être surveillée au même titre
que l’électrocardiogramme, peut faire arrêter l’effort si l’on observe
soit une chute tensionnelle importante traduisant l’inadaptation
cardiaque à l’effort et le dysfonctionnement ventriculaire gauche,
soit au contraire une hypertension artérielle supérieure à
280 mmHg ;
– les critères électrocardiographiques d’arrêt sont représentés par les
troubles du rythme. La survenue d’une arythmie complète, d’un
flutter ou de troubles de conduction auriculoventriculaire, ou encore
d’un trouble de conduction intraventriculaire à type de bloc de
branche, rend l’épreuve ininterprétable. Il convient d’insister surtout
sur le fait que la survenue de troubles d’excitabilité doit faire arrêter
l’épreuve d’effort, en particulier lorsque l’on observe six
extrasystoles ventriculaires consécutives ou l’apparition
d’extrasystoles ventriculaires polymorphes. Elles sont en effet
généralement annonciatrices de troubles du rythme graves,
tachycardie ventriculaire, fibrillation ventriculaire, responsables
d’arrêt circulatoire. Un certain nombre de patients présentent au tout
début de l’épreuve d’effort des extrasystoles qui disparaissent lors
de l’accélération du rythme cardiaque pour réapparaître
ultérieurement lors de l’arrêt de l’effort. Classiquement, s’il survient
des signes électrocardiographiques traduisant l’ischémie
myocardique, l’épreuve d’effort pourrait être arrêtée. La plupart des
auteurs la poursuivent cependant jusqu’à l’apparition de symptômes
cliniques, en particulier de douleurs angineuses. Enfin, en cas
d’absence de modifications électrocardiographiques, il existe un
critère d’arrêt facile à déterminer : lorsque le sujet a atteint la
fréquence théorique maximale prédite pour l’âge, c’est-à-dire
220 battements/min moins l’âge du sujet (par exemple :
180 battements/min pour un sujet de 40 ans) ;
– les critères de positivité sont essentiellement représentés par des
anomalies au niveau de la phase de repolarisation et au niveau du
segment ST. L’épreuve d’effort est dite positive si le segment ST
présente un sous-décalage horizontal ou obliquement descendant
d’amplitude égale ou supérieure à 1 mm à 60 ms du point J (fig 8). Il
existe donc deux paramètres à prendre en compte : l’amplitude du
sous-décalage (supérieure à 1 mm) et la valeur de la pente qui doit
être horizontale, donc d’une valeur égale à 0 ou négative, calculée
par l’ordinateur. L’aspect obliquement descendant ou en sagging est
extrêmement caractéristique.
Un sus-décalage du segment ST peut être observé dans diverses
circonstances. Le sus-décalage du segment ST observé dans le
territoire infarci chez un patient venant de présenter un infarctus du
myocarde n’a pas de valeur d’ischémie myocardique. Il traduit tout
simplement la dyskinésie ventriculaire avec expansion paradoxale
lors de l’effort. En revanche, chez un patient indemne d’infarctus, le
sus-décalage du segment ST pendant l’effort peut être en rapport
avec un spasme coronarien : c’est une éventualité assez rare, mais
beaucoup plus fréquemment observée pendant la période de
récupération.
Il convient d’insister sur le fait que les anomalies de l’onde T, à type
d’aplatissement ou d’ondes T négatives n’ont pas de signification
pathologique.
Les modifications électrocardiographiques qui ne sont pas apparues
pendant l’effort et qui apparaissent quelques minutes après l’arrêt
de l’effort n’ont pas de valeur diagnostique.
En réalité, l’épreuve d’effort n’apporte pas une réponse positive ou
négative, selon la loi du tout ou rien. L’épreuve d’effort
électrocardiographique n’a qu’une valeur prédictive. Elle doit être
interprétée selon la théorie bayesienne, en tenant compte en
particulier de la prévalence de la maladie coronarienne. Celle-ci est
habituellement très faible dans le sexe féminin, beaucoup plus élevée
dans le sexe masculin, et l’on explique ainsi que la valeur prédictive
de l’épreuve d’effort soit différente dans les deux sexes. Dans une
étude prospective comportant 1 297 sujets ayant fait l’objet d’une
épreuve d’effort informatisée, suivie d’une artériographie coronaire
dans les 9 jours qui suivaient l’épreuve d’effort, Pruvost, Lablanche
et al [56] ont permis de déterminer la valeur de l’épreuve d’effort dans
les deux sexes. Les auteurs montrent la sensibilité et la spécificité, la
valeur prédictive positive et négative de l’épreuve d’effort chez les
patients ayant un antécédent d’infarctus du myocarde et chez les
patients sans antécédent d’infarctus du myocarde.
Grâce à une étude multifactorielle avec une corrélation linéaire
multiple, Pruvost et al [56] ont pu établir une équation permettant de
tenir compte des différents résultats obtenus au cours de l’épreuve
d’effort, en particulier de l’apparition des symptômes lors de cet
examen. On retient que la valeur prédictive négative d’une épreuve
d’effort chez la femme est également satisfaisante et très bien
corrélée avec l’absence de lésion coronarienne. En revanche, la
valeur prédictive positive d’une épreuve d’effort dans le même sexe
est très décevante. Il faut, en effet, souligner la possibilité fréquente
de faux positifs au cours de l’épreuve d’effort. Les principales causes
sont l’administration préalable d’une médication antiarythmique ou
digitalique ou antiangineuse (ce qui implique la suppression de
toute médication avant la réalisation d’une épreuve d’effort
diagnostique), des perturbations électrolytiques ou l’hypocalcémie.
Il faut insister sur une cause fréquente d’épreuve d’effort faussement
positive : c’est l’hypertension artérielle, susceptible d’induire des
modifications de la repolarisation qui sont peut-être liées à une
ischémie myocardique, mais ne sont pas relatives à une sténose
coronarienne. Actuellement, chez l’hypertendu, il est préférable de
recourir en première intention à une épreuve d’effort couplée à la
fixation d’un marqueur isotopique plutôt qu’à l’épreuve d’effort
8 Épreuve d’effort informatisée.
Cardiologie Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne 11-030-A-10
9
électrocardiographique traditionnelle. En fait, l’épreuve d’effort
électrocardiographique n’a qu’une valeur prédictive.
Plus récemment, Michaelides et al ont signalé que la réalisation
d’une épreuve d’effort avec enregistrement supplémentaire des trois
dérivations précordiales droites externes (V3R, V4R, V5R) améliorait
considérablement la sensibilité de l’épreuve d’effort qui devenait
comparable à celle de la scintigraphie. Le bénéfice était
particulièrement important pour les patients mono- ou bitronculaires
où la détection est plus faible avec l’épreuve traditionnelle (tableau I).
La spécificité des trois méthodes (épreuve d’effort standard, épreuve
d’effort + dérivations précordiales externes, scintigraphie) était
respectivement de 88 %, 88 % et de 82 %.
¦ Scintigraphie au thallium
La scintigraphie myocardique au thallium est une autre méthode
diagnostique de l’ischémie myocardique. Elle peut être réalisée au
cours de l’épreuve d’effort ou à la suite d’injection intraveineuse de
diverses substances stimulant la réserve coronaire.
Scintigraphie myocardique d’effort au thallium
Le principe de l’épreuve est relativement simple. On réalise, selon
les conditions habituelles, une épreuve d’effort et, au maximum de
celui-ci, on injecte par voie intraveineuse une dose de thallium 201.
Cet isotope se fixe sur le myocarde normalement irrigué. À l’aide
d’une caméra à scintillation, on enregistre, dans différentes
incidences, la fixation de cet isotope au niveau du myocarde. Les
coupes le plus souvent utilisées sont les coupes en oblique antérieure
gauche, permettant de bien visualiser la paroi septale et la paroi
latérale, ou encore les projections antérieures. Quatre heures plus
tard, après la redistribution du traceur, un nouveau scintigramme
est obtenu avec la caméra à scintillation. Trois situations peuvent
être schématisées :
– fixation identique pendant l’effort et pendant la récupération du
traceur sur le myocarde : il s’agit d’une scintigraphie myocardique
au thallium normale ;
– existence d’un trou de fixation dans un territoire myocardique
apparaissant à l’effort et persistant lors de la récupération : il s’agit
d’un déficit permanent de fixation, traduisant le plus souvent une
zone hypofixante de façon permanente au niveau du myocarde et
révélant le plus souvent la cicatrice d’une séquelle d’infarctus du
myocarde ;
– lors de l’ischémie myocardique d’effort typique, on constate
l’apparition, pendant l’effort, d’une zone hypofixante d’un territoire
délimité et la redistribution normale du traceur lors de la
récupération (fig 9). Cet aspect est tout à fait caractéristique de
l’ischémie myocardique à l’effort.
Théoriquement, la scintigraphie myocardique au thallium offrirait
l’avantage de permettre un diagnostic de localisation de l’ischémie
myocardique. En réalité, il faut retenir qu’il est nécessaire d’observer
des zones d’hypofixation importantes pour qu’elles soient décelables
à la scintigraphie. Les territoires les plus « parlants » sont le territoire
antérieur et le territoire latéral. En revanche, les déficits de fixation à
l’apex, dans la région latérale (en particulier chez les femmes) ou à
la partie inférieure du coeur (en particulier chez l’obèse), sont
d’interprétation difficile. Enfin, il faut savoir que la survenue d’un
bloc de branche, en particulier d’un bloc de branche gauche, est
susceptible de déterminer une hypofixation typique dans le territoire
septal sans qu’il existe de lésion correspondante de l’artère
interventriculaire antérieure. Ces faits ne sont pas toujours bien
expliqués, mais constituent un inconvénient assez gênant dans cette
indication où théoriquement la scintigraphie myocardique serait la
plus souhaitable.
Scintigraphie myocardique après injection intraveineuse
de dipyridamole
Le dipyridamole injecté à fortes doses a l’avantage de déterminer
une vasodilatation très importante des petites artérioles
périphériques. Il s’ensuit chez un sujet normal une accentuation
considérable du flux coronaire dans les vaisseaux épicardiques. S’il
existe un obstacle, cette augmentation n’apparaît pas.
On procède à l’injection de l’isotope, suivie de l’injection d’une dose
de 0,5 à 0,75 mg/kg de dipyridamole. La fixation de ce traceur est
suivie au niveau du myocarde et de nouveau effectuée 4 heures plus
tard en période de redistribution. Le seul avantage de cette
technique, dont la sensibilité et la spécificité seraient comparables à
celles de la scintigraphie myocardique à l’effort, est de pouvoir
réaliser cet examen chez des patients incapables de réaliser un effort
(amputés, artéritiques, coxarthrose, sujets âgés, etc).
Angioscintigraphie cardiaque
Elle permet d’étudier la dimension, la cinétique et la contractilité
ventriculaires à la suite de l’injection d’un isotope. En pratique, on
ne considère généralement que la fraction d’éjection. L’épreuve serait
positive lorsqu’il existe une diminution de la fraction d’éjection lors
de l’effort. Ceci n’est observé que lors de lésions coronariennes
sévères. En pratique, la valeur de cet examen est extrêmement
limitée.
