Attitude scoliotique
JC Bernard
JP Valero
Résumé. – Cette affection bénigne doit attirer l’attention du médecin afin de ne pas passer à côté d’une
étiologie précise, surtout si l’attitude est antalgique.
C’est une déformation sans aucun caractère de gravité à condition de surveiller le rachis pendant la
croissance s’il s’agit d’un enfant et afin de s’assurer de la non-structuralisation de la lésion. Il faut revoir le
patient à 1 an d’intervalle au maximum, pour un contrôle clinique et radiologique avant de pouvoir
considérer la colonne vertébrale comme normale, ce qui ne signifie pas obligatoirement rectiligne dans le plan
frontal. Il faut donner à l’examen clinique toute la place qu’il convient, ce qui évite de se laisser piéger par la
radiographie et permet de jeter les bases de la rééducation qui ne peut être que personnalisée.
© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : déviation du rachis, kinésithérapie personnalisée.
Introduction
L’attitude scoliotique est une affection
rachidienne dont le diagnostic est difficile.
Découverte par les parents ou dépistée par
le médecin scolaire, c’est sur l’examen
clinique codifié que repose le diagnostic, la
radiographie ne devant être interprétée qu’à
la lumière des signes fonctionnels ou
physiques présentés par le patient. L’examen
clinique doit précéder l’analyse des
documents radiographiques qui doivent être
peu nombreux mais réalisés avec beaucoup
d’attention de la part du radiologue et du
patient.
Les moyens thérapeutiques basés sur la
kinésithérapie et l’ergonomie rachidienne
sont utilement complétés par une reprise ou
une poursuite des activités sportives afin
d’agir sur la composante musculaire et
posturale à l’origine du trouble rachidien.
L’attitude scoliotique est une affection
complètement différente de la scoliose ; il est
préférable de parler de déviation
rachidienne plutôt que d’attitude scoliotique,
afin qu’il n’y ait pas confusion, au moins
dans l’esprit des parents.
Jean-Claude Bernard : Médecin de médecine physique et
réadaptation, chef de service de l’unité enfants et adolescents.
Jean-Paul Valero : Masseur-kinésithérapeute, cadre de santé.
Centre médicochirurgical de réadaptation des Massues, 92, rue
Edmond-Locard, 69322 Lyon cedex 05, France.
Définitions
– Déformation non fixée, non structurale du
rachis.
– Diagnostic d’élimination : on recherche
une scoliose, et c’est par élimination que l’on
arrive au diagnostic d’attitude scoliotique.
– Diagnostic évoqué plutôt chez l’enfant ou
l’adolescent en croissance, mais on peut le
rencontrer également chez l’adulte.
– Diagnostic clinique complété par une
radiographie du rachis debout de face qui
met en évidence une sinuosité du rachis sans
rotation vertébrale et par une radiographie
du rachis couché de face qui montre une
disparition de la sinuosité.
– Pas de rotation vertébrale sur la
radiographie du rachis debout de face.
– La déviation réductible constatée dans
l’attitude scoliotique doit être différenciée de
la déformation structurale de la scoliose.
– La thérapeutique est basée sur la
kinésithérapie et l’éducation posturale.
L’examen clinique doit être abordé dans un
esprit rééducatif afin que chaque élément
anormal noté puisse être corrigé.
L’évaluation régulière du patient permet
d’ajuster la prise en charge et d’arrêter le
traitement lorsque les troubles ont disparu
ou se sont stabilisés alors que la croissance
est terminée.
Clinique
CIRCONSTANCES DE DÉCOUVERTE
Il faut s’informer des conditions dans
lesquelles le problème rachidien a été
découvert et sur quels arguments cliniques.
Il peut s’agir :
– d’une déviation d’axe occipital à la
marche ;
– d’un trouble de la statique vertébrale
affectant le plan frontal, mis en évidence en
position debout, souvent en position assise.
L’inquiétude des parents devant l’attitude
prise par leur enfant en position assise
prolongée est un motif fréquent de
consultation. Le dos rond peut être considéré
comme une source légitime d’inquiétude car
la disparition de la double courbure sagittale
du rachis pour une grande courbure
cyphotique diminue la robustesse et la
résilience du système mécanique et favorise
l’apparition de douleurs [18].
