Amyloses cutanées


Résumé. – Les amyloses se définissent par le dépôt extracellulaire de protéines fibrillaires, agencé en feuillet
plissé selon la configuration spatiale bêta dans différents tissus et organes, et qui tend à les envahir et à les
détruire. Ces dépôts extracellulaires de protéines particulières sont caractéristiques par leur affinité tinctoriale
au rouge Congo et un aspect fibrillaire en microscopie électronique. Elles peuvent être localisées ou
généralisées, ce qui explique la multiplicité des manifestations cliniques observées. Les différents types
cliniques d’amylose se distinguent selon la nature de la protéine fibrillaire amyloïde et le mécanisme
pathogénique responsables des dépôts. Cela permet de différencier les formes systémiques diffuses acquises :
amylose immunoglobulinique AL, amylose secondaire ou réactionnelle amyloid associated (AA), amylose des
hémodialysés bêta 2 microglobuline, des formes cutanées localisées : amylose nodulaire AL, amylose cutanée
primitive, amylose au cours des dermatoses, et des formes héréditaires : amylose cutanée familiale isolée,
amylose systémique familiale. La biopsie cutanée est utile au diagnostic des amyloses cutanées localisées et
dans les formes systémiques avec atteinte cutanée. Par ailleurs, devant la suspicion d’une amylose systémique
sans manifestations cutanées, la biopsie cutanée systématique en peau saine peut permettre le diagnostic en
évitant des gestes agressifs.
© 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : amyloses cutanées, amylose cutanée nodulaire primitive, amylose papuleuse, amylose
maculeuse, amyloses cutanées héréditaires, amyloses cutanées primitives, amyloses
immunoglobuliniques.
Introduction
Les amyloses se définissent par le dépôt extracellulaire de protéines
fibrillaires, agencé en feuillet plissé selon la configuration spatiale
bêta dans différents tissus et organes, et qui tend à les envahir et à
les détruire. Elles peuvent être localisées ou généralisées, ce qui
explique la multiplicité des manifestations cliniques observées. Ces
dépôts extracellulaires de protéines particulières sont
caractéristiques par leur affinité tinctoriale au rouge Congo et un
aspect fibrillaire en microscopie électronique. Des progrès ont été
réalisés dans la connaissance des caractéristiques cliniques,
biochimiques et génétiques des amyloses. Les amyloses, longtemps
considérées comme de simples maladies de surcharge, sont
actuellement reconnues comme des maladies des protéines mal
repliées. Les mécanismes intimes de la formation fibrillaire
demeurent toutefois mal connus. Ils concernent, d’une part, les
changements de la conformation des protéines et, d’autre part, des
interactions capitales in vivo entre la protéine amyloïde et la matrice
extracellulaire. On distingue les différents types cliniques d’amylose
selon la nature de la protéine fibrillaire amyloïde et le mécanisme
pathogénique responsables des dépôts qui permettent de distinguer
des formes systémiques et localisées. La peau constitue un organe
cible au cours des amyloses, favorisant un diagnostic précoce devant
la reconnaissance des manifestations cutanées. Par ailleurs, devant
la suspicion d’amyloses systémiques, la biopsie cutanée
systématique en peau saine peut permettre le diagnostic en mettant
en évidence les dépôts amyloïdes tout en évitant des gestes agressifs.
Les progrès dans le diagnostic de variété et dans les mécanismes de
la maladie ont récemment permis l’émergence de traitements plus
adaptés et plus efficaces.
Historique
L’amylose est décrite pour la première fois en 1842 par Rokitansky,
qui rapporte la présence d’un matériel amorphe et lardacé dans le
foie et dans la rate des patients cachectiques. Virchow, en 1855,
nomme cette substance « amylose » car, comme l’amidon, elle se
colore en bleu-violet après traitement par acide sulfurique et iode [15].
Bien que sa nature protéique ait été reconnue par la suite, elle a
conservé ce nom. L’amylose fut étudiée au cours des autopsies
jusque dans les années 1920, puis, grâce à son identification par le
rouge Congo (coloration introduite par Benhold en 1922), sur des
biopsies. Au début de sa description, l’amylose fut considérée
comme une affection rare, puis l’association avec de nombreuses
maladies, essentiellement des infections, fut mise en évidence. Puis
l’on découvrit les relations étroites qu’une variété d’amylose
entretient avec les immunoglobulines et les maladies plasmocytaires.
Magnus-Levy, en 1931, révéla la fréquente association de l’amylose
avec une protéine de Bence-Jones au cours du myélome. Apitz, en
1941, rapportait la présence de plasmocytes anormaux dans la
moelle des sujets atteints d’amylose, sans qu’il y ait d’infection
Philippe Modiano : Professeur de la faculté libre de médecine de Lille, praticien hospitalier, chef de service,
service de dermatologie, hôpital Saint-Philibert, groupe hospitalier catholique de Lille, 115, avenue du
Grand-But, 59462 Lille-Lomme, France.
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 98-720-A-10
98-720-A-10
Toute référence à cet article doit porter la mention : Modiano P. Amyloses cutanées. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Dermatologie, 98-720-A-10, 2003, 10 p.
associée. Par la suite furent décrites les amyloses héréditaires et
l’amylose sénile. À cette dispersion clinique de l’amylose, la
biophysique apporte un élément uniciste : toutes les amyloses ont
en commun une structure fibrillaire en microscopie électronique et
un aspect bêta plissé en diffraction aux rayons X. Un tournant
important dans l’étude de l’amylose s’amorce avec la mise au point
de la technique d’extraction des protéines amyloïdes in vitro en
1968 [61]. C’est alors que furent rapidement identifiées les protéines
amyloïdes impliquées dans les deux principales variétés d’amyloses
généralisées : les chaînes légères d’immunoglobulines et la protéine
AA (amyloid associated).
Caractéristiques de la substance
amyloïde
ASPECT MACROSCOPIQUE
Lorsque l’amylose est discrète, il n’y a pas d’anomalie visible des
organes atteints. Lorsque l’infiltration amyloïde est plus importante,
les viscères sont plus fermes que normalement, roses ou gris,
souvent hypertrophiés, en particulier le foie, la rate et le coeur. Les
reins peuvent, après une longue évolution, être petits et pâles.
Parfois existent des ulcérations gastroduodénales. Les nerfs sont le
plus souvent d’apparence normale, rarement épaissis et nodulaires.
MICROSCOPIE OPTIQUE (tableau I)
En microscopie optique, l’amylose se présente comme une substance
extracellulaire homogène et amorphe se colorant en rose par
l’hématoxyline-éosine-safran. Le siège des dépôts est variable dans
l’organisme, mais ceux-ci sont souvent périvasculaires. L’infiltration
peut être minime, localisée ou diffuse à tout l’organe intéressé. Son
identification fait appel à des techniques spéciales, dont la plus
spécifique est la coloration par le rouge Congo : en lumière polarisée,
la protéine amyloïde colorée par le rouge Congo apparaît vert-jaune
(dichroïsme). La thioflavine T, en fluorescence, marque l’amylose
avec une excellente sensibilité, mais manque de spécificité. En effet,
le pseudomilium colloïde donne également une fluorescence avec la
thioflavine, mais il n’est pas marqué par le rouge Congo. Les
colorations métachromatiques au violet de méthyl et au cristal violet
font apparaître les dépôts en rouge-violet sur fond bleuâtre, ces
colorations sont moins fidèles, révélant les constituants glucidiques
présents dans les dépôts. Avec l’acide périodique Schiff (PAS),
l’amylose se colore en violet.
MICROSCOPIE ÉLECTRONIQUE (tableau I)
Cohen et Calkins ont montré, en 1959, que les dépôts se présentent,
en microscopie électronique, comme de fines fibrilles linéaires,
rigides, sans embranchements [16]. Les fibrilles mesurent environ
10 nm de diamètre, leur longueur est variable. À distance des
cellules, elles sont en général disposées au hasard ; au contact des
cellules, elles sont parallèles ou perpendiculaires à la membrane
plasmique. On a pu mettre en évidence la présence de fibrilles dans
les macrophages et les monocytes. L’étude des fibrilles isolées en
microscopie électronique a suggéré une structure hiérarchisée.
Chaque fibrille est constituée de deux à cinq protofibrilles de 2,5 à
3,5 nm d’épaisseur, agencées parallèlement à l’axe de la fibrille
comme un ruban torsadé. Les protofibrilles sont elles-mêmes
formées de subprotofibrilles de 1,5 nm de large [73]. La disposition
des protéines amyloïdes au sein de ces différents filaments isolés in
vitro n’est pas connue avec précision. Des travaux récents portant
sur l’amylose expérimentale AA ont examiné à nouveau
l’organisation fine des dépôts amyloïdes. Ils suggèrent que, in vivo,
la fibrille amyloïde de 10 nm est centrée sur le composant amyloïde
P, lui-même entouré des glycosaminoglycanes. La protéine
amyloïde, ici la protéine AA, formerait un fin réseau à la face externe
de la fibrille [35].
ÉTUDE BIOPHYSIQUE (tableau I)
La diffraction aux rayons X a montré que les fibrilles sont formées
de chaînes polypeptidiques antiparallèles, disposées selon une
conformation en feuillets bêta plissés perpendiculaires au grand axe
de la fibrille (« structure cross-b » des auteurs anglais) [19].
Cet aspect a été considéré comme spécifique de l’amylose et Glenner
a proposé à un moment l’utilisation du terme b-fibrillose [25, 26]. Cette
structure tridimensionnelle des fibrilles amyloïdes rend compte de
certaines propriétés optiques et tinctoriales de l’amylose. En effet, la
biréfringence caractéristique obtenue avec la coloration par le rouge
Congo est liée à la fixation des molécules du colorant sur les feuillets
bêta plissés. Cette conformation est probablement en partie
responsable de la résistance au processus de dégradation protéique
expliquant la persistance des dépôts amyloïdes dans les tissus. Les
fibrilles bêta plissées ont par ailleurs la faculté de fixer par
absorption des molécules variées. De récents travaux contestent ce
modèle universel de la structure de la substance amyloïde.
