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La consommation maximale d'oxygène ( V O2 max) s'élève en moyenne de 20 % après entraînement physique chez le coronarien. Des patients capables de s'entraîner à 65-85 % de la V O2 max pendant 1 heure 4 à 5 jours par semaine améliorent de 38 % leur V O2 max et augmentent leur double produit
. Grâce essentiellement à une amélioration de l'extraction d'oxygène périphérique, il se produit une redistribution sanguine vers les muscles squelettiques actifs et une meilleure utilisation de l'oxygène en aérobie par ces mêmes muscles. Au niveau de la cellule moycardique elle-même, l'entraînement favoriserait aussi une meilleure exploitation de l'apport d'oxygène. L'entraînement physique permet une diminution de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle au repos et à tous les niveaux de l'exercice, d'où baisse du double produit et élévation du seuil ischémique
, ceci étant vrai même en cas de dysfonction ventriculaire gauche
. Pour un effort donné, la dépense énergétique sera progressivement moindre avec l'entraînement et, en corollaire, à dépense énergétique constante, la capacité fonctionnelle s'améliore progressivement (amélioration de la V O2 max). L'importance du décalage du segment ST pour un même double produit au moment maximal de l'effort est diminuée après l'entraînement, impliquant une réduction de l'ischémie myocardique. Mais rappelons que, dans un premier temps, la réadaptation visera à combattre le déconditionnement physique secondaire à l'immobilisation prolongée. Celle-ci entraîne une balance azotée protéique négative et une diminution du capital musculaire et de la force contractile. Par des expérimentations animales, il a été tenté de mieux comprendre les mécanismes de l'amélioration de la tolérance cardiaque à l'effort : ainsi, chez l'animal porteur de lésions coronariennes induites chirurgicalement et soumis à un entraînement physique, il a été mis en évidence : une amélioration de la fonction et du métabolisme myocardiques et une augmentation de la perfusion myocardique, conséquences possibles d'une vascularisation coronarienne augmentée d'une élévation du rapport capillaire sur fibre myocardique et de la circulation collatérale
. Des singes soumis à une alimentation athérogène et à un entraînement physique régulier présentaient dans une étude des artères coronaires plus larges et moins athéromateuses que des animaux contrôles sédentaires
. Néanmoins, ceci n'a pas été démontré chez l'homme, du moins au vu des seuls documents angiographiques. Des études plus fines de la perfusion myocardique sont peut-être nécessaires.
Les objectifs de la réadaptation à l'effort chez le coronarien sont : améliorer la performance physique, faciliter la réinsertion sociale et la reprise du travail, détecter les patients à risque élevé, et corriger les facteurs de risque.
Les modalités de la réadaptation à l'effort ne sont pas bien codifiées, mais répondent généralement à 3 stades à partir du début de l'infarctus.
- - Phase I : elle débute en unité de soins intensifs, dès le 2e jour pour les formes non compliquées, en l'absence de tout phénomène douloureux. Elle s'étend jusqu'au 10e ou 15e jour après l'événement initial et correspond à la période d'hospitalisation. L'apport des nouvelles techniques de revascularisation précoce, en particulier de l'angioplastie transluminale, permet parfois d'écourter la durée d'hospitalisation ; ainsi, certains patients peuvent quitter les unités de soins intensifs au bout de 2 à 3 jours et le service de cardiologie au bout de 5 à 6 jours .
- - Phase II : elle correspond en règle à la phase de convalescence et au séjour en maison de repos spécialisée. Elle dure donc 3 à 4 semaines, période à laquelle il convient d'ajouter 3 à 4 semaines à domicile avant la reprise du travail.
- - Phase III : il s'agit de la phase d'entretien, plus particulièrement lorsque le patient a repris ses activités professionnelles, elle doit durer théoriquement toute la vie.