¦ Échocardiographie
Échocardiographie de repos
L’échocardiographie, par l’analyse détaillée de la cinétique
segmentaire du ventricule gauche, peut permettre de détecter une
ischémie myocardique de repos [35], ce qui est cependant très rare
dans le cadre de l’angor stable, ou de détecter les séquelles d’un
infarctus qui aurait échappé à l’interrogatoire et à l’électrocardiogramme
(en cas de bloc de branche gauche par exemple). Elle
peut, dans d’autres cas, détecter une pathologie non ischémique, et
donc expliquer des anomalies électrocardiographiques observées
(hypertrophie ventriculaire gauche, cardiomyopathie…).
Enfin, devant un syndrome douloureux thoracique, le diagnostic
précoce d’infarctus du myocarde est capital et la mise en évidence
d’anomalies de la contraction segmentaire peut permettre de
confirmer un diagnostic difficile [49].
Tableau I.
Monotronculaire
Bitronculaire Tritronculaire Tous
patients
Épreuve d’effort
conventionnelle
52 71 83 66
Épreuve d’effort +
dérivations
précordiales
externes
89 94 95 92
Scintigraphie 87 96 98 93
9 Scintigraphie myocardique
au thallium.
11-030-A-10 Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne Cardiologie
10
Échocardiographie de « stress »
L’ischémie myocardique survenant habituellement à l’effort, les
constatations cliniques et électrocardiographiques de repos sont
souvent peu contributives. C’est pourquoi on propose la réalisation
d’un test d’effort avec enregistrement électrocardiographique.
Cependant, ce test présente un certain nombre de limites de
faisabilité (âge, problèmes orthopédiques) et d’interprétation (sujet
de sexe féminin, hypertrophie ventriculaire gauche, anomalie de
l’électrocardiogramme de base) qui ont amené à la recherche de tests
de remplacement. C’est dans ce cadre qu’a été proposée l’échocardiographie
de « stress ».
En effet, l’ischémie entraînant une diminution de la contraction
myocardique, il apparaissait logique de proposer
l’échocardiographie comme moyen de détecter une ischémie
déclenchée par l’augmentation du travail cardiaque. Cependant,
pour des raisons pratiques évidentes, l’effort physique tel qu’il est
réalisé dans une épreuve d’effort classique est rarement utilisé
comme moyen de déclenchement de l’ischémie dans
l’échocardiographie de stress. Des méthodes alternatives ont dû être
trouvées. Ces méthodes recourent à des agents pharmacologiques
qui augmentent le travail cardiaque (dobutamine,
adénosine) ou induisent une vasodilatation des segments coronaires
sains au détriment des segments malades (dipyridamole).
L’examen doit être réalisé par deux personnes : une infirmière et un
cardiologue spécifiquement formés à cette technique. L’échographe
doit avoir une bonne qualité d’imagerie et être couplé à un système
de digitalisation de l’image. Un compte rendu détaillé est adressé
au médecin ayant demandé l’examen. Les images échographiques
sont stockées pour une relecture ultérieure éventuelle.
On note que l’examen peut ne pas être réalisable, soit, dans environ
5 % des cas, en raison d’une échogénicité insuffisante [50, 53], soit, chez
10 % des patients, du fait que le test est non interprétable [51, 53]. Les
effets secondaires extracardiaques (nausées, céphalées, sueurs,
anxiété) sont souvent bien tolérés et ne nécessitent habituellement
pas l’interruption du test. Les effets secondaires cardiaques les plus
fréquents sont l’angor (20 %), l’hypotension (37 %), des extrasystoles
(10 %) ou des troubles du rythme supraventriculaires ou
ventriculaires (5 %).
L’échocardiographie de stress a une valeur diagnostique supérieure
à celle de l’électrocardiogramme d’effort et comparable à celle de la
scintigraphie isotopique pour le diagnostic de la maladie coronaire,
avec une sensibilité comprise entre 68 % et 85 %, et une spécificité
comprise entre 88 % et 97 %, selon les études [25, 37, 38, 40]. La possibilité
de méconnaître une lésion monotronculaire doit être connue [38, 40].
Cependant, l’excellente valeur prédictive négative du test, à la fois
sur le plan diagnostique et pronostique [12, 39], peut aider à mettre en
place une stratégie de surveillance lorsqu’aucune ischémie n’est
documentée.
¦ Artériographie coronaire
C’est un examen important et pratiquement indispensable dans le
bilan d’une angine de poitrine. Effectué par voie percutanée
fémorale, brachiale ou radiale selon la technique de Seldinger,
l’examen comporte deux temps.
Ventriculographie gauche
La cinéangiographie ventriculaire gauche permet d’apporter des
renseignements fondamentaux. L’examen renseigne en effet sur la
cinétique segmentaire du ventricule gauche et permet de repérer
l’existence de zones hypokinétiques, akinétiques ou dyskinétiques,
témoins d’anomalies plus ou moins sévères de la cinétique
segmentaire ventriculaire gauche. Sa représentation nous montre les
diverses variétés d’anomalies de contraction segmentaire. Par
répétition de la ventriculographie après administration de
modificateurs du comportement ventriculaire (trinitrine), on peut
connaître la réversibilité ou l’irréversibilité d’une forme mineure
d’asynergie (hypo- ou akinésie). La ventriculographie gauche permet
également de repérer l’existence ou non d’une insuffisance mitrale
associée, liée généralement à une ischémie du pilier postérieur de la
mitrale. Sur le plan quantitatif, la ventriculographie présente une
très grande importance. En effet, on peut, à partir de l’image
radiologique réalisée en un seul ou en deux plans, mesurer de façon
précise le volume télédiastolique et le volume résiduel, c’est-à-dire
le volume télésystolique. À partir de ces deux données, on peut donc
calculer le volume systolique et surtout la fraction d’éjection. On
rappelle que la valeur normale du volume télédiastolique rapporté
au mètre carré de surface corporelle est de 80 ± 15 mL/m2 et la
fraction d’éjection de 66 %. L’existence d’une fraction d’éjection
inférieure à 25 % témoigne d’une détérioration très importante de la
performance ventriculaire.
Coronarographie
Après les mesures de la pression ventriculaire gauche et la
cinéangiographie ventriculaire, on procède à l’opacification sélective
de chacune des artères coronaires. L’artériographie coronaire
nécessite une imagerie de qualité obtenue par la numérisation.
Actuellement, il est nécessaire d’obtenir des informations très
complètes et très précises de l’anatomie coronaire. C’est la raison
pour laquelle les opacifications de chacune de ces deux artères
coronaires doivent se faire sous de multiples incidences, au moins
cinq incidences concernant l’artère coronaire gauche et quatre ou
cinq incidences concernant l’artère coronaire droite. Bien qu’un plan
général de l’examen soit effectué et comporte des incidences
obliques antérieures droites, obliques antérieures gauches et
transverses, il est surtout nécessaire de réaliser des opacifications
visant à dégager très exactement les lésions observées en s’aidant
d’incidences dans le plan horizontal, mais aussi et surtout
d’incidences dans le plan craniocaudal.
L’artériographie coronaire précise tout d’abord la dominance
vasculaire.
On considère très attentivement les sténoses qui se caractérisent par
une image d’amputation sur le luminogramme obtenu. On apprécie
en premier lieu le degré de la sténose : celui-ci varie suivant les
incidences. La sténose peut être en effet peu serrée dans une
incidence et beaucoup plus serrée dans une autre, si l’on a l’habitude
de considérer uniquement l’incidence où la sténose apparaît la plus
serrée.
L’interprétation visuelle est assez grossière, dépendant de
l’expérience, en particulier de celle résultant de pratique des outils
de quantification. Comme cela a été expliqué antérieurement, la
réserve coronaire à l’effort diminue lorsqu’une sténose réduit le
diamètre de l’artère d’au moins 50 %. Il faut se rappeler que, dans
une image plane, une réduction de 50 % correspond en fait à une
réduction de 75 % de la section. Aujourd’hui, un ensemble moderne
de coronarographie doit comporter la possibilité d’effectuer des
mesures quantitatives avec calcul automatique de la longueur et du
degré du rétrécissement. Ceci minimise la part subjective de
l’interprétation.
Autrefois, la reconnaissance d’une sténose et de sa sévérité, ainsi
que la qualité du lit d’aval, étaient les seuls éléments indispensables
à l’évaluation diagnostique et surtout à la décision thérapeutique.
Avec l’avènement de l’angioplastie transluminale coronaire, il faut
être beaucoup plus exigeant sur l’artériographie coronaire qui doit
fournir des renseignements précis concernant la lésion : son type
doit être exactement déterminé, excentrique ou concentrique, ainsi
que sa longueur. Le départ d’une branche collatérale à l’endroit
précis de la sténose doit être repéré. Le trajet même de la sténose,
ses angulations, son siège dans une courbe sont des éléments
importants pour la décision thérapeutique (fig 10). Il en est de même
en ce qui concerne l’existence d’images de defect intraluminal qui
traduit une thrombose, d’ailleurs située le plus souvent en aval de
la sténose.
L’appréciation du lit d’aval et de son diamètre reste un paramètre
très important à évaluer. Classiquement, l’implantation d’un
pontage aortocoronaire est possible si le diamètre du lit d’aval est
au moins égal à 2 mm, tout en sachant que si la sténose est
extrêmement sévère, l’artériographie coronaire peut donner à cet
Cardiologie Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne 11-030-A-10
11
endroit un aspect d’hypoperfusion et de réduction du diamètre qui
est en fait artificiel. L’artériographie coronaire évalue également
l’existence d’une circulation collatérale, controlatérale ou ipsilatérale.
L’existence d’un spasme artériel coronaire surajouté à une sténose
peut être évaluée grâce au test au Méthergint. Celui-ci comporte
l’administration intraveineuse de 0,4 mg de méthylergométrine. Les
opacifications sont répétées 3 et 5 minutes plus tard. Si un spasme
est surajouté à une sténose et se traduit par l’oblitération complète
du vaisseau à l’endroit de la sténose, il doit être immédiatement
levé par l’injection intracoronaire de 3 à 4mg d’isosorbide dinitrate.
Ainsi, l’artériographie coronaire est le pendant anatomique
obligatoire de l’exploration fonctionnelle ayant permis de déceler
l’ischémie myocardique. Au terme de cet examen, on pourrait
distinguer un certain nombre de situations :
– l’existence d’une sténose du tronc commun coronaire gauche est
une des lésions graves, sévères, qui nécessite un minimum
d’injection. Le document doit être montré le plus rapidement aux
chirurgiens pour décider une revascularisation myocardique semiurgente
ou du moins très rapide ;
– l’artériographie coronaire identifie un groupe de patients
monotronculaires, c’est-à-dire caractérisés par un seul vaisseau lésé
de façon significative. Il peut s’agir d’une occlusion isolée, chez un
patient ayant un seul vaisseau lésé, par exemple au décours d’un
infarctus du myocarde. La partie distale du vaisseau occlus peut
d’ailleurs être reprise par une circulation collatérale. Il peut s’agir
simplement d’une sténose serrée, responsable d’un angor plus ou
moins sévère, et généralement cette éventualité fait l’objet d’une
angioplastie coronaire.