Des études faites sur des préparations pures de fibrilles amyloïdes
(AA) montrent que, outre la structure bêta plissée, existent des
portions d’hélices alpha [80]. L’application de nouvelles techniques,
notamment la résonance magnétique nucléaire en phase solide, à
l’étude de la structure spatiale fine des protéines amyloïdes
naturelles et des peptides synthétiques suggère que la structure bêta
plissée n’est pas la seule à pouvoir expliquer les images obtenues
par diffraction aux rayons X. Il est aussi probable que les structures
spatiales des protéines amyloïdes connues soient différentes [44].
STRUCTURE BIOCHIMIQUE
La découverte de la solubilité de la substance amyloïde dans l’eau
distillée a permis son analyse chimique. La substance amyloïde est
toujours constituée de deux groupes de molécule :
– des composants communs, principalement le composant amyloïde
P, les glycosaminoglycanes, l’apolipoprotéine E (Apo E), et plus
accessoirement des inhibiteurs de protéase et d’autres molécules de
la matrice extracellulaire qui représentent 15 à 20 % de la substance ;
– une protéine spécifique d’un type d’amylose à la base de
l’élaboration d’une classification biochimique de la maladie.
¦ Composants communs
Composant amyloïde P
Le composant P est trouvé dans tous les types d’amylose [60]. Il s’agit
d’une glycoprotéine, synthétisée dans les hépatocytes. Le composant
P des dépôts d’amylose provient du sérum où il circule à l’état
normal et porte le nom de serum amyloid P component (SAP) [4]. Il
existe aussi dans les membranes basales glomérulaires où il se fixe
sur le collagène et dans les microfibrilles des fibres élastiques de la
peau et des vaisseaux. La dégradation du composant P est purement
hépatique. La fixation sur la fibrille amyloïde est calciumdépendante.
Le composant P est intimement lié à la fibrille
amyloïde. Il peut toujours se fixer in vitro grâce à une liaison
calcium-dépendante, à une variété de ligands incluant la
fibronectine, la C4-binding protein, les filaments de kératine agrégés,
Tableau I. – Caractéristiques des amyloses.
Microscopie optique
- Coloration en rose par l’hématoxyline éosine-safran
- Biréfringence jaune-vert en lumière polarisée après coloration par le rouge Congo
- Métachromasie après coloration par le méthyl-violet ou le cristal-violet
- Fluorescence après coloration à la thioflavine
Microscopie électronique
- Fibrilles non organisées de 10 nm de diamètre et de longueur variable
- Interactions imparfaitement définies au sein de cette fibrille entre la protéine amyloïde,
le composant P de structure pentagonale, et les glycosaminoglycanes
Diffraction aux rayons X
Conformation en feuillets b-plissés perpendiculaires au grand axe de la fibrille
98-720-A-10 Amyloses cutanées Dermatologie
2
des glycosaminoglycanes, l’acide désoxyribonucléique (ADN) et la
chromatine. Le composant P a été cristallisé, sa structure spatiale
précisée ; les deux sites de fixation au calcium ont été localisés [20].
Le composant P, comme la protéine C réactive (CRP), appartient à
une famille de protéines pentamériques (les pentraxines) qui sont
conservées au cours de l’évolution. Le composant P et la CRP ont
51 % d’acides aminés identiques. Le gène codant le composant P a
été localisé sur le bras long du chromosome 1 proche du gène codant
la CRP [60].
Glycosaminoglycanes
Les glycosaminoglycanes (GAG) représentent, avec le composant P,
la partie glucidique de la substance amyloïde. Le GAG proprement
dit est un polysaccharide linéaire de masse moléculaire de 60 à
70 kDa formé d’une répétition d’un disaccharide caractéristique
d’une molécule donnée. Les disaccharides sont en partie
sulfoconjugués. Ce polysaccharide est relié par un tétrasaccharide
fixe à un noyau protéique par une sérine. L’ensemble est appelé
protéoglycane [39].
Apolipoprotéine E
C’est une protéine de 299 acides aminés, dont il existe trois
isoformes majeures. L’Apo E est synthétisée essentiellement dans le
foie et le cerveau. Elle joue un rôle important dans le métabolisme
des lipoprotéines et du cholestérol dans le sang, et particulièrement
dans le système nerveux central [85].
¦ Différentes protéines amyloïdes
Nous nous intéresserons aux protéines amyloïdes qui interviennent
préférentiellement dans les amyloses cutanées.
Protéine « amyloid light chain »
L’origine immunoglobulinique de la substance amyloïde était
suggérée par l’association fréquente de l’amylose avec le myélome
et la gammapathie monoclonale sanguine ou urinaire [25, 26]. Glenner,
en 1971, a montré que la séquence des acides aminés d’une fibrille
amyloïde était analogue à la région variable d’une chaîne légère
d’immunoglobulines de type kappa. On appelle ainsi cette variété :
amylose AL pour amyloid light chain. Les deux types de chaînes
légères kappa et lambda sont constituées de deux segments ; un
segment variable VL de 108 acides aminés et un segment constant
CL de 106 acides aminés. Dans les dépôts d’amylose, on trouve
les chaînes légères dans leur intégralité ou sous une forme tronquée,
formée au minimum d’une partie du segment VL. La
masse moléculaire de la protéine déposée varie ainsi entre 4 et
23 kDa [25, 26].
Protéine « amyloid heavy chain »
Eulitz et al ont isolé deux dépôts d’amylose des fragments de
chaînes lourdes gamma G1 d’où le nom d’amylose AH pour amyloid
heavy chain [22].
Protéine « amyloid transthyretin »
La protéine décrite en 1972 est appelée protéine AA (amyloïd
associated) [5]. Elle est en cause dans l’amylose de l’inflammation ou
amylose AA (infections et maladies inflammatoires chroniques,
tumeurs), dans certaines amyloses héréditaires (fièvre
méditerranéenne familiale, syndrome de Muckle et Wells) et dans
l’amylose expérimentale. La protéine AA a un poids moléculaire
d’environ 8 000 Da, elle est constituée de 76 acides aminés. Elle
dérive d’une protéine plasmatique, la protéine SAA (serum amyloid
associated) encore appelée apolipoprotéine SAA (Apo-SAA) car elle
circule liée à des lipoprotéines de haute densité [76]. L’organisation
génomique des gènes SAA est imparfaitement élucidée. Les
protéines SAA appartiennent au groupe des acute phase protéin (APP)
de type 1 dont la synthèse est sous la dépendance des cytokines
pro-inflammatoires interleukine 1 et tumour necrosis factor (TNF)
agissant seules ou en association avec l’interleukine 6 [36]. Lors d’une
inflammation aiguë, la cinétique de la protéine SAA est proche de
celle de la CRP, sa concentration sérique peut augmenter de
plusieurs centaines de fois en 24 à 48 heures. La concentration
sérique de la SAA est élevée de façon permanente dans les infections
chroniques (ostéomyélite, tuberculose), les maladies inflammatoires
(polyarthrite rhumatoïde, rhumatisme psoriasique) et dans certains
cancers pulmonaires et coliques. Son évolution est souvent parallèle
à celle de la CRP [33]. Les propriétés fonctionnelles de la protéine SAA
sont mal connues. Plusieurs rôles ont été proposés au cours de
l’inflammation : stimulation de chimiotactisme des macrophages,
des polynucléaires, fixation spécifique par l’intermédiaire d’un site
RGD à la matrice extracellulaire et induction de l’adhérence des
lymphocytes CD4 à cette matrice [62].
Protéine A bêta 2 microglobuline
Dans cette forme originale d’amylose rencontrée chez les insuffisants
rénaux traités par hémodialyse chronique, les fibrilles amyloïdes
sont formées de la bêta 2 microglobuline dans son intégralité [24]. La
bêta 2 microglobuline appartient à la superfamille des
immunoglobulines. Elle est relarguée des membranes cellulaires de
façon permanente et catabolisée par le rein après filtration
glomérulaire.
Protéine ATTR
Les amyloses dont la protéine amyloïde est formée de transthyrétine
(TTR) incluent l’amylose sénile généralisée (ASG) et le principal
groupe d’amyloses héréditaires autosomiques dominantes. La
transthyrétine appelée naguère préalbumine est une protéine
plasmatique homotétramérique. Elle est une des protéines porteuses
de la thyroxine et transporte également le retinol binding protein qui
transporte la vitamine A. La synthèse de la transthyrétine est
essentiellement hépatique [6].
Protéine Apo A1
L’apolipoprotéine A1 (Apo A1), protéine majeure des lipoprotéines
de haute densité, est impliquée dans différentes formes cliniques
d’amyloses héréditaires avec manifestations cutanées. Des fragments
d’Apo A1 de taille variable ont été purifiés des dépôts d’amylose
dans ces familles [54].
Pathogénie
La compréhension des mécanismes de l’amylose a fait un bond en
avant depuis ces dix dernières années, grâce à l’utilisation de
nouvelles techniques d’étude in vitro. Il n’y a pas de théorie unifiée
de l’amylogenèse (pourquoi se forment, à partir de protéines, des
dépôts d’amylose ?). Il est probable qu’il y a des mécanismes
communs aux différentes variétés d’amylose, mais également des
spécificités pour chacune d’entre elles (fig 1).
ANOMALIES DES PROTÉINES AMYLOÏDES
Les protéines amyloïdes proviennent d’un précurseur circulant dans
le plasma dans les formes généralisées d’amylose, faisant l’objet
d’altération pathologique, héréditaire ou acquise dans un contexte
clinique spécifique.