Phase I
Elle débute en unité de soins intensifs dès que le patient est en état clinique stable, ce qui exclut les états hémodynamiques précaires, les troubles du rythme sévères, les récidives angineuses et la fièvre. Au début de cette phase la surveillance est simple, le patient étant en règle sous contrôle électroscopique. Cette phase peut être décomposée en 3 étapes :
- - mobilisation au lit : elle comprend d'une part des mouvements de mobilisation active des articulations, d'autre part des mouvements respiratoires visant à mieux maîtriser la respiration diaphragmatique ; des séances courtes mais nombreuses sont préférables avec répétition à 5 ou 10 reprises de chaque mouvement ;
- - reprise des activités quotidiennes (toilette, rasage, alimentation) sans aide, au lit d'abord puis en position assise avec, en l'absence de complication, lever précoce permettant notamment d'éviter les efforts de miction et surtout de défécation " sur le bassin " ;
- - reprise des activités ambulatoires, progressive, à partir du 4e ou 5e jour dans les formes non compliquées.
Toutes ces activités modestes n'augmentent pas en règle la fréquence cardiaque de plus de 10 à 20 battements par minute, mais nécessitent cependant de la part des médecins et des infirmières une surveillance étroite pour ne pas ignorer des arythmies ou des signes d'ischémie.
A la phase I, les contre-indications de la mobilisation précoce sont les suivantes : choc, défaillance cardiaque mal contrôlée, frottement péricardique, douleur thoracique persistante ou récidivante, trouble du rythme, température supérieure à 38 °C. Ultérieurement, les contre-indications les plus fréquentes sont représentées par l'insuffisance cardiaque et surtout les arythmies ventriculaires.
Phase II ou phase de convalescence
C'est la phase la plus importante de la réadaptation cardiaque. Une épreuve d'effort précoce d'évaluation réalisée entre le 10e et le 15e jour, visant à atteindre 75 à 80 % de la fréquence maximale théorique (FMT) est fondamentale pour fixer les modalités pratiques de la phase II. La fréquence cardiaque (FC) d'entraînement sera égale à 90 % de la FC atteinte lors de cette épreuve, ce qui correspond à 60-70 % de la V O2 max. Cette épreuve permet de dépister des anomalies évoquant l'existence de lésions multiples et/ou une altération importante de la fonction ventriculaire (ischémie résiduelle, troubles du rythme catécholergiques, absence d'augmentation ou baisse de la pression artérielle systolique à l'effort) pouvant justifier d'autres explorations complémentaires. Le programme de réadaptation comportera par exemple des séances de gymnastique avec des mouvements d'échauffement, d'assouplissement et de remusculation de tous les groupes musculaires, en particulier les ceintures et les abdominaux, et des séances d'entraînement sur cycloergomètre ou sur tapis roulant avec une augmentation progressive de la charge pour amener le patient à la FC d'entraînement. La plateau est alors maintenu pendant une durée progressivement croissante pouvant atteindre de 20 à 45 minutes, voire plus. L'effort est ensuite diminué progressivement. La réadaptation peut se faire pendant un séjour dans un centre spécialisé ou en externe avec 3 à 5 séances par semaine pendant 6 à 8 semaines. Un matériel de réanimation et un défibrillateur doivent équiper tout centre de réadaptation, le personnel doit être formé aux techniques de réanimation. En France, la présence d'un cardiologue est recommandée pour la surveillance des séances de réadaptation. Toutes les séances seront réalisées sous surveillance scopique chez les patients à haut risque
(tableau I). Elle sera intermittente chez les patients à moyen risque
. alors que chez les patients à faible risque une simple surveillance du pouls et de la pression artérielle est suffisante. Certaines équipes américaines préconisent des séances de réadaptation à domicile avec un simple contact téléphonique chez les patients à faible risque. Pour les patients à capacité fonctionnelle plus faible, il paraît préférable d'établir des séances d'entraînement plus fréquentes (3 à 5 fois par semaine) mais plus courtes. Chez les patients très limités (insuffisance cardiaque, seuil ischémique bas par exemple), des séances de 5 minutes plusieurs fois par jour sont préférables. Parallèlement à cet entraînement, d'autres efforts physiques intéressant la vie quotidienne, domestique ou professionnelle, seront autorisés en fonction de la capacité de chaque patient : conduite automobile, jardinage léger en évitant les efforts isométriques (port de charges lourdes, etc.).
