Réanimation du nouveau-né
en salle de naissance
L Simon
G Boulay
L de Saint-Blanquat
J Hamza Résumé. – Moins de 10 % des nouveau-nés requièrent une réanimation active. Cependant, la rapidité et la
qualité de la prise en charge initiale conditionnent le pronostic de l’enfant et la survenue d’une détresse vitale
néonatale est souvent imprévisible. Donc, à chaque accouchement, la réanimation néonatale, actuellement
bien standardisée, doit pouvoir être effectuée par un personnel qualifié disposant d’un matériel adapté.
L’appréciation de la gravité de la situation du nouveau-né est essentiellement basée sur des paramètres
cliniques simples. L’aspiration précoce du pharynx et la désobstruction des voies aériennes constituent
souvent les premiers éléments de traitement des détresses respiratoires néonatales, en particulier lorsque le
liquide est méconial. Les progrès de la réanimation permettent des taux importants de survie sans séquelle
majeure en cas de grande prématurité ou d’hypotrophie majeure ; l’emploi de techniques moins invasives est
souvent proposée sur ces terrains. L’existence de pathologies malformatives doit conduire à une prise en
charge rapide par un personnel spécialisé.
© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : nouveau-né, détresse respiratoire, réanimation cardiopulmonaire, prématurité, surfactant
exogène, NO, devenir neurologique.
Introduction
Moins de 10 % des nouveau-nés requièrent une réanimation active
pour restaurer et maintenir une circulation et une ventilation
satisfaisantes. La nécessité d’une réanimation néonatale peut parfois
être suspectée avant la naissance en cas de pathologie maternelle
(toxémie sévère, infection du liquide amniotique…), d’anomalies du
développement ou de la maturation foetale (grande prématurité,
hernie diaphragmatique, cardiopathie foetale, retard de croissance
intra-utérin [RCIU]...) ou d’extraction particulièrement difficile.
Parfois, au contraire, la détresse néonatale est inattendue (procidence
du cordon, hémorragie aiguë sur placenta prævia, hypertonie
utérine, embolie amniotique…). Cependant, l’adaptation à la vie
extra-utérine est un objectif urgent à atteindre pour tout enfant dès
sa naissance et il faut pouvoir évaluer rapidement les besoins des
enfants afin de leur offrir une réanimation néonatale précoce et
adaptée. Il est donc indispensable que des personnes entraînées aux
bases de la réanimation cardiopulmonaire soient présentes lors de
chaque accouchement [21]. En France, le décret 98-899 du 9 octobre
1998 stipule qu’un gynécologue-obstétricien, un anesthésisteréanimateur
et un pédiatre doivent être disponibles dans un délai
d’arrivée compatible avec l’impératif de sécurité, tous les jours de
l’année, 24 heures sur 24, dans toute unité d’obstétrique quel que
soit le nombre de naissances annuelles. Un anesthésiste-réanimateur
doit être présent sur place tous les jours de l’année, 24 heures sur
24, dans l’établissement de soins dont l’unité obstétricale réalise plus
Lionel Simon : Praticien hospitalier.
Gilles Boulay : Praticien hospitalier.
Laure de Saint-Blanquat : Praticien hospitalier.
Jamil Hamza : Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Service d’anesthésie-réanimation chirurgicale, hôpital Saint-Vincent-de-Paul, 74-82, avenue Denfert-
Rochereau, 75674 Paris cedex 14, France.
de 1 500 naissances par an. Il doit pouvoir intervenir dans l’unité
d’obstétrique dans un délai compatible avec la sécurité (de la mère
et/ou de l’enfant). Lorsque le nombre de naissances dépasse les
2 000/an, un anesthésiste-réanimateur doit être constamment
présent dans l’unité d’obstétrique. Ainsi, pédiatres et/ou
anesthésistes-réanimateurs doivent à tout instant pouvoir intervenir
pour la réanimation d’un nouveau-né qui nécessite une prise en
charge spécialisée.
Prise en charge initiale
des nouveau-nés
La simple inspection de chaque enfant dès la naissance permet
d’apprécier les éléments du score d’Apgar (tableau I) et de juger de
la nécessité de mesures de réanimation immédiate. Ces mesures
doivent pouvoir être exécutées sans délai avec un matériel adapté,
régulièrement vérifié, toujours disponible et fonctionnel (tableau II).
QUELQUES PRÉCAUTIONS INDISPENSABLES
Le nouveau-né, en particulier prématuré, a une compétence
immunitaire limitée et une sensibilité importante aux infections. Les
gestes de réanimation doivent donc toujours être effectués avec une
Tableau I. – Score d’Apgar (d’après [2]).
0 1 2
Couleur
Respiration
Activité
cardiaque
Tonus
Réactivité
Bleue ou blanche
Nulle
Moins de 80 b·min-1
Nul
Nulle
Cyanose des extrémités
Lente et irrégulière
80 à 100 b·min-1
Hypotonie
Grimace
Rose
Bonne
Plus de 100 b·min-1
Mouvements actifs
Cris
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 4-002-P-50
4-002-P-50
Toute référence à cet article doit porter la mention : Simon L, Boulay G, de Saint-Blanquat L et Hamza J. Réanimation du nouveau-né en salle de naissance. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris,
tous droits réservés), Anesthésie-Réanimation, 36-982-A-10, Pédiatrie, 4-002-P-50, 2001, 10 p.
asepsie très soigneuse. Un nouveau-né laissé humide dans une
atmosphère à 20 °C devient hypotherme en seulement quelques
minutes. L’hypothermie augmente considérablement la
consommation d’oxygène, induit des lésions cérébrales et représente
un facteur important de mortalité. Elle doit donc être évitée en
séchant et en réchauffant rapidement l’enfant. De même,
l’hypoglycémie néonatale (glycémie < 2,2 mmol·L–1) doit toujours
être prévenue. L’anoxie périnatale contribue à épuiser les réserves
en glycogène déjà faibles du nouveau-né. Or, l’hypoglycémie
aggrave les lésions cérébrales de l’hypoxie. Un prélèvement
capillaire permet de dépister l’hypoglycémie afin de la corriger
rapidement ou de la prévenir avec une perfusion de soluté glucosé
à 10%.
ÉVALUATION DE LA GRAVITÉ DE LA SITUATION
Le score d’Apgar (tableau I) permet d’évaluer simplement la
situation de l’enfant dès la première minute de vie. Sa valeur à 5
minutes est corrélée au pronostic neurologique ultérieur des enfants.
Chez les enfants nés prématurément, un score d’Apgar bas est
associé à une plus grande morbidité et mortalité. Au contraire,
l’étude de l’histoire anténatale de ces enfants et des complications
obstétricales ne semble pas pouvoir clairement prédire la valeur du
score d’Apgar [48]. Ce score reste donc, depuis 1953 [2], un élément
incontournable de l’évaluation des nouveau-nés. Schématiquement,
on distingue deux niveaux de réanimation active. Les modalités
pratiques de ces techniques sont détaillées au chapitre suivant.
¦ Détresse d’intensité moyenne
Lorsque l’enfant est peu réactif, qu’il n’est pas eupnéique mais que
la fréquence cardiaque est encore acceptable (80 à 100 b·min–1), il est
urgent de stimuler l’enfant en le séchant et en le réchauffant, de
désobstruer ses voies aériennes avec une aspiration douce du nez et
du pharynx et de l’oxygéner. En l’absence de ventilation spontanée,
la ventilation doit être assistée au masque facial en oxygène pur.
Lorsque ces mesures sont mises en oeuvre précocement, elles
permettent souvent une amélioration rapide. Dans le cas contraire,
il est nécessaire d’envisager une réanimation plus agressive.