Une petite asymétrie du rachis découverte à
l’examen clinique par le médecin traitant ou
scolaire est attribuée prioritairement à une
scoliose débutante plutôt qu’à une attitude
scoliotique.
Une petite asymétrie du tronc, surtout si elle
est postérieure, est toujours attribuée à une
gibbosité d’origine scoliotique : l’examen
clinique bien codifié du rachis permet de
différencier une gibbosité d’origine
scoliotique, d’une croissance asymétrique du
thorax.
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 26-300-B-10
26-300-B-10
Toute référence à cet article doit porter la mention : Bernard JC et Valero JP. Attitude scoliotique. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Kinésithérapie-Médecine physique-
Réadaptation, 26-300-B-10, 2001, 7 p.
La pratique de certains sports comme le
tennis interroge souvent les parents qui ont
peur du développement asymétrique de la
musculature et de son influence sur la
posture rachidienne.
La position adoptée lors de l’usage régulier
d’un instrument de musique, le mode de
port du cartable, doivent être répertoriés.
Les parents restent très attentifs à ces
différents moments de la vie quotidienne
comme sources de problèmes de colonne
vertébrale.
INTERROGATOIRE
– Signes fonctionnels.
Tout épisode douloureux, quelle qu’en soit
l’origine, localisé au rachis ou irradiant vers
le rachis, va souvent s’exprimer par une
attitude antalgique, source d’attitude
scoliotique. Il en est ainsi de l’attitude
scoliotique sus-jacente à une discopathie qui
n’est que l’expression d’un trouble
fonctionnel localisé [8].
La sédation de la symptomatologie
douloureuse corrige totalement le trouble de
la statique rachidienne.
L’attitude scoliotique en elle-même n’est pas
douloureuse.
– Rechercher les antécédents traumatiques
même anciens, de fractures localisées aux
membres inférieurs.
La consolidation, chez l’enfant, peut
s ’ a c c o m p a g n e r d ’ u n phénomène
d’hypercroissance sur le membre fracturé, à
l’origine d’une inégalité de longueur des
membres inférieurs avec retentissement
rachidien sus-jacent.
– Les désordres psychiatriques peuvent
s’accompagner d’attitude scoliotique
pithiatique. La courbure rachidienne à grand
rayon se modifie dans le temps et le côté de
la déformation est volontiers variable. Une
psychothérapie appropriée fait disparaître le
trouble [6].
EXAMEN PHYSIQUE [12, 16]
– Observer la marche : l’axe occipital est le
plus souvent équilibré dans l’attitude
scoliotique, contrairement à la scoliose. Si au
terme de l’examen clinique on retient
uniquement comme défaut une déviation
d’axe occipital lors de la marche ou en
statique, alors le diagnostic d’attitude
scoliotique est très probable.
– Éliminer une inégalité de longueur des
membres inférieurs et, si elle existe, équilibrer
le bassin en glissant des planchettes
d’épaisseur appropriée sous le membre
inférieur le plus court.
– Éliminer une paralysie musculaire ou une
rétraction tendinomusculaire prononcée par
l’analyse précise des ceintures scapulaire et
pelvienne.
– Observer le thorax debout de face (fig 1).
Un thorax vu de face, lorsqu’il apparaît
s y m é t r i q u e e t harmonieux, s a n s
proéminence mammaire d’un côté par
rapport à l’autre, n’est pas en faveur d’une
scoliose. Il faut noter que cette asymétrie,
lorsqu’elle existe, peut être minime, et c’est
par la recherche systématique qu’on la
découvre. Lorsque l’asymétrie antérieure
s’accompagne d’une gibbosité dorsale
postérieure opposée, il s’agit d’une scoliose.
En revanche, lorsqu’à l’asymétrie thoracique
antérieure s’associe une asymétrie
thoracique postérieure du même côté, il
s’agit d’une hémihypertrophie ou
hémihypercroissance du thorax pouvant être
à l’origine d’une attitude scoliotique et non
d’une scoliose.
– Patient vu debout de dos sur un bassin
équilibré (fig 2).
