Atrésie tricuspide
GM Brevière
C Rey
Résumé. – L’atrésie tricuspide est une malformation cardiaque congénitale cyanogène rare mais sévère, le
plus souvent isolée. Elle est caractérisée par l’absence de connexion auriculoventriculaire. Les formes
anatomiques sont variées selon les connexions ventriculoartérielles, l’absence ou la présence d’un obstacle
sur la voie pulmonaire.
Le diagnostic est souvent précoce, évoqué par la clinique et l’électrocardiogramme, confirmé par
l’échocardiographie.
Le tableau clinique est variable selon l’anatomie, la forme la plus fréquente est la forme avec sténose
pulmonaire et vaisseaux normoposés.
Le bilan hémodynamique a pour but d’étudier les pressions pulmonaires et la voie pulmonaire. Si les pressions
pulmonaires sont basses, on s’oriente rapidement vers une anastomose, puis, plus tard, sera réalisée soit une
intervention de dérivation atriopulmonaire, soit une intervention de dérivation bicavobipulmonaire.
À long terme, ces interventions correctrices se compliquent de fistules artérioveineuses pulmonaires, de
fistules veinoveineuses, de troubles du rythme, d’entéropathie exsudative, complications toutes difficiles à
traiter.
© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : atrésie tricuspide, anastomose, cardiopathie congénitale, échocardiographie, veine cave
inférieure, veine cave supérieure, intervention de Fontan, fistule artérioveineuse, entéropathie
exsudative.
Fréquence et étiologie
L’atrésie tricuspide est une anomalie rare ; selon les séries, elle
représente 0,3 à 3,7 % des cardiopathies congénitales. C’est une
affection sévère : 3 % des autopsies des cardiopathies congénitales.
Elle survient chez un nouveau-né sur 10 000 à un sur 20 000. Elle est
plus fréquente chez les garçons (63 %) [49] et, dans 1 % des cas, il y a
des anomalies associées : digestives ou osseuses. Elle peut être
associée au cat eye syndrome [20], à l’asplénie. Son étiologie est
inconnue, mais récemment ont été décrits plusieurs cas d’atrésie
tricuspide avec microdélétion 22q11 [40]. Les formes familiales
d’atrésie tricuspide sont exceptionnelles [38], le risque de récurrence
dans une famille est inférieur à 1 % [52]. Enfin ont été décrites
quelques familles sans microdélétion 22q11 où l’un des membres a
une atrésie tricuspide et un autre membre soit une tétralogie de
Fallot, soit un truncus arteriosus [4].
ANATOMIE PATHOLOGIQUE
L’atrésie tricuspide se caractérise par l’absence de connexion
auriculoventriculaire droite associée à un ventricule droit
hypoplasique. Une communication entre la circulation systémique
et la circulation pulmonaire, le plus souvent par une communication
interventriculaire, est constante. Il existe plusieurs types d’atrésie
tricuspide car les connexions ventriculoartérielles peuvent être
Georges-Marie Brevière : Praticien hospitalier.
Christian Rey : Professeur des Universités, chef de service.
Service des maladies cardiovasculaires infantiles et congénitales, hôpital cardiologique, boulevard du
Président J-Leclercq, 59037 Lille cedex, France.
concordantes ou discordantes, les gros vaisseaux sont soit en
position normale - c’est la forme la plus fréquente (70 % des cas) -,
soit en L-malposition ou D-malposition. Enfin, la voie pulmonaire
peut être normale ou sténosée, ou même atrétique.
Les formes anatomiques sont variées, les éléments communs sont
les anomalies de la tricuspide, de l’oreillette droite et du ventricule
droit.
ÉLÉMENTS COMMUNS
¦ Valve tricuspide
Dans la plupart des cas, il s’agit d’une atrésie musculaire, il n’y a
pas de valve tricuspide, elle est remplacée par du tissu musculaire.
Très rarement, l’atrésie est membraneuse, le plancher de l’oreillette
droite est formé d’une membrane translucide.
De façon exceptionnelle, l’atrésie est valvulaire car il existe une valve
tricuspide non ouverte.
Peuvent s’associer à l’atrésie tricuspide, une maladie d’Ebstein, avec
présence d’une partie atrialisée du ventricule droit, et également une
anomalie de type canal atrioventriculaire.
¦ Oreillette droite
Ses parois sont plus épaisses, mais son volume n’est pas augmenté.
La communication entre les oreillettes est habituellement soit un
foramen ovale isolé, soit une communication interauriculaire de type
ostium secundum ; beaucoup plus rarement, il s’agit d’une
communication interauriculaire de type ostium primum ; enfin, il
peut y avoir de petits defects accessoires. Dans le cas d’un ostium
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 11-041-M-10
11-041-M-10
Toute référence à cet article doit porter la mention : Brevière GM et Rey C. Atrésie tricuspide. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Cardiologie, 11-041-M-10, 2000, 12 p.
primum, il existe souvent une fente de la partie septale de la valve
mitrale. Cette communication peut être restrictive. Il existe toujours
une valve d’Eustachi qui peut être très développée dans 10 % des
cas.
¦ Ventricule gauche et communication
interventriculaire
Au début de taille normale, il se dilate et s’hypertrophie avec l’âge
du patient. La valve mitrale est le plus souvent normale, mais ont
été décrits un prolapsus mitral et très rarement une fente mitrale. La
communication entre le ventricule gauche et le ventricule droit se
fait par un foramen bulboventriculaire ; ce defect se situe souvent
soit dans la partie membraneuse du septum - c’est la forme la plus
fréquente -, soit dans la partie musculaire - plus bas dans le
septum -, soit c’est un defect par malalignement du septum conal ;
enfin, il peut être de type canal atrioventriculaire avec straddling de
la valve tricuspide. Le terme de « foramen bulboventriculaire » est
préféré à celui de « communication interventriculaire », car il fait
appel à une notion embryologique.
Le foramen bulboventriculaire est de taille variable, souvent
restrictif ; ce caractère restrictif est évolutif pouvant aboutir parfois
à la fermeture complète.
¦ Ventricule droit
Il est toujours hypoplasique. Le sinus ventriculaire est rarement
présent. Ce ventricule droit est le plus souvent formé d’une chambre
trabéculée de taille moyenne et d’un infundibulum souvent court ;
il y a souvent une sténose musculaire entre ces deux zones.
ÉLÉMENTS VARIABLES
¦ Connexions ventriculoartérielles
C’est un élément important car, selon la disposition des gros
vaisseaux, le tableau clinique n’est pas identique. Si les vaisseaux
sont normoposés, l’aorte est postérieure et naît du ventricule gauche,
l’artère pulmonaire antérieure naît de la cavité accessoire antérieure.
Si les vaisseaux sont transposés, l’aorte antérieure naît de la cavité
accessoire et l’artère pulmonaire du ventricule gauche ; enfin, très
rarement, il peut exister soit une double discordance
ventriculoartérielle, soit les deux vaisseaux naissent de la même
cavité, ventricule gauche ou chambre accessoire.
¦ Ventricule droit et voie pulmonaire
Le ventricule droit est toujours hypoplasique et forme la cavité
accessoire. Le sinus ventriculaire est rarement présent, cette cavité
est le plus souvent formée d’une chambre trabéculée de taille
moyenne et d’un infundibulum souvent court, avec très
fréquemment une sténose musculaire entre les deux zones. Quant à
la voie pulmonaire, toutes les formes sont rencontrées : voie
pulmonaire normale, sténose infundibulaire ou valvulaire, l’atrésie
valvulaire pulmonaire est rare.