¦ Naissance en état de mort apparente
La naissance en état de mort apparente est définie par un score
d’Apgar inférieur à 3. Dans ce cas, la réanimation symptomatique
doit être immédiatement débutée afin d’aspirer l’enfant, de
l’oxygéner, de le ventiler, d’assurer une circulation et de le
réchauffer. La ventilation au masque permet, à elle seule, de corriger
une bradycardie majeure et de rétablir une situation
hémodynamique satisfaisante dans la majorité des cas. L’intubation
trachéale, lorsqu’elle est nécessaire, doit être réalisée devant une
source d’oxygène après avoir ventilé l’enfant deux ou trois fois au
masque. Il faut renouveler cette ventilation au masque entre chaque
tentative infructueuse. Une fois la trachée intubée, la ventilation est
débutée dès la fin de l’aspiration, à fréquence assez rapide, sans forte
pression, pour éviter tout barotraumatisme. Classiquement, cette
ventilation est réalisée en oxygène pur. Cependant, des données
théoriques récentes laissent penser que l’oxygène pourrait avoir des
effets délétères et que la ventilation des nouveau-nés pourrait être
conduite en air plutôt qu’en O2 pur. Une étude multicentrique
randomisée menée sur 609 nouveau-nés en détresse vitale n’a pas
montré de différence en termes de mortalité et de séquelles
neurologiques entre la ventilation en air et la ventilation en O2
pur [34].
Le massage cardiaque externe (MCE) doit être associé à la
ventilation tant que la fréquence cardiaque reste inférieure à 100
b·min-1. En l’absence de récupération rapide (fréquence cardiaque
inférieure à 60 b·min-1 pendant au moins 30 s), il est nécessaire
d’administrer de l’adrénaline en bolus répétés de 10 à 30 μg·kg–1
par voie intraveineuse (soit 0,1 à 0,3 mL·kg–1 d’une solution obtenue
en diluant une ampoule de 1 mg dans 9 mL de sérum
physiologique). La voie intratrachéale est souvent utilisée pour la
première dose car elle est la plus rapide d’accès [25]. Les posologies
recommandées par cette voie sont de l’ordre de 30 μg·kg–1,
l’adrénaline devant toujours être diluée dans du sérum
physiologique. Les bicarbonates, non indiqués en routine, ne doivent
être utilisés que dans des indications ciblées après rétablissement
d’une circulation et d’une ventilation efficaces. Un accès veineux
périphérique ou ombilical permet la suite de la réanimation et le
remplissage vasculaire. L’hypothermie, de survenue rapide chez le
nouveau-né, doit être à tout prix évitée pendant toute la réanimation
en séchant l’enfant et en le maintenant près d’une source de chaleur
(réanimation sur une table radiante).
MODALITÉS PRATIQUES DE LA RÉANIMATION
CARDIOPULMONAIRE INITIALE DU NOUVEAU-NÉ
¦ Désobstruction nasopharyngée
– Le but est de désobstruer les voies aériennes supérieures, d’éviter
l’inhalation trachéale des sécrétions nasopharyngées (sang,
méconium), de vérifier la perméabilité des choanes et de l’oesophage
et de permettre de ventiler manuellement l’enfant au masque.
– Le matériel : des sondes souples, non traumatisantes de calibre 8,
10 ou 12, branchées sur un extracteur de mucosité relié à une source
de vide capable d’assurer une dépression de 50 à 150 cmH2O sont
utilisées.
Tableau II. – Matériel indispensable pour la réanimation néonatale.
Table de réanimation avec chauffage radiant et lumière
Aspiration murale
Source de vide
Aspirateur d’intensité réglable avec système de clampage
Sondes d’aspiration n° 6, 8 et 10 stériles
Flacons de rinçage stériles
Oxygénation et ventilation
Débitmètre d’oxygène
Ballon (Ambuy ou Laerdaly) avec masque néonatal
Laryngoscope avec lames droites, pince de Magill
Sondes d’intubation taille 2,5 à 3,5
Canules de Guedel
Ventilateur néonatal type « découpeur de flux »
Perfusion
Cathéters courts 24 gauges (jaunes ou violets) et 22 gauges (bleus)
Épicrâniennes 27 à 22 gauges
Matériel de fixation avec planchettes, compresses, alcool
Seringues, aiguilles, tubulures, robinets à trois voies, prolongateurs fins
Pousse-seringue élastique
Solutés type sérum glucosé à 10 % avec électrolytes, sérum physiologique,
Ringer Lactatet
Matériel pour pose d’un cathéter veineux ombilical
Monitorage
Stéthoscope
Chronomètre
Cardioscope
Saturomètre
Moniteur de mesure de la pression artérielle non invasive avec brassards adaptés
Dispositif de mesure de la glycémie capillaire
Médicaments
Adrénaline : ampoules de 1 mg/10 mL
Bicarbonate semi-molaire : ampoules de 10 mL
Glucosé à 5 et 10%, NaCl à 0,9 % : ampoules de 10 mL
Naloxone
Vitamine K1
Divers
Draps chauds et stériles
Casaques et gants stériles, bavettes, chapeaux
Lancettes pour prélèvements capillaires
NaCl : chlorure de sodium.
4-002-P-50 Réanimation du nouveau-né en salle de naissance Pédiatrie
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– La technique : l’aspiration doit être douce et brève afin d’éviter les
stimulations pharyngées excessives qui entraînent des bradycardies
vagales néfastes [9] (chute du débit cardiaque), voire des troubles du
rythme ventriculaire, particulièrement chez les nouveau-nés
hypoxiques.
¦ Ventilation manuelle au masque et oxygénation
– Le but est d’initier le déplissement alvéolaire normalement produit
lors de la première inspiration, d’assister la ventilation alvéolaire
jusqu’à ce que le nouveau-né en difficulté acquière son autonomie
respiratoire et bien sûr d’oxygéner le nouveau-né anoxique.
– Le matériel : le masque rond transparent avec bourrelet étanche de
type AmbuTM ou LaerdalTM est idéal car il permet de surveiller la
coloration des lèvres de l’enfant pendant la ventilation.
Les appareils de ventilation manuelle type AmbuTM « bébé » ou
LaerdalTM « enfant » sont munis d’une valve de surpression
s’ouvrant pour des pressions supérieures à 30 cmH2O (blocage
volontaire possible dans certains cas) et d’un branchement latéral
relié à une source d’oxygène de débit adapté (5 L). L’adjonction d’un
ballon-réservoir permet d’augmenter la concentration de l’oxygène
dans l’air inspiré (FiO2) si cela est jugé nécessaire.
– La technique : la tête étant légèrement défléchie, le masque est
appliqué de manière étanche sur le nez et la bouche préalablement
ouverte pour éviter l’obstruction par la langue (fréquente chez le
nouveau-né). Les pressions d’insufflation initiales efficaces peuvent
être élevées si le nouveau-né n’a pas encore respiré : il peut alors
être nécessaire de bloquer pendant quelques insufflations la valve
de surpression pour obtenir une expansion pulmonaire satisfaisante.
Une fois les premières insufflations réalisées, les pressions doivent
rapidement être diminuées afin d’éviter toute complication
barotraumatique (pneumothorax). Le temps d’insufflation ne doit
pas être trop bref et le volume insufflé adapté à l’expansion
thoracique : il faut rappeler que les premières inspirations du
nouveau-né normal à terme mobilisent un volume courant
initialement élevé (jusqu’à 75 mL) qui ne revient à la norme (20 mL)
qu’après constitution de la capacité résiduelle fonctionnelle (CRF)
au bout de plusieurs minutes.
La fréquence de ventilation (40 à 80 c·min-1) est adaptée au terme
du nouveau-né et aux conditions cliniques selon les circonstances
de la naissance.