Rechercher une asymétrie des plis de taille,
synonyme le plus souvent d’une scoliose
lombaire vraie, mais qui se voit aussi dans
les sinuosités lombaires sans rotation : la
simple observation ne permet pas de
différencier une attitude scoliotique d’une
scoliose lombaire vraie. Si l’asymétrie existe,
demander au patient, en orientant le
mouvement, de se corriger. En cas de
scoliose lombaire vraie, la correction totale
sera impossible.
– Patient penché en avant, jambes tendues.
L’examinateur se place derrière le patient
(fig 3).
– Il n’est pas possible de mettre en évidence
une déviation des épineuses par rapport à la
ligne matérialisée par le fil à plomb tendu
de C7 au pli interfessier : pas de sinuosité
vertébrale.
– Rechercher la gibbosité comme s’il
s’agissait d’une vraie scoliose en utilisant la
même méthode de mesure.
Absence de gibbosité penchée en avant : on
oriente le diagnostic vers une attitude
scoliotique. S’il a été noté une asymétrie des
épaules (épaule plus haute que l’autre par
exemple), celle-ci est d’origine musculaire
plutôt qu’en rapport avec une scoliose
dorsale haute. S’il a été noté une asymétrie
des plis de taille, il s’agit d’une anomalie
pelvienne ou sous-pelvienne plutôt que
d’une scoliose lombaire. Si une déformation
est constatée sur le patient penché en avant,
elle est homolatérale : l’asymétrie thoracique
se prolonge souvent en lombaire du même
côté.
À l’inverse, la déformation tridimensionnelle
de la scoliose oppose toujours à une
courbure principale, une ou des courbures
de compensation que l’on vérifie
cliniquement par des gibbosités situées de
part et d’autre de la ligne C7-pli interfessier.
– Examen clinique en décubitus ventral sur
table d’examen.
Cette position permet un relâchement
complet de la chaîne musculaire postérieure
et soustrait en partie le rachis du patient
aux conséquences de la pesanteur et à la
répercussion d’un éventuel trouble de la
statique des membres inférieurs.
Dans cette position, une recherche
minutieuse des anomalies constatées debout
doit être entreprise en n’hésitant pas, s’il le
faut, à se baisser pour se placer à jour frisant
afin de pouvoir apprécier tous les défauts
dans la symétrie du tronc.
Une comparaison avec ce qui a été noté debout
confirme la disparition complète ou quasi
complète de toute déformation. Il peut toujours
persister une petite asymétrie secondaire à la
tension des muscles paraspinaux.
Il faut rester prudent cependant quant aux
conclusions que l’on retire de la disparition
de la déformation : l’adage qui dit : « une
1 Thorax de face : pas de
déformation thoracique notable
(Quentin, 12 ans).
2 Thorax de dos : les
omoplates sont déséquilibrées
(Quentin, 12 ans).
3 Quentin, 12 ans, penché en avant, vu de dos : noter
la tension musculaire dorsolombaire droite. Il ne s’agit
pas d’une gibbosité.
26-300-B-10 Attitude scoliotique Kinésithérapie
2
gibbosité qui disparaît totalement en
décubitus ventral ne correspond pas à une
scoliose mais à une attitude scoliotique » est
vrai tant que les déformations ne sont pas
structuralisées.
En effet, lorsque la scoliose débute, les
déformations cliniques sont modérées et le
simple poids du patient va réduire, en
décubitus ventral, le phénomène de rotation
propre à la scoliose. La gibbosité va
disparaître mais la scoliose est vraie.
– Examen clinique en position assise en bord
de table.
On demande au patient, en l’aidant s’il le
faut, de se redresser et on observe l’équilibre
frontal et sagittal du rachis.
La statique rachidienne est normale dans
l’attitude scoliotique en position assise
active.
– Le bilan dynamique du rachis est normal
s’il ne s’agit pas d’une attitude antalgique. Il
n’y a pas d’altération des capacités
fonctionnelles du rachis.
La fin de l’examen clinique, tel que nous
l’avons développé, doit être complétée par
un examen neurologique toujours négatif
dans l’attitude scoliotique à condition que
celle-ci ne soit pas d’origine antalgique.