¦ Autres anomalies cardiaques
La présence d’une veine cave supérieure gauche se jetant dans le
sinus coronaire est présente dans 15 % des cas. De façon
exceptionnelle, cette veine cave supérieure gauche se jette
directement dans l’oreillette droite. La juxtaposition des auricules se
retrouve dans 10 % des atrésies tricuspides avec vaisseaux
normoposés et dans 40 % des atrésies tricuspides avec transposition
des vaisseaux. Ont également été décrites des associations avec une
coarctation, un canal artériel, un truncus arteriosus [46], un arc
aortique droit associé souvent à une dextrocardie.
CLASSIFICATION
De nombreuses classifications ont été proposées. La plus utilisée est
celle de Edwards et Burchell [15] qui classe la malformation tout
d’abord selon les connexions ventriculoartérielles, et ensuite en
fonction de l’absence ou de la présence d’un obstacle sur la voie
pulmonaire.
¦ Type I
C’est l’atrésie tricuspide avec vaisseaux normoposés. On distingue
trois sous-types :
– le sous-type I A se caractérise par des vaisseaux normoposés et
une atrésie pulmonaire, le ventricule droit est très hypoplasique ;
habituellement, le septum interventriculaire est intact et le canal
artériel toujours présent est souvent de petite taille ;
– dans le sous-type I B, il existe une sténose pulmonaire soit
valvulaire, soit infundibulaire, et le foramen bulboventriculaire est
le plus souvent restrictif ;
– dans le sous-type I C, il n’y a pas de sténose sur la voie
pulmonaire, le foramen bulboventriculaire est large et l’artère
pulmonaire a souvent un calibre plus grand que l’aorte du fait d’un
hyperdébit pulmonaire.
¦ Type II
L’atrésie tricuspide est associée à des vaisseaux en D-transposition.
– Le sous-type II A comporte une D-transposition des gros vaisseaux
associée à une sténose pulmonaire, fréquemment sous-valvulaire
mais parfois valvulaire, rarement à une atrésie pulmonaire.
– Dans le type II B, les vaisseaux sont en D-transposition, le foramen
bulboventriculaire est large et il y a un hyperdébit pulmonaire.
¦ Type III
Cette classification a été complétée par Keith qui ajoute un type III
où les vaisseaux sont en L-transposition.
La forme la plus fréquente est le sous-type I B (51 %). Sur une étude
de 101 cas, Dick [11] donne la fréquence relative des différents types
(tableau I).
Physiopathologie
L’existence d’un shunt auriculaire est obligatoire puisqu’il y a
absence de connexion entre l’oreillette droite et le ventricule droit.
La physiopathologie est variable selon la taille de la communication
interauriculaire, l’existence ou non d’une sténose sur la voie
pulmonaire, le diamètre du foramen bulboventriculaire et la position
des vaisseaux.
Dans l’atrésie tricuspide avec vaisseaux normoposés et sténose
pulmonaire, la variété la plus fréquente, tout dépend de la réduction
du calibre de l’artère pulmonaire et du caractère restrictif du
foramen bulboventriculaire. Le débit pulmonaire est diminué, la
cyanose importante.
Dans l’atrésie tricuspide avec atrésie pulmonaire et vaisseaux
normoposés, le canal artériel vascularise a retro l’arbre artériel
pulmonaire, mais ce canal est souvent petit avec des signes
fonctionnels précoces et une cyanose sévère.
Dans l’atrésie tricuspide sans sténose pulmonaire et vaisseaux
normoposés, il existe un hyperdébit pulmonaire et l’artère
Tableau I.
Type I Vaisseaux normoposés 69 %
Atrésie pulmonaire sans CIV 9 %
Sténose pulmonaire 51 %
Sans sténose pulmonaire 9 %
Type II Vaisseaux en D-transposition 28 %
Atrésie pulmonaire 2 %
Sténose pulmonaire 8 %
Sans sténose pulmonaire 18 %
Type III Vaisseaux en L-transposition 3 %
CIV : communication interventriculaire.
11-041-M-10 Atrésie tricuspide Cardiologie
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pulmonaire est plus large que l’aorte ; mais avec le temps, on
observe souvent une réduction du foramen bulboventriculaire et,
par conséquent, du débit pulmonaire.
Dans les formes avec vaisseaux transposés, il existe le plus souvent
une sténose sous-aortique ou aortique gênant l’éjection du ventricule
gauche.
En pratique, cliniquement, on doit distinguer la forme avec
hypovascularisation pulmonaire et la forme avec
hypervascularisation pulmonaire. Entre ces deux formes existe une
forme « équilibrée » avec une perfusion pulmonaire sensiblement
normale qui, à la longue, va souvent évoluer vers une
hypoperfusion.
Diagnostic
SIGNES CLINIQUES
La plupart des atrésies tricuspides sont diagnostiquées dès le
premier mois et environ 50 % dans la première semaine. Mais le
diagnostic peut se faire en anténatal [25, 27] par l’échocardiographie
foetale, en analysant la coupe des quatre cavités à la recherche d’une
valve tricuspide immobile et épaissie, et d’une cavité ventriculaire
droite réduite.
Les circonstances de diagnostic sont souvent une cyanose, la
présence d’un souffle, plus rarement un tableau d’insuffisance
cardiaque. Il existe essentiellement deux formes : la forme habituelle
avec sténose pulmonaire et vaisseaux normoposés ; la forme avec
un hyperdébit pulmonaire et vaisseaux transposés.
Dans la forme avec sténose pulmonaire, les signes cliniques sont
fonction de l’importance de la sténose. La cyanose est constante,
souvent précoce et sévère ; il n’y a pas d’insuffisance cardiaque ;
cette cyanose peut survenir brutalement lorsque le canal artériel se
ferme, ou peut être discrète, s’accentuant par accès et pouvant se
compliquer de véritables malaises anoxiques. Elle nécessite
rapidement une intervention palliative. Parfois, la cyanose apparaît
évidente au bout de quelques mois, quand le foramen
bulboventriculaire devient restrictif, limitant ainsi le flux
pulmonaire. À l’auscultation, il existe un souffle systolique dû à la
sténose pulmonaire.
Dans la forme avec transposition des gros vaisseaux, où
habituellement il n’y a pas d’obstacle sur la voie pulmonaire, la
cyanose est discrète, mais il y a apparition progressive d’une
insuffisance cardiaque par augmentation du flux pulmonaire. Cette
insuffisance cardiaque s’accompagne d’une tachycardie avec
polypnée, hépatomégalie et sueurs profuses. L’auscultation retrouve
un souffle systolique dû à la communication interventriculaire avec
un deuxième bruit claqué puisque l’aorte est antérieure. Parfois,
l’hépatomégalie est très importante, pulsatile, avec turgescence des
jugulaires, rebelle au traitement médical, signant ainsi une
communication interauriculaire restrictive.
Les signes cliniques ne permettent pas de faire le diagnostic d’atrésie
tricuspide. L’électrocardiogramme et la radiographie évoquent le
diagnostic qui est confirmé par l’échocardiographie.