¦ Intubation endotrachéale
– Les buts : l’intubation de la trachée permet :
– de prévenir l’inhalation alvéolaire de liquide amniotique en
désobstruant la trachée et les grosses bronches ;
– d’assurer la ventilation alvéolaire lorsque la ventilation au
masque est contre-indiquée (hernie diaphragmatique, naissance
dans un liquide méconial) ;
– de permettre une ventilation mécanique prolongée lorsque
l’autonomie respiratoire du nouveau-né ne se restaure pas
rapidement ou s’il présente une détresse respiratoire sévère ;
– d’administrer rapidement certains médicaments utiles à la
réanimation du nouveau-né (adrénaline, atropine, naloxone) avant
même la mise en place d’une voie veineuse (moins rapide que
l’intubation).
– Le matériel :
– les sondes d’intubation utilisées dépendent du poids de l’enfant
(PN : poids de naissance) ; les normes recommandées en France
sont : diamètre interne 2,5 mm si PN inférieur à 2,7 kg ; 3 mm si
PN supérieur à 2,7 kg et 3,5 mm en cas de PN supérieur à 4 kg ;
– les lames utilisées sont des lames droites type Millert ou
Guedelt, nos 0 et 1 ;
– les sondes d’aspiration trachéale stériles nos 4, 5 ou 6 sont
manipulées à l’aide d’une pince stérile.
– La technique d’intubation endotrachéale du nouveau-né : elle
diffère de celle de l’adulte ou du grand enfant en plusieurs points :
– la bouche est petite, la langue relativement grosse ce qui
restreint l’espace disponible pour la visualisation de la glotte et la
mise en place de la sonde ou de la pince de Magill ;
– la glotte est plus haut située, ce qui rend plus difficile son
exposition correcte : il est très souvent utile d’appuyer sur le
larynx pour la visualiser ;
– l’épiglotte est large, masque souvent la glotte et doit être
chargée pour améliorer l’exposition glottique : c’est pourquoi on
utilise une lame droite ;
– l’oxygénation continue durant la laryngoscopie, à l’aide d’un
raccord de perfusion (raccord de « Beaufils »), est particulièrement
recommandée car les réserves en oxygène sont vite épuisées chez
le nouveau-né, même après une préoxygénation en oxygène pur,
car la CRF n’est pas encore constituée. La sonde d’intubation doit
être raccordée à une source intermittente d’oxygène (en marche)
et non continue, car celle-ci risquerait d’entraîner une surpression
intrathoracique après l’intubation ;
– la fixation d’un tube orotrachéal est très précaire et risque
d’aboutir à une extubation ou une intubation sélective de la
bronche souche droite : l’intubation nasotrachéale, s’aidant d’une
pince de Magill, est préférable chez le nouveau-né car la fixation
du tube à l’aide d’une « moustache » de sparadrap est bien plus
efficace. Un guide simple peut être utilisé pour éviter une
intubation sélective : le repère chiffré en centimètres à la narine
doit être de 7 + 1 cm·kg–1 de poids ;
– la trachée du nouveau-né est courte : un déplacement de la
sonde de 1 cm peut suffire à l’extuber accidentellement :
l’immobilisation de la tête est donc importante ;
– l’aspiration trachéale initiale (réalisée avec asepsie et répétée
selon l’encombrement) et l’humidification des gaz inspirés sont
essentielles pour éviter l’obstruction aiguë de la sonde
d’intubation.
¦ Massage cardiaque externe
– Les buts : assurer une circulation lorsque celle-ci paraît insuffisante.
En pratique, on sait que le volume d’éjection systolique est
relativement constant chez le nouveau-né et que le débit cardiaque
est dépendant de la fréquence. On considère qu’une fréquence
cardiaque inférieure à 100 b·min–1 est une indication de MCE chez
le nouveau-né.
– La technique : le MCE est réalisé à une fréquence entre 100 et 120
c·min-1, l’opérateur empaumant le thorax du nouveau-né à deux
mains et déprimant le sternum de 1 à 2 cm à l’aide des deux pouces
superposés. Il doit exercer la pression au niveau de la jonction un
tiers moyen-un tiers inférieur du sternum sans gêner la ventilation
alvéolaire manuelle. L’efficacité du MCE est vérifiée par la palpation
du pouls artériel ombilical, il est poursuivi tant que la fréquence
cardiaque est inférieure à 100 b·min–1. Les fréquences habituellement
recommandées pour le massage cardiaque (120 b·min–1) et la
ventilation (40 c·min–1) sont impossibles à réaliser par un
réanimateur seul. Ces objectifs ne sont atteints que dans environ
20 % des cas lorsque deux personnes réaniment l’enfant [49].
SUITE DE LA RÉANIMATION
¦ Ventilation du nouveau-né
La ventilation artificielle sur sonde d’intubation endotrachéale doit
être prudente pour éviter tout risque de barotraumatisme.
L’augmentation de la pression de pic et/ou du temps inspiratoire
ne permet pas d’améliorer le recrutement alvéolaire ; seule la
pression positive de fin d’expiration (PEP) semble pouvoir
augmenter la CRF. Un délai de 2 à 14 minutes est nécessaire après
réglage du respirateur pour juger de cet effet favorable de la PEP [45].
Cependant, chez les enfants qui ont reçu du surfactant exogène, les
niveaux de pression positive expiratoire doivent pouvoir être
rapidement réduits du fait de l’augmentation parfois très brutale de
Pédiatrie Réanimation du nouveau-né en salle de naissance 4-002-P-50
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la compliance pulmonaire chez ces enfants [10]. Par ailleurs,
l’intubation trachéale augmente considérablement le travail
inspiratoire par augmentation des résistances à l’inspiration et elle
supprime la PEP physiologique (+ 2 cmH2O) assurée par les muscles
laryngés contribuant au maintien de la CRF. Pour ces raisons, il ne
faut jamais laisser un nouveau-né en ventilation spontanée sur son
tube à l’air libre : cela aboutit rapidement à une détresse respiratoire
aggravée par un surcroît de travail respiratoire dû à l’augmentation
des résistances bronchiques et de l’espace mort.
¦ Techniques de ventilation non invasives
Les techniques non invasives de ventilation ont connu un regain
d’intérêt dans le traitement des détresses respiratoires néonatales.
La classique oxygénothérapie sous cloche de Hood peut être
suffisante pour traiter les détresses respiratoires transitoires et
modérées du nouveau-né. Cette modalité de traitement nécessite
une surveillance soigneuse afin de ne pas laisser une situation
respiratoire précaire s’aggraver et afin d’éviter l’hyperoxie en cas de
FiO2 trop élevée. Plus récemment, il a été montré que l’application
d’une pression positive continue (PPC) entre 3 et 5 cmH2O ou même
d’une réelle ventilation artificielle par voie nasale (VN) peuvent
éviter le recours à l’intubation trachéale en cas de détresse
respiratoire transitoire ou de maladie des membranes hyalines
(MMH) modérée chez le nouveau-né, en particulier prématuré [20].
La PPC permet de réduire les résistances pulmonaires totales, en
particulier les résistances supraglottiques, en évitant le collapsus des
voies aériennes supérieures à l’inspiration et à l’expiration. De plus,
la pression positive permettrait d’augmenter le recrutement
alvéolaire et donc la CRF, et d’avoir un effet protecteur sur le
surfactant [37]. La PPC peut être appliquée par l’intermédiaire de
sondes nasopharyngées en silicone transparent souple non
biseautées, introduites de quelques centimètres dans une ou deux
narines de l’enfant (sonde simple ou sonde double en « Y »). Cette
technique nécessite l’occlusion buccale, spontanée ou autour d’une
tétine, pour éviter les fuites. Au contraire, il ne faut pas favoriser
l’occlusion buccale en cas de ventilation artificielle par voie nasale,
des accidents de distension gastrique, voire de perforation digestive,
ayant été décrits. Un masque facial peut également être utilisé pour
appliquer la PPC (ou pour réaliser une ventilation non invasive). Le
dispositif évite alors les fuites, mais il est plus contraignant et le
transport vers une unité d’hospitalisation est rendu difficile. Les
ventilateurs néonatals type « découpeurs de flux » sont
habituellement utilisés en mode ventilation spontanée avec pression
expiratoire positive (VS-PEP) (pour la PPC, avec un réglage de
pression habituel entre 3 et 5 cmH2O) ou en mode ventilation
assistée contrôlée intermittente (VACI) (pour la VN, avec par
exemple un réglage Pmax entre 10 et 15 cmH2O, PEP 2 à 4 cmH2O,
fréquence supérieure à 10 c·min-1, débit machine environ 8 L·min-1).