Nous pouvons alors déduire de cet examen,
pour un patient vu pour la première fois,
que nous sommes en présence :
– soit d’une attitude scoliotique ;
– soit d’une scoliose débutante ;
– soit d’un rachis normal.
C’est dire que l’examen clinique seul n’est
pas suffisant et qu’il faut s’aider d’examens
paracliniques.
Cela explique en partie toute la difficulté du
dépistage systématique de la scoliose.
EXAMENS PARACLINIQUES [16]
¦ Examen radiographique du rachis
debout de face et de profil
Les dimensions du cliché doivent permettre
de visualiser l’ensemble rachis et bassin.
Il faut insister pour que l’enfant soit attentif
au moment de la prise de la radiographie au
bon positionnement des membres inférieurs.
Les membres inférieurs doivent être tendus
de la même façon des deux côtés, sans
recurvatum ou flessum de genoux, qui sont
toujours à l’origine d’un déséquilibre pelvien
source de compte rendu pouvant prêter à
confusion de la part du radiologue (fig 4).
Sur le cliché de face du rachis (que l’on
regarde comme si le patient était vu de dos),
il faut rechercher les éléments observés à
l’examen clinique.
Il est indispensable de ne jamais regarder la
radiographie avant d’avoir réalisé l’examen
clinique afin de savoir précisément ce que la
radiographie doit nous apporter.
Par exemple, une déformation dorsale droite
vue sur le patient qui s’accompagne sur la
radiographie de face d’une sinuosité
rachidienne à convexité droite, même
modérée, avec rotation vertébrale, est
attribuée à une scoliose. En revanche, si le
cliché radiographique de face montre une
colonne rectiligne ou une sinuosité
rachidienne localisée à un autre niveau et
sans rotation vertébrale, cette même
déformation est attribuée à une attitude
scoliotique par croissance asymétrique du
gril costal (fig 5).
Si l’examen clinique met en évidence une
inégalité de longueur des membres
inférieurs, il faut obtenir un cliché du rachis
de face avec compensation et le comparer
au cliché fait sans compensation (fig 6).
Si l’examen clinique ne révèle aucune
anomalie, alors que la radiographie debout
de face n’est pas droite, alors il s’agit d’une
mauvaise positon prise par le patient au
moment du cliché, ce que va confirmer une
nouvelle radiographie faite debout, en
expliquant et en montrant au préalable
l’importance d’une bonne tenue lors de la
prise. Il est important que le bilan clinique
et radiologique soit complet afin de rassurer
les parents et d’éviter le diagnostic erroné
de scoliose.
Sur le cliché de profil du rachis (fig 4B), on
note l’harmonie des courbures et l’on
mesure différents paramètres pelviens
(incidence, version pelvienne, pente sacrée)
ou rachidiens (lordose lombaire, cyphose
dorsale). Le profil est peu ou pas touché
dans l’attitude scoliotique.
¦ Examen radiographique du rachis
de face en décubitus dorsal
Il faut bien préciser à l’enfant de garder une
bonne position pendant la réalisation du
cliché afin de faciliter l’interprétation (fig 7).
La sinuosité rachidienne constatée debout
disparaît en totalité ; parfois il persiste une
petite courbure très atténuée par rapport au
cliché debout qui doit être considérée
comme l’attitude scoliotique radiologique et
non comme une scoliose débutante.
¦ Autres examens
D’autres examens que nous ne faisons pas
systématiquement peuvent être réalisés :
– posturologique à l’aide d’une plate forme
de stabilométrie : les informations visuelles
et plantaires sont impliquées principalement
dans le contrôle de la posture orthostatique.
La modification, connue ou non, de ces
entrées sensorielles se répercute par un recul
des seuils de détection des déséquilibres
avec un effet plus marqué pour l’axe
antéropostérieur [13] ;
– examens spécifiques à la recherche de la
cause, en particulier dans les attitudes
antalgiques.
4 Radiographies du rachis de Maud, 12 ans.
A. Debout de face (sinuosité dorsolombaire gauche).
*A *B
B. Debout de profil. I : incidence ; PS : pente sacrée ; VP :
version pelvienne.