ÉLECTROCARDIOGRAMME
Cet examen est d’une grande aide pour poser le diagnostic d’atrésie
tricuspide. En effet, dans la forme classique, il existe une déviation
axiale gauche, très évocatrice chez un nouveau-né cyanosé, d’une
atrésie tricuspide ; à cet axe gauche s’ajoutent une hypertrophie
ventriculaire gauche, une hypertrophie auriculaire droite et l’absence
de signe d’hypertrophie ventriculaire droite. L’axe gauche serait dû
à la position électrique horizontale du coeur, avec différence de phase
dans l’activation ventriculaire droite et gauche.
Cependant, ces signes caractéristiques ne sont pas constants. Dans
environ 15 à 25 % des cas, il n’y a pas d’axe gauche, surtout dans les
formes avec transposition.
L’onde P a une amplitude importante en D1, D2, aVF et V1 dans
plus de 70 % des cas. À cette hypertrophie auriculaire droite,
s’associe une hypertrophie auriculaire gauche avec élargissement de
l’onde P. Cette hypertrophie biauriculaire n’existe pas si la
communication interauriculaire est restrictive, car dans ce cas seule
l’oreillette droite est dilatée.
Chez le nouveau-né, il existe physiologiquement une hypertrophie
ventriculaire droite, et son absence est un bon signe d’orientation
pour le diagnostic d’atrésie tricuspide.
L’hypertrophie ventriculaire gauche se retrouve dans plus de 85 %
des cas, se caractérisant par des signes directs avec des ondes R
élevées en V5, V6, et des signes indirects avec ondes S profondes en
précordiales droites. Cette hypertrophie ventriculaire gauche
s’accentue avec l’âge et traduit la surcharge volumétrique de ce
ventricule.
RADIOLOGIE
Alors que l’électrocardiogramme est assez caractéristique en raison
de la variété des formes anatomiques, il n’y a pas d’aspect spécifique
radiologique, cela dépend de la présence ou non d’une sténose
pulmonaire.
Dans les formes avec sténose pulmonaire, le volume cardiaque est
le plus souvent normal ou légèrement augmenté, avec une
vascularisation pulmonaire normale ou diminuée. La silhouette
cardiaque objective une hypertrophie concentrique du ventricule
gauche avec un arc moyen le plus souvent concave et un arc
inférieur droit saillant en rapport avec la dilatation de l’oreillette
droite. Il existe donc une hypertrophie auriculaire droite et
ventriculaire gauche comme sur l’électrocardiogramme.
Dans les formes sans sténose pulmonaire, le volume cardiaque est
augmenté et il y a une hypervascularisation pulmonaire avec un
pédicule vasculaire le plus souvent étroit.
ÉCHOCARDIOGRAPHIE
Cet examen va confirmer le diagnostic suspecté par l’examen
clinique et l’électrocardiogramme.
Les signes caractéristiques sont l’absence d’échos provenant de la
valve tricuspide et la diminution de volume de la cavité
ventriculaire droite. L’échocardiographie bidimensionnelle détaille
l’anatomie de la cardiopathie. En incidence sous-costale des quatre
cavités, on ne visualise qu’une seule valve auriculoventriculaire
entre l’oreillette gauche et le ventricule gauche (fig 1). L’échographie
apprécie la taille de la communication interauriculaire ; si le septum
bombe dans l’oreillette gauche, ceci signifie que la pression
auriculaire droite est plus élevée que la pression auriculaire gauche
en raison de la communication restrictive, et incite vivement à
réaliser une atrioseptostomie de Rashkind.
L’échocardiographie montre le plus souvent une augmentation de
volume du ventricule gauche et permet d’étudier la fonction
ventriculaire gauche. Elle met en évidence le foramen
bulboventriculaire. Elle objective la taille de l’anneau pulmonaire et
l’état des valves pulmonaires (existence ou non d’une sténose), elle
permet d’affirmer s’il existe ou non des vaisseaux malposés et
apprécie la continuité mitroaortique.
L’examen doppler renseigne sur le gradient de pressions au niveau
du foramen bulboventriculaire et sur la voie pulmonaire.
Tous ces signes sont assez caractéristiques de l’atrésie tricuspide,
mais non pathognomoniques comme dans le cas d’un ventricule
unique avec valve auriculoventriculaire unique. En cas de doute,
l’échocardiographie de contraste montre l’absence de passage entre
l’oreillette droite et le ventricule droit, mais un passage de l’oreillette
droite vers l’oreillette gauche.
CATHÉTÉRISME ET ANGIOGRAPHIE
Ce sont des examens complémentaires réalisés dans le but d’une
intervention chirurgicale. Ils permettent d’étudier la voie pulmonaire
et la fonction ventriculaire gauche.
Cardiologie Atrésie tricuspide 11-041-M-10
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¦ Cathétérisme
Il est impossible de passer de l’oreillette droite vers le ventricule
droit, mais le cathéter passe facilement de l’oreillette droite vers
l’oreillette gauche ; les pressions seront mesurées dans toutes les
cavités ; la pression dans l’oreillette droite est plus souvent plus
élevée que la pression dans l’oreillette gauche, sauf si la
communication interauriculaire est large. La pression télédiastolique
du ventricule gauche apprécie la fonction ventriculaire gauche. Il
est indispensable de prendre la pression dans l’artère pulmonaire
soit en passant directement du ventricule gauche dans l’artère
pulmonaire en cas de vaisseaux transposés, soit en passant par le
foramen bulboventriculaire ; ceci n’est possible le plus souvent
qu’avec des sondes à ballonnet. Si l’enfant a déjà eu une anastomose
palliative, il est possible d’enregistrer les pressions pulmonaires en
passant par l’anastomose et, ainsi, calculer les résistances
artériolaires pulmonaires.
L’oxymétrie montre un shunt droite-gauche auriculaire important et
une désaturation dans l’oreillette gauche et le ventricule gauche.
¦ Angiocardiographie
Une exploration angiographique complète nécessite trois injections :
une dans l’oreillette droite, une dans le ventricule gauche et une
dans le ventricule droit ou l’artère pulmonaire.
L’angiographie auriculaire droite (fig 2) confirme le diagnostic
montrant une oreillette droite dilatée avec opacification des veines
caves et des veines sus-hépatiques, puis un passage du produit de
contraste dans l’oreillette gauche et le ventricule gauche. Il n’y a
aucun passage de l’oreillette droite vers le ventricule droit. Cette
angiographie peut évaluer la taille de la communication
interauriculaire et montrer une juxtaposition des auricules.
L’angiographie dans le ventricule gauche (fig 3) apprécie la fonction
du ventricule gauche qui peut se dégrader au fil des années, dépiste
éventuellement des communications interventriculaires multiples,
une insuffisance mitrale et, bien sûr, montre la position des gros
vaisseaux.
L’angiographie dans le ventricule droit montre la petite taille de la
cavité accessoire et, en cas de vaisseaux normoposés, met en
évidence une éventuelle sténose sur la voie pulmonaire, apprécie la
dimension de l’artère pulmonaire et de ses branches, ainsi que la
vascularisation pulmonaire.
Histoire naturelle
L’évolution spontanée est marquée par une mortalité importante
d’environ 40 % lors de la première année mais tout dépend, en fait,
du flux pulmonaire.
Dans les atrésies tricuspides avec hypovascularisation pulmonaire,
la mortalité est considérable par malaise anoxique ; le taux de
mortalité avoisine 75 % pendant la première année en l’absence de
chirurgie.