Un dispositif récent (Infant Flow Systemt) permet d’utiliser un
générateur de débit pour réaliser une PPC particulièrement stable
durant tout le cycle respiratoire grâce à un effet jet-ventilation. Cette
pression est transmise par l’intermédiaire d’une pièce binasale,
d’application simple, mais dont la tolérance cutanée n’est pas
toujours très bonne. Par ailleurs, certains auteurs proposent de
n’utiliser l’intubation trachéale que le temps d’administrer un
surfactant exogène puis d’extuber la trachée pour prendre un relais
immédiat par une PPC [40, 47].
¦ Arrêt de la réanimation
Certaines situations imposent à l’évidence l’arrêt des manoeuvres de
réanimation :
– la persistance d’un « état de mort apparente » (Apgar < 3) au-delà
de la 20e minute de réanimation précoce et bien conduite ;
– un début trop tardif de la réanimation après une anoxie totale et
certaine depuis plus de 5 minutes après la naissance (ce qui ne doit
plus se voir).
La plus grande prudence est requise dans tous les autres cas, une
« réanimation d’attente » est donc la règle. Pour les grands
prématurés [12] ou les enfants de très petits poids [26], des facteurs
d’ordre affectif interviennent souvent dans la décision de limiter la
réanimation. Néanmoins, le pronostic neurologique ultérieur de ces
enfants ne peut souvent être apprécié que dans une unité de
réanimation néonatale ; les décisions qui en découlent pourront y
être réfléchies à partir d’éléments objectifs.
Détresse respiratoire du nouveau-né
Les problèmes ventilatoires sont fréquents à la naissance et
nécessitent toujours une intervention précoce, du fait de la rapidité
de survenue et de la gravité de l’hypoxie chez le nouveau-né. La
tachypnée supérieure à 60 c·min-1, l’irrégularité du rythme
respiratoire ou l’existence de signes de lutte (tableau III) sont des
signes d’inspection qui permettent, à eux seuls, de porter le
diagnostic de détresse respiratoire. En présence de ces signes, les
arguments anamnestiques, cliniques et radiologiques doivent
permettre à la fois d’apprécier la gravité de cette détresse et d’en
suspecter l’étiologie (tableau IV). Quelle que soit l’origine de la
détresse respiratoire, une obstruction des voies aériennes doit
toujours être suspectée, et l’aspiration du pharynx est un élément
fondamental à réaliser. La mauvaise tolérance de la dyspnée est
appréciée sur l’importance des signes de lutte, sur l’existence
d’irrégularités du rythme respiratoire et/ou de pauses respiratoires,
sur la présence d’une cyanose, de troubles hémodynamiques
associés ou d’une hypoxémie marquée. Ce dernier élément est
apprécié par l’oxymétrie de pouls et/ou la mesure de la TcPO2. Le
traitement symptomatique permettant l’oxygénation et la ventilation
du nouveau-né doit être immédiatement débuté et constamment
adapté à la gravité du tableau ainsi qu’aux données étiologiques.
PRINCIPALES DÉTRESSES RESPIRATOIRES D’ORIGINE
MÉDICALE
¦ Détresse respiratoire transitoire
Elle témoigne d’un trouble de résorption du liquide alvéolaire. La
naissance par césarienne en est le principal facteur de risque. La
Tableau III. – Score de Silverman, permettant de coter la sévérité
d’une détresse respiratoire néonatale.
0 1 2
Balancement
thoracoabdominal
Tirage intercostal
Entonnoir
xiphoïdien
Battement des
ailes du nez
Geignement
expiratoire
Absent
Absent
Absent
Absent
Absent
Thorax immobile
Intercostal discret
Modéré
Modéré
Audible au stéthoscope
Respiration paradoxale
Intercostal sus- et soussternal
Intense
Intense
Audible et continu
Tableau IV. – Principaux mécanismes de détresse respiratoire
néonatale.
Mécanismes Exemples de pathologies
Obstruction des voies aériennes - Syndrome de Pierre Robin
- Atrésie des choanes
Pathologies pulmonaires congénitales - Hernie diaphragmatique
Épanchements - Pneumothorax du nouveau-né
Pathologies pulmonaires acquises - Maladie des membranes hyalines
- Inhalation de liquide méconial
- Pneumopathie infectieuse
Pathologies non pulmonaires - Cardiopathie congénitale type transposition
des gros vaisseaux
- Myopathie d’expression néonatale
- Pathologie neurologique
- Polyglobulie (hématocrite > 70 %)
4-002-P-50 Réanimation du nouveau-né en salle de naissance Pédiatrie
4
détresse respiratoire, souvent modérée, est parfois suffisamment
sévère pour nécessiter la ventilation mécanique. Toutefois, les
techniques de ventilation non invasive et de continuous positive
airway pressure (CPAP) nasale trouvent là une indication de choix.
Une radiographie de thorax réalisée de façon très précoce en salle
de naissance n’est pas spécifique, dans la mesure où elle ne permet
pas d’éliminer une MMH débutante ou une pneumopathie
infectieuse (fig 1). Elle doit néanmoins être réalisée, ne serait-ce que
pour éliminer un pneumothorax (fig 2). L’évolution est favorable en
24 à 48 heures, parfois moins.
¦ Maladie des membranes hyalines
Le déficit en surfactant pulmonaire est à l’origine de la MMH. La
MMH est surtout observée chez les prématurés, mais parfois
également chez des enfants nés à terme. La radiographie de thorax
aide au diagnostic en montrant de petits poumons rétractés avec un
syndrome alvéolaire bilatéral plus ou moins marqué, du simple
« granité » aux poumons « blancs » (fig 3). Des surfactants naturels
d’origine porcine (Curosurft) ou bovine (Survantat) sont
disponibles pour la prévention et le traitement des MMH. Ces
surfactants améliorent les échanges gazeux dès la cinquième minute
qui suit l’administration, avec une augmentation importante de la
CRF permettant une réduction des besoins ventilatoires. On a pu
ainsi réduire l’incidence de la mortalité liée à la MMH, ainsi que
celle de nombreuses complications comme le nombre de
1 Radiographie de thorax d’un enfant né à terme avec
une détresse respiratoire transitoire. Le cliché de gauche fait
après quelques minutes de vie montre des poumons avec un
aspect de grisaille diffuse sans signe évident de pathologie
parenchymateuse ni épanchement pleural. Le cliché
de droite réalisé 12 heures plus tard est devenu normal.
2 Pneumothorax bilatéral chez un nouveau-né.
3 Maladie des membranes hyalines de grade II.
Pédiatrie Réanimation du nouveau-né en salle de naissance 4-002-P-50
5
pneumothorax. Il pourrait également exister un effet favorable de
ces surfactants sur l’incidence des hémorragies intracrâniennes du
prématuré et sur la sévérité des dysplasies bronchopulmonaires
postventilation.
L’administration du surfactant naturel dans les voies aériennes est
habituellement réalisée en quelques minutes sous forme de bolus.
