Propriétés physiques
du cheveu
Elles résultent d’une
architecture protéique complexe.
L’analyse de la kératine du
cheveu après hydrolyse montre la
présence de 18 à 20 acides
aminés distincts, mais l’un d’entre eux, la
cystine, représente à lui seul
15 à 18 % de l’ensemble : c’est dire son
extrême importance dans la
structure. La chaîne latérale de la cystine
comporte un « pont » de deux
atomes de soufre formant jonction
entre deux enchaînements
peptidiques voisins (fig 1). Une forte
teneur en cystine traduit donc
un taux de réticulation élevé. Les
ponts disulfures de la cystine
sont une composante essentielle de la
résistance mécanique du
cheveu, mais la cohésion de l’édifice est
renforcée par le grand nombre
de liaisons hydrogènes qui
s’établissent entre les
groupes carbonyles (CO) et amides (NH) des
liaisons peptidiques (fig 2), et par les liaisons dites
salines qui
résultent de l’attraction
ionique entre les groupements acides
(aspartique, glutamique) et
basiques (lysine, arginine) situés sur les
chaînes latérales (fig 3). Nous verrons ci-après
comment la rupture
Claude Bouillon : Directeur corporate
direction générale, recherche et développement, L’Oréal, centre de
recherche Charles Zviak, 90,
rue du Général-Roguet, 92583 Clichy cedex, France.
et la reconstitution de ces
divers types de liaisons sont mises à profit
pour imposer des déformations
au cheveu et le mettre en forme de
façon plus ou moins durable.
Déformation temporaire
du cheveu :
produits de mise en
forme, de coiffage
et de maintien
Le moyen le plus simple pour
donner une forme à la chevelure
consiste à l’humidifier, à lui
imprimer une déformation à l’état
mouillé, puis à sécher les
cheveux dans la forme imposée. Ce
processus s’appuie sur les
propriétés élastiques remarquables du
cheveu : les déformations de
faible amplitude sont totalement
réversibles. Toutefois, la
vitesse avec laquelle s’opère le retour à l’état
OC NH
HN CO
CH-CH2-S-S-CH2-CH
K1 K2
1 Pont disulfure (cystine)
entre deux chaînes
de kératine K1 et K2.
Encyclopédie
Médico-Chirurgicale 50-190-B-10
50-190-B-10
initial après étirement peut
dépendre des conditions dans lesquelles
la déformation a été réalisée.
Dans l’eau, le cheveu s’allonge
beaucoup plus rapidement, mais
il revient aussi beaucoup plus vite
à son état initial quand cesse
la traction. En revanche, si après avoir
étiré le cheveu, on le sèche
en maintenant la tension, le cheveu
conserve à sec une partie de l’allongement
qui lui a été donné. Ce
comportement est attribué à la
contribution des liaisons hydrogènes
et des liaisons salines : à l’état
mouillé, un certain nombre de ces
liaisons sont rompues ou
affaiblies, les chaînes de kératine peuvent
donc glisser plus facilement
et subir un certain étirement. Au cours
du séchage, de nouvelles
liaisons s’établissent, qui vont cristalliser
le nouvel arrangement spatial
interne. Ces nouvelles liaisons cèdent
toutefois progressivement sous
la pression des forces naturelles de
rappel et ce d’autant plus
vite que l’atmosphère ambiante est plus
humide.
Dans la pratique, on opère
comme suit : la déformation est imprimée
aux cheveux mouillés :
– soit par enroulage sur des
rouleaux de mise en plis ou des
papillotines ou d’autres
supports de formes variables, ou même
autour d’un doigt avec
fixation de la boucle avec des épingles ;
l’enroulage est suivi d’un
séchage au séchoir ou à l’air libre ;
– soit à l’aide d’un peigne et
d’une brosse, avec fixation de la forme
simultanément par un séchoir à
main (Brushingt).
La forme obtenue dans ces
conditions n’est que temporaire ; elle
disparaît à la première
averse. D’où l’idée de rechercher des produits
capables de retarder cet
inéluctable retour au naturel et d’essayer de
prolonger la forme d’un
shampooing à l’autre.
Les produits de mise en forme
et de coiffage sont basés sur des
solutions de polymères dits
filmogènes, c’est-à-dire des substances
de haut poids moléculaire qui
laissent, après évaporation, un film
enveloppant chaque cheveu : ce
film doit à la fois exercer un rôle
mécanique en maintenant le
cheveu dans la forme imposée, apporter
du gonflant à la chevelure et
la protéger contre l’humidité ambiante.
Il ne doit être ni collant ni
rêche, ni friable ni hygroscopique, ne pas
poudrer, rester invisible...