À l’opposé, il existe des patients porteurs de lésions multiples,
étagées, touchant les principaux vaisseaux coronaires et l’on a
l’habitude de considérer l’artère coronaire gauche comme comptant
pour deux vaisseaux. On identifie ainsi des patients bi- ou
tritronculaires. Ainsi peuvent se montrer des occlusions complètes
de vaisseaux associées à des sténoses d’autres vaisseaux. Leur bilan
exact doit être effectué afin de décider ou non l’éventualité d’une
revascularisation myocardique par pontage ou par angioplastie.
Enfin, il peut exister des doutes sur la sévérité et le rôle d’une
sténose coronaire à la limite de la signification. Dans ces conditions,
la mesure de la réserve fractionnelle de flux avec un guide de
pression peut être très utile.
Évolution
L’évolution de l’angine de poitrine est totalement imprévisible.
Gallavardin [24] disait que « l’angine de poitrine est une maladie qui
dure de 30 secondes à 30 ans ».
Certes, sur le plan anatomique, les lésions progressent lentement,
mais sur le plan clinique, l’évolution s’effectue par poussées.
On peut néanmoins schématiser certaines évolutions.
ANGINE DE POITRINE STABLE
Dans certains cas, après la première crise d’angine de poitrine, les
crises d’angor vont se répéter pour des efforts généralement
importants et cet état stable peut durer plusieurs mois, mais il est
légitime de mettre en doute le diagnostic si un patient qualifié de
coronarien n’a effectué aucun événement aigu au cours d’une
période de 10 à 15 ans.
ANGOR INSTABLE
L’évolution est le plus souvent rythmée par des poussées évolutives
caractérisées par l’apparition de l’angine de poitrine instable
résultant d’une fissuration de la plaque, avec saignement, d’où une
thrombose [12, 17, 18] et une embolisation réduisant plus ou moins
durablement et de façon plus ou moins subtotale la lumière de
l’artère.
Sur le plan clinique, l’angine de poitrine instable se définit par une
douleur spontanée prolongée (au moins 15 minutes), apparaissant
en dehors de tout effort et le plus souvent dans la dernière partie de
la nuit. La suspicion d’un syndrome coronaire ischémique aigu
impose un électrocardiogramme. Si celui-ci montre l’existence d’un
sus-décalage persistant du segment ST, il s’agit d’un infarctus
transmural imposant des mesures de recanalisation rapides par
thrombolyse ou angioplastie primaire. Dans les autres éventualités,
on peut noter des troubles de la repolarisation divers à type de sousdécalage
de ST, d’inversion de l’onde T, d’aplatissement de l’onde T.
L’électrocardiogramme peut même être normal chez un patient
présentant un syndrome coronaire ischémique aigu.
Parfois, il s’agit simplement d’une inversion d’une onde T qui
devient négative, pointue et symétrique. On peut rencontrer des
aspects de pseudonormalisation de l’onde T. Dans ces cas, il s’agit
de patients présentant des anomalies de la repolarisation qui, au
cours des crises, présentent un aspect pratiquement normal avec
retour à l’état antérieur lors de l’administration de trinitrine ou lors
de la disparition de la crise. C’est dire l’intérêt, dans toutes ces
formes, d’enregistrer l’électrocardiogramme percritique avant toute
prise de trinitrine et de l’enregistrer après la prise de ce médicament.
Enfin, le troisième critère de l’angine de poitrine instable est un
critère rétrospectif : absence d’apparition d’une onde Q et absence
d’élévation enzymatique (le dosage des créatines phosphokinases
(CPK) reste dans les limites de la normale et la fraction muscle-brain
[MB] reste normale). En revanche, on peut noter une élévation de la
troponine I ou T, témoignant des petites nécroses résultant de
l’embolisation distale.
Il est habituel d’ajouter à ces trois critères (douleur spontanée
prolongée, modifications électrocardiographiques percritiques,
absence de signes électrocardiographiques ou biologiques de
nécrose) l’absence de facteurs extracardiaques d’instabilité (anémie,
hypothyroïdie, etc).
La survenue d’une angine de poitrine instable implique
l’hospitalisation immédiate en unité de soins intensifs où le patient
est soumis à un traitement optimal comportant une perfusion
d’héparine, l’administration d’aspirine, des bêtabloquants, des
dérivés nitrés par voie intraveineuse.
Les patients présentant des signes de gravité, c’est-à-dire une
élévation des troponines T ou I, ceux développant une angine de
poitrine instable survenant précocement après un infarctus du
myocarde récent, une instabilité hémodynamique (oedème aigu du
poumon ou collapsus), une instabilité électrocardiographique
doivent être soumis à un traitement par les inhibiteurs des
récepteurs GpIIb-IIIa. Dans l’éventualité où les troponines restent
normales, le patient continue le traitement par aspirine, héparine
intraveineuse et bêtabloquants. Un nouveau dosage de troponine,
réalisé 8 à 12 heures plus tard, permet de préciser s’il y a lieu
10 Coronaire droite sténosée.
11-030-A-10 Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne Cardiologie
12
d’entreprendre ou non un traitement par les GpIIb-IIIa ou de
considérer ultérieurement que la douleur thoracique de ce patient
n’était pas obligatoirement d’origine ischémique et de faire l’objet
d’une évaluation complète.
L’artériographie coronaire des patients avec angine de poitrine
instable peut montrer des sténoses irrégulières, excentriques, à bords
déchiquetés, correspondant au type II d’Ambrose [1, 2]. Ces aspects
d’angor instable correspondent aux lésions anatomiques décrites par
Davies et Falk [13, 18, 19], c’est-à-dire par une rupture de la capsule
fibreuse. Cette fissuration met en contact le sang avec le matériel
intraplaque. Il en résulte l’apparition d’un thrombus endoluminal
qui obstrue de façon subtotale la lumière coronarienne avec
apparition de phénomènes de lyse spontanée et de rethrombose
spontanée expliquant la disparition et la réapparition des crises
d’angor instable finalement liées à une obstruction subtotale du
vaisseau.
Il existe également une possibilité de saignement à l’intérieur de la
plaque aboutissant à une majoration de celle-ci et à la possible
progression des lésions athéroscléreuses [13, 19] après l’épisode d’angor
instable lié à l’existence d’un hématome augmentant l’importance
de l’obstacle intraluminal.
Ces divers travaux anatomopathologiques ont montré que l’angine
de poitrine instable présentait de nombreux points communs avec
l’infarctus du myocarde dont elle ne diffère que par le caractère
subtotal de l’occlusion, sa régression, mais il est évident que le
dénominateur commun entre ces deux états est la thrombose.
Celle-ci se manifeste sur l’artériographie coronaire par un defect
intraluminal [1, 2, 10] caractéristique (fig 11). Ces defects sont d’autant
plus fréquemment observés que l’artériographie coronaire est
réalisée en pleine période d’instabilité. Lorsque le délai entre la
dernière douleur et l’artériographie coronaire est inférieur à
24 heures, on trouve dans 63 % des cas [59] des images compatibles
avec un thrombus intracoronaire. Van Belle et al ont montré par
angioscopie que l’on pouvait d’autant plus visualiser le thrombus
que l’examen était réalisé dans les heures suivant le dernier épisode
douloureux. L’évolution spontanée de l’angine de poitrine instable
réfractaire non traitée est l’infarctus du myocarde ou éventuellement
même la mort subite. De nos jours, sous l’influence du traitement
classique (aspirine + héparine), la fréquence des décès ou des
infarctus varie encore entre 7 et 16 %.
COMPLICATIONS
L’évolution de l’angine de poitrine peut être émaillée de nombreuses
complications.
¦ Infarctus du myocarde
C’est la complication classique et l’aboutissement de l’insuffisance
coronaire. Cet accident survient, soit de façon brutale chez un
angineux connu, soit précédé d’un épisode d’instabilité (45 % des
cas). L’infarctus du myocarde s’observe dans 30 % des cas dans la
première année d’installation de l’angine de poitrine et dans 60 %
des cas au cours de la deuxième année suivant l’apparition de
l’angor. L’accident coronarien traduit l’occlusion complète d’une
artère, majorant l’importance des lésions et la détérioration de la
fonction ventriculaire. Dans quelques cas isolés de sténose isolée
d’un vaisseau, la survenue d’un infarctus peut s’accompagner d’une
disparition complète des douleurs. Dans la majorité des cas, en
particulier chez les multitronculaires, l’apparition d’un infarctus du
myocarde est suivie le plus souvent d’une accentuation des douleurs
angineuses.
¦ Insuffisance cardiaque
C’est une complication classique traduisant une détérioration
progressive de la fonction ventriculaire gauche. Il s’agit là de zones
de fibrose juxtaposées qui aboutissent à un dysfonctionnement
ventriculaire important. L’insuffisance cardiaque se traduit au début
par des manifestations d’insuffisance ventriculaire gauche, puis
d’insuffisance cardiaque congestive globale. L’apparition de celles-ci
traduit généralement un pronostic très péjoratif dans les années
suivantes. Dans certains cas, l’insuffisance cardiaque est la première
manifestation de la maladie athéroscléreuse. Elle survient en général
chez les patients ayant fait des infarctus du myocarde à bas bruit,
sans aucun symptôme douloureux.
¦ Mort subite
Elle peut interrompre à tout moment l’évolution d’une angine de
poitrine. Cet accident est généralement lié à un trouble du rythme
grave, en particulier à une fibrillation ventriculaire.
L’évolution peut également être émaillée par d’autres manifestations
et accidents de la maladie athéroscléreuse, en particulier par un
accident vasculaire cérébral.
Le pronostic d’ensemble de l’angine de poitrine est donc
extrêmement variable et, dans l’état actuel des choses, compte tenu
des possibilités thérapeutiques, on estime que la mortalité actuelle
est en moyenne de 2 à 3% par an.
En fait, le pronostic individuel d’un patient nécessite l’évaluation de
certains facteurs prédictifs de survie. La fonction ventriculaire
gauche est l’un des éléments les plus importants du pronostic et il
est évident qu’une large akinésie ou une perturbation importante de
la cinétique segmentaire, voire une hypokinésie globale diffuse, sont
des facteurs très péjoratifs de pronostic.
La diffusion des lésions est également un facteur important et il est
évident que des lésions multitronculaires diffuses réparties depuis
la partie proximale du vaisseau jusqu’à sa partie distale comportent
un pronostic très péjoratif.
Classiquement, la sténose du tronc commun coronaire gauche est
extrêmement sévère. Il en est de même du pronostic de la sténose
de l’interventriculaire antérieure qui est beaucoup plus sévère
qu’une sténose isolée de l’artère coronaire droite.