L’enfant n’est pas obligatoirement déconnecté de son respirateur le
temps de l’administration, des raccords de Cobb avec voie latérale
permettant la poursuite de la ventilation pendant l’instillation. Le
surfactant doit être réparti de manière aussi homogène que possible
dans les deux champs pulmonaires en s’aidant si besoin d’une
mobilisation de la tête de l’enfant au cours de l’administration. Une
radiographie du thorax permet de préciser la position de l’extrémité
de la sonde d’intubation trachéale (au-dessus de la carène), de
préciser la pathologie et d’éliminer un pneumothorax. L’instillation
du surfactant est réalisée chez un enfant stable sur le plan
hémodynamique et respiratoire. Au décours de celle-ci, il est
recommandé d’éviter toute aspiration trachéale pendant une période
de 6 heures.
De nombreuses études suggèrent que l’administration de surfactant
chez le prématuré de moins de 32 semaines d’aménorrhée assure
une prophylaxie efficace de la MMH [31, 42]. L’administration très
précoce (en salle de naissance) de surfactant aux prématurés semble
réduire la mortalité, le nombre de pneumothorax et
l’oxygénodépendance à 28 et à 40 jours de vie. Dans une étude
randomisée récente, l’administration systématique de surfactant
(quatre doses de 0,75 mL chacune, soit 3 mL) aux prématurés à 10
minutes de vie était au moins aussi efficace que l’administration
immédiate d’un bolus de 3 mL de surfactant avant toute mesure de
réanimation [22]. L’administration à la dixième minute a l’avantage
de permettre une réanimation cardiopulmonaire précoce et la
réalisation d’une radiographie de thorax avant d’utiliser le
surfactant. L’efficacité du surfactant d’origine bovine a également
été démontrée dans les pneumonies infectieuses du nouveau-né
ainsi que dans les inhalations méconiales.
¦ Inhalation de liquide méconial
Le méconium est une substance verte, visqueuse, épaisse, composée
de bile et de débris cellulaires résultant de la desquamation du tube
digestif du foetus. L’expulsion d’un liquide méconial survient lors
de 10 à 15 % des accouchements, avec une incidence plus importante
lorsque le terme est dépassé ; elle peut également traduire une
motilité excessive du tube digestif foetal en réponse à une souffrance
foetale. Des facteurs de risque sont individualisés tels la durée du
travail, l’existence d’une souffrance foetale chronique et/ou aiguë,
d’une infection maternofoetale. Le nouveau-né apparaît alors
souvent recouvert d’un enduit méconial vert et épais. L’inhalation
méconiale, présente dans 30 % de ces situations, est une grande
urgence mettant en jeu le pronostic vital. Elle est définie par la
découverte à l’aspiration de méconium sous la glotte. Lors des
mouvements respiratoires (à éviter pour ne pas aggraver
l’inhalation), l’enfant présente une détresse respiratoire souvent
importante et l’auscultation note l’existence de râles bronchiques.
La radiographie de thorax permet d’objectiver la présence d’infiltrats
pulmonaires nodulaires denses et floconneux (fig 4). Il existe
fréquemment une distension importante liée à l’obstruction des
bronches par le méconium.
Lorsque le liquide amniotique est méconial, il est fondamental
d’éviter l’inhalation de liquide méconial lors de mouvements
respiratoires de l’enfant en aspirant le nez et la bouche du
nouveau-né dès l’apparition de la tête à la vulve, avant la sortie du
thorax. Il faut maintenir l’enfant en position de Trendelenburg,
sectionner le cordon et amener rapidement l’enfant sur la table de
réanimation en comprimant la cage thoracique pour retarder la
respiration spontanée. Une fois sur la table de réanimation, il faut
réaspirer nez et pharynx sous laryngoscopie directe, intuber la
trachée d’emblée, sans ventilation préalable, aspirer directement les
voies aériennes par la sonde d’intubation. Le contenu gastrique doit
également être aspiré.
S’il n’y a pas de méconium visualisé lors de l’exposition glottique, il
faut aspirer la trachée et les bronches avec une sonde d’aspiration
stérile pour vérifier l’absence de méconium. L’intubation trachéale
est alors discutée en fonction de l’état clinique de l’enfant.
S’il y a du méconium au-delà des cordes vocales, il semble logique
d’intuber la trachée pour pouvoir répéter les aspirations trachéales.
Pourtant, l’utilité de cette aspiration trachéale est incertaine chez les
nouveau-nés à terme et bien toniques nés dans un liquide méconial.
Chez ces enfants, une étude randomisée récente a montré que
l’aspiration trachéale ne permettait pas de diminuer les problèmes
respiratoires par rapport à une attitude plus attentiste [50]. Lorsque la
ventilation mécanique est nécessaire, elle doit utiliser de faibles
pressions d’insufflation (Pimax entre 20 et 30 cmH2O, pas de PEP
initialement) et une fréquence respiratoire rapide (environ 80
c·min-1) pour éviter de favoriser la survenue d’un pneumothorax.
Dans tous les cas, le matériel de drainage thoracique doit être à
proximité, du fait du risque majeur de pneumothorax chez ces
enfants.
Ce traitement préventif agressif a permis de réduire la mortalité liée
aux inhalations de méconium survenant à la naissance lors des
premiers mouvements respiratoires. Il est cependant peu efficace
lorsque l’inhalation a précédé de plusieurs heures la naissance.
L’urgence consiste alors davantage à lutter contre les conséquences
de l’anoxie foetale (intubation et ventilation en oxygène pur) que
d’aspirer un méconium déjà trop distal.
DÉTRESSES RESPIRATOIRES
À TRAITEMENT CHIRURGICAL
¦ Atrésie des choanes
Obstruction uni- ou bilatérale de l’orifice postérieur des fosses
nasales par un mur fibreux ou osseux, elle entraîne une détresse
respiratoire néonatale immédiate (lorsqu’elle est bilatérale), marquée
par une dyspnée intense avec cyanose et un tirage buccofacial et
sous-mentonnier disparaissant aux cris (le nouveau-né ne respire
spontanément et au repos que par le nez durant les premières
semaines de vie).
Le diagnostic doit être fait en salle de naissance, lors de l’aspiration
nasopharyngée bilatérale systématique (dépistage des formes
unilatérales ne se révélant parfois que plus tardivement, à la tétée,
et symptômes disparaissant lors des cris), la sonde 6 ou 8 Ch butant
alors à 2 ou 3 cm de l’orifice nasal.
4 Inhalation méconiale
chez un nouveau-né à 41 semaines
d’aménorrhée après
un accouchement difficile.
4-002-P-50 Réanimation du nouveau-né en salle de naissance Pédiatrie
6
La conduite à tenir initiale est dominée par la liberté des voies
aériennes [13] : maintenir l’ouverture de la bouche du nouveau-né par
une canule de Guedelt n° 00 ou 0 solidement fixée par un sparadrap
(sans obstruer l’orifice) et poser une sonde gastrique par voie orale
(déclive au sac). L’amélioration de la détresse respiratoire doit être
rapide. Dans le cas contraire, le nouveau-né est intubé par voie
orotrachéale (sonde d’intubation minutieusement fixée).
Le transfert de ces enfants par service d’aide médicale d’urgence
(SAMU) pédiatrique (en position assise, avec aspirations pharyngées
douces et répétées) est réalisé en urgence vers une unité de
réanimation néonatale, à proximité d’un service d’oto-rhinolaryngologie
(ORL) pédiatrique, où la correction chirurgicale par
résection-plastie peut être entreprise.
La recherche d’anomalies viscérales associées doit être systématique
(anomalies congénitales associées dans 72 % des cas).