Phase III
Elle vise à conserver, voire à améliorer, les acquis de la phase II. Cependant, elle coïncide dans les cas favorables avec la complète réinsertion dans la vie active, sociale et professionnelle. Le patient va continuer sa réadaptation seul, sans surveillance médicale. Il paraît plus prudent de n'autoriser cette autonomie qu'à des sujets stables, bien informés, pouvant surveiller leur pouls pour ne pas dépasser la fréquence cardiaque limite d'entraînement qu'on leur a conseillée. L'assiduité à un programme d'entraînement va en décroissant (70 % au début de l'entraînement à 50 % 9 mois plus tard), alors que l'entraînement libre est de plus en plus préféré. L'idéal est d'effectuer quotidiennement une séance de gymnastique et un effort d'environ 30 minutes. Les sports conseillés sont essentiellement le vélo, la course à pied, la marche, le golf et la natation pratiquée en eau tempérée. Les sports à proscrire sont ceux nécessitant des accélérations brèves et rapides comme le tennis, le squash, la musculation utilisant des charges lourdes et l'haltérophilie. Le ski de fond peut être pratiqué en respectant quelques recommandations : en faire à des altitudes relativement peu élevées (1 000 à 1 500 mètres), préférentiellement en fin de matinée lorsque les températures sont plus acceptables.
Entre les mains d'équipes entraînées, les risques de la réadaptation semblent très faibles, voire négligeables. Il convient cependant de respecter certaines contre-indications.
Dans une étude
passant en revue trente programmes supervisés de réadaptation aux États-Unis et au Canada concernant 13 570 patients, il a été retenu un taux de complications global de 1 pour 25 715 patients-heure et un taux de mortalité de 1 pour 116 402 patients-heure de participation. Cependant, des voix se sont élevées, notamment aux États-Unis, dénonçant la soi-disant innocuité de la réadaptation à l'effort chez le coronarien. En fait, sont particulièrement mis en cause l'absence de réadaptation supervisée chez des patients encouragés à s'entraîner vigoureusement et qui tendent à oublier les règles de l'exercice aérobie (croissance douce et progressive de l'effort) et les seuils de FC à ne pas dépasser. La fréquence des fibrillations ventriculaires au cours de l'effort reste très faible mais néanmoins variable en fonction des différentes études et de la sévérité des programmes de réadaptation : de 1 fibrillation pour 10 000 à 1 pour 50 000 heures d'entraînement. Il nous paraît indispensable que les programmes de réadaptation soient effectués en milieu cardiologique sous surveillance médicale directe. Les contre-indications à la réadaptation sont les mêmes que pour une simple épreuve d'effort. Le même matériel que pour des épreuves d'effort diagnostiques est requis, notamment pour une réanimation éventuelle (défibrillateur, oxygène, chariot d'urgence). De plus, les patients peuvent avoir des activités sportives en dehors du milieu médical mais doivent être bien éduqués, sachant notamment ne pas dépasser un seuil de FC (en règle 70 % de la FMT) et arrêter l'effort en cas de fatigue, de dyspnée, de malaise ou de douleur thoracique. A aucun moment ils ne doivent être encouragés à " forcer ".
Les résultats de la réadaptation à l'effort chez le coronarien sont controversés. Il convient de distinguer l'amélioration de la qualité de la vie, à la fois sur les plans physique et psychosocial, dont l'évaluation est du reste malaisée, et l'amélioration de la morbidité et de la mortalité cardiovasculaires.
Résultats physiques
Sur le plan physique, le bénéfice peut être objectivé par l'amélioration de la performance à l'effort, mais ce résultat ne peut être maintenu que par la poursuite d'un entraînement au long cours.
Résultats cardiologiques
Sur le plan cardiologique, de nombreux essais randomisés ont été conduits posant d'inévitables problèmes méthodologiques (modalités de la réadaptation, importance des effectifs, durée du suivi, " crossover " entre les deux groupes, etc.). La plupart d'entre eux révèle une tendance au bénéfice dans les groupes " exercice " mais non statistiquement significative, peut-être en raison du faible nombre de patients (plus de 300 dans chaque groupe néanmoins). Pour essayer de dégager des tendances statistiques plus significatives, des méta-analyses ont été effectuées
et les résultats sont en faveur d'une réduction de 19 à 35 % de la mortalité dans les groupes " exercice ", hautement significative. L'une de ces méta-analyses a comporté 22 études randomisées et a trouvé une diminution de 20 % de la mortalité cardiovasculaire et totale. Cette diminution du risque apparaît à la première année et se maintient à 3 ans. Mais il convient d'insister sur certains protocoles particulièrement rigoureux adoptés dans la plupart de ces études : 2 à 4 séances d'entraînement par semaine durant de 20 à 60 minutes sur des périodes habituellement supérieures à 12 mois. Ces modalités supposent des infrastructures assez lourdes ainsi qu'une parfaite adhésion à la fois du patient et du cardiologue traitant. Rappelons que dans l'étude de Ehsani et coll.