Dans les atrésies tricuspides avec flux pulmonaire augmenté,
l’insuffisance cardiaque prédomine avec hépatomégalie et
cardiomégalie nécessitant un traitement médical digitalodiurétique ;
1 Échocardiogramme bidimensionnel en incidence apicale des quatre cavités en diastole
: la valve mitrale entre l’oreillette gauche (OG) et le ventricule gauche (VG) est
ouverte. Il existe une atrésie de la valve tricuspide qui donne un écho dense entre
l’oreillette droite (OD) et le ventricule droit (VD) hypoplasique qui communique avec
le ventricule gauche par une communication interventriculaire (CIV). Il existe en outre
une communication interauriculaire (CIA).
2 Cinéangiographie dans la partie basse de l’oreillette droite : on voit d’une part
l’opacification de l’oreillette droite (OD) et des veines sus-hépatiques ; il n’y a pas
de passage dans le ventricule droit, mais un passage relativement important
de l’oreillette droite vers l’oreillette gauche (OG) par une communication interauriculaire
large.
3 Cinéangiographie dans le ventricule gauche : à partir du ventricule gauche, on
voit, très bien opacifiée, l’aorte ascendante et, par une communication interventriculaire
haute sous-aortique, visualisation d’un petit ventricule droit (VD) « croupion »
antérieur.
11-041-M-10 Atrésie tricuspide Cardiologie
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la cardiopathie est assez bien tolérée jusqu’à la seconde décennie.
Ensuite, l’évolution se fait soit vers l’hypertension artérielle
pulmonaire obstructive, soit vers la diminution du débit pulmonaire
par diminution de taille du foramen bulboventriculaire ou
accentuation de la sténose pulmonaire infundibulaire.
L’atrésie tricuspide, comme toutes les cardiopathies cyanogènes,
peut se compliquer d’abcès cérébraux, d’endocardite bactérienne ou
de troubles du rythme, les plus fréquents étant la fibrillation et le
flutter auriculaire.
Diagnostic différentiel
Le plus souvent, le diagnostic ne pose pas de problème.
L’électrocardiogramme est, dans la majorité des cas, évocateur et
l’échocardiographie affirme le diagnostic. Seules quelques rares
cardiopathies complexes peuvent parfois être confondues, comme le
ventricule unique avec valve unique, l’hypoplasie de la valve
tricuspide dans le cadre d’une hypoplasie du coeur droit.
Traitement
Il est essentiellement chirurgical, le traitement médical permettant
simplement d’aider l’enfant pour attendre l’acte chirurgical :
prévention des crises de cyanose par bêtabloquant, oxygénothérapie
dans les formes avec hypovascularisation, traitement
digitalodiurétique dans les formes avec hypervascularisation.
Pendant très longtemps, la chirurgie n’était que palliative jusqu’à
l’intervention de Fontan en 1968 [17]qui est une des grandes
innovations en chirurgie cardiopédiatrique.
MÉTHODE
¦ Chirurgie palliative
Elle a deux buts : permettre la survie de l’enfant pour le préparer à
l’intervention correctrice et améliorer la circulation pulmonaire soit
en l’augmentant dans les formes avec sténose pulmonaire, soit en la
diminuant dans les formes avec hypertension pulmonaire.
Il en résulte trois types d’intervention palliative : l’agrandissement
de la communication interauriculaire, les anastomoses
systémicopulmonaires, le cerclage de l’artère pulmonaire.
Agrandissement de la communication interauriculaire
Il se fait par atrioseptostomie au cours de la manoeuvre de Rashkind
lors du cathétérisme. L’indication est formelle lorsque la
communication interauriculaire est restrictive, avec un gradient
interauriculaire supérieur à 5 mmHg. Pour la plupart des auteurs,
cette manoeuvre de Rashkind devrait être systématique dans toutes
les formes d’atrésies tricuspides car la communication
interauriculaire peut devenir secondairement restrictive, et il est
beaucoup plus difficile de faire cette manoeuvre à l’âge de quelques
mois plutôt qu’à la naissance. Lorsque l’enfant est âgé de plus de 3
mois, l’agrandissement de la communication interauriculaire peut
être effectué au cours d’un cathétérisme interventionnel avec le
cathéter de Park (blade septostomy), complété si besoin en est d’une
dilatation de la communication interauriculaire.
Anastomoses systémicopulmonaires
La plus ancienne est l’anastomose de Blalock-Taussig, réalisée pour
la première fois en 1944 ; c’est une anastomose terminolatérale entre
l’artère sous-clavière et l’artère pulmonaire du même côté ;
l’inconvénient de cette technique est qu’elle est difficile à réaliser
chez un enfant de petit poids et qu’à long terme peut apparaître un
vol sous-clavier, mais son avantage est qu’il n’y a pas de risque
d’hypertension artérielle pulmonaire.
On préfère donc actuellement l’anastomose de Blalock-Taussig
modifiée dont le principe est le même ; il n’y a plus section de
l’artère sous-clavière mais interposition d’un tube de Gore-Tex entre
la sous-clavière et l’artère pulmonaire. Chez les enfants de petit
poids, le chirurgien utilise un tube de 3 ou de 3,5 mm, avec le risque
de thrombose de l’anastomose nécessitant toujours un traitement
préventif par l’acide acétylsalicylique à raison de 1 à 3 mg/kg/j. Le
risque d’hypertension artérielle pulmonaire est quasi nul, c’est un
élément primordial pour une correction ultérieure.
L’anastomose de Waterston (anastomose entre aorte ascendante et
artère pulmonaire droite) et de Potts (entre l’aorte descendante et
l’artère pulmonaire gauche) ont été abandonnées car difficiles à
calibrer, avec un risque d’hypertension artérielle pulmonaire ou
d’une sténose de l’artère pulmonaire anastomosée ; de plus le
démontage, surtout pour le Potts, est loin d’être simple.
L’anastomose cavopulmonaire de Glenn est une anastomose
terminoterminale entre la veine cave supérieure et l’artère
pulmonaire droite qui est sectionnée (fig 4). Sa réalisation est aisée ;
il s’agit d’une anastomose entre deux vaisseaux à basse pression,
donc sans risque d’hypertension artérielle pulmonaire, et cette
anastomose ne surcharge pas le coeur gauche, contrairement aux
anastomoses de Potts et de Waterston.
Elle est difficilement réalisable chez l’enfant de faible poids. À court
terme, cette anastomose peut entraîner un syndrome cave supérieur
lentement résolutif ; à long terme, peut apparaître une circulation
collatérale aux dépens d’artères bronchiques, ce qui peut entraîner,
au bout de 10 à 20 ans, des hémoptysies qui peuvent être difficiles à
contrôler et nécessiter une embolisation de ces vaisseaux
bronchiques. Enfin, sa suppression n’est pas simple.
Cerclage de l’artère pulmonaire
Il est réservé aux formes avec hypervascularisation pulmonaire et
insuffisance cardiaque mal tolérée. Cette intervention a pour objet
d’abaisser la pression pulmonaire pour l’amener au tiers environ de
la pression systémique. Ce cerclage ou banding permet, dans un
second temps, de réaliser une chirurgie à visée correctrice.