D’autres facteurs ont un rôle prédictif extrêmement important. L’âge
joue un rôle notable ; la mortalité est d’autant plus élevée que le
sujet est plus âgé. La disparition des facteurs de risque joue un rôle
nullement négligeable, en particulier la persistance d’une
intoxication tabagique est un facteur de mauvais pronostic. Sur le
plan clinique, un angor stable mais très sévère ou la répétition des
épisodes d’angor instable sont des facteurs importants de pronostic
péjoratif. Il en est de même de la présence d’extrasystoles
ventriculaires multiples décelées par l’enregistrement continu de
l’électrocardiogramme. Une épreuve d’effort très rapidement
positive s’accompagnant d’une chute tensionnelle est également de
mauvais pronostic.
Au cours de ces dernières années, on a insisté sur le rôle des facteurs
prédictifs de l’inflammation. Le groupe de Maseri a en effet montré
que les taux de différents marqueurs d’inflammation (protéine C
réactive, sérum amyloïde) sont élevés chez les patients qui ont un
mauvais pronostic à distance. Ces marqueurs sont donc très utiles
pour établir le pronostic dans le long terme.
11 Sténose de la partie moyenne de la
coronaire droite avec image de thrombus
(1).
Cardiologie Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne 11-030-A-10
13
Diverses études multifactorielles ont permis de sélectionner ces
facteurs et l’importance de ces travaux ne doit échapper à personne
car ces derniers permettent de sélectionner des groupes à haut risque
qui doivent donc faire l’objet de thérapeutiques plus agressives, en
particulier de revascularisation myocardique.
Formes cliniques
FORMES ATYPIQUES
La crise d’angine de poitrine étant essentiellement un symptôme,
c’est-à-dire un phénomène subjectif, il est aisé de comprendre
l’existence de nombreuses formes symptomatiques atypiques.
¦ Formes atypiques selon le siège
En dehors du siège thoracique médian, il existe des formes où la
douleur est localisée à des endroits divers. Les formes abdominales
avec douleurs situées au niveau du creux épigastrique peuvent être
observées, comme dans l’angine de poitrine commune, après un
effort postprandial. On pense donc plus volontiers à une affection
digestive, d’autant que des éructations postcritiques sont fréquentes
dans cette éventualité. On peut ainsi décrire des formes pseudoulcéreuses,
des formes à type de cholécystite, des formes à type
d’aérogastrie.
Dans d’autres cas, les douleurs sont latéralisées, soit à droite, soit à
gauche, plus ou moins pongitives. Il est des cas où la douleur
démarre au niveau de l’épaule et irradie dans le thorax. Il est des
formes où la douleur démarre au niveau des coudes et des poignets,
prenant une allure constrictive en forme de « bracelet trop serré ».
La douleur remonte ensuite vers le bras, l’épaule et atteint le thorax.
Il s’agit du classique angor retourné.
Il faut enfin mentionner des formes dorsales.
¦ Formes atypiques selon les irradiations
Nous avons vu que les irradiations traditionnelles se faisaient vers
l’épaule et le bras gauche, la mâchoire. Il est des formes atypiques
avec des irradiations sous-costales qui sont autant de formes de
diagnostic difficile.
¦ Formes atypiques suivant le mode de survenue
Dans l’angine de poitrine commune, l’effort est le facteur
déclenchant habituel. Tous les efforts peuvent déclencher une
douleur : la marche, la course, le port d’un objet lourd, le
déboulonnage d’une roue de voiture, un effort sexuel, l’effort de
défécation. Dans ces diverses éventualités, le patient peut mettre
l’accent sur ce mode de survenue très particulier et faire ainsi
envisager des diagnostics extrêmement divers.
Il faut insister sur une forme particulière : l’angine de poitrine non
précédée d’un effort, c’est-à-dire spontanée. Cette éventualité,
surtout si elle est prolongée, peut faire penser à l’angine de poitrine
instable. Elle doit faire également penser à l’angor de Prinzmetal
[36, 41, 44].
¦ Angine de poitrine de Prinzmetal
En 1959, Prinzmetal [54, 55] a décrit une forme d’angine de poitrine
particulière (variant angina). Il s’agit d’une douleur qui survient sans
aucun facteur déclenchant apparent et en particulier au repos. La
crise survient plus volontiers dans la deuxième partie de la nuit,
entre 7 heures et 8 heures du matin. Il s’agit d’une douleur
angineuse typique relativement prolongée qui peut s’accompagner
de malaise à type de lipothymie ou même de véritable syncope. Ces
éventualités sont liées à des troubles du rythme survenant pendant
la crise.
L’ensemble peut survenir de façon strictement isolée ou chez un
patient présentant une angine de poitrine d’effort tout à fait banale
mais ayant quelques caractéristiques particulières. Le patient décrit
assez volontiers que son angine de poitrine d’effort est très sensible
par exemple au froid, qui raccourcit régulièrement le périmètre de
marche, alors que le même effort effectué en atmosphère chaude
peut s’accompagner d’une distance de marche beaucoup plus élevée.
Parfois, le patient décrit le phénomène du deuxième souffle (walk
through phenomenon). Dans cette éventualité, le patient démarre son
effort, ressent une crise d’angine de poitrine et la poursuite de
l’effort entraîne non pas la persistance de la crise comme d’habitude,
mais au contraire son atténuation ou même sa disparition. Une telle
éventualité doit faire songer à un spasme artériel coronaire. Enfin, la
coexistence d’un phénomène de Raynaud bilatéral traduisant une
anomalie vasomotrice des extrémités, le plus souvent spastique, doit
également faire évoquer le phénomène. Dans cette éventualité,
l’examen-clé est l’enregistrement électrocardiographique Holter [63].
Cet examen permet d’enregistrer plusieurs types d’anomalies ; la
plus classique, qui correspond à la forme typique de l’angor de
Prinzmetal, est un sus-décalage du segment ST traduisant une
ischémie transmurale massive. Il existe généralement une
exagération de la flèche R de l’électrocardiogramme ; surtout, cette
anomalie est réversible et dans les heures qui suivent, il n’existe pas
d’élévation enzymatique.
Il faut savoir cependant que le sus-décalage du segment ST n’est
pas l’apanage de l’angine de poitrine de Prinzmetal.
L’enregistrement électrocardiographique Holter peut en effet
enregistrer un sous-décalage du segment ST, une inversion de l’onde
T et une pseudonormalisation de l’électrocardiogramme. En fait, la
caractéristique fondamentale du spasme artériel coronaire est que
ces anomalies de la repolarisation sont transitoires, surtout non
précédées des paramètres traduisant une perturbation des besoins
en oxygène du coeur et en particulier ne sont pas précédées d’une
accélération de la fréquence cardiaque [41].
En revanche, pendant l’apparition des modifications
électrocardiographiques et en particulier pendant la douleur, il peut
exister une accélération du rythme cardiaque.
Il faut exiger des enregistrements de qualité, analyser très
soigneusement la bande pour éliminer les artefacts, et l’on a
l’habitude d’exclure toutes les anomalies de la repolarisation qui ne
durent pas au moins 40 secondes.
L’enregistrement Holter utilisant des boîtiers à mémoire solide et la
numérisation du signal électrocardiographique sont particulièrement
utiles dans ce type de détection.
Le diagnostic d’angine de poitrine de Prinzmetal implique le
transfert du patient en unité de soins intensifs et l’enregistrement
électrocardiographique continu. L’épreuve d’effort peut être
effectuée chez ces patients [65, 66]. Cette épreuve d’effort a pour but
d’évaluer la composante organique de l’ischémie organique. Elle
peut mettre en évidence les aspects tout à fait classiques de
l’ischémie myocardique d’effort tels qu’ils ont été décrits
précédemment. Elle peut montrer un signe caractéristique du
spasme, c’est-à-dire l’apparition d’un sus-décalage du segment ST,
pendant ou surtout après l’effort [9].
L’artériographie coronaire est un examen indispensable. Cet examen
précise sur ce territoire l’existence de lésions athéroscléreuses et
recherche un spasme, soit spontané, soit provoqué par le test au
Méthergint (cf supra) [4].
Dans cette éventualité, on peut observer [5], soit l’apparition d’un
rétrécissement notable à l’emplacement d’une simple irrégularité de
l’artère (fig 12), soit le plus souvent, lors d’angine de poitrine mixte
alternant angor d’effort et angor spontané, un spasme artériel
coronaire surajouté à une lésion athéroscléreuse significative. Dans
cette éventualité, le spasme se manifeste par une occlusion complète
du vaisseau, accompagnée de douleurs et d’un sus-décalage du
segment ST traduisant l’ischémie transmurale massive. Il convient
encore d’insister sur l’opportunité de libérer immédiatement le
spasme par l’injection intracoronaire d’un dérivé nitré. Le spasme
artériel coronaire surajouté à une sténose s’observe le plus souvent
sur l’artère coronaire droite (50 % des cas), sur l’artère
interventriculaire antérieure (30 % des cas) et sur l’artère circonflexe
(11 % des cas).
11-030-A-10 Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne Cardiologie
14
¦ Angine de poitrine instable postinfarctus
L’infarctus du myocarde doit faire l’objet de mesures de
recanalisation précoces. Cette recanalisation peut s’effectuer, soit par
angioplastie primaire, soit, dans une grande majorité de cas, par
injection intraveineuse d’agents fibrinolytiques. Celui-ci permet
d’obtenir la dissolution du caillot et la reperméabilisation de l’artère.
Toutefois, un certain nombre d’études ont montré qu’après la
reperméabilisation pouvaient survenir des phénomènes de
réocclusion subtotale ou totale aboutissant ou non à des
réinfarcissements. Dans les deux cas, il y a récurrence de symptômes
pouvant réaliser le tableau de l’angine de poitrine instable
postinfarctus. Il s’agit là d’un tableau particulier dont la fréquence
peut être évaluée à 26 % des cas après un traitement thrombolytique
par le recombinant-tissue-type plasminogen activator (rt-PA) au cours
de l’infarctus du myocarde. L’apparition d’une récurrence de ces
crises et d’un angor instable postinfarctus milite en faveur d’une
artériographie coronaire précoce permettant de prendre la décision
d’une revascularisation myocardique chirurgicale, ou par
angioplastie si celle-ci est possible.
FORMES ASSOCIÉES
¦ Association de l’angine de poitrine à l’ischémie
myocardique silencieuse
Les travaux de ces dernières années ont montré la fréquence avec
laquelle il était possible d’observer des phénomènes d’ischémie
myocardique silencieuse.
Dans sa forme vraie, celle-ci survient chez des sujets totalement
asymptomatiques, mais il existe des formes associées à l’angine de
poitrine typique. Fréquemment, des épreuves d’effort réalisées chez
des sujets présentant un angor d’effort révèlent l’apparition de
phénomènes d’ischémie myocardique, alors que le patient ne ressent
aucun symptôme. De même, les enregistrements électrocardiographiques
Holter ont permis de mettre en évidence des
épisodes d’ischémie myocardique caractérisés par un sous-décalage
du segment ST typique et prolongé, sans aucune manifestation
clinique, chez des patients qui présentent, lors des efforts
importants, une angine de poitrine d’effort typique. Gottlieb a
démontré que ces épisodes d’ischémie myocardique indolore
survenant chez des patients ayant présenté des manifestations
d’angor instable constituent un facteur de pronostic aggravant. Il y
a donc possibilité d’association d’une ischémie myocardique d’effort
douloureuse et d’épisodes d’ischémie myocardique silencieuse. Il a
été démontré que ces épisodes d’ischémie myocardique silencieuse,
associés à de l’angine de poitrine, ne modifient en rien le pronostic
général du patient et ne modifient également en rien la
thérapeutique à adopter vis-à-vis de ces malades.
