Introduction
Comment prévenir et empêcher le vieillissement et comment
prolonger la vie tout en ayant une meilleure qualité de vie ?
Autant
de questions qui inspirent un grand nombre de recherches et de
chercheurs depuis quelques années et dont les réponses éclairent
un
peu mieux les mécanismes du vieillissement et les moyens possibles
pour en retarder les manifestations.
Une des voies de recherche pour tenter d’expliquer le
vieillissement
en général suggère que les espèces réactives de l’oxygène (reactive
oxygen species [ROS]) causent des dégâts au
niveau des cellules
conduisant à des modifications pathologiques caractéristiques du
vieillissement. Dès 1950, plusieurs expériences démontrent, sur
des
animaux de laboratoire exposés à des radiations, la survenue d’un
vieillissement rapide et l’augmentation du taux des ROS dans les
cellules.
Radicaux libres
L’oxygène moléculaire (O2) est indispensable à la vie. Il peut
cependant devenir toxique lorsqu’il est présent en trop grande
abondance dans notre environnement.
DÉCLENCHEMENT
Dans l’organisme, les métabolites de l’oxygène ou ROS [1] sont
formés de façon permanente au cours de la vie par des réactions
biochimiques physiologiques, mais aussi par un grand nombre de
facteurs externes comme par exemple les ultraviolets (UV), la
pollution, la fumée du tabac, les herbicides, les pesticides et
beaucoup d’autres substances.
CONSÉQUENCES
Les ROS sont normalement bénéfiques pour le corps, mais lorsque
leur taux augmente, ils peuvent être la cause de nombreuses
pathologies : syndromes de détresse respiratoire de l’adulte,
rétinopathies des prématurés, convulsions [27], réactions de stress,
hypoxie, maladies cardiovasculaires, cancers, maladies
dégénératives, vieillissement, etc [3, 4, 20]. Ils peuvent aussi être la
conséquence de l’exposition aux UV [5, 6], aux radiations ionisantes,
au tabac, à l’alcool, à l’oxygène hyperbare, aux hydrocarbures
cancérigènes ou à des agents photosensibilisants (psoralènes et
porphyrines). Au niveau des cellules, les ROS, lorsqu’ils ne
peuvent
être éliminés ou lorsqu’ils sont formés en trop grande quantité,
lèsent les membranes, les acides désoxyribonucléiques (ADN), les
protéines, les constituants lipidiques et glucidiques.
Au niveau de la peau, les UVA (320-400 nm) sont absorbés par des
chromophores qui, excités, vont fournir l’énergie nécessaire pour
donner un oxygène singulet (forme excitée d’O2). Les UVA
entraînent aussi la réduction de l’O2 en anion superoxyde (O2
-), luimême
rapidement transformé en peroxyde d’hydrogène (H2O2) ou
eau oxygénée par l’enzyme superoxyde dismutase (SOD). L’eau
oxygénée est ensuite réduite en radical hydroxyle (OH) en présence
d’un ion ferrique ou cuivrique (réaction de Fenton). Le radical OH
agit sur les protéines, les lipides et le matériel génétique
(altération
de l’ADN), qui se traduit par des modifications des cellules et
des
macromolécules de l’épiderme. Au niveau du derme conjonctif, les
ROS agissent sur l’ensemble des constituants : substance
fondamentale, élastine, collagène et fibroblastes. La triple
hélice du
collagène est attaquée au niveau de ses extrémités. Le collagène
de
structure est progressivement remplacé, aboutissant à la formation
d’une élastose. Ainsi, cette agression répétée et prolongée des
ROS
conduit progressivement à des altérations irréversibles qui
réalisent
le vieillissement cutané.