¦ Modification quantitative
Il existe le plus souvent une augmentation de la disponibilité du
précurseur de la protéine amyloïde. Cela est particulièrement
démonstratif pour la bêta 2 microglobuline qui est normalement
éliminée par le rein. En situation d’insuffisance rénale chronique
terminale, la concentration sérique de la bêta 2 microglobuline est
multipliée par 40 environ [82]. Cette élévation considérable par défaut
d’élimination est le facteur essentiel de la formation de cette
amylose.
Au cours des états inflammatoires chroniques, qui s’accompagnent
de façon intermittente ou permanente d’une réaction inflammatoire,
Dermatologie Amyloses cutanées 98-720-A-10
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l’élévation de la concentration sérique de SAA est certainement un
facteur qui favorise la survenue d’une amylose de type AA. Mais
cette élévation n’explique pas tout car tous les malades souffrant
d’une maladie inflammatoire chronique ne développent pas une
amylose. En outre, il n’y a pas de parallélisme absolu entre la
sévérité de l’inflammation et la survenue d’une amylose au cours
des états inflammatoires chroniques [71]. Il existe quelques observations
de malades atteints d’une amylose AA sans maladie inflammatoire
sous-jacente. Dans l’amylose AL, il existe, dans 90 % des cas, des
chaînes légères d’immunoglobuline circulant dans le sang ou dans
l’urine. Cette détection nécessite parfois l’emploi de techniques plus
sensibles que les techniques habituelles d’immunoélectrophorèse ou
d’immunofixation.
¦ Polymorphisme
L’amylogénicité des chaînes légères est variable selon leur structure
primaire. Ainsi les chaînes lambda sont plus amylogènes que les
chaînes kappa [75]. Cette proportion de certaines chaînes légères
d’immunoglobuline a formé des fibrilles, a conduit à rechercher des
variations originales de leur structure primaire qui pourraient s’y
rattacher. Cette recherche est rendue particulièrement compliquée
par le caractère naturellement très variable des chaînes légères. Ces
recherches sont en cours de développement.
¦ Mutation
La mutation ponctuelle, associée aux différentes formes d’amylose
héréditaire, constitue un excellent modèle pour étudier
l’amylogénicité de ces protéines.
Dans la majorité des cas, la mutation porte sur la protéine amyloïde
ou sur son précurseur et il est légitime de penser qu’elle est
l’élément essentiel qui modifie la protéine et la rend amylogène.
FIBRILLOGENÈSE
¦ Rôle de la conformation spatiale
L’absence de points communs entre les structures primaires et les
fonctions des différentes protéines amyloïdes incite à préciser le rôle
de la conformation spatiale dans la fibrillogenèse (formation des
fibrilles à partir des protéines amyloïdes naturelles) et à comprendre
comment des protéines, qui ont une conformation en partie
naturellement bêta-plissée, adoptent cette conformation de manière
extensive et répétée dans les fibrilles [37]. Il est possible de créer de
l’amylose in vitro à partir de la TTR normale par simple
dénaturation en milieu acide [17]. Le tétramère, qui est la forme
physiologique, est dénaturé et des monomères intermédiaires sont
ainsi produits. Ces derniers seraient la forme directement
amylogène. L’effet des mutations de la TTR serait identique. Les
différentes substitutions observées dans les chaînes légères
d’immunoglobuline amylogène créent des interactions
supplémentaires de plusieurs types chimiques, ponts-hydrogènes,
force de Van Der Waals entre deux chaînes légères. Ce sont les
dimères de chaînes légères qui seraient le motif répété comme pour
la TTR [34].
¦ Protéolyse
La plupart des protéines amyloïdes sont des fragments de
précurseur de taille parfois largement supérieure, c’est le cas
notamment des protéines AA. Enfin, pour d’autres protéines, le
précurseur entier figure dans les dépôts au même titre que ces
fragments. La protéolyse apparaît donc inconstante. À travers les
diverses espèces étudiées, la protéine AA est toujours un fragment
de son précurseur, la protéine SAA. Le lieu exact de la dégradation
de la SAA n’est pas connu avec certitude. Il a été rapporté une
diminution de la capacité à dégrader la protéine SAA en cas
d’amylose AA. Par ailleurs, diverses données histologiques ont
apporté de sérieux arguments pour une formation
intracytoplasmique et, plus encore, intralysosomale des fibrilles
amyloïdes AA [74]. La capacité de diverses enzymes lysosomales à
dégrader la fibrille AA a été testée in vitro. Tous ces résultats
suggèrent indirectement que la protéolyse de la SAA est nécessaire
à la fibrillogenèse.
COMPOSANTS COMMUNS
Les composants communs jouent probablement un rôle dans
l’amylogenèse in vivo, mais les interactions avec les fibrilles
amyloïdes elles-mêmes et entre les divers composants communs
sont loin d’être complètement analysées. In vitro, le composant P
protège diverses fibrilles amyloïdes de la dégradation enzymatique.
Cette protection peut être prévenue par la liaison aux fibrilles d’une
molécule dérivée du galactose [78].
Classification clinique des amyloses
cutanées
La classification et la nomenclature des amyloses cutanées
présentées sur la figure 2 a été établie en fonction de la nature des
protéines amyloïdes, des mécanismes pathogéniques responsables
des dépôts et selon que l’amylose atteint un ou plusieurs organes,
ce qui permet de distinguer des formes systémiques et localisées.
Manifestations anatomocliniques
des amyloses cutanées
AMYLOSES SYSTÉMIQUES DIFFUSES ACQUISES
¦ Amyloses immunoglobuliniques
Dans les amyloses immunoglobuliniques, on distingue les amyloses
immunoglobuliniques isolées nommées également primitives, les
amyloses immunoglobuliniques associées au myélome et les
amyloses nodulaires. Les dépôts amyloïdes dans la peau et les
muqueuses sont constitués de fragments de chaînes légères le plus
souvent de type lambda, définissant l’amylose AL.
Amyloses immunoglobuliniques isolées ou associées au myélome
– Les lésions cutanées et muqueuses sont observées dans 29 à 40 %
des cas [8, 87].
– Le signe cutané le plus fréquent est le purpura décrit chez 15 %
des patients. Il atteint en particulier les paupières (fig 3) après une
1. Augmentation
de la disponibilité locale
ou sanguine
- inflammation
- clone plasmocytaire
- vieillissement
- insuffisance rénale chronique
- tumeur endocrine
2. Polymorphisme protéique
3. Mutation
4. Protéolyse
1. Matrice extracellulaire
(glycosaminoglycane)
2. Composant P
3. Apolipoprotéine E
PROTÉINE PRÉCURSEUR
DÉPÔT AMYLOÏDE
Composants communs
+ Transconformation
1 Mécanismes généraux de l’amylose [29].
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4
expectoration forcée ou un effort de toux, mais également les
aisselles, l’ombilic et les régions anogénitales (fig 4) spontanément
ou après un traumatisme mineur. Il peut se disposer en stries
linéaires ou se révéler sous forme d’ecchymoses (fig 5).
– Des papules, des nodules, des plaques d’aspect cireux parfois
hémorragiques constituent d’autres signes fréquents d’amylose
immunoglobulinique (fig 6). Elles traduisent une infiltration du
derme papillaire. La papule hémisphérique, jaunâtre ou couleur de
la peau, de quelques millimètres de diamètre est non prurigineuse.
Elle présente parfois une composante ecchymotique. Les papules
peuvent se regrouper en placard inesthétique dont la topographie
préférentielle se situe au niveau de la face (partie interne des
paupières, zone périorificielle) donnant un aspect léonin [7]. Les
autres parties du corps peuvent être atteintes, notamment la région
anogénitale mimant des condylomes [27] (fig 7).
– Quelquefois, les lésions peuvent prendre un aspect jaunâtre
faisant penser à des xanthomes [14]. Il faut noter qu’il a été rapporté
la coexistence de xanthomes plans normolipidiques diffus et d’une
amylose immunoglobulinique de type IgG lambda. Au niveau des
lésions cutanées coexistaient des aspects histologiques de xanthome
normolipidique et d’amylose [12].
• Amylose immunoglobulinique AL
- amylose immunoglobulinique isolée (primitive)
- amylose associée au myélome
- amylose nodulaire
• Amylose II aire ou réactionnelle AA
• Amylose des hémodialysés bêta 2 microglobulines
• Amylose nodulaire AL
• Amyloses cutanées primitives :
- amylose papuleuse
- amylose maculeuse
- amylose biphasique
- amylose anosacrée
- amylose poïkilodermique
- amylose vitiligoïde
• Amylose au cours des dermatoses
• Amyloses cutanées familiales isolées
• Amyloses systémiques familiales :
- Moulin
- Muckle-Wells
CLASSIFICATION DES AMYLOSES CUTANÉES
Amyloses cutanées
localisées
Amyloses systémiques
diffuses acquises
Amyloses héréditaires
2 Classification des amyloses cutanées.
3 Purpura des paupières
d’une amylose systémique
immunoglobulinique
(photo de la collection
Cuny-Truchetet CHR
Metz-Thionville).
4 Purpura de la région
anale d’une amylose systémique
amyloid light
chain (AL).
5 Purpura diffus du tronc. Amylose systémique amyloid light chain (AL).
6 Nodules cireux du visage.
Amylose systémique
amyloid light chain (AL).
Dermatologie Amyloses cutanées 98-720-A-10
5
– Des aspects sclérodermiformes sont beaucoup plus rares. Celles-ci
sont d’étendue variable, de teinte porcelaine avec une consistance
dure qui correspond à une infiltration plus diffuse et plus profonde
du derme. Elles peuvent présenter en surface un caractère papuleux
et sont parfois purpuriques (fig 8). Elles se localisent le plus souvent
au visage, au cou, aux doigts, conférant une perte d’expressivité et
une limitation des mouvements.
– Des lésions bulleuses parfois hémorragiques, associées à une
fragilité cutanée, ont été décrites [65].