Kinésithérapie Attitude scoliotique 26-300-B-10
3
Rééducation
ATTITUDE SCOLIOTIQUE
DE L’ENFANT
¦ Bilans de départ
– Morphostatique, avec mesure de la
longueur des membres inférieurs et
évaluation des asymétries dans les trois
plans.
– Posturographique, avec mesure du
coefficient de Romberg et recherche
d’éventuels troubles de l’équilibre statique
[2, 10].
– Dynamique, avec mesure de la mobilité
du rachis dans les trois plans.
– Évaluation de la force musculaire du tronc
et des membres inférieurs.
– Évaluation des raideurs musculaires et
tendineuses des membres supérieur et
inférieur.
– Mesure de la taille debout et assise.
– Mesure des périmètres thoraciques.
– Bilan de la douleur au besoin.
– Connaissance du compte-rendu médical et
des radiographies.
– Retentissement sur les activités de la vie
quotidienne :
– évaluation de la position assise (en
classe et à domicile) ;
– évaluation du geste sportif.
– Bilan photographique standardisé (de dos,
de face, de profil) réalisé à intervalles
réguliers.
¦ Objectifs de rééducation
– Surveiller l’évolution morphologique
pendant la croissance.
– Avoir une action antalgique en cas de
douleurs vertébrales.
– Si les sports ont été interrompus, reprise
progressive et totale de toutes les activités
sportives à des fins de musculation, mais
aussi pour diminuer les temps de réaction
posturaux et modifier les stratégies
posturales [11].
¦ Principes de rééducation
– Respect de la non-douleur.
– Respect des lois de la croissance osseuse
et ligamentaire.
– Choix des exercices en fonction de l’âge et
de l’objectif.
– Bilans comparatifs réguliers e t
communication au prescripteur et au
patient.
– Compenser l’inégalité vraie de longueur
des membres inférieurs.
5 Radiographies du rachis de Quentin, 12 ans.
A. Debout de face (sinuosité dorsolombaire gauche alors que cliniquement on observe une asymétrie à droite).
B. Debout de profil (harmonieux).
*A *B
6 Radiographies du rachis de Rémy, 11 ans.
A. Debout de face sans compensation.
B. Debout de face avec compensation.
*A
*B
26-300-B-10 Attitude scoliotique Kinésithérapie
4
¦ Moyens de rééducation
Deux grands types de rééducation :
– conception globale type rééducation
posturale globale : peu adaptée à l’âge car
les postures utilisées doivent être tenues
pendant 30 minutes. De plus, la croissance
ne permet pas de fixer les gains acquis [14, 15] ;
– conception classique : la variété des
exercices permet de construire une séance
ludique et variée.
Une séance type comporte plusieurs étapes.
Prise de conscience des « défauts »
et recherche de l’autocorrection segmentaire
puis de plus en plus globale
Le travail d’autocorrection se fait à l’aide
d’un miroir quadrillé afin de corriger le
déjettement de l’axe occipital, de rééquilibrer
la ceinture scapulaire, de symétriser les
auvents chondrocostaux, d’équilibrer le
bassin dans le plan frontal.
Ces corrections segmentaires ajoutées les
unes aux autres se font sur un autograndissement
et une expiration contrôlée.
En progression, l’enfant passe d’une position
assise jambes fléchies à une position assise
jambes tendues, pieds talus. La mise en
tension de la chaîne musculaire postérieure,
rend, selon l’importance de l’hypoextensibilité
tendinomusculaire, l’exercice plus ou
moins difficile à réaliser.
Enfin, le travail en position debout, pieds
parallèles et genoux déverrouillés complète
cette prise de conscience.
Dans l e s diff é rentes positions, l e
kinésithérapeute exerce une stimulation
manuelle occipitale dans le sens de
l’autograndissement. L’autre main dirige les
corrections ponctuelles des asymétries.
Le kinésithérapeute, par des sollicitations
verbales, maintient l’attention de l’enfant car
le caractère statique de cet exercice peut vite
devenir ennuyeux.
Étirements [7]
Les croissances osseuses et tendineuses
doivent être respectées : les exercices actifs
inspirés du stretching sont préférés aux
pratiques passives visant l e gain
d’extensibilité par des contraintes mal
dosées.