L’art du formulateur est à la
fois dans le choix du (ou des)
polymère(s) pour satisfaire à
ces exigences nombreuses et souvent
contradictoires, et dans la
mise au point d’un support permettant
d’exalter les qualités du film
polymère, de minimiser ses défauts et
de répondre aux besoins ou à
une utilisation spécifiques (mise en
plis, Brushingt, coiffage avec les doigts,
coiffures modelées,
structurées, ébouriffées,
fixées...). La formulation a constamment
évolué avec les techniques de
mise en forme, la mode, les types de
coiffure. La disponibilité de
nouveaux polymères et de nouveaux
agents traitants a permis aux
cosméticiens d’enrichir constamment
la palette de produits et de
performances. Aux premières lotions
aqueuses ou hydroalcooliques
se sont adjoints des gels, des mousses
aérosols, des sprays, des
lotions et des mousses de coloration
temporaire, offrant un
maintien plus ou moins rigide ou un
modelage coiffant souple plus
ou moins traitant et embellissant
(apport de douceur, brillance,
soin, démêlage, discipline, texture,
corps...).
La formule d’un produit de
mise en forme, de coiffage ou de
maintien se compose en général
de :
– polymères filmogènes ;
– plastifiants ;
– agents adoucissants,
démêlants, donneurs de brillance ;
– parfum, colorant ;
– solvant (eau, alcool).
Les polymères utilisés sont,
soit des résines non ioniques
(polyvinylpyrrolidone [PVP] ou
copolymères de vinylpyrrolidone et
d’acétate de vinyle [PVP/VA]),
soit, le plus souvent, des résines
anioniques, c’est-à-dire des
polymères dont la structure porte un
certain nombre de groupements
acides libres que l’on neutralise
pour obtenir une bonne
solubilité dans l’eau et l’alcool. Le taux de
neutralisation revêt une
grande importance car il détermine à la fois
la solubilité et la résistance
du film à l’humidité : il doit donc être
soigneusement ajusté. Les
plastifiants ont pour objectif de modifier
la flexibilité, la dureté, la
résistance à l’humidité et d’empêcher le
poudrage du film. Ce sont des
polyglycols, des dérivés de lanoline,
des silicones, des protéines.
Les agents destinés à améliorer le
toucher, l’aspect, le démêlage
des cheveux sont multiples, mais on
peut citer en particulier les
polymères cationiques, qui, en plus de
toutes ces propriétés,
renforcent l’adhésion du film grâce à leur
affinité pour la kératine.
Les laques sont normalement
destinées à être appliquées sur la
coiffure terminée, c’est-à-dire
sur cheveux secs, après le « coup de
peigne ». L’objectif n’est
plus de gainer le cheveu, mais de recouvrir
la chevelure d’une résille
invisible plus ou moins ferme, plus ou
moins souple, pour conférer
une certaine rigidité à la coiffure finie
et la protéger contre les
déformations mécaniques, le vent,
l’humidité.
Alors que les produits de mise
en forme, de coiffage ou de maintien
s’appliquent après un
shampooing ou pas plus d’une fois par jour,
les laques peuvent être
appliquées plusieurs fois par jour. À plus de
90 %, ce sont des aérosols :
une solution alcoolique conditionnée
sous pression et vaporisée au
travers d’une valve commandée par
un bouton poussoir. La qualité
d’une laque est à la fois dans la
finesse de sa pulvérisation et
dans les propriétés de la maille
polymérique, qui doit
satisfaire à des exigences tout aussi délicates
et multiples que pour les
produits précédents. La plupart des
polymères filmogènes
utilisables pour ces derniers le sont aussi pour
les laques. Les principales
différences résident dans la concentration
en polymère (plus élevée en
général) et la nature et la quantité de
plastifiants. La possibilité
de formuler sans eau permet en outre de
faire appel à d’autres
résines, dès lors que leur solubilité dans
l’alcool et leur compatibilité
avec les propulseurs sont bonnes.
Les performances d’une laque
dépendent dans une large mesure de
la technologie de
pulvérisation. Les principaux gaz propulseurs
utilisés sont des associations
à partir d’hydrocarbures simples ou
fluorés non chlorés ou d’oxyde
de diméthyle (diméthyléther [DME]).
Déformation.
Ondulation permanente
Quel que soit le corset
polymérique dont on emmaillote le cheveu
pour prolonger sa forme, il ne
résiste pas au premier shampooing.