¦ Chirurgie correctrice
C’est une chirurgie correctrice hémodynamique car le ventricule
droit ne peut être récupéré. Cette chirurgie a été rendue possible par
des travaux expérimentaux qui ont démontré que le ventricule droit
n’est pas indispensable. C’est Fontan qui, en 1968, a publié le
VCI
VSH
VD
VG
OD
SC
APG
APD
VCS
AO
4 Anastomose cavopulmonaire de Glenn : anastomose terminoterminale entre
la veine cave supérieure (VCS) et l’artère pulmonaire droite (APD) qui est donc séparée
du tronc de l’artère pulmonaire. APG : artère pulmonaire gauche ; OD : oreillette
droite ; VCI : veine cave inférieure ; VSH : veine sus-hépatique ; VG : ventricule gauche
; SC : sinus coronaire ; VD : ventricule droit.
Cardiologie Atrésie tricuspide 11-041-M-10
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premier cas opéré avec succès par dérivation atriopulmonaire. Puis
sont apparues les dérivations cavopulmonaires soit partielles, soit
subtotales, soit totales, dont il est encore difficile de juger du résultat
à très long terme.
Dérivation atriopulmonaire
L’intervention princeps de Fontan [17] consiste en une anastomose de
Glenn (entre la veine cave supérieure et l’artère pulmonaire droite)
avec fermeture de la communication interauriculaire ou du foramen
ovale, connexion entre l’auricule droite et l’artère pulmonaire avec
une homogreffe valvulaire aortique et ligature du tronc de l’artère
pulmonaire, et mise en place d’une valve prothétique dans la veine
cave inférieure (fig 5).
On s’est aperçu rapidement que les valves prothétiques n’étaient pas
indispensables et, actuellement, on fait appel au Fontan modifié
(fig 6). Lorsque les vaisseaux sont transposés, c’est l’anastomose
entre l’auricule droite et le tronc de l’artère pulmonaire après avoir
fermé la communication interauriculaire, ou l’anastomose entre
l’auricule droite et l’anneau pulmonaire désinséré de son
infundibulum, c’est l’intervention de Kreutzer [34]. Lorsque les
vaisseaux sont normoposés, on peut réaliser une connexion entre
l’auricule droite et la chambre accessoire sous-pulmonaire après
fermeture de la communication interauriculaire et du foramen
bulboventriculaire. L’intérêt de ces dérivations atrioventriculaires est
la simplicité de la réalisation chirurgicale, mais l’inconvénient est de
laisser en place la totalité de l’oreillette droite avec, en particulier,
une élévation de pression dans le sinus coronaire, d’où une
diminution de la perfusion coronaire pouvant entraîner une
myocardiopathie ischémique, et d’où l’idée de réaliser des
dérivations cavopulmonaires.
Dérivations cavopulmonaires
Elles consistent à connecter directement les veines caves à l’arbre
artériel pulmonaire. On en distingue trois variétés :
– les dérivations partielles, qui ne sont que des palliatives et
dérivées du Glenn ;
– les dérivations subtotales ;
– les dérivations totales.
· Cavopulmonaire partielle
Elle ne dérive qu’un territoire cave, le plus souvent supérieur, soit
vers une artère pulmonaire (c’est l’intervention de Glenn décrite
précédemment), soit vers les deux artères pulmonaires : anastomose
cavobipulmonaire ; plusieurs montages sont possibles. S’il y a une
seule veine cave supérieure, on réalise une anastomose
terminolatérale sur l’artère pulmonaire droite (fig 7) ; s’il y a deux
veines caves supérieures, l’anastomose cavopulmonaire est réalisée
de chaque côté. L’anastomose cavopulmonaire partielle peut être
isolée ou associée soit à une anastomose systémicopulmonaire
controlatérale ou homolatérale, soit en laissant libre la voie
antérograde ventriculoartérielle.
VCI
VSH
VD
OD VG
APG
APD
VCS
AO
Valve
SC
5 Intervention de Fontan : elle consiste en une anastomose de Glenn associée à un
tube valvé entre l’auricule droite et l’artère pulmonaire droite (APD), fermeture de la
communication interauriculaire ou du foramen ovale, et mise en place d’une valve prothétique
dans la veine cave inférieure (VCI). VCS : veine cave supérieure ; AO : aorte ;
APG : artère pulmonaire gauche ;OD : oreillette droite ; VG : ventricule gauche ; VD :
ventricule droit ; SC : sinus coronaire ; VSH : veine sus-hépatique.
VCI
VSH
VD
VG
OD
APG
VCS
AO
APD
SC
6 Fontan modifié ou Kreutzer : anastomose entre l’auricule droite et l’anneau pulmonaire
désinsérée de l’infundibulum. Fermeture du foramen ovale. Pas de valve prothétique.
APD : artère pulmonaire droite ; VCS : veine cave supérieure ; AO : aorte ;
APG : artère pulmonaire gauche ; OD : oreillette droite ; SC : sinus coronaire ; VD :
ventricule droit ; VG : ventricule gauche ; VCI : veine cave inférieure ; VSH : veine
sus-hépatique.
VCI
VSH
VD
VG
OD
APG
VCS
APD AO
SC
7 Anastomose monocavobipulmonaire : anastomose terminolatérale entre la veine
cave supérieure (VCS) et l’artère pulmonaire droite (APD), avec un shunt bidirectionnel
vers les deux poumons. AO : aorte ; APG : artère pulmonaire gauche ; OD :
oreillette droite ; SC : sinus coronaire ; VG : ventricule gauche ; VD : ventricule droit ;
VCI : veine cave inférieure ; VSH : veine sus-hépatique.
11-041-M-10 Atrésie tricuspide Cardiologie
6
· Cavopulmonaire totale
Elle consiste à dériver tout le sang systémique vers l’artère
pulmonaire à l’exception parfois, dans certains montages, du retour
veineux coronaire.
Pour le territoire veineux cave supérieur, on réalise toujours une
anastomose cavopulmonaire ; pour le territoire veineux cave
inférieur, plusieurs techniques sont utilisées :
– incorporation de l’oreillette droite après fermeture de la
communication interauriculaire, mais on retrouve les problèmes du
Fontan (dilatation de l’oreillette droite, hyperpression veineuse) ;
– dérivation cavopulmonaire décrite par Puga et de Leval [10, 35, 45] :
elle consiste à créer un chenal intra-auriculaire en utilisant la partie
postérieure de l’oreillette droite et un patch pour tunnelliser la veine
cave inférieure vers l’orifice de la veine cave supérieure, en laissant
le sinus coronaire se drainer dans l’oreillette gauche (fig 8) ;
– soit enfin, anastomose veine cave inférieure-artère pulmonaire par
un tube extracardiaque (fig 9), cette intervention peut se faire à coeur
battant [28].
Enfin, dans toutes ces interventions de type cavopulmonaires totales,
le chirurgien peut éventuellement réaliser un montage fenestré,
c’est-à-dire maintien d’une communication avec l’oreillette gauche,
la cavopulmonaire devient alors partielle ; cette fenêtre est une voie
de décharge en cas d’hyperpression, mais au prix d’un shunt droitegauche
pouvant poser plus tard de gros problèmes. Certaines
fenestrations peuvent être obturées par cathétérisme interventionnel
lorsque la tolérance est meilleure.