– Une alopécie diffuse ou localisée liée à une infiltration du cuir chevelu
peut être présente [41].
– Une fragilité unguéale ou une onycholyse totale est plus fréquente
que la papillomatose sous-unguéale de Duperrat [27].
– Certaines formes d’amylose caractérisées par un tropisme pour le
tissu élastique donnant un aspect de cutis-laxa [55] ou de pseudoxanthome
élastique, avec des cordons indurés sur les trajets
vasculaires [72]. Ces formes soutiennent l’hypothèse que les
composants P, associés aux fibres élastiques, formeraient le lit des
dépôts amyloïdes [72].
– L’atteinte muqueuse intéresse la langue avec la macroglossie
(fig 9). Elle se rencontre dans 20 % des cas. Il s’agit de la
manifestation clinique la plus évocatrice. L’infiltration amyloïde
peut débuter sous une forme diffuse, entraînant une augmentation
de volume modérée et régulière de teinte jaune-orangé ou sous une
forme localisée, avec la présence de papules ou de nodules
déformant la surface linguale.
L’augmentation de volume se fait de façon progressive ou par
poussées parfois douloureuses. Les bords sont souvent marqués par
l’empreinte des dents et peuvent surplomber le reste de l’organe. La
surface est parfois déformée par des nodules, des sillons ou des
vésicobulles hémorragiques. L’augmentation de volume est parfois
telle qu’elle peut entraîner des problèmes alimentaires ou
respiratoires à l’origine de dysphagie, de dyspnée et de dysarthrie.
Le plancher de la bouche peut être envahi par des infiltrations
amyloïdes fixant la langue à sa base [8, 87]. Elle est observée dans 19 %
des amyloses immunoglobuliniques isolées et dans 32 % des
amyloses immunoglobuliniques associées au myélome [3]. Une
tumeur des gencives localisée et de consistance élastique est rare,
alors que l’infiltration par les dépôts amyloïdes est massive à
l’examen histologique. Des xérostomies liées à l’infiltration des
glandes salivaires par l’amylose ont été rapportées [40].
Amylose cutanée nodulaire primitive
L’amylose cutanée nodulaire primitive est la forme la plus rare
d’amylose. Il s’agit d’une amylose tumorale immunoglobulinique,
le clone plasmocytaire n’étant retrouvé que dans la peau. Elle doit
donc être considérée comme un plasmocytome extramédullaire. Les
plasmocytes localisés à la peau fabriquent des chaînes légères
d’immunoglobulines qui dégénèrent en substance amyloïde. L’âge
moyen de début de l’amylose nodulaire est de 65 ans [28]. La maladie
est deux fois plus fréquente chez l’homme que chez la femme
(fig 10). Les lésions sont plus souvent multiples qu’uniques et
atteignent plus fréquemment les jambes que le reste du corps (fig 11).
D’autres localisations ont été décrites telles que le visage et le
tronc [49]. Les nodules, qui ressemblent à ceux observés dans
l’amylose systémique primitive, se présentent comme des
formations tumorales luisantes, de teinte ambrée et d’aspect cireux.
Ils sont parfois surmontés de télangiectasies. Ils ont une consistance
molle ou ferme. Rarement, les lésions sont à l’origine d’une atrophie
de l’épiderme, d’une anétodermie ou d’une bulle par destruction
des fibres élastiques ou de collagène du derme. L’amylose nodulaire,
bien qu’initialement localisée à la peau, peut évoluer vers une
maladie systémique. Un clone plasmocytaire est parfois retrouvé,
suggérant qu’il puisse exister un plasmocytome cutané de faible
masse tumorale avec des dépôts importants de chaînes légères [30].
7 Lésions d’amylose systémique
amyloid light
chain (AL) de la région
anale mimant des condylomes.
9 Macroglossie avec nodules déformant la surface linguéale.
A. Face.
B. Profil.
*A *B
8 Forme sclérodermiforme
purpurique du dos du
pied d’une amylose systémique
amyloid light chain
(AL).
98-720-A-10 Amyloses cutanées Dermatologie
6
Des observations d’amyloses nodulaires rapportées au Japon ont mis
en évidence le caractère monoclonal de l’infiltrat de plasmocytes par
technique PCR. Cela suggère qu’une expansion monoclonale de
plasmocytes peut être responsable localement de l’amylose
nodulaire [31]. Le risque exact d’atteinte systémique n’est pas connu,
certains auteurs le situant à moins de 15 % alors que d’autres chiffres
publiés atteignent 50 % [56]. Il est nécessaire de pratiquer un bilan
approfondi pour éliminer une maladie systémique telle qu’un
myélome et d’effectuer un suivi au long cours des patients atteints
d’une amylose cutanée nodulaire primitive.
Manifestations systémiques [29]
– L’atteinte cardiaque. Elle est constatée cliniquement dans 26 à
30 % des cas. Elle se manifeste par une insuffisance cardiaque,
gauche ou globale réfractaire et par des troubles du rythme.
– L’atteinte rénale (11 à 32 %) : la protéinurie, le syndrome
néphrotique représentent les manifestations les plus caractéristiques.
– L’atteinte du système nerveux périphérique (5 à 17 %) se
manifeste par une neuropathie à prédominance sensitive. L’atteinte
du système nerveux autonome peut se voir avec une hypotension
orthostatique constatée dans 15 % des cas.
– L’atteinte du tube digestif est fréquente anatomiquement, elle se
manifeste rarement sur le plan clinique.
– L’atteinte articulaire (16 %) réalise un tableau cliniquement proche
de la polyarthrite rhumatoïde.
– L’infiltration hépatique est fréquente. Une hépatomégalie est
retrouvée dans 50 % des cas. Les anomalies biologiques sont
discrètes.
– L’atteinte splénique se manifeste par une splénomégalie avec
risque de rupture spontanée.
Histologie
L’examen histologique est indispensable au diagnostic d’amylose
AL. En peau lésée, la substance amyloïde est retrouvée le plus
souvent dans le derme papillaire autour des annexes, plus rarement
dans le derme réticulaire et dans le tissu sous-cutané. Dans le derme,
les dépôts peuvent être observés autour ou dans la paroi des
vaisseaux, autour des muscles arrecteurs, des follicules pileux et
autour des adipocytes, réalisant des « anneaux amyloïdes ». Le
polymorphisme clinique est expliqué par la variabilité du siège des
dépôts. Les lésions purpuriques correspondent à la diapédèse
d’érythrocytes, secondaire à la fragilité capillaire induite par les
dépôts périvasculaires dans le derme superficiel. Les papules et les
nodules contiennent des dépôts amyloïdes massifs dans le derme
réticulaire et le tissu sous-cutané [11]. L’amylose bulleuse est liée à un
décollement sous-épidermique lié à la fragilisation de la lamina
lucida par les dépôts amyloïdes. L’alopécie est associée à
l’infiltration profonde par la substance amyloïde des follicules
pileux. En peau saine, chez le malade ayant une amylose AL, la
biopsie cutanée peut révéler des dépôts amyloïdes dans 55 % cas [68] ;
la biopsie de graisse abdominale est plus rentable et positive dans
95 % des cas [46], alors que la biopsie rectale l’est dans 75 % des cas si
la sous-muqueuse est atteinte [42]. L’immunofluorescence cutanée
directe avec des anticorps dirigés contre les chaînes légères des
immunoglobulines peut être utile, montrant un dépôt chevelu dans
le derme superficiel monotypique. Dans les formes bulleuses, le
dépôt est retrouvé à la jonction dermoépidermique dans un quart
des cas [65]. La microscopie électronique est l’examen de référence,
elle met en évidence des fibrilles de 10 nm de diamètre non
ramifiées, réparties sans ordre dans tout le derme [25, 26, 87].
¦ Amyloses cutanées réactionnelles
Les amyloses secondaires ou réactionnelles sont consécutives au
dépôt d’une substance amyloïde AA. Cette dernière est présente à
une concentration élevée dans le sérum dans de nombreuses
circonstances où il existe un état inflammatoire prolongé tels les
rhumatismes inflammatoires, les infections chroniques, les tumeurs
malignes, la fièvre méditerranéenne familiale. Les lésions cutanées
de l’amylose AA sont exceptionnelles, et seules des lésions
purpuriques ont été décrites [46]. Cependant, des dépôts de la
protéine fibrillaire sont retrouvés dans 89 % des biopsies cutanées
en peau saine, 58 % des ponctions de graisse abdominale et 70 %
des biopsies rectales [86]. Les dépôts amyloïdes siègent dans le derme
profond autour des cellules adipeuses. Les biopsies sont plus
rentables sur les fesses ou l’abdomen. Ainsi, la biopsie cutanée est
un moyen de diagnostic simple en cas de suspicion d’amylose AA.
La coloration par le rouge Congo permet le diagnostic d’amylose
secondaire AA avec la perte de cette affinité tinctoriale après
traitement au permanganate de potassium, alors que les amyloses
immunoglobuliniques y sont résistantes.
¦ Amylose des hémodialysés
Il s’agit de dépôts de bêta 2 microglobuline dans le derme observés
chez les hémodialysés après plus de 10 ans de dialyse. Ces dépôts
sont exceptionnellement responsables de lésions cutanées. Celles-ci
consistent en des nodules sous-cutanés des fesses [23], des nappes
hyperpigmentées, des lésions lichéniennes [70], des lésions digitales
discrètement infiltrées [52]. L’examen histologique de la peau de la
graisse abdominale retrouve des dépôts de la substance amyloïde
dans 25 % des cas [1]. Sa caractérisation repose sur l’examen en
immunofluorescence ou en immunoperoxydase par des anticorps
antibêta 2 microglobuline. Enfin, la microscopie électronique
retrouve des fibrilles amyloïdes dans plus de la moitié des biopsies
cutanées systématiques [35, 77].