, durant les 3 derniers mois, les patients couraient en moyenne 30 kilomètres par semaine ou un exercice équivalent sur bicyclette ergométrique. Peu de centres français peuvent proposer de tels programmes de réadaptation et même aux États-Unis ces programmes s'inscrivent souvent dans le cadre de protocoles de recherche clinique effectués dans des instituts particulièrement motivés.
Conséquences sur les dépenses de santé
Une étude américaine récente
a montré que la réadaptation permettait une réduction des dépenses médicales totales. Ces considérations économiques constituent un argument supplémentaire aux effets bénéfiques de la réadaptation.
Conséquences sur les facteurs de risque
L'exercice régulier augmente la masse maigre corporelle et est, d'une manière générale et croissante, considéré comme une composante importante des programmes d'amaigrissement réussis. Il augmente la sensibilité à l'insuline et réduit les concentrations d'insuline plasmatique post-prandiale, ce qui va dans le sens d'une normalisation du métabolisme glucidique.
Il agit sur le métabolisme lipidique en entraînant une augmentation du HDL cholestérol (" high density lipoproteins ") et une réduction du taux des triglycérides
. Il n'existe cependant pas de consensus en ce qui concerne la relation entre cholestérol sérique total et exercice. Un seuil de performance est probablement nécessaire pour influencer favorablement le profil plasmatique des lipoprotéines : il a été rapporté un seuil d'environ 15 km par semaine de course à pieds ou de jogging, poursuivi au moins 9 mois, comme nécessaire pour élever de manière significative le taux d'HDL cholestérol chez des hommes d'âge moyen sédentaires auparavant.
L'entraînement physique agit favorablement sur l'hypertension artérielle : la diminution des chiffres tensionnels apparaît au repos mais est plus importance à l'effort avec principalement une baisse de la pression diastolique et surtout de la pression moyenne. La pression artérielle peut aussi être réduite indirectement par le biais de la diminution pondérale.
Il semble que l'exercice physique favorise la diminution de la consommation tabagique. Il permet la modification du comportement de type A
, diminue l'adhésivité plaquettaire, stimule la fibrinolyse et diminue la sécrétion de catécholamines en réponse au stress.
Il est improbable cependant que la réadaptation à l'effort puisse à elle seule réduire les facteurs de risque sans intervention spécifique sur ces facteurs, mais il est possible, à l'inverse, qu'elle puisse contrer certains effets néfastes, chez le tabagique par exemple (diminution de l'agrégabilité plaquettaire et accélération du métabolisme du monoxyde de carbone). C'est pourquoi la réadaptation à l'effort s'inscrit souvent dans le cadre de programmes visant à combattre les facteurs de risques cardiovasculaires simultanément. C'est en Scandinavie qu'il existe la plus grosse expérience dans ce domaine avec des programmes très élaborés, incluant les interventions pharmacologiques et impliquant non seulement le patient mais aussi son entourage familial, avec une réduction de la mortalité et de la morbidité coronariennes chez les patients acceptant de se soumettre à ces programmes.