Pour obtenir des boucles ou
des ondulations durables, pour
imprimer à la chevelure un
support de forme qui se conserve dans
le temps, il faut mobiliser d’autres
liaisons que les seules interactions
ioniques (salines) et «
hydrogène » : il faut libérer toutes les
ressources d’extension de la
fibre en rompant les ponts disulfures
(cystine). Le principe de la
permanente consiste à ouvrir
temporairement un certain
nombre de liaisons disulfures K-S-S-K
entre les chaînes de kératine
(K), grâce à l’action d’un agent
réducteur ou « liquide frisant
» qui va rendre le cheveu plastique,
c’est-à-dire déformable sans
élasticité, et permettre ainsi le
glissement des chaînes
polypeptidiques de la kératine pour modeler
le cheveu dans une forme
nouvelle, imposée par enroulage sur
bigoudi. Dans un deuxième
temps, les liaisons disulfures sont
RIC
H
•••
NIH
O
C
I I
C
O•••HIN
I I
CIR
H
K1
K2
2 Liaisons « hydrogène ».
OC NH
HN CO
CH-CH2-CO2- +H3 N- (CH2)4 -CH
3 Liaison saline acide
aspartique/
lysine.
reconstituées, mais selon une
répartition différente de l’état initial,
par l’intermédiaire d’un agent
oxydant appelé « fixateur » ou
« neutralisant » qui va fixer
durablement l’ondulation créée (fig 4).
LOTIONS FRISANTES
Les meilleurs agents
réducteurs pour réaliser l’ouverture des liaisons
disulfures lors de la première
étape de la permanente sont les thiols
ou mercaptans :
fonctionnellement apparentés, ils sont les
partenaires d’élection des
liaisons cystines qui relient les chaînes de
kératine pour réaliser une
réaction d’interéchange oxydoréducteur :
2 R-SH + K-S-S-K ¬ 2 K_SH + R-S-S-R
thiol liaison disulfure
thiol oxydé
entre chaînes
kératine réduite
Beaucoup de thiols et de
systèmes réducteurs ont été essayés, mais
un nombre très restreint s’est
avéré utilisable, essentiellement pour
des raisons d’irritation ou de
potentiel allergisant, de durée
d’application ou de qualité de
frisure.
Le plus utilisé, de très loin,
est l’acide thioglycolique, neutralisé sous
forme de sel, qui réalise le
meilleur compromis efficacité/tolérance
malgré une odeur peu agréable
et la nécessité de travailler à pH
basique pour disposer d’un
potentiel réducteur suffisant. La majorité
des lotions frisantes sont des
solutions de thioglycolate
d’ammonium et d’ammoniaque,
éventuellement « tamponnées »
avec du carbonate/bicarbonate
d’ammonium. Le choix de
l’ammoniaque offre le double
avantage de favoriser un bon
gonflement du cheveu par
affaiblissement des liaisons hydrogène et
d’éviter un excès d’alcalinité.
L’efficacité frisante dépend à
la fois de la concentration en réducteur
et du pH. La législation
européenne (CEE) autorise un pH compris
entre 6 et 9,5 et une
concentration maximale de 11 % en acide
thioglycolique pour les
produits à usage professionnel et de 8 %
pour les produits vendus au
public. La force des produits est
adaptée à chaque qualité de
cheveux. Les cheveux colorés et surtout
les cheveux décolorés, plus
poreux, doivent être traités avec des
solutions beaucoup plus
faibles (on utilise par exemple une lotion à
1 % d’acide thioglycolique
pour des cheveux fortement décolorés
contre 7 % pour un cheveu
naturel moyen facile à permanenter et 8
à 9 % pour un cheveu
difficile). Les produits destinés à l’utilisation à
domicile ont une force réduite
d’environ un tiers par rapport aux
lotions à usage professionnel.
Les lotions frisantes
contiennent également de faibles quantités
d’agents mouillants et
moussants (tensioactifs non ioniques ou
anioniques) pour favoriser une
imprégnation régulière du cheveu et
bien localiser l’application ;
des séquestrants pour préserver le
système réducteur, en
particulier vis-à-vis du fer ; et des agents
adoucissants : huiles
végétales, dérivés de lanoline, hydrolysats de
protéines, qui mettent à
profit une perméabilité augmentée du
cheveu réduit pour le soigner
et l’embellir. Mais le progrès majeur
apporté par les formulations
modernes est d’avoir réussi à
incorporer certains polymères
cationiques, qui protègent le cheveu
sur toute sa longueur tout au
long du processus de permanente et
améliorent considérablement l’état
de la fibre, laissant un cheveu
vigoureux, soyeux et brillant.