¦ Syndrome de Pierre Robin
Il s’agit d’un syndrome polymalformatif congénital fréquent
(1/2 000 naissances) associant microrétrognathisme, fente palatine
et glossoptose par hypoplasie des organes dérivés de l’arc
mandibulaire. Elle est responsable d’une détresse respiratoire
néonatale par chute de la langue en arrière obstruant le nasopharynx
(particulièrement marquée lors de la déglutition et des efforts
inspiratoires) et d’un encombrement des voies aériennes supérieures.
Le diagnostic est porté à l’inspection sur l’association de la détresse
respiratoire et des anomalies morphologiques précédemment
décrites.
Assurer la liberté des voies aériennes constitue là encore la priorité :
mettre en place une canule de Guedelt n° 00 ou 0 si possible. Si la
bouche est trop petite, placer une sonde d’intubation de gros calibre
(4 ou 5) en position pharyngée ou une grosse sonde nasogastrique [16]
pour empêcher la formation d’une pression pharyngée négative et
éviter ainsi l’obstruction complète du pharynx par la langue. Aspirer
fréquemment les sécrétions pharyngées avec douceur. Mise en
décubitus ventral pour éviter la chute de la langue en arrière. En
l’absence d’amélioration de la ventilation dans cette position,
l’intubation nasotrachéale (toujours difficile) et la ventilation
contrôlée sont nécessaires (l’utilisation d’une lame de type Oxford
permet parfois une intubation plus aisée). La fixation de la sonde
d’intubation endotrachéale doit être solide afin d’éviter tout
déplacement secondaire aux conséquences potentiellement
dramatiques dans ce contexte, en particulier lors du transport. Le
masque laryngé n° 1 est une alternative intéressante en cas
d’intubation impossible chez ces patients, permettant une ventilation
de sauvetage temporaire dans les situations critiques [3]. Il peut
également servir de guide lors d’une intubation à l’aveugle [7].
L’idéal serait de pouvoir disposer d’un fibroscope bronchique
pédiatrique dans cette situation d’intubation extrêmement délicate.
Le transfert de ces patients en réanimation néonatale à proximité
d’un service d’ORL pédiatrique se fait par SAMU.
¦ Hernie diaphragmatique
Malformation congénitale fréquente (1/2 200 naissances [6], 1/5 500
nouveau-nés vivants [18]), la hernie diaphragmatique est un defect
diaphragmatique postérolatéral le plus souvent situé à gauche (80 à
90 % des cas), avec passage de viscères abdominaux dans le thorax
par l’orifice de Bochdalek. L’arrêt du développement pulmonaire
du fait de la hernie intrathoracique des organes abdominaux
explique l’hypoplasie pulmonaire ipsilatérale constamment
associée [8] lorsque la hernie est large. Dans les cas sévères, il existe
une hypoplasie pulmonaire bilatérale, provoquant une détresse
respiratoire sévère avec hypoxie réfractaire, shunt droite-gauche et
hypertension artérielle pulmonaire. Cette hypertension artérielle
pulmonaire est liée non seulement à des facteurs anatomiques
(développement insuffisant de la vascularisation), mais aussi à des
anomalies de la vasomotricité pulmonaire. Une étude récente s’est
intéressée à la vasomotricité pulmonaire sur un modèle expérimental
de hernie diaphragmatique. Dans ce modèle de mouton avec hernie
diaphragmatique, la vasodilatation induite par la voie du monoxyde
d’azote (NO) semblait normale, mais la stimulation ou le blocage
des récepteurs à l’endothéline semblait pouvoir induire des effets
vasoconstricteurs ou vasodilatateurs différents de ceux observés
chez les animaux témoins [28]. Ainsi, une anomalie du tonus
vasculaire médié par la balance endothéline/NO pourrait expliquer,
en partie du moins, l’hypertension artérielle pulmonaire dans cette
pathologie malformative [44]. Par ailleurs, on note que le NO est
d’efficacité inconstante pour lutter contre l’hypertension artérielle
pulmonaire associée à la hernie diaphragmatique [27, 43].
Dans la plupart des cas, le diagnostic anténatal par échographie
permet le transfert maternel avant l’accouchement dans un hôpital
disposant d’un centre médicochirurgical pédiatrique, ou à défaut
l’assistance anténatale par un service médical d’urgence et de
réanimation (SMUR) pédiatrique.
La hernie diaphragmatique méconnue se révèle parfois brutalement
à la naissance par un tableau de détresse respiratoire rapide et
croissante avec cyanose, abdomen plat, thorax distendu, absence ou
diminution franche du murmure vésiculaire du côté hernié, parfois
remplacé par des bruits hydroaériques d’origine digestive et
déplacement des bruits du coeur à droite dans la forme gauche. La
confirmation du diagnostic par radiographie de thorax avec sonde
gastrique en place (fig 5) ne doit pas retarder la réanimation initiale.
La prise en charge urgente des hernies diaphragmatiques
congénitales n’est pas la correction chirurgicale du defect
diaphragmatique, qui diminue la compliance pulmonaire déjà
altérée en préopératoire et grève encore le pronostic vital [19, 29, 33],
mais la stabilisation des fonctions respiratoire et hémodynamique.
La ventilation au masque est contre-indiquée (distension gastrique
intrathoracique aggravant la compression pulmonaire).
Classiquement, les modalités de la ventilation mécanique sont les
suivantes : en oxygène pur (FiO2 = 1), faibles volumes courants (du
fait de l’hypoplasie pulmonaire), pressions d’insufflation basses
(maximum 20 à 30 cmH2O si possible, pour éviter la survenue
catastrophique d’un pneumothorax sur le poumon controlatéral qui
assure à lui seul l’hématose), rapport I/E = 1, fréquence respiratoire
élevée (supérieure à 80 c·min-1) pour assurer une ventilation-minute
suffisante et tenter même d’hyperventiler l’enfant pour obtenir une
hypocapnie relative (PaCO2 entre 25 et 35 mmHg) qui contribue à
abaisser les résistances vasculaires pulmonaires et améliore le débit
5 Hernie diaphragmatique gauche. La radiographie ne doit pas retarder l’intubation
trachéale.
Pédiatrie Réanimation du nouveau-né en salle de naissance 4-002-P-50
7
artériel pulmonaire, facteur crucial d’une hématose correcte chez ces
enfants. Les constantes de ventilation sont adaptées aux valeurs de
TcPO2, TcPCO2, SpO2 mesurées en sus- et sous-ductal (en amont et
en aval du canal artériel).
Une sédation, voire une curarisation, sont souvent nécessaires pour
adapter la ventilation. Le matériel de drainage thoracique doit être
prêt à l’emploi, car l’éventualité d’un pneumothorax (de pronostic
très péjoratif) [17, 38] sur l’unique poumon restant fonctionnel est
possible à tout moment (toute détérioration subite de la fonction
respiratoire doit faire évoquer un pneumothorax controlatéral à la
hernie).
La vidange gastrique douce et répétée (décompression pulmonaire),
le remplissage vasculaire (hypovolémie fréquente), et parfois les
inotropes positifs sont les autres thérapeutiques importantes à
mettre en oeuvre avant le transfert rapide de ces enfants en
réanimation près d’un service de chirurgie infantile ou dans une
unité médicochirurgicale.
Une stabilisation préopératoire de 24 à 48 heures est souvent
préconisée avant le geste chirurgical. Dans les formes graves, la
ventilation à haute fréquence par oscillations (HFO) et/ou des
techniques d’assistance extracorporelle permettent parfois de passer
le cap initial difficile. L’indication de ces techniques récentes reste à
définir précisément. Les résultats des premières études sur la
mortalité des enfants bénéficiant de ces techniques d’assistance
circulatoire sont contradictoires [30, 39].
La recherche de malformations associées, en particulier cardiaques
(16 à 23 %), est systématique avant toute intervention chirurgicale
[1, 5, 23].