MÉCANISMES DE DÉFENSE
VIS-À-VIS DES ROS
Heureusement, l’organisme assure le contrôle de la formation des
ROS ou d’autres espèces réactives de l’oxygène produits in vivo,
grâce à un système de défense et de réparation très performant qui
lui permet de limiter les dégâts induits [35]. Pour ce faire, la cellule
dispose de plusieurs moyens de défense : antioxydants cellulaires,
réponse adaptative au stress, synthèse protéique, inflammation,
apoptôse (mort programmée de la cellule). Ces systèmes peuvent
cependant être insuffisants ou débordés. C’est dans ces cas que
l’apport d’antiradicalaires (topiques ou par voie alimentaire), au
même titre que la modification de certains comportements
(protection vis-à-vis des UV, suppression du tabac, etc) peuvent
être
intéressants pour lutter ou ralentir des processus comme le
vieillissement cutané.
Modifier son
comportement
VIS-À-VIS DU SOLEIL
Le soleil favorise l’aggravation du vieillissement, tout
particulièrement au niveau des zones exposées à la lumière, ainsi
que la formation des cancers cutanés. Toutes les mesures visant à
protéger la peau ou à réduire la quantité d’UV grâce à la
protection
vestimentaire, l’utilisation d’écrans solaires d’indice élevé
associés à
une meilleure connaissance des risques encourus permettent de
lutter indirectement contre la formation des ROS induite par les
UV.
VIS-À-VIS DU TABAC
Le tabac diminue l’oxygénation tissulaire. Mais le mécanisme exact
par lequel il induit la formation de rides reste aujourd’hui
imparfaitement compris. Les modifications observées au niveau des
fibres élastiques ressemblent à celles observées au cours du
vieillissement cutané. La fumée diminuerait le taux de vitamine A
circulante et, de ce fait, la protection naturelle contre les ROS.
La
suppression du tabac est une mesure simple pouvant jouer un rôle
dans l’amélioration du vieillissement cutané [36].
Antiradicalaires
endogènes
L’organisme possède un système de défense complexe. Ce sont des
systèmes enzymatiques et des molécules biologiques liposolubles et
hydrosolubles. Ces systèmes de défense sont surtout
endocellulaires,
ce qui explique que la peau en contienne relativement peu, compte
tenu de l’abondance du tissu conjonctif dermique extracellulaire.
SYSTÈMES ENZYMATIQUES
Les enzymes qui sont impliquées dans la cellule (cytosol,
mitochondries) sont les SOD [32], les catalases, la nicotinamide
adénosine dinucléotide phosphate (NADPH) et les enzymes liées
aux acides aminés soufrés (groupe thiol, gluthation peroxydases [38]
et transférases). Ces enzymes nécessitent pour être actives la
présence d’oligoéléments métalliques.
ANTIOXYDANTS LIPOSOLUBLES
La vitamine E, les caroténoïdes et le coenzyme Q10
(ubiquinone + ubiquinol) agissent principalement en s’intégrant
dans les membranes cellulaires pour empêcher les réactions de
peroxydation lipidique.
ANTIOXYDANTS HYDROSOLUBLES
La vitamine C, l’acide urique, la bilirubine, le gluthation, l’albumine,
la ferritine, la transferrine et la céruloplasmine régénèrent les
substances liposolubles.
Les estrogènes (estriol et estradiol 17 bêta) sont des
antioxydants
naturels, alors que la cortisone possède des propriétés
pro-oxydantes.
Antiradicalaires
exogènes
MICRONUTRIMENTS (MN)
Ils regroupent les vitamines (substances organiques) et les
oligoéléménts (minéraux) qui ne sont pas synthétisés par
l’organisme mais lui sont indispensables. Ils ont un rôle surtout
de
cofacteur enzymatique ou hormonal et sont dénués de valeur
énergétique propre. Ils transforment les ROS en espèces moins
toxiques pour les cellules et leurs constituants en particulier
génétiques.
OLIGOÉLÉMENTS
Ce sont des métaux ou des substances métalloïdes [10] dont la
présence à doses infinitésimales est nécessaire au fonctionnement
des êtres vivants [28]. Ils jouent un rôle important
dans la balance
oxydant-antioxydant, et de ce fait dans la prévention du
vieillissement, en particulier cutané. Toutes les études faites
avec les
vitamines et les oligoéléments [33] montrent leur intérêt dans la
photoprotection et donc indirectement dans la prévention du
vieillissement cutané.