AMYLOSES CUTANÉES LOCALISÉES
¦ Amylose nodulaire
Nous ne reviendrons pas sur la description de l’amylose nodulaire
AL, considérée comme une forme tumorale d’amylose
immunoglobulinique dont le clone plasmocytaire n’est retrouvé que
dans la peau. Cette forme d’amylose peut rester localisée ou évoluer
vers une amylose systémique, nécessitant alors une surveillance
rigoureuse.
¦ Amyloses cutanées primitives
Elles se différencient nettement de l’amylose systémique tant sur le
plan clinique, ou l’atteinte cutanée est exclusive,
10 Amylose localisée du
visage nodulaire primitive
amyloid light chain (AL).
11 Amylose localisée de la
jambe nodulaire primitive
amyloid light chain (AL).
Dermatologie Amyloses cutanées 98-720-A-10
7
qu’étiopathogénique où l’origine de la substance amyloïde semble
être dermoépidermique, faisant intervenir des processus
essentiellement locaux liés au prurit. Ces amyloses sont liées à des
dépôts dermiques fibrillaires de certaines cytokératines [90]. Dans une
étude histochimique, il s’agit de cytokératines spécifiques des
kératinocytes suprabasaux ou de la gaine externe des follicules
pilosébacés (kératine 1, 5, 14, 15, 16) alors que les cytokératines des
kératinocytes basaux et glandulaires ne sont pas retrouvés [58]. Les
amyloses cutanées primitives pourraient être liées à la mort des
kératinocytes (apoptose qui se déposerait dans le derme sous la
forme de corps colloïdes). Les cytokératines des corps colloïdes sont
modifiées secondairement pour aboutir à des microfibrilles
caractéristiques de l’amylose cutanée primitive [21]. La mort des
kératinocytes pourrait être secondaire au prurit et au grattage répété.
Lichen amyloïde ou amylose papuleuse (fig 12, 13)
Le lichen amyloïde se présente sous l’aspect de lésions papuleuses,
couleur chair ou brune d’aspect sale, lisse ou hyperkératosique
extrêmement prurigineuse, siégeant électivement aux faces
antérieures des jambes et pouvant s’étendre aux mollets et au dos
des pieds de façon plus ou moins symétrique [83]. Les papules ont un
volume modéré, formant une saillie de 1 à 3mm de hauteur. Leurs
sommets sont parfois kératosiques, voire verruqueux, souvent
excoriés par l’intensité du grattage. Des ulcérations sont décrites.
L’évolution est chronique, peu modifiée par la thérapeutique comme
dans toutes les formes d’amylose cutanée primitive. Le pronostic
vital n’est pas mis en jeu. Le lichen amyloïde survient plus
fréquemment chez les Asiatiques [83].
Amylose maculeuse (fig 14)
Elle s’observe chez la femme (78 %) d’âge moyen (30-60 ans). La
plupart des observations proviennent d’Amérique centrale,
d’Amérique du Sud, du bassin méditerranéen, d’Asie. Elle se traduit
par des plages prurigineuses, brunâtres sur le tronc ou les membres,
avec une prédominance au niveau du dos. Le début est insidieux.
La lésion élémentaire est une macule hyperpigmentée de 2 à 3mm
de diamètre de couleur brune ou gris-noir, un peu brillante. Les
éléments peuvent rester isolés ou conflués, formant un placard de
plusieurs centimètres de diamètre entouré de quelques macules
pouvant se disposer en stries rectilignes parallèles ou dessinant un
réseau à mailles irrégulières. Des micropapules peuvent se voir en
superficie. Les lésions adoptent généralement un caractère
symétrique. L’évolution est chronique, s’étendant sur plusieurs
années. Des papules de lichen amyloïde peuvent s’associer à ces
macules, constituant la forme biphasique [9, 10].
Amylose anosacrée
L’amylose anosacrée est une forme d’amylose cutanée primitive
constituée de macules hyperkératosiques et de papules lichénoïdes
atteignant la région périanale. Elle est plus fréquente chez l’homme
à la différence du lichen amyloïde et de l’amylose maculeuse et
survient après 60 ans, suggérant un lien avec les modifications
séniles de la peau [84, 89].
Amylose poïkilodermique
L’amylose poïkilodermique est une forme rare d’amylose cutanée,
caractérisée par une peau atrophique comprenant des zones
hyperpigmentées, hypopigmentées et parcourues de télangiectasies.
Des lésions bulleuses, une photosensibilité, une petite taille, une
kératodermie palmoplantaire sont parfois associées [57].
Amylose vitiligoïde
L’amylose vitiligoïde se traduit par des lésions dépigmentées,
parfois avec une hyperpigmentation périphérique souvent sur le
crâne d’homme chauve. Elle est fréquente en Équateur, représentant
10 % des amyloses cutanées primitives [3].
Histologie
L’examen histologique permet de confirmer le diagnostic d’amylose
cutanée primitive. Il montre les dépôts de substance amyloïde dans
12 Amylose papuleuse de la jambe et du dos du pied.
13 Amylose papuleuse de la jambe et du dos du pied.
14 Amylose maculeuse
du dos.
98-720-A-10 Amyloses cutanées Dermatologie
8
le derme papillaire dans l’amylose maculeuse, dans les papilles
dermiques essentiellement dans le lichen amyloïde [45].
Dans les formes anciennes de lichen amyloïde, les crêtes dermiques
sont allongées et amincies et la papille refoulée. Des anomalies de
l’épiderme à type d’acanthose ou d’hyperkératose peuvent être
observées dans l’amylose maculeuse et surtout dans le lichen
amyloïde. Plus rarement, une incontinence pigmentaire, une
surcharge mélanique de l’épiderme, une vacuolisation
kératinocytaire sont possibles. L’immunofluorescence cutanée
directe avec des anticorps antichaînes légères des immunoglobulines
est négative. Quant à la microscopie électronique, elle est l’examen
de référence, mais est rarement nécessaire au diagnostic [48]. Elle
objective des masses filamenteuses dans le derme, souvent entourées
d’expansion cytoplasmique provenant de fibroblastes. Des vésicules
d’endocytose dans le cytoplasme des fibroblastes sont observées au
contact du dépôt amyloïde et des fibroblastes. Une pycnose
nucléaire, une dégénérescence du cytoplasme des polynucléaires
sont possibles dans l’épiderme. Toutes ces constatations sont en
accord avec le mécanisme pathogénique de ces amyloses.
¦ Amyloses au cours des dermatoses
Des dépôts amyloïdes sont parfois retrouvés autour de tumeurs
épithéliales comme le carcinome basocellulaire, la maladie de
Bowen, les kératoses séborrhéiques, les kératoses actiniques, le
pilomatricome ou les porokératoses [8]. Les dépôts amyloïdes
semblent plus liés à une affection préexistante qu’à la tumeur
épithéliale, l’association étant probablement fortuite. Des dépôts
dermiques d’amylose ont également été rapportés au sein de lésions
d’élastose solaire, de même que chez les patients traités par
puvathérapie pour psoriasis.
AMYLOSES HÉRÉDITAIRES [66]
¦ Amylose cutanée familiale isolée
Ce sont des génodermatoses très rares, de transmission autosomique
dominante à pénétrance et phénotype variables. Elle concerne des
familles d’origines ethniques très diverses. Les lésions cutanées
apparaissent le plus souvent au cours de l’adolescence, parfois plus
tardivement au cours de la 3e décennie. Dans un cas, les lésions
étaient présentes à la naissance [69]. Le prurit manque rarement. Il est
d’intensité variable, mais le plus souvent sévère et peut précéder de
plusieurs années l’apparition des lésions cutanées [53]. Cliniquement,
il s’agit d’amylose papuleuse typique constituée de placards de
petites papules de quelques millimètres, fermes, translucides ou
hyperpigmentées à la surface kératosique. À ces lésions s’associent
rarement des lésions d’amylose maculeuse [63, 81]. Des lésions
d’amylose bulleuse ont également été décrites dans une famille [18].
La topographie est évocatrice, les dépôts amyloïdes siégeant
habituellement sur les jambes, notamment dans les régions
prétibiales, sur les avant-bras ou dans le dos. Dans ce dernier cas, ils
se trouvent en regard des omoplates ou dans la région
interscapulaire et prennent volontiers un aspect tourbillonnant.
¦ Manifestations cutanées
des amyloses systémiques familiales
Lésions cutanées d’amylose infiltrées et atrophiques
Elles ont été rapportées dans une famille atteinte d’une neuropathie
amyloïde familiale typique [67] et de type lichénoïde dans une famille
japonaise atteinte d’une neuropathie amyloïde originale par
l’association à une maladie hépatique [79]. Moulin a décrit une famille
avec une amylose systémique où les localisations cutanées et
cardiaques sont prédominantes [50]. Dans cette forme, la protéine
amyloïde est constituée de fragments N-terminaux d’une
apolipoprotéine A1 anormale. Celle-ci comporte une substitution de
leucine pour la proline sur le 90e acide aminé. Elle est due à une
mutation ponctuelle non rapportée jusqu’ici sur le 4e exon du gène
de l’apolipoprotéine A1 [32].
Syndrome de Muckle-Wells
Le syndrome de Muckle-Wells a été décrit pour la 1re fois en 1962
dans une famille atteinte sur cinq générations. Il s’agit d’une maladie
autosomique dominante à expression variable [51]. Sur le plan
clinique, les patients présentaient des malaises périodiques fébriles,
des éruptions urticariennes, une surdité de perception progressive
et des arthralgies. Certains cas ont une néphropathie par amylose.
Classiquement, l’éruption cutanée est d’aspect urticarien non
prurigineuse avec une histologie non spécifique. Elle apparaît
quelques années après la surdité et est déclenchée par le froid, la
chaleur ou la fatigue. Elle est associée à un malaise général avec des
frissons, de la fièvre, des arthralgies et dure entre 1 et 3 jours à raison
de plusieurs fois par semaine [13]. L’amylose est de type AA avec
une atteinte surrénale, hépatique, testiculaire, pulmonaire,
sudoripare et surtout rénale, atteinte qui conditionne la survie des
malades. Les symptômes sont résistants au traitement par la
colchicine mais répondent très bien à de petites doses de
corticostéroïdes.