Malgré les progrès de la prise en charge anté- et postnatale, la
mortalité de cette pathologie reste importante (50 % de décès).
Les facteurs permettant de préciser le pronostic d’une hernie
diaphragmatique dès la naissance restent controversés. L’existence
d’une hypoplasie du ventricule gauche sur l’échographie anténatale
est un critère classique de mauvais pronostic [43]. De même, une forte
inclinaison de la veine cave inférieure à l’échographie anténatale
serait corrélée à l’importance de la masse viscérale herniée [4]. Au
contraire, l’absence de diagnostic échographique avant 25 semaines
d’aménorrhée serait un critère de bon pronostic. En effet, une hernie
de constitution tardive n’entraîne pas d’hypoplasie pulmonaire
majeure. L’importance de l’aération parenchymateuse et de la
déviation médiastinale sur la radiographie du thorax initiale a
récemment été corrélée avec le taux de survie [11].
Détresse neurologique
Une souffrance anténatale explique souvent un état neurologique
imparfait à la naissance [32]. Les situations à risque élevé d’anoxie
périnatale nécessitent souvent une réanimation précoce et active. La
surveillance neurologique est alors indispensable et l’examen
clinique doit être consigné par écrit. En particulier, le tonus et la
réactivité de l’enfant lors de la réanimation doivent être consignés.
L’existence de mouvements anormaux doit également être notée, la
précocité de ces mouvements étant un indice pronostique important.
En cas d’administration maternelle de produits hypnotiques et/ou
morphinomimétiques, l’utilisation d’antagonistes peut être proposée
chez le nouveau-né et l’influence possible de médications
maternelles sur l’état neurologique de l’enfant doit toujours être
suspectée. Plusieurs éléments paracliniques peuvent être recueillis
dès la salle de naissance pour témoigner de l’importance de la
souffrance foetale : tracés du rythme cardiaque foetal, pH prélevé soit
au niveau du cordon ombilical, soit chez l’enfant (scalp, prélèvement
artériel ou veineux) et dosage de lactates.
Suspicion d’infection maternofoetale
L’éventualité d’une infection maternofoetale doit être envisagée de
principe devant toute détresse respiratoire du nouveau-né.
L’infection maternofoetale est une pathologie fréquente (4 à 10/1 000
naissances), parfois accompagnée d’un tableau clinique initialement
discret et/ou trompeur. L’évolution, habituellement bénigne sous
traitement, peut être dramatique en cas de thérapeutique retardée
ou inadaptée. Néanmoins, la fréquence des infections à streptocoque
B semble en régression depuis qu’une politique de prophylaxie
antibiotique est proposée en per-partum aux femmes à risque (fièvre
maternelle, streptocoque B au prélèvement vaginal, rupture
prolongée de la poche des eaux) [31]. Le diagnostic d’infection peut
être aidé par la réalisation d’examens biologiques et
bactériologiques. Les prélèvements périphériques permettant le
diagnostic le plus sensible sont effectués au niveau de l’oreille et au
niveau gastrique. Ces prélèvements doivent être réalisés
précocement avant toute manipulation de l’enfant. Les hémocultures
peuvent être répétées, au mieux au niveau de deux sites différents.
L’élévation de la C reactive protein (CRP) est un marqueur très
sensible d’infection, mais est souvent décalée dans le temps. Par
ailleurs, la CRP peut être élevée en l’absence d’infection
maternofoetale du fait de l’inhalation méconiale ou de
l’administration de surfactant exogène. D’autres marqueurs de
l’inflammation comme la procalcitonine, d’élévation plus précoce,
ont été proposés pour le diagnostic d’infection maternofoetale [15].
Ces marqueurs ne sont pas disponibles en routine et leurs
indications restent à préciser. Une antibiothérapie active sur les
germes habituellement responsables d’infection maternofoetale doit
être débutée précocement, dès la réalisation de prélèvements
bactériologiques en salle de naissance. Les germes le plus
fréquemment responsables d’infection maternofoetale sont le
streptocoque du groupe B et Escherichia coli, ces deux germes se
partageant à part égale la responsabilité d’environ 80 % des cas. Une
association céphalosporine de troisième génération et aminoside est
souvent proposée. L’amoxicilline, insuffisante pour couvrir
l’ensemble des infections à E. coli, est souvent rajoutée pour prévenir
l’infection à Listeria monocytogenes. Ce germe semble néanmoins plus
rare qu’il y a quelques années dans les zones citadines. Cette triple
antibiothérapie ainsi réalisée doit être réévaluée en fonction de
l’évolution de l’enfant et des résultats des prélèvements
bactériologiques initiaux (direct et culture à j3). En l’absence de
confirmation de l’infection maternofoetale, l’antibiothérapie
empirique est interrompue. Si une infection est documentée,
l’antibiothérapie est réajustée aux germes isolés.
Prise en charge d’un enfant
ayant un defect de paroi
OMPHALOCÈLE
Cette malformation (1/5 000 naissances) se caractérise par un defect
de la paroi abdominale périombilicale et touche la peau, le tissu
sous-cutané et les aponévroses sous-jacentes. Le contenu abdominal
est entouré d’une membrane fragile, parfois rompue, composée de
péritoine pariétal et de membrane amniotique, qui fait hernie sur
l’abdomen en position médiane. Le cordon ombilical s’insère sur le
sac sur son versant inférieur. Ce defect est secondaire à une anomalie
de la réintégration du tractus digestif dans la cavité abdominale au
cours de la 11e semaine de vie embryonnaire. De taille variable, il y
a toujours malrotation du tube digestif associée. La recherche
d’autres anomalies est systématique : trisomie 13 ou 18 (40 % des
cas), malformations congénitales associées (50 % des cas) cardiaques,
digestives, génito-urinaires ou du tube neural. Le syndrome de
Wiedemann-Beckwith associe hypoglycémie, macroglossie,
indentations auriculaires, viscéromégalie à des anomalies du cordon
ombilical (il concerne 9 % des enfants atteints d’omphalocèle).
LAPAROSCHISIS
Cette malformation (1/10 000 à 1/15 000 naissances) se caractérise
par une éviscération du contenu abdominal à travers un defect
paraombilical de la paroi abdominale (le plus souvent à droite de
4-002-P-50 Réanimation du nouveau-né en salle de naissance Pédiatrie
8
l’ombilic) (fig 6). L’ombilic est en situation normale, séparé du defect
pariétal par un intervalle de peau saine. À la différence de
l’omphalocèle, il n’y a pas de sac herniaire. Les anses intestinales
herniées, oedématiées, violacées, sont recouvertes d’un exsudat
inflammatoire et de fausses membranes liés à la péritonite chimique.
Ce defect, qui concerne toute la paroi, est secondaire à une
interruption de l’apport vasculaire au cours du développement
embryonnaire : artère omphalomésentérique ou veine ombilicale.
D’autres malformations congénitales, surtout digestives, peuvent s’y
associer mais elles sont plus rares : atrésie duodénale, du grêle ou
du côlon. Il y a retard de croissance intra-utérin dans deux tiers des
cas, prématurité dans un tiers des cas et liquide amniotique
méconial dans 40 à 60 % des cas.
Ces defects de la paroi abdominale exposent le nouveau-né aux
risques d’hypothermie (favorisée par les larges surfaces d’échanges
créées par la malformation), de rupture du sac de l’omphalocèle,
d’infection (par absence de revêtement des viscères extériorisés) et
de torsion des pédicules vasculaires avec risque de nécrose digestive
et d’occlusion néonatale.
Le diagnostic par échographie anténatale est la règle, permettant le
transfert de la mère dans un centre disposant d’une maternité et
d’une unité médicochirurgicale pédiatrique. La césarienne n’a pas
d’indication systématique. Dans les autres cas, la simple inspection
des organes éviscérés à la naissance suffit pour le diagnostic.