· Cavopulmonaire subtotale
Il s’agit de patients avec une continuation azygos de la veine cave
inférieure qui se jette dans la veine cave supérieure. Dans ce cas
précis, il suffit de faire une anastomose cavopulmonaire
bidirectionnelle pour que la quasi-totalité du sang veineux aille dans
l’artère pulmonaire, à l’exception du sang veineux coronaire et du
sang veineux issu des veines sus-hépatiques (fig 10), c’est
l’intervention de Kawashima [31]. Devant le bon résultat à court terme
de cette intervention, certains chirurgiens [37] ont étendu la technique
aux patients sans continuation azygos en dérivant la veine cave
inférieure vers l’artère pulmonaire, en laissant délibérément le
drainage normal des veines sus-hépatiques dans l’oreillette droite.
INDICATIONS OPÉRATOIRES
Le traitement chirurgical dépend à la fois de l’âge du patient et du
type d’atrésie tricuspide. Avant l’âge de 1 an, il s’agit presque
toujours d’une intervention palliative.
¦ Chirurgie palliative
Dans les formes avec hyperdébit pulmonaire, s’il y a transposition,
le cerclage de l’artère pulmonaire sera presque toujours nécessaire
assez rapidement, souvent avant 3 mois, pour protéger les poumons
de l’hypertension artérielle pulmonaire obstructive et afin de
pouvoir ultérieurement effectuer une chirurgie correctrice.
Lorsqu’il n’y a pas de transposition, l’indication n’est pas facile à
poser car, le plus souvent, l’hyperdébit pulmonaire va diminuer par
VCI
VSH
VD
VG
OD
APG
VCS
APD AO
SC
8 Cavopulmonaire totale (anastomose bicavobipulmonaire type Puga) : anastomose
entre la veine cave supérieure (VCS) et l’artère pulmonaire droite (APD), création d’un
chenal intra-auriculaire tunnellisé de la veine cave inférieure (VCI) jusqu’à la VCS
avec fenestration éventuelle du chenal. AO ; aorte ; APG : artère pulmonaire gauche ;
OD : oreillette droite ; SC : sinus coronaire ; VD : ventricule droit ; VG : ventricule
gauche ; VSH : veine sus-hépatique.
VCI
VSH
VD
VG
OD
APG
APD
VCS
AO
SC
9 Cavopulmonaire totale avec mise en place d’un tube extracardiaque : anastomose
directe entre la veine cave inférieure (VCI) et la veine cave supérieure (VCS) par un
tube. APD : artère pulmonaire droite ; APG : artère pulmonaire gauche ; OD :
oreillette droite ; SC : sinus coronaire ; VD : ventricule droit ; VG : ventricule gauche ;
VSH : veine sus-hépatique.
VSH
VD
VG
OD
APG
APD
VCS
AO
VA
SC
10 Cavopulmonaire subtotale (Kawashima) : patient ayant une continuation azygos
se drainant dans la veine cave supérieure (VCS) et anastomose terminolatérale VCSartère
pulmonaire droite (APD). Le sang des veines sus-hépatiques (VSH) et du sinus
coronaire (SC) continue à se drainer dans l’oreillette droite (OD). APG : artère pulmonaire
gauche ; AO : aorte ; VD : ventricule droit ; VG : ventricule gauche ; VA : veine
azygos.
Cardiologie Atrésie tricuspide 11-041-M-10
7
réduction de la taille du foramen bulboventriculaire et accentuation
de la sténose infundibulaire. Les échocardiographies successives
aident à la décision avec parfois, en cas de doute, mesure de la
pression dans l’artère pulmonaire par cathétérisme.
Dans les formes avec hypodébit pulmonaire, on réalise le plus
souvent une manoeuvre de Rashkind et, si la cyanose est importante
ou s’il y a des malaises anoxiques, une anastomose systémicopulmonaire
de type Blalock-Taussig modifiée si l’enfant est en
période néonatale ; après 2 mois, une anastomose de type
cavobipulmonaire est souvent préférable [47].
¦ Chirurgie correctrice
L’indication d’une chirurgie correctrice, intervention de Fontan ou
bicavobipulmonaire, n’est pas facile à poser et toujours discutée,
surtout si une intervention palliative antérieure a bien amélioré le
patient.
Au début de l’intervention de Fontan, il existait de nombreux
critères pour sélectionner les patients. Ces critères ont évolué au fil
des années ; ils étaient au nombre de 10 lors des premières
interventions de Fontan : âge minimal de 5 ans, rythme sinusal,
retours veineux caves normaux, oreillette droite de taille normale,
pression artérielle pulmonaire moyenne inférieure à 16 mmHg,
résistances vasculaires pulmonaires inférieures à 4 U/m_, rapport
des diamètres artère pulmonaire/aorte supérieur à 0,75 [19], une
fonction ventriculaire gauche normale, l’absence d’insuffisance
mitrale et l’absence d’effet délétère d’une anastomose préalable.
Puis, avec l’expérience, certains critères se sont révélés de moindre
importance, mais certains restent essentiels pour l’intervention de
Fontan : des résistances pulmonaires inférieures à 2 U/m_, une
fonction ventriculaire gauche normale, rapport artère
pulmonaire/aorte supérieur à 0,75 [5, 23] et une pression artérielle
pulmonaire moyenne inférieure à 16 mmHg.
Avec l’apparition des bicavobipulmonaires, ces critères ont encore
évolué. Certaines équipes ont opéré des enfants dès l’âge de 3 mois ;
le rythme sinusal est souhaitable, mais un bloc auriculoventriculaire
ou une tachycardie atriale ne sont pas des contre-indications.
L’anatomie des veines caves n’a plus d’importance en raison de la
variété des montages. La pression artérielle moyenne, inférieure ou
égale à 15 mmHg, reste un critère important. Les résistances
vasculaires pulmonaires doivent être inférieures à 4 U/m_. Une
bonne fonction ventriculaire gauche, surtout diastolique, est
essentielle. Il faut s’assurer de l’absence de sténose sous-aortique par
communication interventriculaire restrictive. La dimension des
artères pulmonaires reste également un critère important (rapport
artère pulmonaire/aorte supérieur à 0,75). Les anastomoses
antérieures peuvent occasionner des sténoses sur l’arbre artériel
pulmonaire en rendant les suites opératoires moins simples, mais ne
constituent pas une contre-indication.
Quel est l’âge idéal pour réaliser une intervention bicavobipulmonaire
? À cette question, il n’y a pas encore de réponse précise
et seuls les résultats à très long terme peuvent nous guider.
RÉSULTATS
¦ Cavopulmonaire partielle
– L’anastomose de Glenn a un taux de mortalité opératoire inférieur
à 5 %. Le pourcentage de survie à long terme est de 84 % à 10 ans et
de 66 % à 20 ans [33]. Cependant, dans 20 % des cas, surviennent des
fistules artérioveineuses pulmonaires [41], les thromboses sont
exceptionnelles.
– L’anastomose monocavobipulmonaire (fig 11) dérivée de
l’intervention de Glenn est considérée par certains comme une
alternative à la dérivation totale avec un taux de mortalité opératoire
inférieur à 4 %, une qualité de vie normale sept fois sur 10 et une
saturation moyenne de 86 % (± 6 %) [3, 6, 36, 53], avec éventuellement
une anastomose systémicopulmonaire ou préservation du débit
pulmonaire. Les complications sont essentiellement des fistules
artérioveineuses pulmonaires [8, 50] et des fistules veinoveineuses.
¦ Intervention de Fontan
Le recul est actuellement de 30 ans. Au début, la mortalité opératoire
était relativement importante mais ensuite, avec une meilleure
sélection des patients, la mortalité a baissé pour atteindre 5 %.
Fontan [18], sur une série de 100 patients, rapporte un taux de
mortalité de 4 %.