¦ Angine de poitrine associée à des facteurs
extracardiaques
Tout facteur assurant une déplétion sanguine, donc une perte des
transporteurs d’oxygène, est susceptible d’engendrer une majoration
d’un angor stable.
II en est ainsi de l’anémie qui, lorsqu’elle survient à bas bruit,
caractérisée par des saignements occultes pouvant aboutir à des
déglobulisations importantes, peut majorer une angine de poitrine
d’effort stable. Cela s’observe fréquemment chez les sujets âgés
ayant des pertes sanguines méconnues par un cancer de l’estomac,
une hernie hiatale ou tout simplement un saignement hémorroïdaire
répété.
Il en est de même des aggravations secondaires à une
hyperthyroïdie. Au cours de cette affection, la majoration du
métabolisme de base, la tachycardie sont susceptibles de déterminer
une exagération des manifestations angineuses.
Enfin, il faut évoquer le problème de l’angine de poitrine intriquée,
décrite par les auteurs lyonnais. Dans la description princeps, il
s’agit d’une angine de poitrine stable qui, à l’occasion d’un
phénomène extracardiaque et le plus souvent digestif (mais qui peut
être également rhumatologique), s’aggrave, avec apparition de ce
que l’on appelait autrefois un « état de mal angineux ». Dans la
description initiale, le traitement du facteur extracardiaque
(traitement d’un ulcère gastroduodénal, d’une cholécystite) est
susceptible de restabiliser cet état de mal angineux. En vérité, l’angor
intriqué est rare. Dans l’extrême majorité des cas, il s’agit plus
souvent d’une angine de poitrine d’effort sévère qui, à l’occasion
d’un épisode intercurrent, s’est décompensée, et l’on peut se
demander si dans un certain nombre de cas, il ne s’agit pas plus
d’une coïncidence que d’une véritable intrication.
Diagnostic différentiel
DIAGNOSTIC D’UNE FORME TYPIQUE
D’ANGINE DE POITRINE D’EFFORT
Dans cette forme typique, l’angine de poitrine d’effort pose peu de
problèmes diagnostiques. Si la sémiologie est typique et s’il existe
des signes objectifs d’ischémie myocardique, le diagnostic est
facilement établi. En revanche, le mécanisme reste à préciser et dans
ce cadre, il faut séparer l’angine de poitrine d’effort typique liée à
l’athérosclérose coronarienne, qui nous préoccupe ici, des
manifestations d’angine de poitrine d’effort typique mais à
coronaires normales, telles qu’on les observe au cours du
rétrécissement aortique ou encore du syndrome X. Dans cette
dernière éventualité, il s’agit de patients présentant un syndrome
angineux typique d’effort associé à des signes objectifs d’ischémie
myocardique. Nous avons l’habitude d’exiger deux preuves
obligatoires d’ischémie myocardique (par exemple : épreuve d’effort
positive et production d’acide lactique lors de la stimulation
électrique avec recueil de sang artériel et veineux coronaire),
associées à une coronarographie normale. Ces faits sont peu
nombreux mais ils existent. Il faut évoquer également le diagnostic
chez des hypertendus qui présentent, on le sait, une diminution de
la réserve coronarienne, alors que la coronarographie est strictement
normale. Chez ces malades, on retrouve donc l’association d’un
angor d’effort typique, d’une hypertension artérielle, d’une épreuve
d’effort souvent pathologique et d’une coronarographie strictement
normale.
DIAGNOSTIC D’UNE FORME ATYPIQUE
D’ANGINE DE POITRINE
La véritable difficulté diagnostique réside dans les formes atypiques.
¦ Douleurs pariétales
Le diagnostic le plus facile à reconnaître est celui des douleurs
pariétales. En effet, on reproduit très exactement la douleur dont se
12 Spasme coronaire provoqué par le test au Méthergint.
A. État de base.
B. Spasme.
C. Après injection intraveineuse de nitrés.
*A
*B
*C
Cardiologie Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne 11-030-A-10
15
plaint le patient en palpant la face antérieure du thorax. Ces
douleurs peuvent être liées, soit à une fracture de côte récente ou
semi-récente méconnue, soit à une arthrite sternocostale ou
chondrocostale, au syndrome de Tietze, à une cellulite précordiale.
Certaines douleurs précordiales ne sont que la projection de
douleurs de voisinage, telles que la douleur d’une périarthrite
scapulohumérale ou d’une cervicarthrose. D’autres douleurs de
siège atypique ne sont en fait que la traduction de manifestations
digestives d’un ulcère, d’une cholécystite, d’une hernie hiatale.
Certaines douleurs qui varient avec les mouvements respiratoires
peuvent être liées à une séquelle pleurale, au décours par exemple
d’une symphyse pleurale.
¦ Crise douloureuse thoracique prolongée
La douleur thoracique de type angineux et prolongé évoque
essentiellement quatre diagnostics.
Bien évidemment, en premier lieu l’infarctus du myocarde : la
douleur se caractérise par son intensité plus grande, sa longue
durée, ses irradiations plus étendues et les patients qui ont souffert
antérieurement d’angine de poitrine ne s’y trompent pas, la douleur
est différente.
Il faut évoquer aussi le diagnostic d’embolie pulmonaire, plus
souvent latéralisée, variable avec les mouvements respiratoires,
s’accompagnant d’une tachycardie. Le diagnostic est affirmé par
l’existence de signes cliniques de phlébothromboses et peut être
complété par la réalisation d’une phlébographie et d’une
angiographie pulmonaire.
Le diagnostic de dissection aortique est parfois malaisé.
Typiquement, il s’agit d’une douleur naissant sur la face antérieure
du thorax, enjambant l’épaule gauche et irradiant dans le dos. Cette
douleur migratrice, parfois syncopale, est fort évocatrice, mais peut
être de type et de siège inconstants. Classiquement, on note sur la
radiographie thoracique un élargissement de l’ombre aortique et il
n’y aurait pas de modification électrocardiographique, ni
enzymatique. En fait, on connaît la possibilité d’extension d’une
dissection aortique de type I aux ostia coronariens donnant donc
des modifications électrocardiographiques et éventuellement
enzymatiques. Le diagnostic est donc malaisé et c’est dans ce
domaine que l’échocardiographie, le scanner et la résonance
magnétique nucléaire peuvent apporter des renseignements
importants.
Enfin, une douleur variable avec la toux, avec le mouvement
respiratoire, avec le changement de position du patient peut faire
évoquer une péricardite, surtout si elle est associée à une fièvre
initiale. Toutefois, le diagnostic est parfois hésitant, car les
modifications électrocardiographiques peuvent ne pas être
évocatrices de péricardite, mais d’ischémie myocardique. La
réalisation d’un échocardiogramme peut éventuellement faciliter le
diagnostic.
Ainsi, contrairement à ce que l’on pourrait penser, le diagnostic
d’angine de poitrine est souvent malaisé. On ne saurait en effet trop
répéter que ce diagnostic repose sur un interrogatoire qui doit être
non suggestif et non orienté. Toutefois, l’expérience clinique
commune montre qu’il existe une variabilité de réponses
extraordinaire et tel syndrome douloureux typiquement angineux
relevé par l’externe le matin peut devenir une précordialgie atypique
lors de la visite du patron et réciproquement. Comment s’en étonner
lorsque l’on pense que le patient peut découvrir les « bonnes
réponses » à une série d’interrogatoires qui posent finalement
toujours les mêmes questions ?
Traitement de l’angine de poitrine
TRAITEMENT DE LA CRISE
Il repose essentiellement sur l’administration de trinitrine.
Celle-ci peut être administrée sous forme de tablette sublinguale. Il
faut dans ce cas bien prévenir le patient que ce produit doit être
croqué et qu’il faut le laisser déliter sous la langue. Actuellement, il
existe d’autres formes d’administration de la trinitrine, en particulier
la trinitrine en nébulisation. Il faut inviter les patients à consommer
ces dérivés nitrés chaque fois qu’ils présentent une crise.
En effet, la tendance naturelle de ces coronariens est de garder ces
médicaments pour une crise qui pourrait être plus forte : mieux vaut
une dragée qu’une crise. Il faut même insister sur la nécessité d’un
traitement prophylactique et sur l’opportunité pour le coronarien de
prendre de la trinitrine sublinguale ou un spray de trinitrine avant
d’effectuer un effort dont il sait la nature « anginogène ».
TRAITEMENT DE FOND
¦ Méthode médicale
Bêtabloquants
Ils constituent des médications importantes dans le traitement de
l’angine de poitrine. Ces substances agissent essentiellement en
bloquant les effets néfastes de la stimulation adrénergique. Ils
diminuent la fréquence, la pression artérielle et la contractilité, c’està-
dire les trois paramètres essentiels des besoins en oxygène du
coeur.
Ils permettent donc d’ajuster les besoins aux apports et d’éviter la
disparité caractéristique de l’ischémie myocardique. C’est dire qu’en
ce domaine il faut utiliser essentiellement des bêtabloquants sans
action sympathomimétique intrinsèque. Sur le plan pratique, l’idéal
serait de guider ce traitement bêtabloquant et sa prescription par
des épreuves d’effort en administrant des doses progressives jusqu’à
ce que le patient ne puisse dépasser 120 battements/min à l’effort.
En pratique, on se fie généralement à la fréquence de base, et il faut
que la bradycardie à l’état de base se situe entre 50 et
60 battements/min.
Calcium-bloquants
Ces substances agissent essentiellement par leur action
vasodilatatrice au niveau des grosses artères épicardiques. Certaines
d’entre elles agissent par une légère action bradycardisante
(diltiazem et vérapamil). Parmi les divers médicaments proposés,
mentionnons la nifédipine, très vasodilatatrice mais légèrement
tachycardisante ; le diltiazem a à peu près la même action
vasodilatatrice mais bradycardisante ; le vérapamil déprime la
contractilité myocardique. Les calcium-antagonistes à tendance
tachycardisante n’ont pas leur place dans le traitement de l’angine
de poitrine qu’ils peuvent aggraver. En revanche, les calciumantagonistes
du calcium à action bradycardisante ont donné des
résultats satisfaisants lors d’études diverses.
Dérivés nitrés
Il est actuellement démontré qu’en traitement de fond, les dérivés
nitrés doivent être administrés à fortes doses pour surmonter l’effet
de « premier passage » hépatique. Les dérivés nitrés peuvent être
administrés sous forme de préparation galénique à effet retard : 20 à
30 mg/24 h peuvent être utilisés. Ils peuvent être utilisés sous forme
d’onguents ou sous forme transdermique.