En dehors de l’acide
thioglycolique, il est essentiellement fait appel
à deux autres thiols : l’acide
thiolactique et la cystéine. D’une
efficacité plus modérée, ils
sont utilisés soit en complément, soit
pour réaliser des permanentes
souples ou destinées à des cheveux
fragilisés.
FIXATEUR OU NEUTRALISANT
Deuxième temps de la
permanente : la neutralisation. La reformation
des liaisons disulfures par
oxydation est une étape déterminante
pour consolider le cheveu dans
sa nouvelle configuration. L’oxydant
le plus généralement employé
est l’eau oxygénée à 6-8 volumes à
pH acide, pH où elle est la
plus stable. La formule d’un fixateur ou
neutralisant contient en outre
des stabilisants pour empêcher la
décomposition de l’oxydant,
des agents mouillants ou moussants
pour une bonne imprégnation
des mèches enroulées, et des
substances traitantes et
embellissantes, alcools gras, dérivés de
lanoline, tensioactifs ou
polymères cationiques, etc, dans la mesure
où celles-ci peuvent être
compatibles avec le milieu oxydant.
Défrisage
Le principe est le même que
pour l’ondulation permanente, mais
dans une perspective de
déformation inverse. Il s’agit de rendre le
cheveu suffisamment plastique
pour lui faire adopter une
configuration lisse et rendre
celle-ci durable. L’opération peut être
réalisée en utilisant la même
séquence de traitements que pour la
permanente : rupture des
liaisons disulfures par un réducteur pour
permettre l’étirement des
chaînes de kératine, puis reconstitution des
liaisons disulfures par un
oxydant pour fixer le cheveu dans la forme
défrisée. Pour boucler le
cheveu, on utilisait les bigoudis ; le lissage
est effectué mécaniquement par
passage du peigne sur les mèches
imprégnées de produit
réducteur. Le réducteur utilisé est en général
le thioglycolate d’ammonium,
et l’oxydant fixateur un bromate. Mais
ils sont incorporés dans des
supports totalement différents des
produits frisants : au lieu de
lotions, on recherche ici des crèmes ou
des gels épais, « lourds »,
pour maintenir les cheveux aussi raides
que possible pendant toute la
durée du traitement.
Pour des cheveux difficiles à
défriser, cette approche
réducteur/fixateur ne donne
pas de résultats satisfaisants. Les seuls
défrisants efficaces sont des
crèmes alcalines contenant 2 à 4%d’une
base forte (soude, potasse,
lithine). Ils sont les plus répandus, en
particulier aux États-Unis où
ils sont appelés relaxers. Ces crèmes de
défrisage contiennent en
général des quantités importantes de
vaseline pour maintenir les
cheveux en place pendant l’opération
de lissage, des émulsionnants,
ainsi que des alcools gras et autres
adoucissants (lanolines,
silicones, protéines, polymères…). Très
efficaces, ces produits
doivent être manipulés avec précaution. Il est
recommandé de faire précéder
leur application de celle d’un produit
gras sur le cuir chevelu pour
le préserver de l’agressivité des
alcalins. Le passage du peigne
doit être très progressif pour éviter
des ruptures de cheveux excessives.
S
S
S
S
S
S
S
S
K1
R-SH
K2
SH
HS
SH
HS
SH
HS
SH
HS
SH
SH
SH
SH
HS
HS
HS
HS
S
S
S
S
S
S
S
H2O2 S
4 Principe de la permanente.
A. Réduction.
B. Étirement.
C. Oxydation. K1, K2 : chaîne de kératine ; R-SH :
acide thioglycolique ; H2O2 :
eau oxygénée.
*A
*B
*C
Décoloration.
Éclaircissement
L’éclaircissement de la
couleur des cheveux consiste essentiellement
dans la destruction oxydative
et la solubilisation des pigments
mélaniques situés dans le
cortex. Ces pigments mélaniques sont
généralement classés en deux
types principaux :
– les eumélanines,
pigmentation granuleuse de couleur brun à noir
foncé ;
– les phæomélanines,
pigmentation diffuse de couleur jaune pâle à
roux.
Le processus de décoloration
affecte les deux types de pigmentation,
mais avec, semble-t-il, une
cinétique et des évolutions différentes. Il
en résulte un éclaircissement
progressif, attribué à la dégradation
des pigments bruns, et
parallèlement une révélation de reflets,
caractéristiques de la
pigmentation diffuse. Les procédés de
décoloration font
essentiellement appel à l’oxygène naissant. Les
sources d’oxygène naissant
sont l’eau oxygénée, les persulfates et
les peroxydes. On utilise :
soit l’eau oxygénée seule, soit l’eau
oxygénée en présence d’ammoniaque
(la libération d’oxygène croit
avec l’alcalinité), soit, si l’on
désire éclaircir davantage, l’eau
oxygénée en présence d’ammoniaque
et de persulfates.