Le pronostic à long terme est mal connu, sur les 100 patients de
Fontan, 88 % étaient encore en vie 14 ans après l’intervention, avec
une grande majorité en classe I de la New York Heart Association
(NYHA).
Les complications précoces sont un épanchement pleural,
péricardique, la présence d’une ascite, disparaissant en quelques
semaines après cependant, parfois, persistance d’une hépatomégalie
en rapport avec une élévation veineuse systémique. Le traitement [2]
est d’abord l’évacuation de l’épanchement, un régime à base de
triglycérides à chaîne moyenne et, en cas d’échec, on peut être
amené à ligaturer le canal thoracique, ceci peut être fait sous
vidéoscopie [24].
Les complications plus tardives sont l’entéropathie exsudative [16] par
augmentation de la pression veineuse au niveau de la veine cave
inférieure, la cirrhose secondaire avec une stase hépatique
chronique. L’entéropathie exsudative survient en moyenne 3 ans
après l’intervention et jusqu’à 16 ans. Sur une série de 3 029 Fontan,
3,7 % des patients ont présenté une entéropathie exsudative [43]. Les
causes peuvent être reconnues comme une sténose du montage, une
dysfonction ventriculaire ou une insuffisance mitrale, des résistances
vasculaires pulmonaires élevées, mais dans 40 % des cas, on ne
retrouve pas d’étiologie évidente. L’entéropathie se manifeste
cliniquement par des oedèmes, de l’ascite, des épanchements
pleuraux, de la diarrhée. Biologiquement, existent une
hypoalbuminémie et une hypoprotidémie. Le pronostic est souvent
sombre, avec une survie à 10 ans inférieure à 20 % ; la moitié des
patients décèdent dans les 5 ans.
Le traitement médical est efficace une fois sur quatre : diurétiques,
perfusion d’albumine, stéroïdes, inotropes. En cas d’échec de ce
traitement, une chirurgie a été proposée : levée d’un obstacle,
transformation du Fontan en cavopulmonaire, voire transplantation.
Dans certains cas, la sténose du montage (fig 12) a pu être dilatée
par cathétérisme interventionnel, de même des fenestrations
auriculaires ont été réalisées par chirurgie [29] ou par cathétérisme
interventionnel [42, 48].
11 Cinéangiographie d’une anastomose monocavobipulmonaire : le cathétérisme est
réalisé à partir d’une veine périphérique du bras gauche ; la sonde arrive dans la veine
cave supérieure (VCS) et l’opacification de celle-ci montre l’anastomose terminolatérale
entre la veine cave supérieure et l’artère pulmonaire droite (APD), avec également
opacification de l’artère pulmonaire gauche (APG).
11-041-M-10 Atrésie tricuspide Cardiologie
8
Une surveillance échocardiographique des patients opérés par
intervention de Fontan est nécessaire à la recherche d’obstruction
du conduit ou de l’homogreffe nécessitant une réintervention.
L’échocardiographie peut dépister une insuffisance mitrale et une
dégradation de la fonction ventriculaire gauche. L’imagerie par
résonance magnétique (IRM) [44] peut bien objectiver le montage et
une sténose éventuelle.
Une exploration hémodynamique réalisée au repos et à l’effort a fait
l’objet de plusieurs publications. Cette exploration montre au repos
une augmentation de la pression moyenne auriculaire aux environs
de 15 mmHg, une saturation artérielle supérieure à 90 %, une
pression télédiastolique du ventricule gauche et un volume
ventriculaire gauche dans les limites de la normale. À l’effort, la
capacité physique est de 70 à 80 % de la normale ; il existe une
altération notable de la fonction ventriculaire gauche [13, 22].
À long terme, la fonction ventriculaire gauche est de plus en plus
altérée avec apparition d’une insuffisance cardiaque parfois très mal
contrôlée posant l’indication d’une greffe cardiaque [7]. Des
thromboses peuvent survenir [12], ainsi ont été décrites des
thromboses cérébrales dont l’origine était un thrombus dans l’artère
pulmonaire [32].
Surviennent également des arythmies de plus en plus rebelles au
traitement médical et un dysfonctionnement de la valve mitrale.
Les troubles du rythme [21] sont essentiellement des tachycardies
atriales dont la fréquence augmente avec l’âge. Ces tachycardies sont
dues à des circuits de réentrées dont le point de départ est la
cicatrice opératoire ; la dilatation de l’oreillette droite avec une
pression élevée est un facteur favorisant. D’autres facteurs
favorisants sont une anomalie de la valve mitrale (prolapsus ou
insuffisance mitrale), la présence de troubles du rythme avant
l’intervention et l’âge de l’intervention : avant 3 ans et après 10
ans [14].
L’électrocardiogramme montre le plus souvent un flutter avec une
conduction auriculoventriculaire altérée, ce qui rend parfois difficile
le diagnostic. Le Holter peut aider au diagnostic. En cas d’échec du
traitement médical par l’amiodarone, on peut tenter une réduction
par stimulation atriale rapide par voie endocavitaire, sinon on aura
recours à la cardioversion. Mais les récidives sont quasi constantes
en raison des circonstances anatomiques (oreillette droite dilatée) et,
si ces troubles du rythme sont très mal tolérés, se pose la question
d’une réintervention chirurgicale en transformant la connexion
atriopulmonaire en cavopulmonaire totale, en utilisant le plus
souvent un tube extracardiaque. Cependant, il existe maintenant une
alternative à la chirurgie : c’est la possibilité de l’ablation par
radiofréquence du circuit de réentrée ; il semble s’agir d’une
méthode d’avenir en plein développement.
¦ Dérivation cavopulmonaire totale et subtotale
Plusieurs séries mondiales démontrent que la dérivation
cavopulmonaire totale a un bon résultat postopératoire immédiat,
avec une mortalité globale immédiate de 9 %. Il faut noter que cette
technique chirurgicale, tout d’abord réservée à l’atrésie tricuspide,
s’est étendue au traitement des ventricules uniques et de certaines
cardiopathies cyanogènes complexes [1, 30].
Les patients doivent être suivis régulièrement. Les éléments de
surveillance sont cliniques et paracliniques. Cliniquement, on
recherche une hépatomégalie, une cyanose avec prise de la
saturation cutanée. Les examens paracliniques sont essentiellement
l’électrocardiogramme et l’échocardiographie. En cas de doute, on
réalise un bilan hémodynamique (fig 13, 14) qui peut parfois être
remplacé par l’IRM (fig 15) [54].
Les décès précoces sont dus à plusieurs facteurs : l’hypertension
pulmonaire qui aboutit à une augmentation des résistances
vasculaires pulmonaires ; l’hypovolémie joue également un rôle
important ; enfin, la circulation extracorporelle est aussi un facteur
de mortalité car elle augmente également les résistances vasculaires
pulmonaires, mais l’ultrafiltration modifiée, le monoxyde d’azote
ont amélioré les résultats.
En postopératoire immédiat, les échecs sont dus à des bas débits
cardiaques, soit rarement par problème myocardique, soit le plus
souvent par une incompétence du lit artériel pulmonaire, d’où
l’importance du bilan échocardiographique et hémodynamique
avant l’acte chirurgical. Dans ces échecs immédiats, on procède le
plus souvent à un démontage en urgence, en laissant le plus souvent
le patient avec une cavopulmonaire partielle ; la fenestration ne
semble pas avoir d’effet sur le chiffre de mortalité précoce.