¦ Sélénium
Le sélénium (Se) constitue le site actif des enzymes glutathion
peroxydases (GPX et PHGPX) [40]. Ses propriétés antioxydantes sont
indiscutables, comme en témoignent de nombreuses études :
– les souris supplémentées avec du sélénium résistent mieux aux
expositions solaires (diminution de l’érythème, pigmentation plus
efficace, réduction de l’incidence des tumeurs malignes
photo-induites) [39] ;
– l’application sur la peau de souris sans poils d’eau thermale
riche
en sélénium (La Roche-Posay), avant et après chaque exposition à
des UVB, rallonge considérablement le temps d’apparition de
cancers cutanés et protège les membranes cellulaires. À l’arrêt de
la
supplémentation, l’effet bénéfique du sélénium disparaît [9].
La survie des cellules après exposition aux UVA, UVB et H2O2 est
plus importante lorsque le milieu de culture est enrichi en
sélénium
[2, 23, 24, 34]. Ces résultats sont confirmés avec des associations de
complexes vitaminiques variés. Certaines eaux thermales sont
naturellement riches en sélénium ; elles sont recommandées dans
certaines pathologies. Le sélénium se prescrit par voie orale sous
forme organique (sélénométhionine, sélénocystéine) ou inorganique
(sélénite, sélénate) et à faibles doses en oligothérapie. Aucune
étude
ne permet aujourd’hui d’affirmer si la supplémentation en sélénium
prévient véritablement le vieillissement cutané chez l’homme. La
rationalité d’un tel traitement repose sur des données théoriques
et
expérimentales surtout in vitro et chez l’animal.
¦ Zinc
Il entre dans la composition de nombreuses métalloenzymes comme
la SOD zinc-cuivre dépendante, en quantité plus abondante au
niveau de l’épiderme que du derme [3]. Son rôle antioxydant est
connu dans le maintien de l’intégrité des membranes [17, 38], la
protection des groupements thiols de l’oxydation, et la lutte
contre
la production des ROS. Les études qui ont été faites montrent qu’il
prévient les lésions induites par les UV [15], mais aucune étude chez
l’homme ne permet aujourd’hui de confirmer son rôle dans la
prévention du vieillissement cutané.
¦ Silicium
Le silicium (Si) participe à l’élasticité et à l’architecture
cutanée. Au
niveau de l’épiderme (couche cornée), il se lie à la kératine avec
le
soufre. Au niveau du derme, il intervient dans la formation du
tissu
conjonctif : il est un cofacteur de la prolylhydroxylase. Le
silicium
organique restaure les cellules épidermiques et dermiques altérées
et intervient dans le métabolisme et le renouvellement des
cellules.
Avec l’âge, le taux cutané de silicium diminue. L’apport de
silicium
se fait sous forme de silanol, dans des crèmes dites
« antivieillissement ».
¦ Manganèse
C’est le métal du site actif de la SOD à manganèse, enzyme ayant
une action antiradicalaire, localisée dans les mitochondries. Il
stimule la prolifération des kératinocytes et du collagène.
VITAMINES
Le rôle des vitamines est connu depuis très longtemps. De faibles
quantités de vitamines sont nécessaires pour prévenir les
carences.