L’eau oxygénée est
généralement commercialisée sous forme de
solutions acides à 20 volumes
(6 %) ou 30 volumes (9 %). Les
coiffeurs utilisent des
solutions à 20, 30 ou 40 volumes (12 %). Pour
empêcher la décomposition de l’eau
oxygénée, ces solutions
contiennent séquestrants et
stabilisants (acide phosphorique,
phénacétine, acétanilide). Les
persulfates (de sodium, potassium ou
ammonium) sont utilisés dans
les formulations de poudres
décolorantes, à mélanger au
moment de l’emploi à l’eau oxygénée
(20-30 volumes) en milieu
alcalin (pH 9-9,5).
Les produits de décoloration
peuvent se présenter sous des formes
variées. Du fait de l’instabilité
de l’eau oxygénée à pH alcalin, le
support ammoniacal et l’oxydant
sont conditionnés séparément et
mélangés au moment de l’emploi.
SOLUTIONS OU ÉMULSIONS OXYDANTES
Ce sont des solutions ou
émulsions d’eau oxygénée acides (pH 4)
stabilisées. Elles sont
mélangées au moment de l’emploi avec de
l’ammoniaque. Selon la
concentration, elles permettent d’obtenir en
15-20 minutes un
éclaircissement léger à moyen.
LOTIONS RENFORÇATRICES,
DÉMÊLANTES,
ADOUCISSANTES
Elles contiennent des
polymères de maintien, de coiffage (résines
non ioniques ou anioniques) ou
conférant du démêlage et de la
douceur (résines cationiques)
associées à 6-10 volumes d’eau
oxygénée pour donner une
action éclaircissante légère et
progressive. Ces lotions ne se
rincent pas.
SHAMPOOINGS ÉCLAIRCISSANTS
Il s’agit de solutions
moussantes ammoniacales que l’on mélange au
moment de l’emploi avec une
solution ou émulsion (oxydant crème)
d’eau oxygénée à 20 volumes.
CRÈMES DÉCOLORANTES
Ce sont des crèmes
ammoniacales à base de corps gras (cires, acides
gras, dérivés de lanoline) et
composés adoucissants (tensioactifs et
polymères cationiques)
contenant 10 à 15 % d’ammoniaque. Elles
sont mélangées avec une
solution ou émulsion d’eau oxygénée à
20-30 volumes au moment de l’emploi.
POUDRES ET CATAPLASMES
À base de persulfates et
éventuellement de peroxydes, ces poudres
sont destinées aux fortes
décolorations. Elles contiennent des charges
minérales et un agent de
gonflement (gomme végétale ou dérivé de
cellulose) pour assurer une
décoloration homogène et progressive.
Le pH fortement alcalin est
obtenu par des carbonates ou
métasilicates. Au moment de l’emploi,
elles sont mélangées à une
solution d’eau oxygénée 20-30
volumes. Faciles à appliquer, ces
produits permettent d’obtenir
un éclaircissement puissant en 50 à
60 minutes.
HUILES DÉCOLORANTES
Produits de consistance
huileuse contenant des émulsionnants et de
l’ammoniaque, ils présentent la
particularité de former un gel par
mélange avec l’eau oxygénée.
Ils sont utilisés en général avec des
sachets de poudre décolorante
pour obtenir des éclaircissements
forts.
En résumé, selon le degré d’éclaircissement
désiré (fig 5), on fait
appel aux produits mentionnés
dans le tableau I.
L’application d’un produit
décolorant est toujours effectuée sur
cheveux non lavés. Le cuir
chevelu doit conserver sa couche
protectrice naturelle de sébum
pour prévenir les risques d’irritation.
En revanche, toute décoloration
mettant en jeu l’eau oxygénée en
milieu basique (ammoniacal)
doit être suivie d’un shampooing pour
éliminer les traces de réactif
: ce shampooing doit être faiblement
détergent et de préférence
acide.
D’une façon générale, le
cheveu décoloré a un comportement
différent du cheveu normal
vis-à-vis des traitements qui peuvent lui
être appliqués. Ses propriétés
de surface sont différentes, il est plus
sec, plus poreux, plus
sensible à l’humidité, plus difficile à sécher,
plus facile à permanenter,
plus absorbeur vis-à-vis de certaines
substances telles que les
colorants et les agents cationiques. Bref,
l’action éclaircissante
entraîne des modifications importantes dans
les propriétés physiques et
chimiques du cheveu, des modifications
assez similaires, d’ailleurs,
à celles que provoque l’exposition
prolongée (et décolorante) au
soleil d’été et aux embruns. D’où la
nécessité d’utiliser des
produits de soin ou de traitement spécifiques
pour les cheveux décolorés.