Épidémiologie
L’épidémiologie des différentes variétés d’amylose est mal connue.
L’étude de la région d’Olmstead où se trouve la Mayo Clinic a
trouvé, pour la période 1950-1989, une incidence annuelle de 8,9 cas
par million d’habitants, ce qui permet d’estimer à 2 225 nouveaux
cas par an l’incidence de l’amylose AL aux États-Unis. Il n’existe pas
d’étude équivalente pour l’amylose AA [29, 43].
Traitement
AMYLOSES IMMUNOGLOBULINIQUES
Nous n’aborderons pas le traitement de ces amyloses qui commence
habituellement au traitement de la prolifération plasmocytaire.
Cependant, l’exérèse des lésions cutanées est possible par
dermabrasion [47], au laser à colorant pulsé [2] et laser CO2. Le
traitement est indiqué dans les amyloses cutanées nodulaires
primitives.
AMYLOSES CUTANÉES PRIMITIVES
Elles sont favorisées ou entretenues par le prurit et, par conséquent,
il paraît indispensable de prévenir le frottement et le grattage. Des
dermocorticoïdes de classe 1 sous pansement occlusif constituent le
traitement de première intention, mais il existe souvent une rechute
à leur arrêt [88]. Les antihistaminiques sont souvent associés, afin de
diminuer l’intensité du prurit. L’association du diméthyl sulfoxide
(DMSO) aux dermocorticoïdes sous occlusion peut potentialiser
l’action de ces derniers [59]. Des thérapeutiques ont été proposées
comme les solutions pures de DMSO où les solutions à 0,05 %
d’acide rétinoïque avec, là encore, des rechutes à l’arrêt, mais des
applications intermittentes de DMSO pures ou à 50 % pourraient
diminuer le risque de rechute avec une bonne tolérance [38]. L’acide
trichloroacétique à 33 %, en une application quotidienne, permet une
régression de la symptomatologie. Les ultraviolets B (UVB)
constitueraient une alternative, mais leur efficacité a été rapportée
de manière anecdotique, de même que le calcipotriol [88] et la
dermabrasion qui retire mécaniquement l’épiderme et le derme
superficiel avec cependant des troubles pigmentaires séquellaires.
L’efficacité de l’étrétinate, ou de l’acitrétine [64] de la vaporisation par
le laser CO2 et du DMSO per os reste à confirmer [3].
Dermatologie Amyloses cutanées 98-720-A-10
9
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98-720-A-10 Amyloses cutanées Dermatologie
10

Arthrites virales



M De Bandt R é s u m é. – Les arthrites virales constituent un groupe nosologique se traduisant par des
manifestations cliniques fréquentes et polymorphes allant de la simple douleur articulaire au
décours d’un épisode fébrile jusqu’à des tableaux polyarthritiques sévères et handicapants.
Certains virus réalisent des tableaux cliniques assez caractéristiques, tandis que d’autres
s’intègrent dans un « syndrome grippal » banal. Les manifestations articulaires engendrées
concernent de préférence l’adulte jeune, plus souvent de sexe féminin et s’inscrivent parfois
dans un contexte épidémique ; elles sont de pronostic en règle favorable. De nombreux virus
sont incriminés.
© 1999, Elsevier, Paris.
Généralités
De façon schématique, les manifestations articulaires surviennent à la fin de
la phase prodromique de l’infection virale ou au début du tableau clinique
infectieux. Une éruption cutanée est souvent présente. L’atteinte articulaire
est en général de début assez brutal, de durée brève ; des formes prolongées,
semaines ou mois, sont parfois rapportées. Les manifestations cliniques
articulaires ne récidivent pas mais il existe des exceptions notoires, telles la
rubéole et le Parvovirus B19 (PVB19).
Devant une suspicion d’arthrite aiguë virale, l’interrogatoire s’attache à
rechercher les éléments suivants : notion de contage, de professions au
contact des enfants (enseignant(e), nourrice, personnel des crèches et des
cantines...), de transfusion sanguine ou d’usage des dérivés du sang, de
voyage à l’étranger, de vaccination récente, de toxicomanie intraveineuse, de
rapport sexuel non protégé...
Le diagnostic clinique est en général assez aisé si l’ensemble des éléments du
syndrome viral sont présents (contage, épidémie, phase prodromique,
éruption, fièvre, parfois ictère...) et accompagnent l’arthrite. Cependant,
l’atteinte articulaire peut être au tout premier plan ou représenter la
manifestation quasi exclusive de l’infection virale.
Les examens biologiques de routine ne sont d’aucun intérêt pour établir le
diagnostic. La ponction articulaire (qui n’est pas souvent possible) ramène un
liquide inflammatoire avec une cellularité variable, sans cristaux ni germes.
Dans de rares cas, des particules virales ont pu être isolées du liquide et/ou de
la synoviale. Seules les sérologies spécifiques (répétées à 2 semaines
d’intervalle) affirment le diagnostic.
Il n’y a pas de traitement spécifique des arthrites virales. Les corticoïdes ont
en général un effet modeste ou nul ; de plus ils sont susceptibles de relancer la
prolifération virale. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) peuvent
être utiles ; le risque hépatotoxique (accru par les viroses) doit rester présent
à l’esprit ; l’aspirine chez l’enfant est susceptible d’entraîner un syndrome de
Reye ; les antalgiques simples sont commodes. Typiquement, l’arthrite virale
n’est pas destructrice et son pronostic est bon.
Les mécanismes des arthrites au cours des viroses sont mal connus, de
nombreuses hypothèses sont avancées [22] : infection directe (aiguë ou
chronique) de la synoviale, destruction des tissus de l’hôte infectés par le virus
(réaction aiguë ou chronique), maladie à complexes immuns...
Michel De Bandt : Attaché, service de rhumatologie, hôpital Bichat-Claude-Bernard, 46, rue
Henri-Huchard, 75018 Paris, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : De Bandt M. Arthrites virales. Encycl
Méd Chir (Elsevier, Paris), Appareil locomoteur, 14-207-A-10, 1999, 4 p.
Virus des hépatites
Les virus hépatotropes sont de grands pourvoyeurs de manifestations
articulaires.
Le virus B en est la forme de description la plus typique ; cependant, la
vaccination a réduit considérablement le nombre de nouveaux cas. Ce sont
les sujets qui font une séroconversion précoce (développement d’anticorps
anti-HBs) chez qui apparaissent une maladie aiguë à complexes immuns et
des arthrites (la périartérite noueuse, ou PAN, en est la forme systémique
caricaturale). La fréquence des atteintes articulaires au cours de l’infection B
est de 10 à 25 % selon les séries.
Le tableau classique (triade de Caroli) comporte « arthrite-urticaire-céphalée
». L’arthrite est contemporaine de la phase prodromale puis de l’ictère et de la
cytolyse, réalisant une atteinte souvent additive, bilatérale, distale et
symétrique [12].
À ce stade, dans le sang du patient, on détecte l’antigène HBs (Ag-HBs), sans
l’anticorps anti-HBs ; l’acide désoxyribonucléique (ADN) viral est présent.
Avec la rémission des signes cliniques, les taux s’inversent, l’Ag-HBs devient
indécelable alors que le taux d’anticorps anti-HBs augmente.
La raideur matinale est importante, des nodules sous-cutanés peuvent se
rencontrer (mais cela est rare : moins de 2 % des cas). La présence d’une
atteinte articulaire ne modifie pas l’évolution ni le pronostic de l’hépatite.
Une cytolyse doit donc être recherchée devant toute polyarthrite aiguë [23]. Le
diagnostic repose sur les sérologies B (Ag-HBs,ADN viral, Ag-HBe...).
Au cours des hépatites chroniques B, des manifestations articulaires (liées aux
complexes immuns) sont rapportées de façon fréquente. Elles peuvent être
isolées ou associées aux manifestations cutanées ou rénales. Dans ce cas de
figure, elles s’amendent lorsque le traitement antiviral permet d’obtenir la
séroconversion [31].
Le virus de l’hépatite A [33] est plus rarement associé à des manifestations
extrahépatiques. Des atteintes articulaires sont présentes chez 5 à 15%des
patients, en règle associées à un rash et une diarrhée ; elles sont
contemporaines de la phase aiguë de l’hépatite. Une vascularite cutanée est
tout à fait exceptionnelle et correspond alors à la présence d’une
cryoglobulinémie. La gravité de la surinfectionAchez un malade infecté par
le virus C impose la vaccination systématique de ces malades [30].
Des manifestations articulaires aiguës peuvent se rencontrer lors de
l’infection par le virus C ; il s’agit d’arthralgies simples chez 5 à 10% des
malades. La caractéristique du virus de l’hépatite C est d’être responsable,
lors de l’infection chronique, du tableau dit de « cryoglobulinémie mixte
essentielle » [1]. Ce tableau comporte à la fois une atteinte cutanée (purpura,
ulcère...), une atteinte neurologique (neuropathie périphérique sensitive), une
hépatite, des manifestations liées au froid (syndrome de Raynaud), et des
manifestations arthromyalgiques, plus souvent que des arthrites vraies [6]. Une
atteinte rénale (glomérulonéphrite membranoproliférative) peut se voir
14-207-A-10
© Elsevier, Paris ENCYCLOPÉDIE MÉDICO-CHIRURGICALE 14-207-A-10
également. Il existe, dans le sérum des patients, une cryoglobulinémie de type
II (immunoglobuline G [IgG] polyclonale et composant monoclonal IgM) ou
de type III (IgM de type polyclonal) avec une activité facteur rhumatoïde.