Les apports quotidiens recommandés (AQR) déterminent la quantité
de chaque vitamine nécessaire pour les prévenir. Mais des doses
supérieures aux AQR peuvent avoir des effets bénéfiques, voire
préventifs [21, 34]. Une
série d’études montre que la prise régulière de
vitamines et d’oligoéléments chez des sujets âgés, pendant 6 mois,
entraîne une normalisation des taux de nutriments dans le sérum,
avec comme conséquence une augmentation de l’activité
enzymatique SOD et GPX. D’autres études ont montré que la prise
de 100 à 250 UI/j de vitamine E ou de vitamine C au-delà de
50 mg/j réduit la mortalité par atteinte cardiovasculaire et
l’athérosclérose [44]. Sur la peau, les résultats
se veulent intéressants
dans les études in vitro et expérimentales chez l’animal, voire
prometteurs, en tout cas en ce qui concerne la photoprotection et
les
conséquences visibles des irradiations UV. Chez l’homme, les
résultats sur le traitement ou la prévention du vieillissement
cutané
sont loin d’être aussi probants.
¦ Vitamine A (rétinol) et
rétinoïdes
Les rétinoïdes incluent les dérivés naturels et les dérivés
synthétiques de la vitamine A (rétinol, aldéhyde de vitamine A,
esters de rétinyl et acide rétinoïque ou trétinoïne) et peuvent
être
transformés en rétinol dans l’organisme.
Utilisé depuis 1971 dans le traitement l’acné, l’acide
transrétinoïque
a vu ses indications s’élargir avec Kligman [21] en 1984 qui fut le
premier à signaler l’amélioration du vieillissement photo-induit
chez
la souris. De multiples études in vivo et chez l’homme ont depuis
confirmé que l’acide rétinoïque augmente le processus de
réparation
naturel du vieillissement photo-induit. L’amélioration clinique
porte
sur les rides et les ridules, l’aspect de la peau, les lentigines,
les
kératoses actiniques dont le nombre et la taille diminuent. Ces
résultats sont confirmés par les études histologiques. Les
résultats
obtenus après application quotidienne pendant 48 semaines
persistent si l’on diminue la fréquence d’application à trois fois
par
semaine, et à l’inverse, ils disparaissent à l’arrêt de toute
application.
Le rétinol topique [15], bien qu’ayant une activité
plus faible que celle
de l’acide rétinoïque, a cependant une meilleure pénétration et ne
provoque aucune irritation. Ceci a conduit à l’introduire dans de
nombreuses préparations topiques destinées à lutter contre le
vieillissement cutané. Les rétinoïdes synthétiques comme la
trétinoïne, l’isotrétinoïne et l’étrétinate ont aussi été proposés
par
voie orale pour traiter et prévenir le développement de cancers
cutanés et de lésions précancéreuses. Les résultats ont montré qu’ils
ont un effet suspensif, avec des récidives dès l’arrêt des
traitements,
au prix d’effets secondaires constants, les doses requises pour
obtenir une efficacité étant toujours élevées, supérieures à 1
mg/kg/j
[25, 37].
De nombreuses préparations locales à base de vitamine A acide sont
commercialisées dans le but de traiter le vieillissement cutané.
Elles
sont recommandées en association à des préparations hydratantes
pour lutter contre la sécheresse cutanée induite par la vitamine A
acide ou tout autre actif cosmétique venant renforcer son
efficacité
(acides de fruits, vitamine C, etc).
¦ Bêtacarotène ou
provitamine A
Le bêtacarotène peut être converti en acide rétinoïque en évitant
la
voie du rétinol. Il agit comme piégeur de radicaux libres, en
protégeant les membranes cellulaires de la peroxydation lipidique.
Chez l’homme, la prise orale de bêtacarotène se traduit par une
augmentation du taux sanguin périphérique des lymphocytes
CD4+ et des cellules natural killer (NK). Quand les apports en
bêtacarotène sont faibles, on constate une augmentation du risque
de développement de certains cancers (cutanés, poumons, col de
l’utérus, oesophage, sein, vessie, intestin,
oto-rhino-laryngologiques).
Chez l’homme, la supplémentation orale en bêtacarotène ne modifie
pas l’incidence des cancers cutanés dans une étude contre placebo
rapportée par Greenberg [18]. Les données manquent quant à son
action sur le vieillissement cutané.