Conséquences sur la réinsertion psycho-socio-professionnelle
L'exercice physique en groupe, la répétition des séances d'entraînement sous surveillance et l'information médicale ont un rôle essentiel pour diminuer l'impact psychologique de la maladie et montrer au patient les efforts qu'il peut effectuer dans la vie de tous les jours. Une réadaptation précoce avec sortie rapide du milieu hospitalier paraît être un des facteurs d'une reprise professionnelle moins tardive. L'entraînement physique constitue un remède contre l'anxiété et prévient la survenue ou la progression d'une dépression, deux phénomènes fréquemment rencontrés chez les cardiaques. Une bonne connaissance de la capacité fonctionnelle physique peut aussi aider à la reprise d'une activité sexuelle normale qui est souvent envisagée avec appréhension. Le patient doit savoir que le pic moyen de FC au cours d'une activité sexuelle est inférieur à 120 battements par minute et que cet effort correspond à la montée d'un ou de deux étages. Beaucoup de patients restent inactifs de manière injustifiée après infarctus. Il a été pourtant montré que la capacité physique maximale d'un patient après infarctus du myocarde non compliqué n'est inférieure que de 10 % à celle d'hommes en bonne santé du même âge. Une activité physique, même de faible intensité, paraît suffisante pour avoir une influence positive. L'électrocardiogramme d'effort est un test important pour juger au mieux des possibilités de réinsertion professionnelle. Beaucoup d'entreprises ont interdit de manière injustifiée à des patients ayant fait des infarctus d'occuper des emplois dans l'industrie par exemple, alors que moins de 10 % de ces emplois sont considérés comme " durs " physiquement. Si un patient n'extériorise pas d'anomalie cardiovasculaire lors d'un test d'effort limité par les symptômes, la probabilité est forte qu'il ne présentera pas d'anomalie lors de conditions de travail ordinaires. Des patients exerçant des métiers sédentaires 8 heures par jour développent une activité de l'ordre de 3 METs. En ce qui concerne les métiers avec activité physique importante, si l'effort requis est, comme c'est le cas habituellement, de durée brève, avec des périodes de repos intercalées, même des individus avec une capacité physique basse peuvent atteindre des niveaux de travail étonnamment élevés avant que n'apparaissent des symptômes ou des signes d'ischémie. Quoi qu'il en soit, le retour au travail doit être favorisé dans la mesure du possible et ce avec la collaboration des employeurs et surtout des médecins du travail. Rappelons l'intérêt de la technique de Holter qui peut être faite au cours d'une journée professionnelle pour dépister non seulement une arythmie ventriculaire mais aussi une ischémie silencieuse avec les récentes améliorations techniques détectant de manière plus fiable les décalages du segment ST. La réadaptation a donc un impact positif évident quant à la réinsertion du coronarien. En raison de l'âge souvent élevé des patients et des problèmes actuels au niveau de l'emploi, le bénéfice de la réadaptation sur la réinsertion professionnelle ne peut être probablement apprécié comme il le mériterait. De plus, il convient de ne pas tomber dans l'excès inverse et de vouloir à tout prix minimiser la gravité de la pathologie cardiaque, ce qui peut être dangereux. L'assistance psychologique doit être adaptée cas par cas.
Il ne saurait être question de nier les avantages offerts par la réadaptation à l'effort chez les coronariens, mais plutôt de souligner certaines difficultés d'application notamment en France.
La réadaptation permet d'améliorer la capacité physique du patient dans des conditions optimales quant à la consommation d'oxygène par le myocarde ischémique. Elle facilite la réinsertion sociale du patient et favorise une meilleure prise en charge des autres facteurs de risques cardiovasculaires. Les risques de la réadaptation sont quasiment nuls à condition de respecter les contre-indications et d'assurer un encadrement médical effectif et efficace. Des méta-analyses ont montré que la réadaptation permettait une diminution de la mortalité cardiovasculaire et totale. Les modalités extrêmement variées de la réadaptation à l'effort, et parfois l'absence de conviction à tort du thérapeute quant à ses bénéfices, soulignent les difficultés d'application. Dans beaucoup d'études, la réadaptation se poursuit sur plusieurs mois ou années avec une fréquence de plusieurs séquences par semaine et un rythme d'exercice soutenu. Cela suppose des infrastructures adaptées et une adhésion à la fois du patient et de son médecin. Très souvent, en France, le patient bénéficie d'une réadaptation à la phase hospitalière et lors de la convalescence en maison de repos cardiologique. Au-delà, il est en règle livré à lui-même et se contente, dans les meilleures conditions, d'une bonne " hygiène de vie " (marche, régime, etc.). Peu de centres offrent une prise en charge à long terme. Il est vraisemblable pourtant que les effets fastes de la réadaptation s'estompent avec le temps en l'absence d'un entretien de l'entraînement. C'est tout l'intérêt des clubs qui se développent actuellement et qui donnent l'occasion de garder les bénéfices acquis grâce à un entraînement de phase III bien conduit. Enfin, une étude récente a montré une réduction des dépenses médicales dans le groupe des patients pris en charge par un centre de réadaptation, ce qui constitue un argument supplémentaire à tous les autres bénéfices de la réadaptation.