Ces deux pathologies, anatomiquement et embryologiquement très
différentes, partagent les mêmes impératifs de prise en charge en
période périnatale.
En cas d’omphalocèle, le clampage du cordon n’est fait qu’après
avoir vérifié l’absence d’anse intestinale herniée (risque de ligature
accidentelle d’une anse digestive). Le clamp de Bar est placé à 10 cm
environ de l’implantation du cordon.
L’enfant doit être manipulé avec une asepsie rigoureuse (casaque et
gants stériles) en évitant de toucher à la malformation pour éviter
de léser les anses digestives.
La limitation des déperditions hydriques et thermiques est assurée
par l’utilisation d’un « sac à grêle » [46]. Ce sac en matière plastique
transparente, stérile, est doté d’une extrémité supérieure pouvant
être fermée par laçage. Le tronc, les membres inférieurs et les anses
extériorisées du nouveau-né sont enfermés dans ce sac, remonté et
fermé sous les aisselles. L’emballage des anses digestives dans des
compresses ou du coton cardé est à proscrire formellement. L’enfant
est alors placé en décubitus latéral (pour éviter les compressions
vasculaires lorsque l’omphalocèle est volumineuse) dans un
incubateur.
L’intubation trachéale n’est réalisée qu’en cas de détresse
respiratoire, ce qui est inhabituel. Il faut ensuite poser une sonde
gastrique, vider l’estomac et laisser la sonde ouverte au sac, en
position déclive. La mise en place d’une voie d’abord veineuse
permet la correction des désordres hémodynamiques et l’apport des
besoins hydroélectrolytiques et glucosés de base.
Un examen clinique soigneux et une radiographie du thorax sont
systématiques à la recherche de malformations associées, en
particulier cardiaques, plus fréquentes avec les omphalocèles
qu’avec les laparoschisis, surtout avec les omphalocèles de faible
diamètre [41].
Après accord téléphonique, ces enfants sont transférés par SMUR
pédiatrique dans une unité médicochirurgicale infantile où ils
pourront être opérés rapidement.
Enfants de très petit poids
La naissance d’un enfant de très petit poids soulève toujours
beaucoup de questions de la part de la famille et de l’équipe. Dans
une étude récente, le taux de survie après réanimation
cardiopulmonaire était de 23,9 % chez des nouveau-nés pesant entre
401 et 500 g et de 63,3 % chez ceux pesant 501 à 1 500 g. La survie de
ces enfants ne semble pas influencée par la nécessité d’une
réanimation cardiopulmonaire à la naissance ou non. En revanche,
parmi les enfants survivants, 52,2 % des enfants réanimés à la
naissance ne développaient pas d’hémorragie intracrânienne, tandis
que ce taux était de 81,3 % chez ceux qui n’avaient pas dû être
réanimés [14]. Ces chiffres plaident en faveur d’une réanimation active
des nouveau-nés de très petits poids qui la nécessitent.
Jusqu’à récemment, il était classique d’intuber systématiquement dès
la naissance la trachée des enfants de très petit poids. Lidner et al
ont montré que lorsque l’intubation trachéale était limitée aux
situations où elle était indispensable et non plus réalisée de manière
systématique, cela n’accroissait ni la mortalité ni la morbidité de ces
enfants [24].
Le transfert de toute femme présentant une menace d’accouchement
prématuré avant 32 semaines d’aménorrhée ou porteuse d’un enfant
ayant un retard de croissance intra-utérin inférieur au 10e percentile
est actuellement recommandé vers une maternité comportant une
unité de réanimation néonatale. Ces mesures contribuent à
l’amélioration du pronostic des enfants de très petit poids qui
peuvent ainsi bénéficier d’une réanimation spécialisée dès leur
naissance. En dix ans, une diminution nette de la mortalité des
enfants de petit poids a été observée. Ce progrès s’accompagne
d’une réduction importante de la morbidité neurologique acquise
en période périnatale chez les enfants survivants. Ainsi, l’incidence
des convulsions néonatales, des hémorragies intraventriculaires et
des encéphalopathies anoxo-ischémiques semble avoir été réduite
de plus de 50 % [35]. L’évolution neurologique de ces enfants est
conditionnée non seulement par la sévérité de l’histoire médicale
qui leur est associée mais aussi par des facteurs socioéconomiques
[28, 36]. Le pronostic neurologique ne peut être apprécié de manière
fiable en salle de naissance. L’examen clinique initial, en particulier,
peut être faussement inquiétant ou au contraire faussement
rassurant. Des données électroencéphalographiques précoces ou
certaines techniques d’imagerie par résonance magnétique
pourraient permettre l’obtention de critères pronostiques dès les
premiers jours de vie. Les indications et les limites de ces techniques
restent à évaluer.
Conclusion
Les possibilités d’adaptation et les réserves métaboliques et respiratoires
du nouveau-né sont limitées. En particulier, l’hypoglycémie,
l’hypoxémie et l’hypothermie sont de survenue rapide en cas de détresse
néonatale. La réanimation d’un enfant en détresse doit toujours être
précoce pour permettre au nouveau-né de conserver une homéostasie, en
l’aidant à assurer ses besoins ventilatoires, circulatoires, caloriques et
métaboliques. Mieux, elle doit souvent anticiper ces désordres. De
6 Laparoschisis. Les anses sont à droite du cordon ombilical. L’enfant est placé dans
un sac à grêle jusqu’à l’arrivée sur la table d’opération, en léger décubitus pour éviter
les phénomènes de traction et de compression vasculaire.
Pédiatrie Réanimation du nouveau-né en salle de naissance 4-002-P-50
9
même, certains « stress » physiologiques comme des variations
d’osmolarité ou de pression artérielle doivent absolument être évités. En
effet, le système nerveux central du nouveau-né est particulièrement
sensible et des lésions irréversibles (hémorragies du système nerveux
central) peuvent apparaître en quelques minutes si ces facteurs ne sont
pas contrôlés.
Références
[1] Adzick NS, Vacanti JP, Lillehei CW, O’Rourke P, Crone RK,
Wilson JM. Fetal diaphragmatic hernia : ultrasound diagnosis
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Points essentiels
– L’appréciation de la gravité de la situation du nouveau-né est essentiellement basée sur des paramètres cliniques simples.
– La rapidité et la qualité de la prise en charge initiale conditionnent le pronostic de l’enfant ; ce qui impose, à chaque accouchement, la
présence de personnel qualifié (au moins deux personnes) et d’un matériel adapté pour assurer une réanimation cardiopulmonaire à
chaque fois qu’elle est nécessaire (dans moins de 10 % des accouchements).
– La désobstruction pharyngée et la stimulation du nouveau-né représentent souvent des éléments majeurs de la prise en charge initiale de
la détresse respiratoire néonatale.
– L’administration prophylactique de surfactant est justifiée chez les prématurés de moins de 32 semaines d’aménorrhée.
– L’intubation trachéale systématique des enfants de très petits poids ne semble pas justifiée.
– La désobstruction des voies aériennes et l’oxygénation doivent être précoces en cas de détresse néonatale.
– La radiographie de thorax est essentielle chez tout nouveau-né présentant une détresse respiratoire.
– La prévention de l’hypothermie est essentielle ; de même, une grande asepsie est souhaitable lors des manoeuvres de réanimation.
– Les prélèvements bactériologiques (oreille, liquide gastrique, hémoculture, placenta…) doivent être réalisés en salle de naissance avant
toute manipulation.
– Le pronostic de la grande prématurité est en nette amélioration depuis 10 ans.
4-002-P-50 Réanimation du nouveau-né en salle de naissance Pédiatrie
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