¦ Vitamine E
(alphatocophérol)
La vitamine E inclue les tocophérols et les tocotriénols. C’est
surtout
la fraction alpha de la vitamine E qui possède une activité
antioxydante en prévenant la peroxydation lipidique [33]et les
dommages induits par les radiations ultraviolettes [46]. Bissett [4] note
une réduction de la formation des rides de 75 % et du nombre des
tumeurs chez la souris après application d’une crème à 5 % de
vitamine E avant exposition aux UVB. L’application d’une crème
contenant 4 ou 8 % de vitamine E sur tout le visage diminue la
rugosité, la longueur et la profondeur des rides, comparativement
à
un placebo [27]. À l’inverse, dans une étude
contre placebo, la
supplémentation orale de vitamine E semble moins efficace chez
12 sujets absorbant 400 UI/j pendant 6 mois, que l’utilisation
locale,
sur les effets induits par les UV. L’association à d’autres
antioxydants
semble nécessaire (acide ascorbique, sélénium, thiols) pour prévenir
la dégradation du tocophérol. Enfin, le rôle de la vitamine E dans
la
prévention des cancers cutanés n’est pas totalement prouvé et les
résultats obtenus dans les études sont parfois contradictoires.
Knekt [22] constate
une diminution du taux sérique de vitamine E de
30 % chez dix sujets atteints de mélanome et de 5 % chez 35 sujets
porteurs d’épithélioma basocellulaire, non confirmée par d’autres [45].
La vitamine E est incorporée dans de nombreuses préparations
locales destinées à combattre le vieillissement cutané. Certains
auteurs recommandent d’y associer une supplémentation orale
quotidienne pour renforcer son rôle photoprotecteur systémique
faible, dans le but de prévenir indirectement le développement du
vieillissement cutané, tant intrinsèque qu’extrinsèque.
¦ Vitamine C (acide
ascorbique)
La vitamine C (acide ascorbique) est un antioxydant puissant
neutralisant les radicaux libres (anion superoxyde, radical
hydroxyl
et oxygène singulet), préservant la vitamine E de l’oxydation,
activant la production de la SOD, pouvant être pro-oxydante en
présence d’ions métal comme le fer. Elle a un effet positif sur la
cicatrisation et la microcirculation cutanée. Son rôle
antiradicalaire
est indéniable :
– toutes les situations qui conduisent à un stress oxydatif
génèrent
une déplétion de vitamine C ;
– Shindo constate une déplétion de vitamine C épidermique après
exposition aux UV ;
– chez la souris, un apport de vitamine C dans l’alimentation
réduit
la formation des tumeurs induites par les UV [16].
Murray [29] compare
l’efficacité d’une crème contenant de la vitamine
C sur la face interne des avant-bras de dix sujets d’un côté par
rapport à un placebo de l’autre côté. Il montre une nette
diminution
de l’érythème et de la dose érythémale minimale (DEM) du côté
traité après exposition aux UV. De même, l’application topique de
vitamine C sur la peau de porc prévient les réactions
phototoxiques
induites par les UVB et les UVA [11].
Enfin, la vitamine C topique stimule la prolifération de
fibroblastes
en culture. Son action peut être expliquée par sa pénétration
directe
dans la peau par rapport au placebo [12]. De nombreuses crèmes
destinées aux peaux vieillissantes incorporent la vitamine C avec
des résultats objectifs sur les rides. Inconvénient, elles s’oxydent
à
l’air, entraînant une couleur jaune orangé à la fois sur la peau
et les
textiles.
ASSOCIATIONS DE VITAMINES ET D’OLIGOÉLÉMENTS
De nombreuses études constatent de meilleurs résultats sur les
réactions de phototoxicité in vitro avec les associations
d’antioxydants. Pour Laruche et Césarini [23], l’association de
sélénium, cuivre, alpha tocophérol et rétinol per os pendant
3 semaines ne modifie pas la DEM des sujets, mais réduit de façon
significative le nombre des cellules dyskératosiques induites par
les
UV. Pour d’autres, l’association de vitamines per os (A, C, E) et
de
sélénium est corrélée à une augmentation de la résistance cutanée
au déclenchement de l’érythème induit par les UV, et une
Cosmétologie Antiradicalaires et
vieillissement cutané 50-160-C-14
3
augmentation de la pigmentation après irradiation aux UVA,
corrélée à la baisse de la production de lipoperoxydes cutanés [9].