Ces dérivés nitrés ont des durées d’action diversement prolongées.
Il faut signaler qu’il existe un effet d’accoutumance et qu’il est bon
d’effectuer de temps à autre des fenêtres thérapeutiques pour
éliminer ces effets d’accoutumance.
La molsidomine possède des propriétés vasodilatatrices très
intéressantes et serait douée également d’activité antiplaquettaire.
Dans le cadre de la prévention secondaire, les patients qui
présentent des signes d’insuffisance coronaire doivent être soumis à
un traitement au long cours comportant la prescription d’aspirine
de 75 à 160 mg/24 h.
Il est également démontré que le clopidogrel était bénéfique dans la
prévention à long terme des événements coronaires chez ces
malades.
11-030-A-10 Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne Cardiologie
16
Il est également très intéressant de noter que l’on a démontré que
les statines, au cours de grands essais cliniques, présentent des
propriétés de prévention secondaire vis-à-vis de la récurrence
d’angine de poitrine instable, d’infarctus du myocarde, de décès, de
réhospitalisation, d’apparition de signes d’artérite des membres
inférieurs ou d’accidents cérébrovasculaires.
Les études 4S, CARE et LIPID ont ainsi montré que tous les
coronariens traités par les statines avaient un bénéfice important en
termes de prévention secondaire, et ceci quel que soit leur taux
initial de cholestérol. En effet, si l’on examine par quartiles les
résultats obtenus dans les différents quartiles de cholestérol, de LDL
cholestérol à l’état de base, on s’aperçoit qu’il n’existe aucune
différence significative depuis des taux bas de LDL cholestérol
jusqu’à des taux élevés.
La récurrence d’angor instable, d’infarctus myocardique,
d’insuffisance cardiaque est significativement diminuée.
¦ Méthodes de revascularisation
Chirurgie de revascularisation
La chirurgie de pontage aortocoronaire est née en 1967 [20]. Cette
méthode a connu de très grands succès. Au départ, la
revascularisation myocardique s’effectuait par l’intermédiaire de
greffons veineux saphène interne renversés, interposés entre l’aorte
et l’artère coronaire distale, en aval du segment sténosé.
Aujourd’hui, la chirurgie de pontage aortocoronaire s’effectue
essentiellement grâce à des greffons artériels, en particulier l’artère
mammaire interne qui, du côté gauche, peut être assez aisément
implantée sur l’artère interventriculaire antérieure.
La tendance est actuellement à la revascularisation « toute
artérielle », c’est-à-dire utilisant l’artère mammaire interne droite ou
d’autres conduits tels que l’artère radiale ou l’artère
gastroépiploïque.
Ceci a permis d’améliorer considérablement le pronostic à long
terme des pontages aortocoronaires.
En effet, il avait été démontré que 10 à 20 % des pontages
aortocoronaires veineux étaient oblitérés dans l’année qui suivait
leur implantation, qu’il existait ensuite une détérioration progressive
de telle sorte que 40 à 55 % des pontages aortocoronaires veineux
étaient complètement oblitérés au bout de 10 ans. En revanche, les
implants de mammaire interne et artériels restent très longtemps
perméables.
Suivant la sévérité des lésions coronaires et la fonction ventriculaire,
le geste opératoire comporte une mortalité comprise entre 1,5 et 3 %.
Il est évident que la complexité des lésions, et surtout la qualité de
la fonction ventriculaire gauche, entraînent un taux de mortalité plus
élevé.
Angioplastie coronaire
Elle est née en 1977. Elle a été décrite par Grüntzig [31] sous la forme
d’une angioplastie à ballonnet. Un cathéter est introduit à l’intérieur
d’une artère coronaire avec mise en place sur la lésion du ballonnet
qui est gonflé à des pressions variables pouvant aller jusqu’à 12 ou
14 atm. Le mécanisme d’action de cette technique repose sur
plusieurs éventualités : fracture de la plaque et réalisation de
chenaux externes importants, compression du matériel
athéroscléreux, extrusion des liquides de la plaque athéroscléreuse,
etc.
Ultérieurement, différents outils ont été proposés : athérectomie par
ablation, athérectomie rotative. Toutefois, toutes ces méthodes se
sont effacées devant l’implantation de stents aortocoronaires.
Réalisée pour la première fois en mars 1986 à Toulouse par Jacques
Puel, la méthode avait connu initialement un grand succès, suivi
d’un grand désenchantement lié au fait qu’il existait un grand
nombre de thromboses aiguës ou subaiguës des implantations de
prothèses endocoronaires. Ceci a été observé malgré une
anticoagulation parfois forcenée.
C’est à partir de 1993 que la prescription d’antiagrégants
plaquettaires puissants, et surtout de l’action synergique combinée
de l’aspirine et des thiénopyridines, a permis d’obtenir un taux de
perméabilité très satisfaisant et de diminuer de façon très
significative les complications aiguës ou subaiguës de l’implantation
des stents.
Aujourd’hui, 86 à 90 % des patients faisant l’objet d’une angioplastie
coronaire reçoivent une prothèse endocoronaire (fig 13). Ceci a
permis d’éliminer complètement les complications aiguës de la
technique (dissection, obstruction aboutissant à des gestes de
sauvetage chirurgical en urgence).
Conditions requises pour la revascularisation myocardique
Les conditions de revascularisation myocardique sont identiques
pour l’angioplastie et la chirurgie de pontage aortocoronaire. Il faut
en effet qu’il existe une lésion sévère (plus de 50 % de réduction de
diamètre, ce qui correspond à plus de 75 % de réduction de la
surface coronaire) et surtout, il faut qu’il existe un bon lit d’aval. Un
lit d’aval irrégulier, sténosé ou a fortiori complètement oblitéré, ne
peut constituer une indication satisfaisante de revascularisation
myocardique.
Parfois, il existe une obstruction complète de l’artère et seule la
partie distale de celle-ci est visible sur la reprise de ce vaisseau par
une circulation collatérale. Il était classique autrefois d’ajouter aux
critères d’indication la nécessité d’une fraction d’éjection supérieure
à 35 % et une bonne fonction ventriculaire.
INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES
¦ Angine de poitrine d’effort commune
Forme légère
Les formes légères, c’est-à-dire un angor tout à fait exceptionnel ne
survenant que lors d’efforts très importants, ne justifient qu’un
traitement médical. Dans ce domaine, il est recommandé de traiter
les facteurs de risque du patient et de lui administrer seulement des
dérivés nitrés en cas de crise ou, au mieux, des dérivés nitrés retard
au long cours.
Forme sévère
L’angine de poitrine sévère (classe 3 de la classification canadienne)
justifie bien sûr une évaluation fonctionnelle par épreuve d’effort ou
scintigraphie et une artériographie coronaire. En fonction de celleci,
on distingue deux éventualités :
– les lésions ne sont pas justiciables d’une revascularisation
myocardique en raison de lésions diffuses sur l’ensemble des
vaisseaux jusque dans leur partie la plus distale avec un mauvais lit
13 Sténose complexe de la coronaire traitée par angioplastie et implantation de stent.
A. Avant.
B. Après dilatation et stent.
*A
*B
Cardiologie Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne 11-030-A-10
17
d’aval. Il est évident que, dans ce domaine, il n’y a pas de
revascularisation à envisager : seul un traitement médical est de
mise. Dans ces formes sévères, il est le plus souvent nécessaire
d’utiliser un traitement triple associant bêtabloquant, dérivé nitré
retard, antagoniste du calcium, associés à des antiagrégants
plaquettaires. Dans d’autres cas, il existe des lésions qui peuvent
faire l’objet d’une revascularisation myocardique : sténose serrée
avec bon lit d’aval ;
– il existe des sténoses isolées d’un vaisseau. Dans l’état actuel des
choses, la revascularisation myocardique s’effectue, sauf cas
exceptionnel, par angioplastie transluminale coronaire.
Seules des sténoses uniques situées au décours de trajets très
tortueux, peu accessibles, peuvent faire l’objet d’une
revascularisation myocardique par pontage aortocoronaire.
En général, les lésions bitronculaires sont à réserver à l’angioplastie
transluminale coronaire. En revanche, les lésions tritronculaires sont
plus difficilement accessibles à l’angioplastie car il est rare que des
lésions de trois vaisseaux soient simultanément accessibles à un
geste d’angioplastie coronaire. Le problème le plus typique est celui
d’une occlusion d’un vaisseau, par exemple la coronaire droite,
associée à des lésions plus ou moins complexes des deux autres
branches coronaires : circonflexe et interventriculaire antérieure.
Suivant la complexité et la difficulté d’abord de ces lésions, la
chirurgie peut être retenue quand cela est très complexe, ou au
contraire, le traitement par angioplastie est privilégié lorsque l’accès
est plus facile.
Les résultats des grandes études BARI, CABRI, EAST et GABI ont
montré que chez les patients multitronculaires (bi- et tritronculaires),
la survie à long terme sans infarctus du myocarde était identique,
que le traitement soit fait par angioplastie ou par chirurgie de
pontage.
Ceci vient d’être confirmé plus récemment par l’étude ARTS,
comportant l’implantation de stents, dont les résultats à 1 an
montrent que les accidents majeurs (décès, accidents vasculaires
cérébraux, infarctus du myocarde) sont à un taux exactement
superposable chez les patients dilatés ou opérés.
En revanche, la différence entre les deux méthodes de
revascularisation tient au risque de nouvelle revascularisation (par
nouvelle angioplastie ou pontage) dans les cas traités par
angioplastie. En effet, les patients traités par angioplastie ont un
risque de resténose. Il est vrai que le caractère répétable de cette
technique et sa facilité opérationnelle minimisent l’importance de ce
problème.
Il est cependant une catégorie de patients qui bénéficient
préférentiellement de la chirurgie par rapport à l’angioplastie, il
s’agit des diabétiques.
Chez les diabétiques, l’étude BARI d’une part, et les résultats de
l’étude ARTS d’autre part, ont montré que le pronostic vital de ces
patients était très supérieur lorsqu’ils étaient traités par chirurgie
que par angioplastie. Dans l’étude ARTS qui comporte l’utilisation
de stents endocoronaires, il existe encore, malgré l’implantation de
ces prothèses, une différence très significative penchant en faveur
de la chirurgie.
L’étude EPISTENT, combinant un inhibiteur des récepteurs GpIIb-
IIIa à diverses techniques interventionnelles, permettra peut-être de
réduire cet écart.
Dans l’état actuel des choses, chez les patients bi- et tritronculaires
diabétiques, il est préférable d’envisager un geste de chirurgie
cardiaque avec pontage artériel plutôt qu’une angioplastie. En
revanche, en ce qui concerne les monotronculaires, le problème n’a
pas été testé, et il semble prudent de continuer à dilater ces patients
en utilisant cependant une implantation systématique de prothèse
complétée par l’infusion d’inhibiteurs des GpIIb-IIIa.