Dans 90 % des cas, les cryoglobulinémies mixtes essentielles sont associées
au virus de l’hépatite C et le traitement par l’interféron á (seul ou en
association avec la ribavirine) permet d’obtenir des résultats très intéressants
en terme d’atteinte hépatique mais aussi, en terme de réduction des
manifestations cliniques de la cryoglobulinémie (atteintes articulaires et
musculaires dans le cas précis), à condition de poursuivre un traitement
prolongé, et pour des doses d’interféron supérieures ou égales à 300 millions
d’unités [3].
Des observations isolées de la littérature laissent à penser que la vaccination
contre le virus de l’hépatite B puisse être, dans certains cas, responsable de
poussées arthritiques. Ces observations font mention soit d’exacerbations
d’atteintes articulaires préexistantes (arthrite rhumatoïde...) ou de l’apparition
de novo de tableaux mimant une arthrite réactionnelle, une arthrite
rhumatoïde, soit enfin des tableaux systémiques au sein desquels existe une
note articulaire [10, 15]. Certains de ces tableaux peuvent évoluer pour leur
propre compte.
Virus de la rubéole
C’est un Togavirus à acide ribonucléique (ARN) dont l’incubation est de 2 à
3 semaines. Classiquement, l’enfant ne présente pas de phase prodromique
alors que, chez l’adulte, des manifestations non spécifiques sont très
fréquentes et précieuses pour le diagnostic : infections respiratoires hautes,
angines, céphalées, adénopathies, fièvre, myalgies, nausées, vomissements...
ainsi que des brûlures oculaires parfois très sévères qui précèdent l’apparition
du rash de 1 à 5 jours. Chez l’enfant comme chez l’adulte, des adénopathies
multiples débutant à la tête et au cou sont retrouvées. Le rash est de durée
brève, en règle non confluent, très prurigineux et pouvant être pris pour une
réaction allergique.
La polyarthrite est observée intimement liée à l’apparition du rash, bien
qu’elle puisse parfois débuter dans la semaine précédant ou suivant celui-ci.
La rubéole, maladie infectieuse sans manifestation articulaire, touche
préférentiellement l’enfant et l’adolescent ; les tableaux articulaires [24] sont
souvent l’apanage de la femme jeune de moins de 40 ans (extrêmes de 1 à
82 ans).
Approximativement, 30 % des femmes et 5 % des hommes infectés par le
virus font une polyarthrite aiguë brutale, bilatérale et symétrique,
prédominant aux petites articulations, pouvant s’étendre de manière
migratrice ou additive à la manière du rhumatisme articulaire aigu. L’atteinte
articulaire dure de 1 à 2 semaines, mais des évolutions prolongées (environ
2 mois) ont été rapportées. Des arthralgies sont plus souvent rencontrées que
des arthrites franches ; le réveil nocturne et l’importance du dérouillage
matinal sont souvent le motif de la consultation.
Des tableaux cliniques trompeurs ont été rapportés, sans que l’implication du
virus ne soit démontrée de façon formelle : citons des formes exceptionnelles
de maladie de Still [21], des syndromes d’activation macrophagique et des
syndromes de Kikuchi [16].
Le virus a parfois été isolé de l’articulation (liquide articulaire et cellules
synoviales). Le liquide articulaire est souvent inflammatoire à prédominance
de lymphocytes.
Le diagnostic est facile lorsque le tableau clinique est complet (notion de
contage, d’épidémie, plasmocytose sur la numération-formule sanguine...).
Seule la sérologie détecte les IgM spécifiques de l’infection.
Vaccin antirubéolique
Le vaccin utilise trois souches de virus : HP77, RA27-3 et W138. La lignée
RA27-3, la plus immunogénique, est la plus largement commercialisée. Dans
les jours qui suivent la vaccination, de très rares manifestations rubéoliformes
peuvent s’observer. En revanche, les atteintes articulaires sont fréquentes et
touchent environ 20 %des sujets vaccinés, il s’agit plus souvent d’arthralgies
que d’arthrites franches [20, 26].
Le tableau débute en moyenne 2 semaines (extrêmes 8 à 45 jours) après la
vaccination ; l’atteinte du genou est assez typique et est suivie, dans un second
temps, par les atteintes des petites articulations des mains et des poignets puis
des genoux et des chevilles. Les symptômes sont de courte durée, en règle
moins de 1 semaine, mais peuvent être récurrents avec des rechutes multiples
(trois à quatre rechutes observées chez 1 à 2 %des patients). Classiquement,
les rechutes décroissent en intensité et en sévérité avec le temps. Il n’y a pas
de traitement spécifique de l’arthrite, qu’elle soit virale ou postvaccinale. Les
anti-inflammatoires sont en règle générale efficaces.
Parvovirus B19
C’est un virus à ADN monocaténaire dont la primo-infection et la
séroconversion se font tôt dans l’enfance. Dans la population générale adulte,
65 à 70 % des sujets présentent des anticorps dirigés contre le Parvovirus
(IgG), séquelles d’une infection ancienne. Le PVB19 est l’agent de la
« cinquième maladie », maladie éruptive bénigne, transitoire de l’enfance.
Les manifestations articulaires sont l’apanage de la primo-infection de
l’adulte [18] et sont exceptionnelles chez l’enfant. Le tableau de primoinfection
de l’adulte est plus rare que celui de l’enfant et ne se rencontre que
chez 10 à 12 % des adultes exposés. Il associe des signes cutanés (60 % des
cas), à type de rash prurigineux respectant la face (atteinte préférentielle des
membres), un syndrome grippal dans 80 % des cas (fièvre, céphalées,
nausées, vomissements, douleurs abdominales) et des manifestations
articulaires dans 65 % des cas.
L’atteinte articulaire concerne plus souvent les femmes (sex-ratio : 3,2/1),
mais le tableau clinique est identique dans les deux sexes [5]. L’âge moyen des
malades est de 35 ans (extrêmes de 20 à 50). Il s’agit d’une polyarthrite nue et
isolée (un cas sur quatre), survenant dans un contexte grippal (un cas sur
quatre) ou associée à un rash et un syndrome grippal (un cas sur deux). C’est
une acropolyarthrite aiguë bilatérale et symétrique très intense avec des
synovites dans la plupart des cas. La gêne fonctionnelle et le dérouillage
matinal sont importants. Les ténosynovites des fléchisseurs des doigts sont
communes. Le liquide articulaire (lorsqu’il est ponctionnable) montre un
liquide inflammatoire à prédominance de cellules mononucléées.
L’évolution est en règle générale transitoire, bénigne, sans séquelles clinique
ni radiologique. Les manifestations articulaires du PVB19 sont sensibles aux
AINS. Les corticoïdes à faible dose sont inefficaces.
Des tableaux articulaires d’évolution prolongée, pouvant aller jusqu’à 6, voire
24 mois, sont rapportés. Leur fréquence exacte n’est pas connue.
Au plan biologique, le syndrome inflammatoire est en règle peu marqué
(vitesse de sédimentation et protéine C réactive subnormales), une cytolyse
hépatique modérée et transitoire est inconstante. Des anomalies
immunologiques existent et doivent être présentes à l’esprit car sources de
confusion. On peut ainsi observer des facteurs antinucléaires (FAN)
homogènes (parfois mouchetés), transitoires à un taux faible ; une
séropositivité pour les réactions au latex et de Waaler-Rose est notée dans
30 à 40 %(à des taux très variables), se positivant au début de la maladie et se
négativant 2 à 4 mois plus tard. L’existence de tableaux articulaires subaigus,
persistant plusieurs semaines ou mois est incontestable et certains de ces
patients présentent alors comme une polyarthrite rhumatoïde débutante
séropositive répondant aux critères de l’American Congress of Rheumatology
ACR [5, 32]. Seuls les nodules et les modifications radiologiques font défaut. Si
la fréquence de ces observations reste difficile à chiffrer (19 cas sur
153 patients observés dans la série de Bacon) et demande à être précisée,
celles-ci doivent être présentes à l’esprit avant de commencer un éventuel
traitement agressif de polyarthrite rhumatoïde...
D’autres manifestations articulaires sont imputées (sans preuve véritable) au
PVB19 : il s’agit de myalgies, de syndrome de fatigue chronique ou de
syndrome de Kikuchi (lymphadénite histiocytaire nécrosante) et enfin
d’exacerbations de maladies lupiques [17].
Dans tous les cas, le diagnostic de l’infection à PVB19 se fait sur la présence
d’IgM anti-PVB19 (et non pas d’IgG) dans les jours qui suivent l’éruption ou
par identification de l’ADN viral (méthode d’amplification génique ou PCR
[polymerase chain reaction]).
Alphavirus
Les alphavirus sont membres de la famille des Togavirus. Les chefs de file
sont les virus Chikungunya, O’Nyong-Nyong, Ross River, Mayaro et Sindbis.
Tous sont associés à des manifestations articulaires extrêmement sévères. La
durée de la phase d’incubation explique que les tableaux articulaires qu’ils
engendrent puissent être rencontrés, en France, chez des voyageurs de retour
des zones d’endémies.
Le virus Chikungunya est présent dans l’Est africain, le sous-continent indien,
l’Asie du Sud-Est et les Philippines ; il est transmis par la piqûre du moustique
Adès Aegyptis. O’Nyong-Nyong est présent dans la même région d’Afrique
que le précédent ; il est transmis par l’anophèle. Son nom signifie
littéralement le « casseur d’articulation », traduisant l’intensité du syndrome
articulaire qu’il engendre. Le virus Ross River est endémique enAustralie, en
Nouvelle-Zélande et dans de nombreuses îles du Pacifique Sud ; il donne une
polyarthrite épidémique survenant en été et en automne. L’atteinte articulaire
concerne jusqu’à 40 ou 50 % des populations infectées. Le virus Mayaro est
présent dans la région des Antilles et de Trinidade, au Surinam, au Brésil, en
Colombie et en Bolivie. Le virus Sindbis est de répartition géographique
beaucoup plus large (Afrique, Europe, Asie, Australie, Philippines...).