12 Contrôle angiographique d’une intervention de Fontan : l’injection se fait dans
l’oreillette droite (OD), puis opacification du tronc de l’artère pulmonaire et de l’artère
pulmonaire gauche (APG) ; on voit très bien qu’il y a une sténose entre l’auricule droite
et la voie pulmonaire, sténose qui sera dilatée par cathétérisme interventionnel.
13 Cinéangiographie après intervention de type Puga : la sonde passe de la veine
cave inférieure (VCI), dans le chenal intra-auriculaire, et arrive dans la veine cave supérieure
(VCS). Opacification de la partie inférieure et de la partie supérieure de la
veine cave, toutes deux branchées sur l’artère pulmonaire droite (APD) avec un shunt
bidirectionnel puisqu’il y a également opacification de l’artère pulmonaire gauche.
Cardiologie Atrésie tricuspide 11-041-M-10
9
Quant aux complications à long terme, outre l’entéropathie
exsudative, peuvent survenir des fistules artérioveineuses
pulmonaires, des fistules veinoveineuses, et également des troubles
du rythme et des complications thromboemboliques.
Fistules artérioveineuses pulmonaires
Elles se voient également dans les cavopulmonaires partielles et les
cavopulmonaires subtotales, lorsque la circulation pulmonaire est
privée de sang veineux hépatique [51]. Ceci a conduit à penser qu’il
existait un facteur hépatique présent dans la circulation hépatique
qui empêcherait l’apparition de fistules artérioveineuses
pulmonaires, mais ceci n’a pas été démontré jusqu’à présent malgré
des expérimentations animales. Un facteur péjoratif semble être la
présence d’un isomérisme qui est pratiquement constant chez les
sujets développant des fistules [50]. Il s’agit d’une complication sévère
apparaissant à bas bruit, avec apparition progressive d’une cyanose.
Le diagnostic n’est pas facile. L’échocardiographie de contraste
montre la présence d’échos dans l’oreillette gauche ; ceci n’est pas
pathognomonique car cela se voit dans les fistules veinoveineuses
et les shunts droite-gauche auriculaires lors de montages fenestrés.
Lorsque l’échocardiographie de contraste est positive, il faut essayer
de confirmer le diagnostic soit par angiographie, soit par
angioscanner spiralée des poumons. Ces fistules sont difficiles à
traiter ; dans les formes macroscopiques, des embolisations ont été
tentées avec, le plus souvent, des résultats transitoires ; s’il s’agit de
fistules localisées, une chirurgie à type d’exérèse peut être proposée.
Fistules veinoveineuses
Les patients ayant un retour azygos ou hémiazygos opérés par
intervention de Kawashima ont une hémodynamique de dérivation
cavopulmonaire quasi totale, mais peuvent développer des fistules
entre le système azygos et les veines sus-hépatiques ; le shunt
devient de plus en plus important et entraîne une désaturation de
plus en plus sévère.
Ces fistules peuvent être embolisées mais avec un succès souvent
relatif car elles récidivent (fig 16, 17). Il faut donc secondairement
soit dériver les veines sus-hépatiques à l’artère pulmonaire, ce qui
est l’option le plus souvent retenue, soit lier les veines sushépatiques
avec parfois de bons résultats [26].
De même, des fistules veinoveineuses entre les veines rénales,
suprarénales et les veines sus-hépatiques surviennent quasi
constamment dans les interventions où la veine cave inférieure a été
anastomosée à l’artère pulmonaire, en laissant les veines sushépatiques
se drainer dans l’oreillette droite [37]. Il a toujours fallu
réintervenir.
Accidents thromboemboliques
Ils sont loin d’être rares, mais plus fréquents après intervention de
Fontan qu’après cavopulmonaire ; ils surviennent à la faveur d’un
trouble du rythme ou d’un ralentissement circulatoire comme une
14 Cinéangiographie après intervention de Kawashima : lors du cathétérisme,
la sonde passe dans une continuation azygos de la veine cave inférieure (VCI) ; cette
continuation azygos se jette dans la veine cave supérieure (VCS) qui est anastomosée
par une anastomose type monocavobipulmonaire à l’arbre artériel pulmonaire. APD :
artère pulmonaire droite.
15 Ciné-IRM (imagerie par résonance magnétique) après intervention
de Kawashima : coupe native frontale d’une angiographie 3D par résonance magnétique
avec gadolinium montrant une continuation de la veine cave inférieure (VCI) dans
la veine azygos qui se jette dans la veine cave supérieure (VCS), puis visualisation
de l’artère pulmonaire droite (APD) en raison d’une anastomose cavopulmonaire.
16 Fistule veinoveineuse : à partir de la veine cave, fistule entre veines suprarénales
et veines sus-hépatiques qui vont secondairement se drainer dans l’oreillette droite ; ces
fistules avaient été embolisées dans un premier temps, avec des coïls visibles
sur l’angiographie, avec succès immédiat mais échec à long terme. VCI : veine cave inférieure.
11-041-M-10 Atrésie tricuspide Cardiologie
10
stase importante dans une oreillette droite dilatée. Un traitement
préventif est donc toujours proposé, tout d’abord un traitement par
antivitamine K, mais il n’y a pas encore de consensus sur ce
traitement à long terme. Faut-il le poursuivre toute la vie ou peuton,
au bout de quelques mois, prendre le relais par l’aspirine ? La
tendance actuelle est de donner un traitement antivitamine K à vie,
surtout s’il existe un shunt résiduel. Une exploration de la
coagulation doit être systématique à la recherche du facteur V de
Leiden, de même que le dosage des D-dimères.
Complications rythmiques
Elles sont beaucoup plus rares que dans les dérivations
atriopulmonaires [39] ; elles sont dues à l’acte chirurgical ; elles sont
plus importantes lors d’isomérisme. Il s’agit surtout de tachycardies
atriales hétérotopes. Si le traitement médical est inefficace, on ne
peut réduire ce trouble du rythme par stimulation endocavitaire car
l’oreillette droite est complètement isolée ; la prise en charge devient
très difficile : stimulation par voie épicardique ou par voie
endoventriculaire (abord sus-hépatique, transthoracique). Il s’agit
alors de techniques d’exception et périlleuses. Les techniques
modernes d’ablation par radiofréquence semblent prometteuses,
certains ont réalisé des ablations du noeud auriculoventriculaire avec
de l’éthanol par voie transcoronaire [9].
Conclusion
Il n’existe pas actuellement de traitement chirurgical parfait.
L’intervention de Fontan a été une révolution mais les complications,
lorsqu’elles surviennent, sont redoutables et difficiles à traiter.
Les interventions cavopulmonaires totales et subtotales ont semblé plus
séduisantes. Mais actuellement, on évite d’exclure les veines sushépatiques
car la réintervention est inéluctable. À long terme, les
cavopulmonaires totales ont vu apparaître leurs complications. C’est la
raison pour laquelle va se poser la question : peut-on se contenter d’une
cavopulmonaire partielle au prix d’un certain degré de cyanose ?
Références
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: à partir de la veine cave
inférieure, injection sélective
dans une veine suprarénale
; on voit très bien
de nombreuses anastomoses
avec des veines sus-hépatiques
(VSH) qui se drainent
directement dans
l’oreillette droite (OD) puis
dans le coeur gauche, expliquant
la désaturation cutanée.
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