¦ Angine de poitrine de Prinzmetal
Cet état clinique caractérisé essentiellement par un spasme artériel
coronaire relève donc essentiellement d’un traitement vasodilatateur,
d’une part par des médications relaxant la fibre musculaire lisse, les
antagonistes du calcium, d’autre part, dans les formes aiguës et au
début de la maladie, par l’utilisation de dérivés nitrés administrés
par voie intraveineuse. En traitement d’entretien, on utilise
essentiellement les antagonistes du calcium à fortes doses, tels que
la nifédipine à raison de 80-120 mg/24 h ; le diltiazem à la dose de
360 à 480 mg/24 h. L’association de dérivés nitrés est souhaitable,
en rappelant la nécessité de surveiller très étroitement la pression
artérielle, en particulier en orthostatisme, et d’éviter les prises
simultanées des deux médications. Il faut cependant distinguer
plusieurs éventualités :
– angine de poitrine de Prinzmetal sur coronaires normales : c’est la
forme vasospastique pure. Elle justifie donc uniquement un
traitement médical, qu’il convient de poursuivre au moins pendant
1 an. Les divers travaux de la littérature ont montré qu’au terme de
ce délai, il était possible dans un grand nombre de cas de supprimer
totalement et définitivement le traitement. Cela ne se fait
généralement qu’après s’être assuré de la disparition des crises
spontanées par l’enregistrement Holter et par la pratique du test au
Méthergint, basé par exemple sur l’électrocardiogramme en unité
de soins intensifs ;
– angine de poitrine de Prinzmetal par spasme surajouté à des
lésions athéroscléreuses : il y a deux composantes à traiter, d’une
part la composante spastique, en utilisant les médications
précédemment citées, d’autre part la composante athéroscléreuse.
Dans certains cas, celle-ci ne doit faire l’objet que d’un traitement
médical et l’on majore le traitement précédemment décrit. Dans
d’autres cas, le patient peut faire l’objet d’une revascularisation
myocardique (chirurgie ou dilatation). II faut savoir que les lésions
dynamiques, c’est-à-dire les lésions athéroscléreuses avec spasme
artériel coronaire surajouté, donnent plus volontiers des resténoses
que les lésions fixes.
¦ Angine de poitrine instable
La prise en charge des syndromes coronaires ischémiques aigus
implique tout d’abord la mise en unité de soins intensifs.
Dans ce cas, la sédation et le repos au lit sont les premières mesures
à instituer. Dès l’arrivée du patient, après l’interrogatoire et l’examen
physique, l’électrocardiogramme est réalisé et sera répété, cependant
qu’un monitoring continu de la phase de la repolarisation est institué.
Des prélèvements sanguins sont effectués pour dosage de la
troponine et de la CPK-MB.
Un traitement médical comportant l’aspirine à raison de
300 mg/24 h, l’héparine intraveineuse ou les héparines de bas poids
moléculaire est institué en même temps qu’un traitement
bêtabloqueur, sauf s’il existe des contre-indications traditionnelles
(asthme, insuffisance respiratoire, troubles de conduction
auriculoventriculaire).
On y associe généralement des dérivés nitrés à la seringue
électrique, par exemple 0,5 à 1 mg/h d’isosorbide dinitrate en
fonction de la tension artérielle.
Lorsque l’on reçoit le dosage des troponines et si ceux-ci sont
positifs, on institue pour ces patients un traitement par les GpIIb-
IIIa-bloqueurs, c’est-à-dire tirofiban, eptifibatide ou abciximab.
Il est en effet démontré que, chez les patients présentant un
syndrome coronaire aigu, seuls les patients présentant des taux
élevés de troponines bénéficient de ce type de traitement. Ceux-ci
sont également prescrits dans les cas suivants : angine de poitrine
instable, postinfarctus du myocarde récent, instabilité
hémodynamique (par exemple angor instable avec oedème aigu du
poumon) ou encore instabilité rythmique, trouble de l’excitabilité ou
même trouble plus sévère de tachycardie ventriculaire, ce qui en
définitif est relativement rare au cours de l’angine de poitrine
instable.
Lorsque le traitement par les GpIIb-IIIa est institué, il est prudent
de prévoir l’artériographie coronaire précocement et d’effectuer en
particulier le geste d’angioplastie si celui-ci est indiqué, sous couvert
11-030-A-10 Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne Cardiologie
18
de cette infusion d’antiagrégants plaquettaires puissants. Dans ce
cas, le traitement par les inhibiteurs des récepteurs GpIIb-IIIa est
arrêté 12 heures après l’intervention.
Dans le cas où la troponine reste normale, on répète ce dernier
dosage 8 à 12 heures plus tard. Dans l’éventualité où il n’existe pas
de nouvelle élévation, on peut remettre en doute la question de
l’origine coronaire et myocardique des douleurs présentées par le
patient, et dans ce cas on est ramené au bilan d’une douleur
thoracique (cf supra). Ainsi, après 24 à 36 heures, il fera l’objet d’une
épreuve d’effort ou d’une scintigraphie, suivie ou non d’une
coronarographie en fonction des résultats des tests fonctionnels.
¦ Traitement d’entretien et traitement de fond
Après avoir subi un geste de revascularisation myocardique de
pontage ou par dilatation, le patient revascularisé n’en reste pas
moins un athéroscléreux coronaire. Il importe donc de mettre en
oeuvre des mesures extrêmement strictes concernant la prévention
secondaire. Celle-ci comporte la suppression complète des habitudes
tabagiques, la reprise d’une activité physique facilitée par exemple
par un programme de réadaptation. Il faut lutter contre l’obésité par
un régime de restriction calorique strict, équilibrer le diabète, et bien
évidemment traiter les autres facteurs de risque. Une dyslipidémie
est corrigée. Les chiffres de pression artérielle doivent être
normalisés.
La prévention secondaire médicamenteuse doit comporter
l’administration à vie d’aspirine de 75 à 100 mg, la prescription
d’une statine (20 à 40 mg), et enfin, compte tenu des résultats de
l’étude HOPE, la prescription d’un inhibiteur de l’enzyme de
conversion.
Conclusion
Comme on peut le voir, l’angine de poitrine, modèle clinique
douloureux de l’ischémie myocardique, a bénéficié de très nombreux
progrès, tant dans le domaine diagnostique que dans le domaine
thérapeutique, au cours de ces 15 dernières années. Il est devenu
exceptionnel qu’une angine de poitrine soit entièrement réfractaire et
que le patient continue à souffrir malgré les possibilités thérapeutiques
actuelles. Il existe encore cependant certaines imperfections dans la
précision et la spécificité du diagnostic. Sur le plan thérapeutique, le
cardiologue dispose aujourd’hui d’un arsenal thérapeutique
particulièrement étendu et remarquablement efficace qui a
considérablement amélioré non seulement l’espérance de vie, mais aussi
la qualité de vie des patients angineux.
Références ä
Cardiologie Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne 11-030-A-10
19
Références
[1] Ambrose JA, Hjemdahl-Monsen CE, Borrico S, Gorlin R,
Fuster V. Angiographic demonstration of a common link
between unstable angina pectoris and non-Q wave acute
myocardial infarction. Am J Cardiol 1988 ; 61 : 244-247
[2] Ambrose JA, Hjemdahl-Monsen CE, Borrico S, Sherman W,
Cohen M, Gorlin R. Quantitative and qualitative effects of
intracoronary streptokinase in unstable angina and non-Q
wave infarction. J AmColl Cardiol 1987 ; 9 : 1156-1165
[3] Bertrand ME, Lablanche JM, Tilmant PY et al. Frequency of
provoqued coronary arterial spasm in 1 089 consecutive
patients, undergoing coronary arteriography. Circulation
1982 ; 65 : 1299-1306
[4] Bertrand ME, Laisne C, Lefebvre JM, Carre AG, Warembourg
H, Carre AG et al. Le spasme des artères coronaires.
Arch Mal Coeur 1977 ; 70 : 1233-1244
[5] Bertrand ME, Rousseau MF, Lablanche JM, Warembourg
H,CarreAG,Lekieffre JP.Ladétectionduspasmedesartères
coronaires par le test à la méthylergométrine. Technique,
résultats, indications. Arch Mal Coeur 1979 ; 72 : 123-129
[6] Blackall J. On the nature and cure of dropsies to which is
added an appendix, containing several cases of angina
pectoris with dissections, etc. London, 1813 : 1-244
[7] Bourassa MG, Lesperance J, Campeau L, Simard P. Factors
influencing patency of aortocoronary vein grafts. Circulation
1972 ; 45 (suppl 1) : 79-85
[8] Bourassa MG, Lesperance J, Corbara F et al. Progression of
obstructive coronary artery disease 5 to 7 years after aortocoronary
bypass surgery. Circulation 1978 ; 58 (suppl 1) :
100-106
[9] Broustet JP, GriffoR, Series E,GuernP, Laylavoix F.Angorde
Prinzmetal déclenché par l’arrêtdel’effort. Cinq cas à coronarographie
normale. Arch Mal Coeur 1979 ; 72 : 391-400
[10] Capone G, Wolf NM, Meyer B, Meister SG. Frequency of
intracoronary filling defects by angiography in angina pectoris
at rest. Am J Cardiol 1985 ; 56 : 403-406
[11] Chahine RA, Raizner AE, Luchi RS, Macintosh HD. The incidence
and clinical implications of coronary arterial spasm.
Circulation 1975 ; 52 : 972-978
[12] Chuah SC, Pellikka PA, Roger VL, McCully RB, Seward JB.
Role of dobutamine stress echocardiography in predicting
outcome in 860 patients with known or suspected coronary
artery disease. Circulation 1998 ; 97 : 1474-1480
[13] Davies MJ, Thomas AC. Plaque fissuring, the cause of acute
myocardial infarction, sudden ischaemic death, and crescendo
angina. Br Heart J 1985 ; 53 : 363-373
[14] De Feyter PJ, Serruys PW, Soward A, Van Den Brand M, Bos
E, Hugenholtz PG. Coronary angioplasty for early postinfarction
unstable angina. Circulation1986;74:1365-1370
[15] De Feyter PJ, Serruys PW, Suryapranata H, Beatt K, VanDen
Brand M. Coronary angioplasty early after diagnosis of
unstable angina. Am Heart J 1987 ; 114 : 48-54
[16] De Feyter PJ, Serruys PW, Van Den Brand M, Balakumaran
K, Mochtar B, Soward AL et al. Emergency coronary angioplasty
in refractory unstable angina. N Engl J Med 1985 ;
313 : 342-346
[17] Effler DB, Groves LK, Suarez EL, Favaloro RG. Direct coronary
artery surgery with endarterectomy and patchgraft
reconstruction. Clinical application and technical considerations.