La méthodologie est la suivante :
– placer le muscle ou le groupe musculaire
en position longue en combinant les trois
plans de l’espace ;
– demander une contraction statique en
position longue (120 % de la longueur de
repos) pendant 6 secondes ;
– accompagner le retour dans les
composantes inverses ;
– maintenir l’autograndissement et
l’expiration pendant la durée de l’exercice.
· Étirements des membres inférieurs
Les rétractions habituelles concernent les
ischiojambiers, le triceps sural et le droit
antérieur.
Nous décrivons à titre d’exemple un exercice
de mise en tension des ischiojambiers :
– position debout : contrôle lombaire sur
autograndissement ;
– fente avant sur le membre inférieur droit
avec inclinaison du tronc vers l’avant de
40° ;
– genou fléchi à 30°, pieds talus, en position
neutre ou en rotation interne ou externe ;
– effet de mise en tension par enfoncement
du talon dans le sol, combiné à une traction
de l’ischion vers le haut et l’arrière.
· Étirements des membres supérieurs
L’enroulement des épaules, fréquemment
noté, par rétraction des pectoraux est corrigé
par ce type d’exercice. Il suffit de placer les
membres supérieurs dans une combinaison
où l’épaule est en extension, abduction,
rotation externe. On demande alors une
contraction statique en position longue.
Cette approche active par le stretching est
intéressante pour les enfants qui pratiquent
un sport.
Exercices d’équilibre et de proprioception
[3, 4, 17]
· Exercices d’équilibre
Les stabilisations rythmées sur plan stable
puis sur plan instable, yeux ouverts puis
fermés, exercées au niveau de la ceinture
scapulaire, permettent un ajustement
postural sur une boucle d’action courte. Les
différentes positions (assise, procubitus…) et
l’utilisation du trampoline et du ballon de
Klein facilitent la combinaison des
enchaînements.
Le travail de rééquilibration complète
l’action statique visée dans les exercices
d’autograndissement.
Ce travail diversifié et ludique est souvent
apprécié par les jeunes.
· Feed-back postural
Les exercices informatisés sur plateforme de
stabilométrie complètent cette gamme. Ils
sont basés sur la recherche d’une répartition
équilibrée du centre de pression assimilé au
centre de gravité. Les exercices proposés
consistent à atteindre des cibles de taille et
de forme variables. Leurs dispositions sur
l’écran permet un travail sélectif du
déplacement du centre de gravité. Les tests
7 Radiographies du rachis.
A. Maud, 12 ans couchée de face.
B. Quentin, 12 ans couché de face.
*A
*B
Kinésithérapie Attitude scoliotique 26-300-B-10
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préalables des paramètres de l’équilibre sont
souvent pauvres.
L’aspect ludique permet néanmoins de
solliciter les entrées proprioceptives et
musculaires du système postural.
Travail musculaire
· Tronc
En fonction du bilan, et au cas par cas, le
renforcement musculaire des abdominaux et
des paravertébraux est utile.
– Abdominaux.
– Renforcement en statique des muscles
droits en décubitus dorsal, correction
vertébrale et expiration filée par la
sollicitation des membres inférieurs
tendus avec flexion de hanche à 90°.
– Renforcement des obliques selon le
même mode par des poussées déséquilibrantes
au niveau malléolaire.
– Sollicitations dynamiques concentriques
par des efforts de redressement du tronc.
– Paravertébraux.
L’exercice de la « gargouille » en demiprocubitus
en bout de table permet un
renforcement de l’ensemble des gouttières
paravertébrales.
Une installation rigoureuse et le contrôle de
l a p o s i t i o n d ’ a r r i v é e é v i t e n t l e s
compensations en lordose avec hyperpression
sur les articulaires postérieures,
toujours néfastes et douloureuses.
· Membres inférieurs
L’exercice du losange, en autograndissement,
permet un renforcement global des
membres inférieurs associé à un contrôle de
l’équilibre.
Le travail sur stepper en paramétrant le
temps, le rythme, la résistance est plus
ludique.
Les séances s’échelonnent à raison d’une
séance hebdomadaire pendant 6 mois,
renouvelables éventuellement à l’issue de
l’examen médical de suivi (fig 8).