Coloration
On peut estimer aujourd’hui
que 30 à 40 % des femmes des pays
industrialisés sont
utilisatrices de produits de coloration. Se colorer
les cheveux correspond à de
multiples besoins et désirs à satisfaire :
cacher les cheveux blancs,
changer la nuance naturelle en totalité ou
partiellement de façon durable
ou éphémère, exalter, raviver, parer
de reflets…
1. Noir
2. Brun
3. Châtain foncé
4. Châtain
5. Châtain clair
6. Blond foncé
7. Blond
8. Blond clair
9. Blond très clair
10. Blond clair clair
Puissant
6 tons
Moyen :
2 tons Fort :
4 tons
Niveau (couleur) Pouvoir
éclaircissant *
5 Classification des nuances
naturelles.
* à titre d’exemple, en
partant du niveau châtain.
Tableau I. – Produits
utilisés en fonction du degré d’éclaircissement
désiré.
Éclaircissement Produits
Léger (un à deux tons) Lotions
éclaircissantes non rincés
coiffantes ou démêlantes
(eau oxygénée 6-10 vol)
Léger à moyen (deux à quatre
tons)
Shampooing, gels, crèmes
ammoniacaux
+ eau oxygénée
20-30 volumes
rincés
Puissant (quatre à six tons)*
Poudre décolorante ou huile +
poudre + eau oxygénée
20-30 volumes
rincés
* Cf figure 5 : « Classification des nuances
naturelles ».
Les produits de coloration
peuvent être divisés commodément en
trois catégories reflétant la
durée, la persistance de la coloration
apportée : coloration
temporaire, coloration semi-permanente,
coloration permanente.
COLORATION TEMPORAIRE
Elle vise à apporter à la
couleur des cheveux une modification
temporaire qui doit s’effacer
avec un simple shampooing. Elle
consiste donc en un simple
dépôt de colorants à la surface des
cheveux et ne se rince pas.
Son objectif peut être soit de nuancer
légèrement ou raviver la
nuance naturelle du cheveu, soit de
personnaliser ou raviver une
coloration permanente ou semipermanente,
ou déjaunir les cheveux
blancs, corriger les reflets
jaunes d’une décoloration,
donner de la lumière, de l’éclat, du reflet,
etc.
Les colorants utilisés doivent
être facilement éliminables au
shampooing, avoir une faible
affinité pour la kératine, une taille
suffisante pour ne pas
pénétrer dans le cheveu, mais aussi une bonne
résistance au frottement pour
ne pas tacher vêtements ni oreillers, et
une résistance suffisante à la
lumière et à la sueur.
Pour satisfaire cet ensemble
de contraintes, il est fait appel à une
assez large variété de
colorants et pigments empruntés à l’industrie
textile. Les produits de
coloration temporaire sont essentiellement
proposés sous forme de lotions
de coiffage, de maintien ou de mise
en forme (contenant des
polymères non ioniques ou anioniques), de
lotions démêlantes (contenant
des polymères cationiques) ou de
mousses coiffantes ou
démêlantes basées sur les mêmes principes.
COLORATION SEMI-PERMANENTE
Contrairement à la précédente,
cette coloration vise à conférer des
nuances puissantes et pouvant
résister jusqu’à 6 à 12 shampooings.
Elle s’appuie sur des
colorants présentant une grande affinité pour
la kératine et capables de
pénétrer la cuticule du cheveu et de migrer
assez profondément à l’intérieur
de la fibre capillaire. Elle est
destinée soit à apporter des
reflets (dorés, roux, acajou, cendrés…) à
la couleur naturelle, soit à
couvrir les cheveux blancs (en proportion
inférieure à 30-40 %) dans des
nuances naturelles ou à légers reflets,
soit à déjaunir les cheveux
gris ou blancs, etc.
Les colorants utilisés sont
des colorants directs, c’est-à-dire qu’ils
teignent le cheveu par
diffusion directe, sans avoir besoin de
révélateur et sans
modification chimique de leur structure. Ce sont
des colorants puissants, de
faible taille, de faible solubilité dans
l’eau, présentant une bonne
solidité au shampooing et à la lumière.