L Vaillant [43] note
l’amélioration des scores du vieillissement cutané
après application pendant 18 mois d’antioxydants topiques par
rapport à un placebo, avec une diminution de l’épaisseur cutanée,
de l’extensibilité cutanée et des rides. Il faut encore attendre
quelques années pour découvrir les résultats de l’étude SU.VI.MAX,
randomisée contre placebo, portant sur 40 000 adultes (entre 35 et
65 ans), destinée à évaluer l’efficacité d’une supplémentation
orale
en vitamines et oligoéléments (bêtacarotène, vitamines C et E,
zinc,
sélénium) pendant 8 ans, sur plusieurs paramètres dont le
vieillissement cutané.
FLAVOPHÉROL
Il est extrait d’un fruit, le silybum marianum, riche en
flavonolignanes. Il agit en captant et détruisant les ROS formés,
avec
une activité comparable à celle du glutathion. Bien toléré et
efficace
sur des modèles acellulaires, son effet antiradicalaire est
confirmé
en application locale sur des souris sans poils. Cadi [7] confirme son
effet protecteur sur la photocarcinogenèse cutanée induite par les
expositions répétées aux UVB des souris albinos sans poils et sur
l’accumulation des ROS.
Autres mécanismes
réparateurs
Lorsque les mécanismes destinés à éliminer les ROS sont devenus
inefficaces et que les lésions sont irréversibles, les cellules
peuvent
être détruites par des médiateurs de l’inflammation ou
s’autodétruire par apoptôse [30]. Pour contrecarrer les lésions induites
par les ROS, une synthèse de protéines dites réparatrices ou
protectrices peut avoir lieu (ferritine, hème oxygénase et
protéines
dites du choc thermique (heat shock protein [HSP]). Le Biomoclomolt,
inducteur des HSP, pourrait avoir un intérêt dans la lutte contre
les
ROS induites par les expositions répétées aux UV et à leurs
conséquences.
Conclusion
L’agression des radicaux
libres est un facteur majeur du vieillissement
cutané. La peau comporte un
derme conjonctif pauvre en systèmes de
défense antiradicalaires
endogènes et en systèmes enzymatiques.
L’apport de substances ayant
des propriétés antiradicalaires, tant par
voie orale que topique, est
donc particulièrement intéressante pour
pallier le manque de ces
substances et pour avoir une action directe sur
le vieillissement dont on
sait qu’il peut être induit par les radiations
ultraviolettes, solaires et
visibles, mais aussi résulter d’une dégradation
naturelle progressive et
inéluctable des structures cutanées. Le choix
des antiradicalaires, la
meilleure association, l’équilibre entre les doses
normalement recommandées sont
difficiles à trouver, ce d’autant qu’il
existe des interactions
éventuelles entre les diverses substances, que les
études chez l’homme sont
encore peu nombreuses avec des protocoles
extrêmement variables rendant
les résultats difficilement comparables
et le recul souvent
insuffisant. Si les résultats sont, chez l’animal ou in
vitro, relativement probants
sur la photoprotection, ils ne sont pas aussi
nets chez l’homme dans le
vieillissement. Gageons que dans les années à
venir, des études bien
faites, avec un recul suffisant, nous permettront
de savoir si l’apport de
micronutriments antioxydants a véritablement
un intérêt pour réparer « du
temps l’irréparable outrage ». En l’absence
de signes de toxicité,
certains font le pari que la supplémentation
alimentaire a un intérêt
réel, et c’est pour répondre à ce pari que l’étude
SU.VI.MAX a été lancée.
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