14-207-A-10 ARTHRITES VIRALES Appareil locomoteur
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L’infection engendrée par les alphavirus comporte une période d’incubation
variable de 2 jours à 3 semaines, puis apparaît de façon brutale une atteinte
polyarticulaire [8, 25, 27, 28, 29], très sévère pour des virus Chikungunya et
O’Nyong-Nyong, plus modérée et progressive dans les autres cas. Cette
polyarthrite handicapante fait suite à une phase prodromale de 1 à 3 jours
associant une fièvre marquée et un affaiblissement de l’état général. Les deux
sexes sont autant touchés et le pic d’incidence s’observe dans la quatrième
décennie.
La courbe thermique prend un aspect biphasique (fièvre prononcée pendant
une courte semaine, décroissant pendant 3 ou 4 jours puis remontant pendant
3 ou 4 jours) et s’associe à un rash, apparaissant 3 à 4 jours après le début des
signes. Il s’agit d’une éruption maculopapuleuse durant 2 à 10 jours qui
touche de façon prédominante la face, le tronc et les faces d’extension des
extrémités. Le rash peut être discrètement prurigineux, ne s’accompagne pas
de desquamation, mais peut laisser un aspect décoloré de la peau en regard
des lésions.
La polyarthrite touche essentiellement les petites articulations des mains, les
poignets, les genoux et les chevilles, en général de façon bilatérale et
symétrique. Les signes locaux sont sévères, les réveils et la raideur matinale
sont marqués. Des nodules cutanés peuvent être observés en cas d’infection
par le Chikungunya. Le tableau dure quelques jours (en règle moins de
1 semaine) mais des manifestations prolongées ont été observées (jusqu’à 1
an).
En aucun cas, des lésions destructrices articulaires ne sont rencontrées. Au
plan biologique, on peut observer une discrète leucopénie avec une relative
lymphocytose ; le diagnostic est fait sur l’interrogatoire (voyage...), l’examen
clinique et la sérologie qui confirmera le diagnostic.
Virus ourlien
Le virus des oreillons est un paramyxovirus ARN simple brin. La
contamination est suivie d’une incubation de 2 à 3 semaines puis de
manifestations prodromiques aspécifiques pendant 24 à 48 heures. Ensuite
survient l’atteinte parotidienne symptomatique. L’atteinte articulaire apparaît
comme une conséquence de la réplication virale dans le tissu synovial. La
polyarthrite ourlienne est très rare, et touche de façon spécifique l’adulte jeune
de sexe masculin dans la troisième décennie. Elle survient typiquement
1 semaine à 10 jours après l’atteinte parotidienne [9].
Il s’agit en général d’une polyarthrite aiguë, fébrile, migratrice, des grosses
articulations. Les patients qui ont fait une orchite sont les plus à risque de
développer une atteinte articulaire. L’évolution est complètement bénigne.
Entérovirus : virus coxsackie et echovirus
La famille des Entérovirus comporte une soixantaine d’espèces ubiquitaires.
Le tableau clinique qu’ils engendrent est banal. Les manifestations
articulaires sont rares [14], il s’agit alors d’oligoarthrites asymétriques
transitoires des grosses articulations.
Rattacher précisément le tableau clinique à une infection par un Entérovirus
particulier est extrêmement délicat en raison de la fréquence, de la bénignité
et du polymorphisme des tableaux qu’engendrent ces virus. La grande
quantité des isotypes rend la sérologie inutilisable. Il faut alors
impérativement obtenir deux isolements du virus de deux sites différents
(selles, gorge, sang, liquide synovial...), pour avoir une certitude diagnostique
raisonnable ; cependant, celle-ci reste sans conséquence pratique notable...
Rétrovirus
Virus de l’immunodéficience humaine (VIH)
Les virus du syndrome de l’immunodéficience acquise (sida) peuvent
provoquer une atteinte polyarticulaire lors de la primo-infection [13]. Il s’agit
en règle d’arthromyalgies sans signe objectif, dans un contexte infectieux
viral sévère. Les manifestations rhumatologiques sont présentes dans 60 à
70 % des cas. Le tableau clinique comprend un rash chez deux tiers des
patients, avec une pharyngite marquée, des adénopathies diffuses et de la
fièvre. Des ulcérations buccales (mais aussi conjonctivales ou génitales) sont
présentes dans 40 % des cas. Les signes généraux peuvent être marqués
(sueurs nocturnes, diarrhées, asthénie, perte de poids...). Une candidose
buccale peut être notée. La présence d’une thrombopénie et d’une leucopénie
avec des perturbations du bilan hépatique doit retenir l’attention [13]. La
recherche de l’antigénémie est positive dans le sang, à cette date les autres
tests sont encore négatifs.
L’interrogatoire recherche systématiquement la notion de prise de risque
(rapport non protégé, toxicomanie..). Il est important de reconnaître ces
tableaux en raison de l’efficacité des traitements antiviraux précoces
permettant d’obtenir une suppression quasi complète de la réplication
virale [13].
La durée des manifestations rhumatologiques est courte et leur pronostic
bénin.
Dans les stades avancés de l’infection, quelques auteurs ont rapporté des
atteintes des grosses articulations qu’ils considèrent comme spécifiques du
VIH. Il s’agit de monoarthrites (genoux ou cheville) d’évolution brutale [4].
Le tableau est assez intense, le liquide articulaire est inflammatoire (sans
germes ni cristaux) et contient des particules virales (dont le rôle dans la
genèse de l’arthrite est inconnu). L’évolution est favorable en quelques
semaines. L’individualisation de ces tableaux (très rares) est justifiée par le
fait que ces patients ne répondent à aucun critère diagnostique : ils ne
répondent pas aux critères de la polyarthrite rhumatoïde, n’appartiennent pas
au groupe HLA B27 (human leukocyte antigen) et ne répondent pas aux
critères d’Amor des spondylarthropathies.
Sur un autre plan, un des grands aspects rhumatologiques de l’infection VIH
est la fréquence et la sévérité des atteintes, à type de spondylarthropathies et
de rhumatismes psoriasiques, que l’infection virale semble déclencher ou
aggraver, sans que l’on ne sache encore bien par quel mécanisme [34].
Le rôle du virus (ou de l’immunodépression) n’est pas connu. Il s’agit en règle
de sujets masculins présentant une oligoarthrite aiguë asymétrique avec
enthésopathies et répondant aux critères d’Amor. L’évolution est souvent
longue et réfractaire aux thérapeutiques usuelles (la Salazopyrinet semble la
plus intéressante sur le taux des CD4 et les signes cliniques) [4]. La présence
d’un psoriasis cutané est fréquente. La fréquence du sous-typeHLAB27 n’est
pas aussi forte que chez les sujets non infectés.
Virus HTLV-1
Le virus HTLV-1 est localisé dans trois zones d’endémies : le Japon, les
Caraïbes et l’Afrique centrale, mais des foyers sporadiques existent en Europe
et aux États-Unis. Ce virus est responsable de la « paraparésie tropicale
spasmodique » et de « leucémie à cellules T ». Plusieurs types de
manifestations rhumatologiques peuvent être observés lors de l’infection par
HTLV-1, mais la plus fréquente est une oligopolyarthrite d’évolution
chronique, mimant en tout point une polyarthrite rhumatoïde séropositive et
érosive [11]. Les sujets peuvent avoir ou non une leucémie T associée. Le rôle
exact du virus dans la genèse de l’atteinte rhumatologique est mal connu.
Autres virus
Des manifestations articulaires sont rapportées très exceptionnellement au
cours d’autres infections virales.
Le virus de la variole et celui de la vaccine ont disparu, ils engendraient une
polyarthrite chez 1 à 2 % des patients.
Les adénovirus ont été incriminés dans moins d’une dizaine de cas publiés ; il
s’agissait d’oligoarthrites survenant au décours d’infection des voies
respiratoires hautes [7, 8].
Au cours de la mononucléose infectieuse, le virus EBV (Epstein-Barr virus)
ne semble que très rarement capable de provoquer des atteintes articulaires à
type d’oligoarthrites des grosses articulations (moins de 20 cas rapportés).
Les virus de la varicelle et du zona sont rarement incriminés dans des tableaux
articulaires [2] : il s’agit de rares observations de monoarthrites aseptiques de
l’enfant (localisées au genou en particulier) et chez l’adulte de quelques
observations rapportées chez des malades infectés par le VIH. Dans tous les
cas, le diagnostic différentiel de ces monoarthrites aiguës est celui d’une
arthrite septique, compte tenu du tableau et de la présence de portes d’entrée
cutanées potentielles.
Les virus HSV1, 2, 6...(herpes simplex virus) peuvent engendrer
d’exceptionnelles monoarthrites, en général satellites d’une localisation
cutanée de la maladie virale.
Le virus HHV8 (human herpes virus) est capable de provoquer des
manifestations articulaires aiguës (polyarthralgies intenses) lors de la primoinfection,
à condition que celle-ci survienne chez un patient préalablement
infecté par le VIH [19].

• •
Les arthrites virales forment un groupe nosologique très polymorphe
dans son expression clinique.
Il est nécessaire de les évoquer et de les rechercher : en effet, dans la
majorité des cas, il s’agit de manifestations rhumatologiques
transitoires et bénignes ne nécessitant pas de thérapeutique
particulière autre que symptomatique. Faire le diagnostic est alors
important pour rassurer complètement le patient.
Mais, dans d’autres cas, c’est la maladie virale qui se révèle par une
atteinte articulaire qui doit être prise en charge pour elle-même, en
raison de sa gravité potentielle et, dans ces cas, faire le diagnostic
d’arthrite virale est important en raison des implications
thérapeutiques.
Appareil locomoteur ARTHRITES VIRALES 14-207-A-10
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