Les nuances naturelles sont obtenues
par l’association subtile de
colorants dont les propriétés
doivent être très proches pour éviter
des disparités dans la «
montée sur cheveu », et la tenue au lavage
et à la lumière. La famille de
colorants directs la plus riche et la plus
importante est celle des
dérivés nitrés qui regroupe les
nitrophénylènediamines « ortho
» et « para », les nitroaminophénols
et leurs multiples dérivés de
substitution sur les fonctions amines
ou sur le noyau aromatique.
Les produits de coloration
semi-permanente s’appliquent
normalement sur cheveux
humides après shampooing et ils doivent
être soigneusement rincés
après un temps de pause de 10 à
30 minutes pour éliminer l’excès
de colorant. Ils peuvent revêtir des
formes diverses : des lotions
plus ou moins moussantes ou
démêlantes (mais pas de
produits coiffants, de maintien ou de mise
en forme, puisqu’ils sont
rincés), des crèmes traitantes ou
moussantes, des gels ou encore
des mousses aérosols.
Il existe quatre types de
nuances : naturelles, naturelles à reflets,
reflets et gris. Seules les
deux premières peuvent camoufler les
cheveux blancs (lorsque leur
taux ne dépasse pas 30 %).
Cette coloration est
semi-permanente, ce qui implique qu’elle
s’estompe progressivement au
fil des shampooings.
COLORATION PERMANENTE OU D’OXYDATION
Dans l’état actuel de la
technique, c’est la seule coloration qui
permette une modification
durable de la couleur naturelle, la seule
qui puisse donner aux cheveux
des nuances tenaces dans une
infinité de tons. Les produits
de coloration d’oxydation permettent
de colorer la teinte naturelle
en plus clair, en plus foncé, ou en reflet
(doré, cuivré, cendré), de
couvrir les cheveux blancs quel que soit
leur pourcentage, de nuancer
après éclaircissement dans toutes les
tonalités, en apportant une coloration
qui résiste au temps, à la
lumière, aux intempéries et
aux shampooings.
Il en résulte que la
coloration permanente est de très loin la plus
employée (70 à 80 % de la
coloration). Elle s’appuie sur l’utilisation
de colorants dits d’oxydation.
En réalité, il ne s’agit pas de
substances colorantes par
elles-mêmes, mais d’intermédiaires
incolores qui conduisent à des
colorants par un processus de
condensation oxydative. D’où
la dénomination générique qui leur a
été attribuée de « colorants d’oxydation
». Ces précurseurs de
coloration sont des molécules
simples, possédant une grande affinité
pour le cheveu et capables de
s’intégrer facilement dans la structure
du cheveu. Ils se classent en
deux catégories de partenaires, bases et
coupleurs, en fonction du rôle
qu’ils vont jouer dans le processus
d’oxydation qui les transforme
en colorants-pigments.
Les bases sont des
phénylènediamines ou des aminophénols dits
« para », c’est-à-dire
possédant soit deux fonctions aminées, soit un
groupement aminé et un
groupement phénol en positions opposées
(fig 6).
Les coupleurs sont des
phénylènediamines, des aminophénols ou
des diphénols dits « méta », c’est-à-dire
avec des fonctions en
position 1,3 (fig 7).
Les bases ont la propriété de
s’oxyder facilement en présence d’eau
oxygénée ammoniacale pour
conduire à un intermédiaire instable
appelé quinone-imine. Lorsque
cette quinone-imine se trouve au
contact d’un coupleur, elle
réagit instantanément avec ce dernier
pour former un colorant dont
la taille est double de celle des
précurseurs de départ (fig 8).Le processus d’oxydation/condensation
se poursuit à partir des
colorants formés pour conduire à de
véritables pigments
insolubles. La coloration obtenue doit tenir au
moins 4 à 6 semaines, jusqu’à
ce que la pousse des cheveux rende
nécessaire une nouvelle
application.
L’oxygène nécessaire à l’enclenchement
du mécanisme de coloration
est apporté par de l’eau
oxygénée, mélangée au moment de l’emploi
à la composition
bases/coupleurs. Pour être active, l’eau oxygénée
doit être à pH alcalin
(environ 9,5) : l’alcalinité est le plus souvent
NH2
R3 R4
N
OH
R2
N
6 Bases d’oxydation.
A. Paraphénylènediamines.
B. Para-aminophénols.
*A
*B
NH2
N
OH
N
OH
OH
7 Coupleurs d’oxydation.
A. Métadiamines.
*A
*B *C
B. Méta-aminophénols. C.
Métadiphénols.
apportée par de l’ammoniaque,
qui présente en outre l’avantage de
gonfler les cheveux et de
favoriser ainsi la « montée » des colorants
d’oxydation dans la fibre
capillaire. Mais, nous l’avons vu plus haut,
l’eau oxygénée ammoniacale est
aussi le principe oxydant qui
permet de décolorer le pigment
mélanique. La coloration
d’oxydation peut donc être
simultanément éclaircissante, ce qui lui
confère le privilège exclusif
de pouvoir colorer dans une nuance plus
claire que la couleur
naturelle du cheveu. Les propriétés
éclaircissantes permettent
également de préparer le fond pour le
développement d’une coloration
puissante et homogène. Le
potentiel décolorant est
déterminé essentiellement par la quantité
d’ammoniaque présente.