Étude du poste scolaire et ergonomie
rachidienne. Conseils sportifs.
· Étude du poste scolaire . Conseils
d’économie rachidienne [1, 18, 19]
La sédentarisation de plus en plus
importante des jeunes nécessite une
information sur les risques d’une posture
mal adaptée pour le disque intervertébral
notamment. Complément indispensable de
la rééducation, le kinésithérapeute donne
des conseils pour l’adaptation de la position
assise. Il faut expliquer que les positions
parfois surprenantes que peut adopter un
enfant ne sont pas inquiétantes, surtout si
ces positions varient fréquemment. Il faut
laisser l’enfant rechercher des solutions
comme le simple fait de basculer sur les
pieds avant d’une chaise ou glisser en avant
de l’assise d’une chaise pour recréer une
lordose lombaire. Des petites aides peuvent
être utilisées, comme un coussin triangulaire
dont la base est glissée sous les ischions afin
d’antéverser le bassin ou un pupitre incliné
pour rapprocher les documents des yeux et
limiter la cyphose cervicothoracique. On
veille à ce que la hauteur du plan de travail
soit contrôlée et éventuellement rehaussée
en donnant comme repère l’horizontale entre
les coudes et le plan de travail, l’enfant étant
en position assise. L’utilisation d’un siège
ergonomique diminue la pression sur les
disques intervertébraux lombaires par une
ouverture de l’angle tronc-cuisse, et ainsi
prévient la fatigue musculaire toujours à
l’origine de positions inadaptées. L’attitude
de travail debout est à encouragée afin
d’éviter les longues périodes en station
assise.
Le placement correct des ischions, la
verticalité des iliaques et le respect de la
lordose lombaire sont les points de repère
garantissant une juste répartition des
contraintes.
· Conseils sportifs [5, 9]
Une dispense totale de sports scolaires est
toujours injustifiée. Il faut parfois utiliser
une dispense partielle temporairement
lorsqu’une activité spécifique est source de
douleur : l’examen clinique se normalise dès
que la pratique sportive est réorientée.
Une pratique plus intensive nécessite une
collaboration étroite entre le kinésithérapeute
et l’entraîneur : le kinésithérapeute
évalue la qualité du matériel utilisé, la
charge de travail d’un entraînement afin de
préconiser des étirements spécifiques en
fonction de la morphologie de l’enfant et du
sport pratiqué.
Dans tous les cas, une activité physique
régulière et bien conduite est toujours
bénéfique tant sur le plan musculaire en
endurance et en résistance que sur le plan
postural en développant l’aptitude à
commuter rapidement d’un système
sensoriel à un autre. Les sportifs sont plus
stables que les non-sportifs, sauf lorsque la
discipline pratiquée a été à l’origine de
traumatismes ostéoarticulaires.
8 Radiographies du rachis de Maud.
A. Debout de face, initiale.
B. À 10 mois d’intervalle où l’on note la persistance
d’une petite sinuosité mais à convexité droite.
*A
*B
26-300-B-10 Attitude scoliotique Kinésithérapie
6
ATTITUDE SCOLIOTIQUE
DE L’ADULTE
La problématique rééducative est centrée
sur une rééquilibration des tensions
musculaires. Souvent, l’attitude scoliotique
de l’adulte est la conséquence d’un
traumatisme ancien masqué par un jeu de
compensations. C’est le mécanisme de
l’attitude antalgique.
Un bilan initial, morphologique statique et
dynamique, permet de comprendre
l ’ o rganisation des compensations
musculaires et articulaires.
Ce bilan est conduit régulièrement pour
objectiver les changements morphologiques
et dynamiques.
L’utilisation de postures correctrices,
associant un travail expiratoire choisi,
permet de combiner :
– un travail statique excentrique des
muscles statiques rétractés ;
– un renforcement statique concentrique des
muscles dynamiques relâchés.
L’association de corrections segmentaires
périphériques et vertébrales produit un
travail correcteur global et pérenne.
Cette rééducation individuelle au long cours
constitue un « traitement de fond » à raison
d’une séance hebdomadaire de 40 à
60 minutes 6 mois par an, renouvelable.
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Kinésithérapie Attitude scoliotique 26-300-B-10
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