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La transplantation cardiaque a permis d'améliorer la qualité de la vie
et d'augmenter la survie des patients en insuffisance cardiaque sévère. Cependant, après une transplantation cardiaque orthotopique, hétérotopique ou cardiopulmonaire la capacité fonctionnelle à l'effort est loin d'être normalisée chez la majorité de ces patients.
La maladie avant la transplantation favorise le déconditionnement physique et la diminution de la masse musculaire. La dénervation du coeur transplanté est responsable de l'augmentation de la FC et de la pression artérielle au repos, de la diminution de la réponse chronotrope et inotrope aux catécholamines circulantes, de la moindre accélération de la FC et d'une plus grande augmentation de la pression artérielle à l'effort. Par ailleurs, il existe chez ces patients une diminution de la compliance du lit vasculaire pulmonaire. A tout ceci s'ajoutent l'ischémie du greffon, les phénomènes de rejet et les effets secondaires du traitement médical. Tous ces facteurs entraînent une diminution de la V O2 max et une diminution de l'aptitude à l'effort du transplanté. Ainsi, la puissance pic-aérobie est réduite de moitié chez les transplantés en comparaison de populations de témoins
.
L'entraînement physique après transplantation cardiaque orthotopique augmente la masse maigre, la V O2 max et la fréquence maximale atteinte. Il diminue la FC, la pression artérielle systolique et la pression artérielle diastolique au repos et à tous les niveaux de l'effort
. Il permet d'obtenir un délai d'apparition plus tardif du seuil anaérobique, une augmentation de la force musculaire, et par conséquent, une diminution de la perception de l'effort et de la ventilation pendant l'effort sous-maximal. Une baisse de la norépinéphrine sérique à tous les stades de l'effort et une diminution du nombre des bêtarécepteurs sont évoquées pour expliquer la baisse de la FC au repos
.
Après transplantation cardiaque hétérotopique, les effets de l'entraînement physique sont superposables, tout en étant moins satisfaisants, à ceux obtenus après transplantation cardiaque orthotopique
. Cela serait dû, d'après Kavanagh, aux complications médicales plus fréquentes après une transplantation cardiaque hétérotopique, entraînant une présence moins régulière aux séances d'entraînement.
Après transplantation cardiopulmonaire, la capacité fonctionnelle à l'effort et les réponses cardiovasculaires à l'exercice ressemblent à celles des transplantés cardiaques
. L'entraînement physique permet une augmentation de la réponse ventilatoire à l'exercice par augmentation du volume courant et de la fréquence respiratoire
. L'altération de ces paramètres pourrait être due à la dénervation pulmonaire
.
Après un programme de réadaptation, l'adaptation périphérique à l'exercice évolue donc dans le même sens après une transplantation cardiaque orthotopique ou hétérotopique et après transplantation cardiopulmonaire.
Un support psychologique est nécessaire chez ces patients très éprouvés moralement, surtout les premières semaines après la transplantation. Malgré le fait qu'ils disent avoir une bonne qualité de vie après leur transplantation, ils ont souvent une convalescence compliquée. Le suivi médical régulier, les contraintes thérapeutiques et hygiénodiétiques peuvent leur donner le sentiment de passer d'une maladie chronique à une autre, d'où l'intérêt d'un programme de réadaptation très bénéfique sur le plan psychologique de ces patients.
Le programme de réadaptation doit être personnalisé en fonction de l'état clinique, des conditions physiques et non pas en fonction d'un certain pourcentage de la FC comme c'est le cas au cours de la réadaptation des coronariens. Une augmentation progressive de l'effort sur une longue période est recommandée. L'entraînement comporte des exercices d'adaptation cardiovasculaire (bicyclette, tapis roulant, natation) et des exercices d'adaptation respiratoire, musculaire et articulaire (kinésithérapie respiratoire, gymnastique...). La fréquence, la durée et l'intensité des exercices sont fixées par l'équipe médicale. Les séances d'entraînement doivent être interrompues en période de rejet et d'infection.
La réadaptation des transplantés permet donc un bénéfice certain aussi bien sur la plan physique que psychologique. Des études ultérieures seront nécessaires pour déterminer les effets de l'entraînement sur la morbidité et la mortalité de ces patients.