Celle-ci est donc un élément d’ajustement
extrêmement important dans la
mise au point de la formule.
COLORATION TON SUR TON
La coloration d’oxydation peut
aussi être mise en oeuvre sans
décolorer le pigment du
cheveu, en réduisant la quantité
d’ammoniaque ou en remplaçant
celle-ci par la monoéthanolamine.
Il s’agit de la coloration ton
sur ton qui a connu un développement
considérable depuis quelques
années : elle permet d’apporter des
reflets tenaces ou de couvrir
efficacement les cheveux blancs dans la
nuance naturelle de la
chevelure (tableau II).
Les produits de coloration d’oxydation
comprennent en général trois
parties :
A - Le support proprement dit,
qui contient :
– les précurseurs de
coloration : bases et coupleurs ;
– l’alcalinisant : ammoniaque
en général ;
– un antioxydant (thiol,
sulfite, hydroquinone) pour protéger les
précurseurs (bases) vis-à-vis
de l’oxydation ;
– éventuellement des colorants
directs pour orienter les reflets.
Le support est le plus souvent
constitué d’oléate d’ammonium ou
de tensioactifs émulsionnants
ou moussants non ioniques. Il peut se
présenter sous forme de crème,
de shampooing, ou encore sous
forme d’une huile donnant un
gel limpide par mélange avec
l’oxydant.
B - L’oxydant : solution d’eau
oxygénée à 20-30 volumes stabilisée à
pH acide.
C - Un produit de rinçage
terminal.
Le produit de coloration
proprement dit est obtenu par mélange de
A et B juste avant l’application.
Celle-ci s’effectue toujours sur
cheveux non lavés, comme pour
la décoloration. Après un temps de
pause qui peut varier de 15 à
45 minutes, les cheveux sont rincés,
puis on procède à l’application
du produit C. Le rinçage terminal a
une fonction importante et
double : en premier lieu, il élimine les
excès de colorant et d’oxydant
; mais il est aussi mis à profit pour
embellir la chevelure, pour
restituer au cheveu des qualités de
douceur, de légèreté, de
coiffage et exalter la couleur. Le rinçage
terminal, parfois appelé «
neutralisant », se présente soit sous forme
de shampooing acide,
généralement cationique ou amphotère, soit
sous forme d’émulsion de soin
à rincer : l’un et l’autre contiennent
des adoucissants cationiques,
des polymères cationiques qui lissent
et protègent la cuticule du
cheveu sur toute sa longueur.
Références
[1] Zviak C. Science des traitements capillaires.Paris :
Masson, 1987
NH2
NH2 NH NH2 NH2 NH2
Bleu-violet
Brun Vert
Polymère
brun
O
NH2 NH2 OH O NH
N
NH N NH N NH
NH2
NH2 NH
N
Bleu
NH2
NH2
Magenta
O
N
NH
OH
Jaune-vert
O
N
+
QDI + QDI + QDI
NH2
NH2
NH
NH2
NH2 NH2
NH2
NH
NH
OH
NH2 OH
NH
OH
Coupleurs
NH2
OH
OH
NH2
OH
NH
[O]
NH2
Base
Quinone-diimine
(QDI)
NH2
8 Schéma résumé des processus d’oxydation.
Tableau II. – Types de
coloration présentant une certaine durabilité.
Coloration d’oxydation
Coloration ton sur ton d’oxydation Coloration semi-permanente
Action éclaircissante Oui (environ deux tons) Non
Non
Coloration apportée • plus claire (environ deux
tons) • plus foncée (de ½ à un ton) • plus foncée (de ½ à un ton)
• plus foncée (x tons) • d’égale
tonalité • d’égale tonalité
• d’égale tonalité
Possibilité de reflets Oui Oui Oui
Couverture des cheveux blancs Totale Jusqu’à 50 % de cheveux
blancs • Camouflage jusqu’à 30 % de cheveux
blancs pour les nuances
naturelles
• Ne convient pas aux cheveux
blancs
pour les nuances à reflets
Durabilité Permanente Permanente
six-douze shampooings