J Thorac Cardiovasc Surg 1967 ; 53 : 93-101
[18] Falk E. Plaque rupture with severe pre-existing stenosis precipitating
coronary thrombosis. Characteristics of coronary
atherosclerotic plaques underlying fatal occlusive
thrombi. Br HeartJ 1983 ; 50 : 127-134
[19] Falk E. Unstable angina with fatal outcome: dynamic coronary
thrombosis leading to infarction and/or sudden
death. Autopsy evidence of recurrent mural thrombosis
with peripheral embolization culminating in total vascular
occlusion. Circulation 1985 ; 71 : 699-708
[20] Favaloro RG. Saphenous vein autograft replacement of
severe segmental coronary artery occlusion. Ann Thorac
Surg 1968 ; 5 : 334-339
[21] Faxon DP, Detre KM, MacCabe CH, Fisher L, Holmes DR,
Cowley MJ et al. Role of percutaneous transluminal coronary
angioplasty in the treatment of unstable angina.
Report from the national heart, lung, and blood institute
percutaneoustransluminalcoronaryangioplastyandcoronary
artery surgery study registries.AmJ Cardiol1984 ; 53 :
131C-135C
[22] Folts JD, Gallagher K, Rowe GC. Blood flow reductions in
stenosed canine coronary arteries: vasospasm or platelet
aggregation. Circulation 1982 ; 65 : 248-255
[23] Fulton M, Duncan B, Lutz W et al. Natural history of
unstable angina. Lancet 1972 ; 1 : 860-870
[24] Gallavardin L. Les angines de poitrine. Paris : Masson, 1925
[25] GeleijnseM,FiorettiPM,RoelandtTCJr.Methodology,feasibility,
safety and diagnostic accuracy of dobutamine
stress echocardiography. J Am Coll Cardiol 1997 ; 30 :
595-606
[26] Gertz SD, Uretsky G, Wajnberg RS, Navot N, Gotsman MS.
Endothelial cell damage and thrombus formation after
partial arterial constriction: relevance to the role of coronary
arteryspasmin the pathogenesis of myocardial infarction.
Circulation 1981 ; 63 : 476-486
[27] Gotlieb SO, Brin KP, Walford GD, Macgaughey M, Riegel
MB,Brinker JA. Percutaneous transluminal coronary angioplasty
for early postinfarction unstable angina: results and
follow-up [abstract]. J AmColl Cardiol 1986 ; 7 : 20A
[28] Gotoh K, Minamino T, KatohOet al. The role of intracoronary
thrombus in unstable angina: angiographic assessment
and thrombolytic therapy during ongoing anginal
attacks. Circulation 1988 ; 77 : 526-534
[29] GouldKL,LipscombK.Effects ofcoronarystenosesoncoronary
flow reserve and resistance. Am J Cardiol 1974 ; 33 :
48-55
[30] Gould KL, Lipscomb K, Hamilton GW. Physiologic basis for
assessing critical coronary stenosis. Instantaneous flow
response and regional distribution during coronary hyperemia
as measures of coronary flow reserve. Am J Cardiol
1974 ; 33 : 87-94
[31] Gruntzig A. Transluminal dilatation of coronary-artery
stenosis. Lancet 1978 ; 1 : 263
[32] Heberden N. Some account of a disorder of the heart. Med
Trans Coll Phys London 1772 : 59-67
[33] Holt GW, Gersh BJ, Holmes DR, Vliestra RE, Reeder GS,
Bresnahan JS. The results of percutaneous transluminal
coronary angioplasty in postinfarction angina pectoris
[abstract]. J AmColl Cardiol 1986 ; 7 : 62A
[34] Huchard H. Traité clinique des maladies du coeur et de
l’aorte. Tome II. Paris : Doin, 1899
[35] Kerber RE, Marcs ML, Ehrhardt J et al. Correlation between
echocardiographically demonstraded segmental dyskinesis
and regional myocardial perfusion. Circulation 1975 ;
52 : 1097-1104
[36] Kreysig FL. Die krankheiten des Herzens. Berlin, 1816 ; vol
II : 544-547
[37] LimacherMC,QuinonesMA,Poliner LR,NelsonJG,Winters
WL, Waggoner AD. Detection of coronary artery disease
withexercisetwo-dimensionalechocardiography:description
of a clinically applicable method and comparison with
radionuclide ventriculography. Circulation 1983 ; 67 :
1211-1218
[38] Marwick T, D’Hondt AM, Baudhuin T, Willemart B, Wijns
W, Detry JM et al. Optimal use of dobutamine stress for the
detection and evaluation of coronary artery diseases: combination
with echocardiography, scintigraphy or both?
J AmColl Cardiol 1993 ; 22 : 159-167
[39] Marwick T, Mehta R, Arheart K, Lauer MS. Use of exercise
echocardiography for prognostic evaluation of patients
with known or suspected coronray artery disease. J AmColl
Cardiol 1997 ; 30 : 83-90
[40] Marwick T, Willemart B, D’Hondt AM, Baudhuin T, Wijns
W, Detry JM et al. Selection of the optimal non-exercise
stress for the evaluation of ischemic regional myocardial
dysfunctionandmalperfusion:comparisonofdobutamine
and adenosine using echocardiography and Tc-99m MIBI
single photon emission computed tomography. Circulation
1993 ; 87 : 345-354
[41] Maseri A. Pathogenetic mechanisms of angina pectoris:
expanding views. Br Heart J 1980 ; 43 : 648-660
[42] Maseri A, Mimmo R, Chierchia S, Marchesi C, Pesole A,
L’abbate A. Coronary arteryspasmas a cause of acutemyocardial
ischemia in man. Chest 1975 ; 68 : 625-633
[43] Maseri A, Severi S, De NesMet al. « Variant angina »: one
aspect of a continuous spectrum of vasospastic myocardial
ischemia. Pathogenetic mechanisms, estimated incidence
and clinical and coronary arteriographic findings in
138 patients. Am J Cardiol 1978 ; 42 : 1019-1935
[44] Meyer J, Schmitz HJ, Kiesslich T et al. Percutaneous transluminal
coronary angioplasty in patients with stable and
unstable angina pectoris: analysis of early and late results.
Am Heart J 1983 ; 106 : 973-980
[45] Michaelides AP, Psomadaki S, Dilaveris PE et al. Improved
detection of coronary artery disease by exercise electrocardiogrpahy
with the use of right precordial leads. N Engl J
Med 1999 ; 340 : 340-345
[46] Moise A, Theroux P, Taeymans Y et al. Unstable angina and
progression ofcoronaryatherosclerosis.NEngl JMed1983;
309 : 685-689
[47] Osler W. The lumleian. Lectures on angina pectoris. Lancet
1910 ; 1 : 697-844
[48] Parry CH. An inquiry into the symptoms and causes of the
syncope anginosa commonly called angina pectoris. London
: Cadelland Davies, 1799
[49] Peels CH, Visser CA, Kupper AJ, Visser FC, Roos JP. Usefulness
of two-demensional echocardiography for immediate
detection of myocardial ischemia in the emergency
room. Am J Cardiol 1990 ; 65 : 687-691
[50] Pellikka PA, Roger VL, Oh JK, Miller FA, Seward JB, Tajik J.
Stress echocardiography PART II. Dobutamine stress
echocardiography: techniques, implementation, clinical
applications, and correlations. Mayo Clin Proc 1995 ; 70 :
16-27
[51] Picano E, Mathias W Jr, Pingitore R, Bigi R, Previtali M.
Safety and tolerability of dobutamine-atropine stress
echocardiography: a prospective, multicentre study.
Lancet 1994 ; 344 : 1190-1492
[52] Plokker HW, Ernst SM, Bal ET. Percutaneous transluminal
coronary angioplasty in patients with unstable angina pectoris
refractory tomedicaltherapy. Cathet CardiovascDiagn
1988 ; 14 : 15-18
[53] Poldermans D, Fioretti PM, Boersma E et al. Safety of
dobutamine-atropine stress echocardiography in patients
with suspected or proven coronary artery disease: experience
in 650 consecutive examinations. Am J Cardiol 1994 ;
73 : 456-459
[54] Prinzmetal M, Ekmekci A, Kennamer R, Kwoczynski J,
Shubin H, Toyoshima H. Variant form of angina pectoris:
previously undelineated syndrome. JAMA 1960 ; 174 :
1794-1800
[55] Prinzmetal M, Kennamer R, Merliss R, Wada T, Bor N.
Angina pectoris. I. A variant form of angina pectoris, preliminary
report. Am J Med 1959 ; 27 : 375-388
[56] Pruvost P, Lablanche JM, Lombard FR, Nocon PE, Bertrand
ME. Probability of coronary artery disease by multivariate
analysis in 558 men without myocardial infarction. Eur
Heart J 1985 ; 6 : 65-72
[57] Rahimtoola SH, Nunley D, Grunkemeier G, Tepley J,
Lambert L, Starr A. Ten-year survival after coronary bypass
surgery for unstable angina. N Engl J Med 1983 ; 308 :
676-681
[58] Russell RO Jr, Moraski RE, Kouchoukos N et al. Unstable
angina pectoris: national cooperative study group to
compare surgical and medical therapy. II. In hospital experience
and follow-up results in patients with one, two and
three vessel disease. Am J Cardiol 1978 ; 42 : 839-848
[59] Sherman CT, Litvack F, Grundfest W, Lee M, Hickey A,
Chaux A et al. Coronary angioscopy in patients with
unstableanginapectoris.NEngl JMed1986;315:913-919
[60] Sones FM Jr, Shirey EK. Cine coronary arteriography. Mod
Conc Cardiovasc Dis 1962 ; 31 : 735-738
[61] Suryapranata H, Beatt K, DeFeyter PJ et al. Percutaneous
transluminal coronary angioplasty for angina pectoris after
a non-Q-wave acute myocardial infarction. Am J Cardiol
1988 ; 62 : 240-243
[62] Suryapranata H, DeFeyter PJ, Serruys PW et al. Coronary
angioplasty in patient with unstable angina pectoris: is
there a role for thrombolysis? J Am Coll Cardiol 1988 ; 12
(suppl 6A) : 69A-77A
[63] Tilmant PY, Lablanche JM, Hethuin JM, Thieuleux FA,
Dupuis BA, Bertrand ME. L’enregistrement électrocardiographique
continu Holter chez 20 patients présentant un
spasmecoronaire.Étudede277crises électriques.ArchMal
Coeur 1983 ; 76 : 411-420
[64] Timmis AD, Griffin B, Crick JC, Sowton E. Early percutaneous
transluminal coronary angioplasty in themanagement
of unstable angina. Int J Cardiol 1987 ; 14 : 25-31
[65] WatersDD,Szlachcic J, BourassaMG,Scholl JM,TherouxP.
Exercise testing in patients with variant angina: results, correlation
with clinical and angiographic features and prognostic
significance. Circulation 1982 ; 65 : 265-274
[66] Yasue H, Omote S, Takizawa A, Nagao M, Miwa K, Tanaka
S. Circadian variation of exercise capacity in patients with
Prinzmetal’s variant angina: role of exercise-induced coronary
arterial spasm. Circulation 1979 ; 59 : 938-948
[67] Zack PM, Ischinger T, Aker UT, Dincer B, Kennedy HL. The
occurrence of angiographically detected intra-coronary
thrombus in patients with unstable angina pectoris. Am
Heart J 1984 ; 108 : 1408-1412
11-030-A-10 Angine de poitrine par athérosclérose coronarienne Cardiologie
20